103/104 : Colloque 2003, etc. - Société des Amis d'Alfred Jarry

Laurent de Freitas
Durant ce printemps, L'Art littéraire a publié plusieurs comptes rendus
des expositions en cours : en avril, c'est Maurice Cremnitz qui traite de la
4 e exposition des « peintres Symbolistes et Impressionnistes », en mai, c'est
Emile Bernard, sous le pseudonyme Pierre d'Autrefois, qui rend compte
du salon des Indépendants, tandis qu'en juin Fabien Launay rapporte ses
impressions sur le salon de la Rose + Croix. C'est aussi la publication par la
librairie de l'Art indépendant du Voyage d'Urien d'André Gide, illustré de 30
lithographies de Maurice Denis.
Fin juin, Jarry passe pour la troisième fois le concours de l'École normale
et échoue tandis qu'en juillet Fargue passe la première partie du baccalauréat
auquel il échoue également. Cela ne semble guère avoir perturbé les deux
amis qui reprennent de plus belle leurs explorations parisiennes et artistiques.
C'est à ce moment qu'ils semblent être aussi le plus proches de la Rose + Croix
et de la pensée mystico-littéraire du sâr Péladan, époque également où Erik
Satie était très impliqué dans ce mouvement, avant de rompre, et où il se lia
avec Fargue. On ne sait si Satie et Jarry se rencontrèrent à cette occasion.
En août se tient chez Le Barc de Bouteville la grande exposition des
Portraits du prochain siècle qui se prolongera l'année suivante par la
parution aux Essais d'Art libre d'un premier tome de Portraits où Fargue
donnera un article sur Emmanuel Signoret tandis que Jarry s'intéressa au
dramaturge Gerhart Hauptmann 14.
En septembre 1893, Fargue part pour un mois à Pont-Aven pour s'adonner
lui-même à la peinture, en compagnie de Maurice Thomas, et très probablement
de Maurice Cremnitz.
Là encore Jean-Paul Goujon a publié les lettres de Pont-Aven de Fargue 15
à ses parents et celles-ci apportent quelques éléments très intéressants : tout
d'abord qu'il loge chez la veuve Le Sellin, débitante, annexe de la pension
Gloanec, au Pouldu, là même où logea Gauguin. Celle du 11 septembre nous
apprend qu'il y était bien parti pour peindre et pour écrire :
« Je travaille poëme et peintures. Je dessine surtout, au sens exact du
mot, et le « croquis étudié » est vraiment sans rival : — j'extrais des « panorama
[»] coloriés de la réunion de plusieurs études, — et cela devient large,
c'est bien. Nous prenons des modèles vivants, et pour 1 fr., un franc la
séance, (par ex) on peut en avoir un, — beau — Ils sont tous beaux. C'est
cela qui peut donner des résultats, et décidément, cette figure et ce costume,
Bretons, et ces foires, et ces animaux vous apprennent tous les genres
de poses, de traits, de repos, de colorations. On emmène aussi le modèle
14. Portraits du prochain siècle, tome 1, Poètes et Prosateurs, vol. collée, publié par Les
Essais d'Art libre, Girard éd., juin 1894.
15. Cf. : Jean-Paul Goujon, « Fargue et Jarry », op. cit.
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