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Raimond le cathare

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Je pressens qu’à cette mort vio<strong>le</strong>nte d’autres, innombrab<strong>le</strong>s,<br />

vont bientôt succéder.<br />

Le rêve revient sans cesse. La bête me poursuit… Je tente de<br />

lui échapper, mais ma course n’est pas assez rapide. Le fauve est<br />

sur mes talons. J’entends son souff<strong>le</strong> rauque, je sens la cha<strong>le</strong>ur<br />

de ses naseaux fumants. Le sol est lourd, je m’y enlise et <strong>le</strong>s<br />

sabots du monstre en font jaillir des giclées de boue sanglante.<br />

Au crépuscu<strong>le</strong>, ces images me hantent lorsque je cherche <strong>le</strong><br />

sommeil. La bête est à nouveau sur mes traces dès <strong>le</strong>s lueurs de<br />

l’aube. Cette poursuite dure depuis des années. J’ai toujours pu<br />

lui échapper, mais je perds du terrain. Aujourd’hui, <strong>le</strong> muf<strong>le</strong> est<br />

proche. Lentement je me retourne pour lui faire face.<br />

Point n’est besoin d’al<strong>le</strong>r consulter l’un des nombreux devins<br />

qui gagnent <strong>le</strong>ur vie en interprétant <strong>le</strong>s songes. J’y vois clair<br />

dans <strong>le</strong> mien tant il fait de mes nuits <strong>le</strong> fidè<strong>le</strong> ref<strong>le</strong>t de ce que<br />

sont mes jours. Depuis que je gouverne <strong>le</strong> pays toulousain, la<br />

bête dévastatrice rôde, prête à charger, à piétiner, à transpercer.<br />

Je l’ai toujours reconnue : c’est la guerre. Je me suis efforcé de<br />

l’éviter quoi qu’il en coûte, avec succès jusqu’à ce jour, au prix<br />

de ruses, de concessions, de reculs calculés. Au prix de mariages<br />

raisonnés dans <strong>le</strong>squels je plaçais parfois plus d’espoirs<br />

politiques que je ne trouvais de plaisirs amoureux. Et peut-être,<br />

demain, au prix de mon orgueil ou de mon amour-propre. Car<br />

celui qui recherche la paix encourt <strong>le</strong> mépris. On <strong>le</strong> suppose<br />

incapab<strong>le</strong> de se battre, prêt à tout sacrifier pour sauver sa vie et<br />

sauvegarder son pouvoir.<br />

*<br />

* *<br />

La lugubre procession avance <strong>le</strong>ntement, portant la dépouil<strong>le</strong><br />

de Pierre de Castelnau. Le cortège funèbre gravit <strong>le</strong> raidillon<br />

menant à la citadel<strong>le</strong>, puis longe <strong>le</strong>s remparts de Saint-Gil<strong>le</strong>s. Il<br />

est escorté par une douzaine de mes cavaliers. Aussitôt informé<br />

du drame, j’ai dépêché sur <strong>le</strong>s lieux mon fils naturel, Bertrand,<br />

et ses écuyers. Les hommes du légat et <strong>le</strong>s soldats toulousains<br />

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