103/104 : Colloque 2003, etc. - Société des Amis d'Alfred Jarry

Notes e!
communications
journellement par les gens sçavans et studieux de nostre Royaulme et requis
de mectre en l'utilité comme en impression la dicte séquence », etc., et
l'auteur requiert un privilège de dix ans; ainsi sollicité, le roi François I er,
« desirans les bonnes letres estre promeues par nostre Royaulme à l'utilité et
érudition de nos subjeetz », lui en accorde un de six ans.
La durée est plus conforme à la norme, d'ailleurs assez récente puisque les
privilèges n'ont été institués en France qu'en 1521 vulg. Mais la complaisance
verbale se double d'une particularité, c'est que le privilège est « ouvert » :
il donne à son bénéficiaire « privilège, congé, licence et permission de faire
imprimer et mectre en vente [...] ses dietz livres et œuvres consequens des
faietz Héroïques de Pantagruel, commançans au troisiesme volume », mais
aussi « povoir et puissance de corriger et revoir les deux premiers par cy
davant par luy composez » — toutes dispositions qui seront reprises et
étendues par le privilège octroyé cinq ans plus tard par Henri II. Or, les deux
premiers livres ont été censurés en 1543 (pour la première fois sans doute,
contrairement à ce que l'on prétend souvent 5), sur l'édition que Rabelais
en avait donnée, l'année précédente, après les « malencontreuses » éditions
procurées par Etienne Dolet la même année 1542 v. — épisode dont on
pense qu'il servit de justification à la demande de l'auteur et à la réponse du
roi 6 ; la « sincérité » de Rabelais quant à ses protestations d'auteur est sans
doute bien sujette à caution, mais, outre les toujours fâcheuses questions de
phynance (et l'on sait que maître François a connu des périodes de gêne), il
demeure un peu délicat, en cette période sensible, de voir paraître des livres
supposés : tel le bien médiocre Cinquiesme Livre qui parut en 1549 vulg 7.
De fait, Rabelais est au centre de la lutte entre le roi (et certains de ses
conseillers, tel Odet de Châtillon, le dédicataire du Quart Livré) et le Parlement
ou la Sorbonne. L'année même où il perd son protecteur, Guillaume de Langey,
Rabelais aurait été nommé maître des requêtes de François I" (1543); deux
ans plus tard, toutefois, le propre secrétaire de Jean du Bellay, cardinal et frère
de Guillaume, est brûlé en place de Grève; l'année suivante,AndréTiraqueau
supprime de la réédition de son De legibus connubialibus toute allusion à
5. État de la question et citations idoines dans l'édition du Tiers Livre procurée par Jean
Céard (Paris, Librairie Générale Française, 1995, « Le Livre de Poche. Bibliothèque
classique »), pp. II-IV.
6. Puisqu'il prouvait la réalité d'éditions non autorisées et non revues par l'auteur.
7. Publié sans mention de lieu ou d'éditeur, le Cinquiesme Livre des faietz et dietz du noble
Pantagruel. Auquel sont comprins les grans abus, et désordonnée vie de Plusieurs Estatz
de ce monde est un centon de textes repris à Jean Bouchet ; seule particularité notable,
au fol. 14, la présence d'un texte, d'ailleurs assez peu bachique, typographie en forme de
bouteille... Notez par ailleurs que, entre 1548 (édition du « premier Quart Livre ») et 1552
vulg., Pantagruel n'est plus qualifié par Rabelais de « noble », mais de « bon ».
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