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Raimond le cathare

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Le manuscrit caché<br />

Toulouse, château Narbonnais, été 1218<br />

C’est notre premier été de paix depuis près de dix ans. Le<br />

vent d’autan a chassé <strong>le</strong>s re<strong>le</strong>nts des chairs décomposées. La<br />

nuit n’est plus hantée par <strong>le</strong>s cris des b<strong>le</strong>ssés, <strong>le</strong>s râ<strong>le</strong>s des<br />

mourants et par nos rêves noirs comme l’enfer des jours que<br />

nous vivions. Toulouse embaume à nouveau de tous <strong>le</strong>s parfums<br />

des vergers environnants. Les jeunes pousses ont percé sous <strong>le</strong>s<br />

cendres des dévastations. Le soir, <strong>le</strong>s chants et <strong>le</strong>s musiques<br />

résonnent dans la vil<strong>le</strong> ressuscitée.<br />

Hélas, ce délicieux été sera pour moi l’un des derniers. Usé<br />

par la guerre et âgé de plus de soixante ans, j’attends <strong>le</strong><br />

jugement de Dieu. C’est <strong>le</strong> seul qui m’importe désormais.<br />

J’ai beaucoup péché, comme tous <strong>le</strong>s hommes. Plus<br />

gravement peut-être, car <strong>le</strong>s fautes des puissants sont lourdes<br />

de conséquences pour <strong>le</strong>ur prochain. Mais j’ai expié au centup<strong>le</strong><br />

ici-bas. Si j’ai mérité un châtiment, il m’a déjà été infligé par<br />

l’Église. El<strong>le</strong> s’est acharnée contre moi tout au long de ma vie.<br />

El<strong>le</strong> n’a jamais cessé de me combattre et de me persécuter. El<strong>le</strong><br />

a voulu faire périr mon corps et envoyer mon âme au Diab<strong>le</strong>.<br />

Foulques proclame partout qu’il refusera une sépulture<br />

chrétienne à celui qu’il nomme toujours « <strong>Raimond</strong> <strong>le</strong><br />

Cathare ».<br />

Le jugement des hommes est déjà formé. Les uns me<br />

méprisent au-delà de ce que mes torts pourraient justifier. Les<br />

autres me respectent au-delà de ce que mes mérites<br />

permettaient d’espérer.<br />

À cette haine et à cet amour excessifs et indissociab<strong>le</strong>s<br />

aurais-je préféré l’indifférence ? Au soir de ma vie, je me laisse<br />

al<strong>le</strong>r à <strong>le</strong> croire. Mais l’indifférence était inconcevab<strong>le</strong> pour celui<br />

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