Masques Katsinam des Indiens HOPIS de l'Arizona Collection LS Tout

Noirceur boueuse et givrée, nuit
hopie. Ténèbres d’argile, sol durci
par le froid, ornières glacées sur
lesquelles le pas butte, un silence
menaçant : obscurité perpétuelle.
L’aube n’est plus une certitude. Une première : cogito.
Face à la nuit éternelle comme face à sa propre mort.
Explose la vanité de nos évidences cycliques et astrales,
sans créer la moindre lueur susceptible de creuser
l’insondable. Noir. Froid. Terreux. Fin. Et pourtant
nous avançons. S’orienter, tâche impossible.
Tâtonnements instinctifs, rampons debout, même
lenteur antédiluvienne. Progression pesante. Attente
douloureuse. Equilibre instable sur la neige.
Glissades parfois, un bras m’accroche, nous sommes
saisis. Des voix, nous les suivons. Quelques individus
groupés. A droite. Plus bas. On remonte.
Toujours l’instinct. Plus haut. En diagonale, une
ruelle escarpée. Ne pas glisser. Dédale des artères de
Hotevilla, troisième Mesa. Un autre groupe, plus
nombreux. Et parmi eux une lueur, un faisceau électrique.
Dans son sillage, une forme bariolée.
Apparition surnaturelle, un foudroiement.
Premier faisceau : la forme de petite taille, tête flanquée
de deux ailes de corbeau d’un noir profond.
Disparition. Deuxième faisceau : la forme est de dos,
entre les plumes sombres un cylindre vert.
Soulagement dans cet océan opaque, deux plumes
d’aigle laiteuses rehaussent la coiffe. Le faisceau descend,
sur les épaules une épaisseur épineuse d’épicéa
couronne une longue couverture lumineuse tombant au sol. Noir. Des
mouvements. Le son, une série de borborygmes chtoniens, la terre chante, le masque
lui donne voix. Troisième faisceau : la forme titube, balance de droite à gauche,
se déplace cernée d’une vingtaine de villageois transis. Je retiens ma respiration. La
forme se retourne. Des mains blanches, peintes. Sur les doigts couverts d’anneaux
turquoises repose un panier tressé couvert de maïs et de haricots. Les bras lestés
d’une chemise mauve, le reste du corps d’une robe noire brodée d’un liseré rouge,
tenue d’une large ceinture de laine nouée à la gauche du corps. A la fois posture de
recueillement et d’offrande. Le faisceau lumineux remonte sur le cylindre vert à la
place du visage. Peint de deux triangles inversés jaune sur fond noir, un grand et
un petit. Une paire de points jaunes symbolise les yeux, un troisième la bouche.
Inlassablement la mélopée se répète. Rythme et mélodie imprègnent l’atmosphère
glaciale, matérialisent dans la perception la présence au monde d’un esprit.
Deux porteurs de torche éclairent l’incarnation. L’humain a disparu, subsumé
dans le masque.
Le froid ne compte plus. Le chemin s’éclaire, l’esprit nous guide vers l’Est, facile à
suivre, désormais, fendant la nuit comme les eaux. Nous marchons ainsi de longues
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