103/104 : Colloque 2003, etc. - Société des Amis d'Alfred Jarry
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Gilles Firniiii<br />
L'usage veut que l'on édite le dernier état du texte publié du vivant de<br />
son auteur. De fait, il peut sembler évident que le Privilège effectivement<br />
publié avec le Jardin <strong>des</strong> Ronces est à la fois mieux à jour (Karl Boès ayant<br />
remplacé Léon Deschamps après l'occultation de ce dernier), plus complet<br />
(dans la mesure où il évoque, avec le texte, les enluminures et les chansons)<br />
et plus rabelaisien que le manuscrit (notamment par le report de la formule<br />
« non moins utile que délectable » que le plus impavide lecteur ne peut<br />
s'empêcher, apparemment, d'estimer au moins soufflé par Rabelais à la<br />
chancellerie royale).<br />
Il semble toutefois que <strong>Jarry</strong> n'ait pas revu le texte de l'édition;<br />
quelques fautes (la plus grossière étant le « contrevenus » au pluriel) et<br />
son habituelle fidélité à son modèle nous inclinent à le penser : outre la<br />
mention de la Suède et la Norvège, il est au moins deux tournures qui ont<br />
été « normalisées » à la mode moderne :1e sur peine, bien présent dans le<br />
manuscrit comme en 1545 et 1550 (devenu sous peine) et le « si voulons<br />
et mandons... que vous entretenez, gardez et observez» qui choque notre<br />
conscience grammaticale... Il est vrai qu'il modernise son texte (sans doute<br />
directement"*) et qu'il prend d'autres libertés, comme celle de transformer<br />
le « nous humblement requérant » en « humblement requis... nous » — sans<br />
parler de la formule upanishadique « celui qui connaît ainsi ».<br />
Les lecteurs de l'Étoile-Absinthe profiteront peut-être de cette édition<br />
enfin complète 19 pour ré-envisager le rapport de l'auteur d'Ubu à maître<br />
Alcofribas :si la version « intermédiaire » de La Plume introduit, pour<br />
qualifier l'artiste glorifié, l'expression « abstracteur de ressemblances », c'est<br />
néanmoins le « peintre de chansons » réintroduit dans la version « définitive »<br />
que retient <strong>Jarry</strong> dans le compte rendu qu'il publia de l'ouvrage dans la<br />
Revue Blanche le 15 février 1903 (O.C. Pléiade, t. II, pp. 663-664; pp. 1125-<br />
1126 de l'éd. Bouquins, où l'on lit « peinture de chansons »...). Je ne vous<br />
apprendrai pas, Cher et Équanime Photodataire, que la Science gît dans les<br />
18. La Ouste) sévérité dont il a fait preuve à l'égard du Rabelais en français moderne de J. A.<br />
Soulacroix (voir Le Mercure de France du 1 er<br />
mars 1905 ; OC II, pp. 682-684) ne permet<br />
pas, sans doute, de savoir si <strong>Jarry</strong> était ou non favorable à un tel type d'entreprise à<br />
l'égard du « grand public «-auquel s'adresse le Privilège? À propos du ou <strong>des</strong> Rabelais<br />
de <strong>Jarry</strong>, on peut en tout cas dire qu'il ne reprend pas la version <strong>des</strong> Privilèges, déjà<br />
modernisés, que propose le Bibliophile Jacob dans sa « Notice historique sur la vie et<br />
les ouvrages de François Rabelais «-respectivement, aux pp. XLVII-XLVIII et LVIII-LIX de<br />
l'édition Charpentier (Paris, 1841) que nous avons consultée.<br />
19. Aucune <strong>des</strong> éditions pré-citées ne reproduit le sceau authentificateur, reproduit par le<br />
108<br />
Régent Arrivé dans les Peintures, gravures et <strong>des</strong>sins <strong>d'Alfred</strong> <strong>Jarry</strong>, pl. 67, et en tête de<br />
la contribution du Rt Firmin dans le Carnet 121 [NDLR].