Mémoire - Strate Collège
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Le voyage comme un remède<br />
L’habitude anesthésie la perception : nous sommes insensibles à la beauté<br />
des paysages familiers. Savourer son voyage consiste donc à être curieux et<br />
disponible, à suspendre son jugement. Ce qu’on retire du voyage dépend de<br />
l’état d’esprit dans lequel nous sommes.<br />
L’homme ressent le besoin d’aller à la rencontre d’autres peuples, d’autres<br />
cultures, quand il n’attend plus rien des repères habituels de son existence.<br />
Il veut rencontrer d’autres personnes que celles qui peuplent son quotidien.<br />
On peut remarquer que l’homme est très différent, durant son voyage : il a<br />
confiance dans le genre humain, va vers les gens, leur parle naturellement,<br />
est ouvert d’esprit, savoure le plaisir d’une relation à autrui plus authentique<br />
que celles que lui propose la vie quotidienne. En un mot, il est plus naturel<br />
et spontané. Nous ressentons du plaisir à l’idée d’être étranger : on y gagne<br />
un supplément de liberté.<br />
Le mot sédentaire vient du latin Seder : être assis. Aujourd’hui, il signifie,<br />
en partie, être assis dans une routine sans surprise et rassurante. Lorsque<br />
cette routine pose problème, que la lassitude ou la morosité s’installent, on<br />
espère que le voyage nous guérira.<br />
« Il me semble que je serais toujours bien là où je ne suis pas »*<br />
Baudelaire,<br />
Le voyage n’est plus une fin en soi, mais un remède, un moyen. En effet,<br />
l’immobilité dans un lieu favorise l’introspection. L’homme moderne<br />
assis dans un lieu fixe et banal comme son bureau centre son esprit sur ses<br />
problèmes et ses angoisses, sur ses impératifs. Le voyage lui permet de se<br />
perdre de vue, d’avoir l’esprit occupé par l’ « ailleurs » qu’il découvre.<br />
L’homme moderne ne voyage pas pour voyager, mais pour aller mieux.<br />
Le véritable sens du voyage est peut-être de brouiller la conscience<br />
de soi et de lui substituer une conscience ébahie du monde.<br />
Le voyageur est confronté à une multitude de perceptions inédites<br />
qui absorbent son attention, et le détournent de lui-même.<br />
En rêve ou physiquement, il faut s’échapper du quotidien, pour reprendre<br />
conscience de la valeur du lieu qu’on habite. Pour trouver un juste équilibre<br />
entre ces deux extrêmes, et ainsi savoir les savourer à égale mesure.<br />
Les transports modernes ne semblent participer que très peu à ce besoin<br />
de guérison qui nous pousse aujourd’hui à voyager : les contraintes sont<br />
nombreuses et le rêve n’est pas là.<br />
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*Étude sur Baudelaire: le spleen de Paris.<br />
Ellipses, 2000, p24.<br />
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