Raimond le cathare
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nous avons soigneusement ciselé mon argumentation. Je la<br />
livrerai au conci<strong>le</strong>, non pas dans l’espoir de <strong>le</strong> convaincre, mais<br />
pour mieux me préparer à l’audience pontifica<strong>le</strong>.<br />
*<br />
* *<br />
Lorsque l’on m’introduit dans la sal<strong>le</strong> capitulaire de l’abbaye<br />
de Saint-Gil<strong>le</strong>s, je sens <strong>le</strong> poids de tous <strong>le</strong>s regards des<br />
dignitaires. Au milieu d’eux, assis sur un siège suré<strong>le</strong>vé, Arnaud<br />
Amaury, que je croyais trouver en p<strong>le</strong>ine contrariété, m’adresse,<br />
au contraire, un sourire qui m’inquiète. Il avait cette expression<br />
faussement bienveillante lorsque nous chevauchions côte à côte<br />
dans cette même vallée du Rhône, l’été dernier. Je croyais alors<br />
l’avoir contourné en rejoignant la croisade, alors que je faisais<br />
exactement ce qu’il avait prévu.<br />
Debout au milieu de la sal<strong>le</strong>, je salue d’une inclinaison de la<br />
tête <strong>le</strong>s prélats conciliaires, en cherchant vainement un regard<br />
bienveillant ou compréhensif. Ils sont dissemblab<strong>le</strong>s, maigres<br />
ou gros, grands ou petits, pâ<strong>le</strong>s ou sanguins, mais tous <strong>le</strong>urs<br />
yeux me fixent avec la même haine.<br />
De part et d’autre d’Arnaud Amaury ont pris place maître<br />
Thédise et Hugues de Riez, <strong>le</strong>s artisans du conci<strong>le</strong>. Ce sont <strong>le</strong>s<br />
inventeurs du piège qui va me fermer la route de Rome et me<br />
maintenir fermement prisonnier dans <strong>le</strong>s griffes de Foulques,<br />
sous la menace de l’épée de Montfort. Je vais vite m’en<br />
apercevoir.<br />
Ce piège, <strong>le</strong> légat l’actionne en effet dès l’ouverture de la<br />
séance. Il rappel<strong>le</strong> que nous sommes réunis à la demande du<br />
pape et que cette assemblée doit m’entendre sur l’assassinat de<br />
Pierre de Castelnau.<br />
Il se tourne alors vers maître Thédise, qui se lève, <strong>le</strong>s <strong>le</strong>ttres<br />
d’Innocent III à la main. On devine aisément que tout ceci a été<br />
soigneusement préparé.<br />
— Hélas, nous ne pourrons pas entendre <strong>le</strong> comte, objecte<br />
maître Thédise en affectant une expression désolée.<br />
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