Raimond le cathare
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Dans la nuit, la Garonne devient fol<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> sort de son lit,<br />
inonde toute la vil<strong>le</strong>, submerge Saint-Cyprien et emporte dans<br />
sa fureur <strong>le</strong> pont Neuf et <strong>le</strong> pont Vieux dont <strong>le</strong>s tabliers sont<br />
balayés dans un fracas de bois brisé.<br />
Au petit matin, la situation est désastreuse : Toulouse est<br />
coupée en deux. Les deux rives sont isolées l’une de l’autre par<br />
la destruction des ponts. Au milieu des eaux torrentiel<strong>le</strong>s<br />
n’émergent plus que <strong>le</strong>s pi<strong>le</strong>s de brique et de pierre qui<br />
supportaient <strong>le</strong>s ouvrages brisés par la crue. Deux de ces piliers<br />
sont surmontés de tours de guet, permettant de surveil<strong>le</strong>r <strong>le</strong><br />
f<strong>le</strong>uve. Les hommes affectés à la garnison de ces deux bastions<br />
se retrouvent prisonniers sur <strong>le</strong>urs î<strong>le</strong>s, cernés par <strong>le</strong>s flots en<br />
furie.<br />
Sur la rive gauche, la crue a rasé toutes <strong>le</strong>s défenses du<br />
faubourg. Un vio<strong>le</strong>nt caprice de la nature donne à nos ennemis<br />
ce que nous avions défendu avec acharnement au prix du sang<br />
des nôtres. Montfort, qui avait échoué hier dans son attaque<br />
contre Saint-Cyprien, peut aujourd’hui y entrer sans difficulté.<br />
L’inondation lui a frayé la voie. Il occupe toute la rive gauche.<br />
Nous sommes maintenant face à face, de part et d’autre du<br />
f<strong>le</strong>uve tumultueux. En toute hâte nous érigeons des machines de<br />
jet sur <strong>le</strong>s quais et <strong>le</strong>s berges. Nous confectionnons des abris et<br />
des claies pour dissimu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s archers qui viennent prendre<br />
position. De <strong>le</strong>ur côté, <strong>le</strong>s Français fortifient <strong>le</strong>s bâtiments qui<br />
bordent la rive gauche du f<strong>le</strong>uve. Ils instal<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>ur<br />
commandement à l’hôpital, face au port de la Daurade. Les tirs<br />
qui s’échangent de part et d’autre mê<strong>le</strong>nt au-dessus de la<br />
Garonne flèches, carreaux d’arbalètes et pierres catapultées. Les<br />
projecti<strong>le</strong>s se croisent et vont battre <strong>le</strong>s murs. Au milieu des<br />
eaux, <strong>le</strong>s deux tours abritant <strong>le</strong>s garnisons toulousaines forment<br />
nos positions avancées. Il s’y trouve quelques arbalétriers fort<br />
habi<strong>le</strong>s qui font des ravages dans <strong>le</strong>s rangs ennemis et<br />
parviennent à empêcher <strong>le</strong>s constructeurs d’engins d’établir<br />
<strong>le</strong>urs machines trop près de la rive. Mais ils nous font bientôt<br />
des signes, agitant <strong>le</strong>urs armes vides. Ils n’ont plus de dards. Il<br />
faut <strong>le</strong>s ravitail<strong>le</strong>r dans des conditions péril<strong>le</strong>uses. Des hommes<br />
s’élancent dans des barques sur <strong>le</strong>s eaux furieuses. Plusieurs<br />
embarcations se brisent ou sont emportées au loin. L’une d’el<strong>le</strong>s<br />
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