Raimond le cathare
Raimond le cathare
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— Au château, mon lion crie famine, mais ce soir il sera saoul<br />
de sang et repu de cervel<strong>le</strong>s !<br />
Les forces provença<strong>le</strong>s observent la manœuvre et se<br />
préparent à résister au choc.<br />
Tumulte, brail<strong>le</strong>ment, claquement de bannières, appel des<br />
trompes cuivrées déchirent l’air limpide, font frissonner <strong>le</strong>s<br />
arbres et résonner la terre. Le comte de Montfort, ce sinistre<br />
bandit, emporté au galop de son grand cheval noir, rugit comme<br />
un lion. Il se jette au plus chaud de l’énorme mêlée. Le sang<br />
jaillit autour de lui. Les corps se fendent. Mais nos défenseurs<br />
sont en si grande fou<strong>le</strong> et résistent si bien à l’attaque ennemie<br />
que <strong>le</strong> défer<strong>le</strong>ment se répand en cadavres. Tempête de fer et<br />
tonnerre d’enclume. La batail<strong>le</strong> est si rude, meurtrière, acharnée<br />
que <strong>le</strong>s Croisés recu<strong>le</strong>nt et bientôt tournent bride. Les<br />
Provençaux, hurlants, <strong>le</strong>ur galopent dessus, trouant <strong>le</strong>s fuyards.<br />
L’herbe est partout sanglante et couverte de morts, de bras, de<br />
pieds, d’entrail<strong>le</strong>s, de têtes défoncées. Les cavaliers toulousains<br />
pataugent dans <strong>le</strong> carnage et font la chasse aux vaincus. La<br />
batail<strong>le</strong> est finie. Dans <strong>le</strong> pré désert, chiens, vautours et<br />
corbeaux font festin de charognes.<br />
*<br />
* *<br />
Depuis <strong>le</strong> Rhône jusqu’à la Garonne, dans la montagne Noire<br />
comme dans <strong>le</strong>s vallées pyrénéennes, tout <strong>le</strong> pays connaît<br />
désormais <strong>le</strong>s revers de Montfort et ses échecs répétés face à<br />
<strong>Raimond</strong> <strong>le</strong> Jeune. Chaque jour, chaque semaine qui passe<br />
voient monter l’espoir de notre libération.<br />
Les guetteurs de Beaucaire ont capturé un homme qui,<br />
agrippé au rocher surplombant <strong>le</strong> f<strong>le</strong>uve, tentait de fuir <strong>le</strong><br />
château. Hagard, il <strong>le</strong>ur a raconté l’enfer que vivent <strong>le</strong>s assiégés.<br />
Ils ont mangé <strong>le</strong>urs chevaux et <strong>le</strong>urs mu<strong>le</strong>ts. Ils en sont à par<strong>le</strong>r<br />
de se nourrir ensuite de la chair des plus faib<strong>le</strong>s d’entre eux.<br />
Le 15 août, en p<strong>le</strong>in midi, alors que <strong>le</strong>s défenseurs de<br />
Beaucaire somno<strong>le</strong>nt dans <strong>le</strong>s coins d’ombre, l’armée croisée se<br />
déploie une nouvel<strong>le</strong> fois. L’a<strong>le</strong>rte est donnée. L’attaque est<br />
dirigée contre la porte de la Croix. Les Provençaux y massent<br />
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