Raimond le cathare
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Hugues d’Alfaro et <strong>Raimond</strong> de Ricaud sortent à <strong>le</strong>ur tour de<br />
la tente roya<strong>le</strong>. Ils viennent à mes côtés, sombres et si<strong>le</strong>ncieux.<br />
Je devine ce qu’ils éprouvent.<br />
— Six mois à peine après avoir fait allégeance au roi<br />
d’Aragon, nous voilà traités comme de petits vassaux sans<br />
importance. Il laisse un courtisan nous humilier publiquement<br />
sans même blâmer son arrogance. Avec nos suzerains <strong>le</strong>s rois de<br />
France et d’Ang<strong>le</strong>terre, nous n’aurions jamais été traités ainsi,<br />
soupire <strong>Raimond</strong> de Ricaud, <strong>le</strong>s deux mains posées sur sa panse<br />
arrondie.<br />
— Oui, mais ceux-là nous laissaient seuls face à Montfort.<br />
Pierre ne vous a pas défendus contre <strong>le</strong>s siens, mais il s’apprête<br />
à combattre notre ennemi, tempère Hugues d’Alfaro.<br />
— Je m’inquiète des risques qu’il veut prendre. En allant loin<br />
dans la plaine à la rencontre des chevaliers français, il va se<br />
priver du concours des milliers d’hommes en armes. Avec nos<br />
milices de piétons, nous sommes à dix contre un. Dans un<br />
combat de cava<strong>le</strong>rie, ils seront deux contre un.<br />
Hugues d’Alfaro partage mon opinion.<br />
— Il veut une victoire grandiose et cheva<strong>le</strong>resque. Il veut tuer<br />
Montfort dans un tournoi sans merci. Mais pas sans risque.<br />
Muret, 12 septembre 1213<br />
Dès l’aube, une immense fou<strong>le</strong> de plus de dix mil<strong>le</strong> hommes<br />
pressés <strong>le</strong>s uns contre <strong>le</strong>s autres encerc<strong>le</strong> l’autel où <strong>le</strong>s évêques<br />
des diocèses d’Aragon célèbrent la messe. Pour tenter de calmer<br />
la brûlure de l’outrage subi la veil<strong>le</strong>, Pierre II d’une paro<strong>le</strong><br />
aimab<strong>le</strong>, m’a invité à venir à ses côtés. Pendant l’office j’observe<br />
son visage avec appréhension. Ses traits sont marqués par la<br />
fatigue et ses battements de paupières trahissent <strong>le</strong> manque de<br />
sommeil.<br />
L’air de la plaine vibre soudain. Les cloches de l’église de<br />
Muret sonnent à toute volée. Eux aussi, là-bas, célèbrent <strong>le</strong><br />
sacrifice de la messe autour de l’évêque Foulques et de Simon de<br />
Montfort. L’Église est dans chaque camp et Dieu seul sait qui<br />
sera <strong>le</strong> vainqueur.<br />
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