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Raimond le cathare

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Saint-Gil<strong>le</strong>s, 18 juin 1209<br />

L’humiliation<br />

consentie<br />

Depuis ce matin, <strong>le</strong> parvis et la place disparaissent sous la<br />

masse de la fou<strong>le</strong> qui se presse. Ils sont venus nombreux et de<br />

fort loin pour assister à cet événement inouï : <strong>le</strong> comte de<br />

Toulouse, duc de Narbonne, marquis de Provence, va faire<br />

spectaculairement pénitence pour se réconcilier avec l’Église.<br />

Le peup<strong>le</strong> de Saint-Gil<strong>le</strong>s et des villages provençaux<br />

avoisinants ne voulait pas manquer un tel spectac<strong>le</strong>. Les ruel<strong>le</strong>s<br />

contiennent à peine <strong>le</strong>s milliers de curieux qui se dressent sur la<br />

pointe des pieds pour apercevoir <strong>le</strong> cortège. À chaque fenêtre,<br />

par grappes, des têtes tirent sur <strong>le</strong>ur cou. Les plus jeunes et <strong>le</strong>s<br />

plus audacieux sont juchés sur <strong>le</strong>s toits de tui<strong>le</strong>. Dans la fou<strong>le</strong>,<br />

on converse et <strong>le</strong>s plaisanteries s’échangent comme aux jours de<br />

fête. Pour une fois, ce ne sont pas <strong>le</strong>s plus humb<strong>le</strong>s qui vont<br />

subir <strong>le</strong>s châtiments de l’Église auxquels <strong>le</strong>s grands échappent<br />

toujours. C’est l’occasion de se distraire que cet événement dont<br />

<strong>le</strong> peup<strong>le</strong> est spectateur et dont <strong>le</strong> seigneur est la victime.<br />

Soudain <strong>le</strong> si<strong>le</strong>nce se fait. Nu jusqu’à la ceinture, cheveux gris<br />

pendants sur mes épau<strong>le</strong>s, braies flottantes sur mes jambes<br />

maigres, j’avance <strong>le</strong>s verges à la main vers l’église où m’attend<br />

un c<strong>le</strong>rgé innombrab<strong>le</strong>. Les évêques sont coiffés de <strong>le</strong>ur mitre,<br />

revêtus de <strong>le</strong>ur chasub<strong>le</strong> de velours et de soie, chaussés de fines<br />

mu<strong>le</strong>s brodées d’or. Les pierres précieuses qu’ils portent à <strong>le</strong>urs<br />

doigts et à <strong>le</strong>ur cou, <strong>le</strong>s hautes croix de vermeil qu’ils tiennent<br />

en main resp<strong>le</strong>ndissent comme <strong>le</strong> signe ostentatoire de <strong>le</strong>ur<br />

arrogante puissance temporel<strong>le</strong>. Je lève <strong>le</strong>s yeux sur <strong>le</strong> portail de<br />

l’église abbatia<strong>le</strong>. Édifiée par <strong>Raimond</strong> de Saint-Gil<strong>le</strong>s, ouvragée<br />

et sculptée par ses successeurs, décorée sur mes ordres et à mes<br />

frais, el<strong>le</strong> domine la cité et <strong>le</strong> vaste Rhône. De grands voiliers<br />

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