Rocche e castelli_FR:Rocche e castelli_FR
Rocche e castelli_FR:Rocche e castelli_FR
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Les forteresses et les châteaux des Malatesta<br />
à Rimini et dans son territoire<br />
Provincia di Rimini<br />
Assessorato alla Cultura<br />
Assessorato al Turismo<br />
Riviera di Rimini Travel Notes
Rimini<br />
Château de Sigismond<br />
Verucchio<br />
Forteresse malatestienne<br />
Torriana<br />
Forteresse malatestienne<br />
Montebello<br />
Forteresse des Guidi di Bagno<br />
Santarcangelo di Romagna<br />
Forteresse malatestienne<br />
Coriano<br />
Antiquarium Antiquarium del du Château Castello<br />
Mondaino<br />
Forteresse malatestienne<br />
Montefiore Conca<br />
Forteresse malatestienne<br />
Gradara<br />
Forteresse<br />
San Leo<br />
Forteresse de la Renaissance<br />
Pennabilli<br />
Ruines
Provincia di Rimini<br />
Assessorato alla Cultura<br />
Assessorato al Turismo<br />
Agenzia marketing turistico Riviera di Rimini<br />
Pier Giorgio Pasini<br />
Les forteresses et les châteaux des Malatesta<br />
à Rimini et dans son territoire<br />
en collaboration avec
Coordination:<br />
Valerio Lessi<br />
Conception graphique:<br />
Relè - Leonardo Sonnoli<br />
Photographies extraites des<br />
Archives photographiques<br />
de la Province de Rimini<br />
Nous remercions les photographes:<br />
L. Bottaro, P. Cuccurese, P. Delucca,<br />
S. Di Bartolo, L. Fabbrini, R. Gallini,<br />
L. Liuzzi, G. Mazzanti, T. Mosconi,<br />
Paritani, V. Raggi, E. Salvatori,<br />
R. Sanchini, F. Taccola, R. Urbinati<br />
Traduction:<br />
Béatrice Provençal<br />
Link-up, Rimini<br />
Révision et mise à jour de:<br />
Marino Campana, Caterina Polcari<br />
Mise en page et équipements:<br />
Litoincisa87, Rimini<br />
Licia Romani<br />
Première édition 2003<br />
Réimpression 2008
Introduction ><br />
Itinéraire 1 ><br />
Itinéraire 2 ><br />
Itinéraire 3 ><br />
Itinéraire 4 ><br />
Itinéraire 5 ><br />
Bibliographie ><br />
www ><br />
Sommaire<br />
5 Le territoire de Rimini<br />
8 Les défenses de l’Etat des Malatesta<br />
12 Le Château de Rimini<br />
16 Le berceau des Malatesta: Pennabilli et Verucchio<br />
19 La vallée du Marecchia<br />
26 La vallée du Conca<br />
34 Des résidences de vacances: Montefiore et Gradara<br />
40 Pour en savoir plus<br />
Avant de partir visitez<br />
www.riviera.rimini.it
En haut, le rocher de<br />
Pietracuta vu du lit du<br />
Marecchia. En bas, vue<br />
panoramique de la vallée du<br />
Marecchia avec la forteresse<br />
et le petit pays de<br />
Montebello.<br />
5<br />
Introduction > Le territoire de Rimini<br />
Le territoire de Rimini n’est pas entièrement plat. Derrière la ville<br />
s’élèvent en effet la colline de Covignano, et, plus loin, la silhouette du<br />
mont Titano. Outre à être un symbole caractéristique (“la vision bleutée<br />
de Saint-Marin” du célèbre poète Giovanni Pascoli), le mont Titano<br />
est une présence concrète et massive, une sorte de garde avancée des<br />
Apennins, chaîne dont les sommets animent et découpent l’horizon au<br />
sud et effleurent la mer avec le promontoire de Gabicce à l’est.<br />
De nombreux cours d’eau à caractère torrentiel, qui s’étirent<br />
dans leurs larges lits graveleux, donnent à ce territoire riche en reliefs<br />
un rythme varié. Deux d’entre eux sont importants: le Marecchia, qui<br />
prend sa source en Toscane, à l’Alpe della Luna, près de celle du<br />
Tibre; et le Conca, qui naît dans le Montefeltro, sur les pentes du<br />
mont Carpegna. Les vallées et les cônes de ces deux fleuves, que le<br />
mont Titano sépare et écarte l’un de l’autre, forment le territoire de<br />
Rimini qui, d’un côté, s’estompe doucement dans la vallée du Pô, et<br />
de l’autre, s’enfonce entre l’Adriatique et les Apennins, au contact des<br />
Marches et du Montefeltro. Ceux qui s’engagent dans la plaine, le<br />
long de la via Emilia ou de la via Romea, ne rencontrent certainement<br />
pas de signes de frontières naturelles; et ceux qui remontent la douce<br />
vallée du Conca ou celle tumultueuse du Marecchia, se rendront difficilement<br />
compte du passage dans le Montefeltro.<br />
Le Montefeltro a toutefois un caractère précis bien à lui et une histoire<br />
spécifique, dus à la morphologie d’un terrain essentiellement<br />
composé de collines et de petites montagnes ainsi qu’à son appartenance<br />
(du moins à partir du VI e -VII e siècle) à un diocèse particulier, celui<br />
du Montefeltro justement, dont la juridiction, à l’époque médiévale,<br />
s’étendait jusqu’aux vallées du Savio et du Foglia, occupant une position<br />
stratégique pour les liaisons entre la plaine du Pô et les parties<br />
centrale et méridionale de la péninsule. Dès le Haut Moyen Age, cette<br />
zone a été le siège de puissants intérêts particularistes qui en ont toujours<br />
empêché la véritable unification politique et administrative; ainsi,<br />
les différentes communautés de l’intérieur ont longtemps conservé des<br />
formes d’autonomie, aidées en cela par l’absence d’un grand centre<br />
capable de les soumettre et de les organiser. Significatif est d’ailleurs<br />
le fait que le diocèse du Montefeltro n’ait pas eu de siège épiscopal<br />
stable jusqu’au XVII e siècle (San Leo, Saint-Marin, Talamello,<br />
Montetassi, Valle Sant’Anastasio et Pennabilli furent des résidences<br />
temporaires de l’évêque et parfois de sa chancellerie et de son tribunal).<br />
L’une de ces communautés est toutefois parvenue à conserver<br />
son autonomie jusqu’à nos jours, grâce à toute une série de circonstances<br />
favorables: il s’agit de la République de Saint-Marin, qui appartient<br />
au diocèse du Montefeltro et qui, au cours de sa longue histoire,
En haut, la forteresse<br />
malatestienne du Sasso à<br />
Verucchio. En bas, des bijoux<br />
villanoviens du Musée<br />
archéologique de Verucchio.<br />
6<br />
s’est plus appuyée à Urbin et aux Marches qu’à Rimini et à la Romagne.<br />
La vallée du Marecchia en particulier, grâce à la route qui franchit<br />
aisément le col de Viamaggio pour gagner la Toscane et, de là, la<br />
Mer Tyrrhénienne, a joué un rôle de grande importance dès<br />
l’antiquité. Elle était déjà fréquentée à l’époque préhistorique, ceci<br />
étant notamment confirmé par l’établissement villanovien de<br />
Verucchio, qui, au VIII e siècle, constituait une étape importante de la<br />
“route de l’ambre”. Renforcée par les Romains, plus tard, les Goths,<br />
les Lombards et les Byzantins se la disputèrent âprement pour son<br />
importance stratégique: une situation qui, non par hasard, s’est dramatiquement<br />
reproduite lors de la dernière guerre mondiale avec la<br />
“ligne gothique”. Ce sont justement les luttes entre les Lombards et<br />
les Byzantins, puis entre les empereurs francs et allemands et le<br />
pape, qui ont favorisé la formation, dans la haute et la moyenne vallée,<br />
d’autonomies seigneuriales, souvent opposées et en lutte continuelle<br />
pour la possession et la domination du territoire. Un territoire<br />
qui n’a trouvé son unité que lorsque l’Eglise, nominalement propriétaire,<br />
est parvenue à exercer d’une manière directe sa “haute souveraineté”,<br />
c’est-à-dire depuis 1631, année de la dévolution, ou mieux,<br />
de la restitution, du duché d’Urbin. Quant à l’ancienne route qui parcourt<br />
la vallée, elle resta interrompue et inefficace bien plus pour<br />
l’âpreté des luttes et des intérêts opposés des différents seigneurs<br />
que pour les aspérités des lieux: elle ne fut rouverte qu’en 1924, avec<br />
le tracé qu’elle présente actuellement.<br />
La richesse en tours, en forteresses et en châteaux qui caractérise<br />
aujourd’hui encore les vallées du Marecchia et du Conca est justement<br />
due aux luttes du Haut et du Bas Moyen Age, qui obligèrent à<br />
fortifier tous les villages et tous les points stratégiques, tant au fond<br />
de la vallée (moulins, gués, ponts) que sur les hauteurs. Au VIII e<br />
siècle, cette zone était déjà définie comme “la région ou la province<br />
des châteaux”. Construites en pierres du pays, les fortifications se<br />
greffent sur le terrain escarpé telles des gemmations spontanées,<br />
mais sans aucun mimétisme: elles affichent bien au contraire leur<br />
caractère d’artifice menaçant et vantent souvent une force qu’elles<br />
sont loin d’avoir. Elles animent un paysage très varié et parfois extrêmement<br />
pittoresque, pour son aspect sauvage, pour l’alternance de<br />
ses crêtes - qui servent de coulisses à de profondes calanques et à de<br />
doux versants riches en végétation et en bois - et surtout pour la présence<br />
de rochers calcaires isolés, souvent de très grande dimension,<br />
affleurant de bancs d’argile écailleux: c’est le cas du mont Titano,<br />
mais aussi du Sasso Simone et du Simoncello, ou, plus près encore,<br />
du splendide rocher de San Leo, pour ne citer que les principaux.
8<br />
Introduction > Les défenses de l’Etat des Malatesta<br />
Dès l’époque romaine, Rimini a exercé son influence sur une<br />
vaste portion de territoire, tant dans la partie plate vers la Romagne<br />
que dans les zones de colline vers les Marches. Au Moyen Age, le<br />
Rimini des “communes” dut combattre les différentes propriétés de<br />
l’église locale, de l’église romaine et de l’église de Ravenne ainsi que<br />
les nombreuses concessions faites par l’archevêque de Ravenne, le<br />
pape et l’empereur aux monastères et à de riches particuliers. A partir<br />
du XII e siècle, la suprématie qu’elle exerçait sur les zones de colline<br />
fut menacée par les Malatesta qui, de Pennabilli et de Verucchio,<br />
pouvaient contrôler la moyenne vallée du Marecchia, dominée dans<br />
sa partie haute par les familles des Carpegna et des Montefeltro.<br />
Après toute une série de luttes et d’accords, les Malatesta obtinrent<br />
la seigneurie de Rimini à partir du XIV e siècle, seigneurie qu’ils<br />
gouvernèrent avec la charge de vicaires du Saint-Siège de 1355 à la<br />
fin du XV e siècle. Pendant presque deux siècles, l’histoire de Rimini<br />
s’identifie ainsi avec celle des Malatesta, ceux-ci parvenant à étendre<br />
leur domination dans les Marches jusqu’à Ascoli Piceno, en Toscane<br />
jusqu’à Borgo San Sepolcro et en Romagne jusqu’à Cesena, sans ne<br />
jamais réussir à se débarrasser de leurs voisins les plus puissants et<br />
les plus astucieux, les Montefeltro, dont la seigneurie, comme la leur,<br />
était probablement née de la prise de possessions dans les domaines<br />
comtaux des Carpegna, feudataires d’ancienne origine impériale qui<br />
dominaient le mont de Carpegna et une grande partie de la région. La<br />
lutte entre les Malatesta et les Montefeltro se fit particulièrement<br />
âpre dans les décennies centrales du XV e siècle, lorsqu’à la tête des<br />
deux familles rivales se trouvèrent Sigismondo et Federico, et surtout<br />
lorsque ce dernier parvint à faire acquérir à son gendre, Alessandro<br />
Sforza, la ville de Pesaro et son territoire (1445), qui avait jusqu’alors<br />
appartenu aux Malatesta (à Galeazzo Malatesta, cousin peu habile de<br />
Sigismondo). Cette acquisition, outre à offrir au territoire d’Urbin un<br />
libre débouché sur la mer, divisait le domaine de Sigismondo en deux<br />
parties, sa domination s’étendant alors dans les Marches jusqu’à<br />
Fano, Senigallia et Fossombrone.<br />
Les vallées du Marecchia et du Conca offrent de nombreux<br />
exemples de l’architecture militaire entre le XII e et le XV e siècle: des<br />
bourgs plus ou moins fortifiés s’alternent avec de véritables forteresses<br />
capables de contenir de petites garnisons et avec des tours de<br />
guet isolées, ou de simples enceintes, destinées à la surveillance du<br />
territoire et à la transmission de signaux. Malheureusement, la plupart<br />
de ces constructions sont aujourd’hui le résultat de nombreuses<br />
modifications ou réduites en ruines difficilement lisibles. Il faut rappeler<br />
que, bien que nombreuses, elles ne constituent que la partie sub-
9<br />
sistante, très limitée, d’un système qui avait atteint son maximum<br />
d’efficacité et de grandeur dans la septième décennie du XV e siècle,<br />
lorsque le territoire était minutieusement fortifié; en effet, l’insécurité<br />
de l’Etat, pour la présence d’ennemis extérieurs et intérieurs, rendait<br />
nécessaire la fortification de tout lieu présentant quelque importance<br />
stratégique, et non plus uniquement celle des frontières, ces dernières<br />
étant par ailleurs toujours incertaines et soumises à de fréquentes<br />
modifications inattendues, parfois considérables.<br />
Les Malatesta ont toujours transformé leurs fortifications pour<br />
les rendre plus sûres et pour les adapter aux nouvelles méthodes de<br />
combat et de siège. La période qui enregistre le plus grand nombre de<br />
transformations est certainement celle de la seigneurie de<br />
Sigismondo, celle-ci coïncidant également avec la période<br />
d’utilisation la plus fréquente et la plus massive d’une arme nouvelle<br />
et terrible: l’artillerie. Sigismondo, devenu seigneur de Rimini alors<br />
qu’il n’avait que quinze ans (1432), commença très tôt à faire restaurer<br />
et modifier les fortifications du territoire: “Dès son adolescence, il<br />
a perfectionné ce qu’une entière génération aurait difficilement pu<br />
faire”, écrivait avec admiration Marco Battagli dans sa “Chronique<br />
contemporaine”. Ses interventions avaient pour but de donner aux<br />
constructions militaires une réelle fonctionnalité, et non de les rendre<br />
“belles”; nous pourrions dire qu’il essaya de leur donner non pas une<br />
beauté abstraite, mais la beauté qui dérive du fait que chaque partie<br />
était adaptée à son usage militaire.<br />
Esprit pratique, particulièrement doué pour l’art de la guerre,<br />
inventeur de nouveaux engins explosifs (selon Roberto Valturio),<br />
Sigismondo a certainement eu un rôle important dans la conception<br />
et dans la modernisation des structures défensives de son Etat. Mais<br />
il demanda aussi des conseils, et, en 1438, obtint la supervision de<br />
Filippo Brunelleschi pour toutes les constructions qui étaient alors en<br />
cours sur son territoire, tant en Romagne que dans les Marches. En<br />
mars 1454, Leon Battista Alberti visita lui aussi les fortifications malatestiennes,<br />
accompagné par Matteo de’ Pasti: cette date se réfère<br />
certainement à Senigallia (une ville “refondée” par Sigismondo qui<br />
était alors en construction), mais il accomplit aussi probablement un<br />
vaste “examen” des terres malatestiennes.<br />
Toutes les fortifications restaurées ou refaites par Sigismondo<br />
présentent des murs en talus très inclinés, une articulation particulière<br />
des murs extérieurs, développés irrégulièrement, et enfin, des<br />
tours-bastions non pas intéressantes pour leur hauteur, mais pour<br />
leur plan polygonal, prélude des bastions ronds qui constitueront,<br />
d’un point de vue conceptuel, l’innovation la plus éclatante et la plus
En haut, Mondaino, la<br />
forteresse malatestienne,<br />
siège actuel de la Mairie.<br />
En bas, médaille portant le<br />
portrait de Sigismondo<br />
Pandolfo Malatesta (1450<br />
env.).<br />
11<br />
moderne du dernier quart du siècle. L’on peut remarquer d’autres<br />
innovations partielles telles que l’habile utilisation de terre-pleins à<br />
l’intérieur des enceintes défensives, voire dans les parties internes<br />
des constructions, ou encore, la rationalisation des parcours, qui permettait<br />
une certaine facilité de manoeuvre et offrait de successives<br />
rocades en cas d’invasion.<br />
Ces innovations ne contredisent généralement pas la tradition<br />
en ce qui concerne l’aspect extérieur général des fortifications:<br />
hautes, massives, carrées, dotées de tours, de créneaux et de corbeaux<br />
(un peu comme tous les châteaux de la plaine du Pô) qui leur<br />
donnent un aspect pittoresque, elles ont une majesté typiquement<br />
médiévale et une capacité de suggestion extraordinaire, cette dernière<br />
dérivant en partie de la beauté et de l’aspérité des lieux dans lesquels<br />
elles se dressent. Des lieux choisis avec extrêmement<br />
d’attention, de façon à composer une série ininterrompue de remparts<br />
qui se côtoient et qui font la garde l’un à côté de l’autre, l’un sur<br />
l’autre, en un constant et multiple contact visuel; elles semblent<br />
constituer de formidables ceintures défensives expressément tournées<br />
contre le Montefeltro et Saint-Marin.<br />
Mais, même si presque tous ces lieux avaient déjà été fortifiés<br />
précédemment, Sigismondo est le véritable auteur de la rationalisation<br />
de chacune de ces oeuvres ainsi que de la réalisation d’un plan<br />
défensif organique proprement dit, plan en vertu duquel, certaines<br />
anciennes forteresses furent négligées ou réduites alors que d’autres<br />
furent reconstruites ou agrandies, puis reliées entre elles de façon à<br />
former un système. C’est en ce sens que l’on peut dire que<br />
l’organisation défensive de l’Etat fut refondée par Sigismondo; il ne<br />
manqua d’ailleurs pas de le faire remarquer dans les nombreuses épigraphes<br />
gravées dans les différentes forteresses, s’y vantant d’avoir<br />
construit celles-ci a fundamentis, même lorsqu’il ne les avait que<br />
modernisées.
Rimini<br />
Castel Sismondo<br />
piazza Malatesta<br />
tél. 0541 351611 (Fondazione<br />
Cassa di Risparmio)<br />
fax 0541 28660<br />
www.fondcarim.it<br />
segreteria@fondcarim.it<br />
En haut, Rimini, le Château<br />
de Sigismond (1437-1446).<br />
En bas, médaille<br />
malatestienne représentant la<br />
vue du Château de Sigismond<br />
(1450 env.).<br />
12<br />
Itinéraire 1 > Le Château de Rimini<br />
Le chef-d’oeuvre de l’architecture militaire malatestienne est<br />
représenté par le château de Rimini, fait construire par Sigismondo à<br />
partir de 1437 et achevé, sur la base des épigraphes qui le décorent,<br />
en 1446. Ces épigraphes, au contenu solennel et aux formes<br />
anciennes, nous apprennent que le seigneur avait voulu donner à<br />
l’édifice, qu’il déclarait évidemment avoir construit a fondamentis,<br />
son propre nom: Castel Sismondo. La construction engloba de nombreuses<br />
parties de maisons malatestiennes construites au XIII e siècle,<br />
ainsi que les fortifications que le prédécesseur de Sigismondo (son<br />
frère Galeotto Roberto, dit “le bienheureux”) avait fait édifier.<br />
Pour Sigismondo, ce château était beaucoup plus qu’une<br />
demeure, qu’un “palais”: il devait être la représentation visuelle de<br />
son pouvoir, selon un concept encore tout à fait traditionnel; pour<br />
cela, il le fit réaliser dans des formes traditionnelles, c’est-à-dire plus<br />
expressivement pittoresques que rationnellement harmoniques; c’est<br />
ce que démontraient la perspective changeante des tours, la compacité<br />
des courtines crénelées, l’utilisation répétée d’arcs aigus et<br />
d’éléments en pierre et en céramique ainsi que le faste des dorures et<br />
des enduits colorés de vert et de rouge (les couleurs héraldiques<br />
malatestiennes) documentés par les écrivains contemporains; et<br />
encore, les tracés tortueux des parcours intérieurs, l’irrationalité avec<br />
laquelle étaient disposées certaines salles et, peut-être, l’insuffisance<br />
de grandes salles de représentation.<br />
Pour avoir une idée de la forme originale du château, il faut<br />
aujourd’hui se rapporter aux médailles moulées par Matteo de’ Pasti<br />
pour la célébration de sa construction et à un détail de la fresque peinte<br />
par Piero della Francesca à l’intérieur du Temple des Malatesta, qui<br />
en reproduisent exactement le projet; ou encore, à une page du De Re<br />
Militari , de Roberto Valturio, consacrée à la description et à l’exaltation<br />
de cette oeuvre et de Sigismondo. Son noyau intérieur se caractérisait<br />
par cinq tours qui entouraient un grand donjon (le palatium ); le vaste<br />
fossé qui délimitait son circuit extérieur s’étendait sur l’actuelle piazza<br />
Malatesta, jusqu’à la partie postérieure du théâtre du XIX e siècle.<br />
Il surprend encore, notamment pour sa masse imposante, pour<br />
l’aspect puissant et la conformation irrégulière de sa construction,<br />
conçue comme une série d’enceintes fortifiées autour d’un noyau<br />
d’habitation. Certaines de ces irrégularités peuvent s’expliquer par la<br />
nécessité ou l’avantage d’exploiter des structures préexistantes, mais<br />
ce n’est pas le cas pour toutes: par exemple, la disposition des tours<br />
ne peut être que partiellement justifiée par cette raison et devra plutôt<br />
être interprétée comme une tentative - précoce et donc un peu
En haut, coffre malatestien<br />
(1450 env.) provenant de<br />
Montegridolfo, conservé à<br />
Rimini, dans le Musée de la<br />
Ville. En bas, Rimini,<br />
l’intérieur du Château de<br />
Sigismond lors d’une<br />
exposition sur les Malatesta.<br />
15<br />
incertaine - de création d’un système défensif, doté de postes de tir et<br />
d’observation devant se côtoyer et se soutenir réciproquement; une<br />
nécessité qui se faisait ressentir depuis l’introduction de l’artillerie.<br />
Un inventaire, rédigé immédiatement après la mort de<br />
Sigismondo, nous fournit une idée de l’ameublement de la partie du<br />
grand édifice destinée aux appartements: tables, bancs et coffres, lits<br />
et armoires, tapisseries et draps furent recensés et énumérés par le<br />
notaire qui, le 13 octobre 1468, traversa et inventoria soigneusement<br />
toutes les salles, petites et grandes, dont les noms pittoresques dérivaient<br />
en partie de caractéristiques décorations murales (chambre des<br />
guirlandes, du genévrier, de la mort, du crucifix). Les coffres et les<br />
armoires contenaient des livres et des écritures, des bijoux et des vêtements<br />
de coupe compliquée et parfois d’étoffes précieuses, des couvertures<br />
et du linge. Dans les magasins étaient conservés des armes,<br />
des drapeaux, des tentes-abris et des étendards, des harnais de cheval<br />
et des colliers de chien, des instruments pour la chasse traditionnelle<br />
(arcs et flèches) et pour la guerre moderne (espringales et bombardes).<br />
Malheureusement, tout a été perdu. Le seul meuble malatestien<br />
authentique subsistant est un petit coffre en bois de cyprès richement<br />
travaillé remontant environ à la moitié du siècle et portant, parmi<br />
d’autres décorations, les armoiries de Sigismondo; cette pièce, qui<br />
provient du château de Montegridolfo, est conservée auprès du<br />
Musée de la Ville.<br />
A la chute des Malatesta, à la fin du XV e siècle, Castel Sismondo<br />
perdit son caractère de résidence princière et fut uniquement affecté<br />
à des buts militaires; au fil du temps, ses structures durent naturellement<br />
être adaptées à des nécessités de défense, surtout contre les<br />
armes à feu, armes qui, en l’espace de quelques décennies, avaient<br />
fait d’énormes progrès. Au XVII e siècle, après une restauration radicale<br />
et l’adjonction de créneaux, il prit, en l’honneur du pape régnant<br />
(Urbain VIII), le nom de Castel Urbano. Il fut ensuite utilisé comme<br />
caserne et comme magasin, puis enfin comme prison.<br />
Sa future affectation prévoit l’aménagement d’un centre culturel.<br />
Depuis plusieurs années, il est le siège d’un chantier de restauration<br />
qui a permis de mettre au jour plusieurs constructions préexistantes;<br />
particulièrement importante est la découverte de ruines de murailles<br />
romaines comprenant une porte qui est englobée dans les fondations<br />
du château: il s’agit probablement d’une porte “montagnarde” de la<br />
fin de l’époque romaine, qui, au Moyen Age, fut remplacée dans le<br />
même point mais à un niveau supérieur, par la porte dite “del gattolo”;<br />
celle-ci appartint à l’évêché jusqu’à la fin du XIII e siècle, c’est-àdire<br />
jusqu’au moment où elle tomba entre les mains des Malatesta
Verucchio<br />
Forteresse malatestienne<br />
via Rocca, 42<br />
tél. 0541 670222<br />
fax 0541 673266<br />
www.prolocoverucchio.it<br />
iat.verucchio@iper.net<br />
Page ci-contre, Verucchio,<br />
la forteresse malatestienne<br />
du Sasso.<br />
16<br />
Itinéraire 2 > Le berceau des Malatesta:<br />
Pennabilli et Verucchio<br />
dont les maisons se dressaient tout près.<br />
Les documents historiques attestent que les Malatesta possédèrent<br />
des propriétés dans le territoire de Rimini, et notamment dans les<br />
vallées du Marecchia et du Conca, des collines de Rimini au promontoire<br />
de Gabicce, à partir du XII e siècle. Mais leur histoire reste toutefois<br />
incertaine jusqu’au moment auquel ils deviendront des citoyens<br />
de Rimini, un siècle plus tard. A Rimini, dès 1220, Malatesta dalla<br />
Penna s’affirme comme le chef de la famille; à sa mort, vers 1247, son<br />
fils, Malatesta da Verucchio, lui succède. Penna (Pennabilli) et<br />
Verucchio revendiquent toutes les deux l’honneur d’avoir donné naissance<br />
aux Malatesta. Au cours des siècles derniers, les historiens<br />
locaux, allant jusqu’à se baser sur de faux documents, ont versé des<br />
flots d’encre pour mettre fin à cette question, dont l’importance est<br />
toutefois loin d’être fondamentale. Verucchio ne représenta probablement<br />
qu’une étape dans l’approche de la ville de cette famille dont la<br />
puissance et la richesse ne cessaient de croître. Quoi qu’il en soit, la<br />
moyenne vallée du Marecchia doit être considérée comme son “berceau”,<br />
à moins que l’on ne doive remonter ultérieurement la vallée<br />
jusqu’en Toscane (où une trace plus ancienne semble avoir été découverte,<br />
bien que cette considération soit encore incertaine, comme l’a<br />
récemment suggéré Currado Curradi).<br />
Pennabilli et Verucchio présentent une conformation similaire:<br />
elles s’étendent sur des cols traversés par une route et dominent le<br />
Marecchia par deux forteresses chacune. Des forteresses de<br />
Pennabilli, il ne subsiste que des ruines presque informes, comprenant<br />
des traces de puits, qui couronnent le “Roccione” et la “Rupe”<br />
(ainsi s’appellent les deux rochers autour desquels se blotissaient<br />
deux centres habités, Penna et Billi, unifiés au XIV e siècle). Sur le<br />
“Roccione”, les vestiges d’un bastion polygonal témoignent d’une<br />
construction malatestienne du XV e siècle; les restes de la fortification<br />
de la “Rupe” servent d’appui à un monastère d’augustines construit<br />
au début du XVI e siècle avec les pierres de la forteresse détruite. Le<br />
petit centre conserve des restes de muraille et deux portes restructurées<br />
portant les armoiries des familles des Malatesta et des<br />
Montefeltro: témoignage du passage de la domination des Malatesta<br />
à celle des Montefeltro, celui-ci ayant définitivement eu lieu en 1462,<br />
l’année précédant la défaite de Sigismondo Malatesta contre les<br />
milices papales commandées par Federico da Montefeltro.<br />
Verucchio, dans un certain sens, a eu plus de chance; ici aussi,<br />
l’une des forteresses (dite “del Passerello”), pratiquement détruite,<br />
abrite un couvent de soeurs; mais l’autre, dite “del Sasso”, solide et<br />
bien visible, domine encore le pays et le territoire; bien qu’ayant été
18<br />
soumise à de nombreuses interventions de restructuration et<br />
d’adaptation, c’est l’une des plus intéressantes de toute la vallée,<br />
avec celles de Montebello, San Leo et Santarcangelo. Sigismondo la<br />
fortifia en 1449, comme l’indiquent deux belles inscriptions, lui ajoutant<br />
une grande escarpe et réorganisant les constructions autour du<br />
massif donjon central. Des fouilles ont mis au jour d’importants souterrains<br />
ainsi que d’imposantes structures probablement du XII e<br />
siècle, ces constructions étant de toute façon bien antérieures à<br />
l’intervention de Sigismondo. Plus ancienne est également la belle<br />
tour carrée en pierre, partiellement pleine, au parement extraordinairement<br />
soigné. Tout récemment (1975), un ancien sentier très raide,<br />
protégé par le donjon, a été inopinément reconstruit sur le flanc du<br />
rocher: il constituait alors une liaison d’urgence avec le territoire. Les<br />
salles de cette forteresse ont été maintes fois restructurées et transformées<br />
pour satisfaire les nécessités d’adaptation des petites cours<br />
de Zenobio de’ Medici, de Ippolita Comnena, de Leonello et de<br />
Alberto Pio da Carpi, possesseurs du fief de Verucchio de 1518 à 1580,<br />
ainsi que celles d’un petit théâtre construit en ses murs au XVIII e<br />
siècle.<br />
Comme Pennabilli, Verucchio fut perdue par Sigismondo en<br />
1462, après un siège épuisant. La forteresse “del Sasso”, bien armée<br />
et défendue par des troupes fidèles et très attachées à leur seigneur,<br />
ne voulait pas se rendre à Federico da Montefeltro, qui fut obligé de<br />
recourir à l’un des stratagèmes dont il était expert: une lettre portant<br />
la fausse signature de Malatesta Novello et annonçant l’arrivée de<br />
renforts; en fait, les renforts arrivèrent, mais le châtelain s’aperçut<br />
trop tard qu’ils se composaient de soldats de Federico da Montefeltro<br />
opportunément camouflés.<br />
Verucchio est située dans une position qui permet de dominer<br />
parfaitement le fleuve et toute la plaine jusqu’à Rimini, de surveiller<br />
une bonne partie du territoire de Saint-Marin et de communiquer<br />
directement avec la forteresse de Scorticata (l’actuelle Torriana), qui<br />
se dresse en face d’elle, et avec celles de la plaine de Rimini: cette<br />
position, des plus stratégique pour le contrôle du territoire, explique<br />
le soin avec lequel Sigismondo en modifia et en renforça les défenses,<br />
défenses qui constituent aujourd’hui de pacifiques et splendides balcons<br />
sur l’un des plus pittoresques et ravissants paysages du monde,<br />
“mélange de vallées, de montagnes, de terres, de villas et de mer”,<br />
comme l’écrivait en 1705 l’archiâtre de Clément XI, Mgr. Gian Maria<br />
Lancisi.
San Leo<br />
Forteresse de la Renaissance<br />
via Btg. Cacciatori<br />
tél. 0541 926967-916306<br />
musei.san-leo@provincia.ps.it<br />
• ouverture: toute l’année<br />
19<br />
Itinéraire 3 > La vallée du Marecchia<br />
Le territoire compris entre Pennabilli et Verucchio est très intéressant<br />
pour les témoignages d’histoire et d’art qu’il conserve. Au pied<br />
de Pennabilli, entre la route moderne et le Marecchia, se dresse<br />
l’église paroissiale San Pietro in Messa, construction romane en pierre<br />
du XII e siècle présentant une splendide façade et un intérieur à trois<br />
nefs. En 1200, Giovanni Malatesta donna plusieurs terrains à cette<br />
église.<br />
De l’autre côté du fleuve se trouve le charmant petit village de<br />
Petrella Guidi; pratiquement inhabité, il a conservé une structure<br />
médiévale presque intacte; il est dominé par une forteresse en ruine<br />
comprenant une grande tour construite par les Tiberti entre le XII e et<br />
le XIII e siècle. Les murs de la tour présentent encore en de nombreux<br />
points un enduit original resplendissant, qui prouve que les<br />
anciennes fortifications étaient crépies et peintes de façon à être également<br />
bien visibles grâce à leurs couleurs, celles-ci reflétant généralement<br />
les couleurs héraldiques de la famille qui les possédait. La<br />
porte de l’enceinte est surmontée d’un écusson des Malatesta (de<br />
Galeotto) flanqué d’un écusson des Oliva, qui gardèrent la forteresse<br />
sous la protection des Malatesta jusqu’au début du XV e siècle, ainsi<br />
que d’un écusson de l’Eglise (les clés croisées).<br />
Une fois sortie de Petrella, la petite route nous conduit de l’autre<br />
côté du mont, à Sant’Agata Feltria, dans la vallée du Savio; ce petit<br />
centre abrite une belle forteresse malatestienne construite sur un<br />
rocher (le “Sasso del lupo”), modifiée par Federico da Montefeltro,<br />
auquel l’on doit l’adjonction d’un bastion conçu par Francesco di<br />
Giorgio Martini, et surélevée par les Fregoso, qui en furent les derniers<br />
feudataires.<br />
Descendant de Pennabilli en suivant la vallée du Marecchia, l’on<br />
peut voir sur la droite, après Novafeltria, le mont de Maioletto, couronné<br />
par les vestiges d’une forteresse malatestienne - dont il ne<br />
reste qu’une courtine et deux bastions polygonaux en talus - détruite<br />
en 1639 par la foudre qui frappa le magasin des poudres à feu.<br />
Maiolo, le bourg fortifié placé sous sa protection qui se dressait sur le<br />
versant du mont et que se disputèrent tour à tour les Faggiolani,<br />
l’évêque du Montefeltro, l’Eglise, les Malatesta et les Montefeltro, a<br />
été complètement détruit par un éboulement le 29 mai 1700: la déchirure<br />
provoquée par l’éboulement est encore très visible sur le versant<br />
du mont.<br />
Un peu plus loin, la route devient plate et suit le large lit du fleuve,<br />
offrant une vue magnifique sur San Leo, construite sur un rocher
Torriana<br />
Forteresse malatestienne<br />
via Castello, 15<br />
tél. 0541 675232<br />
fax 0541 639905<br />
ristoranteduetorri@libero.it<br />
• ouverture: possibilité de<br />
visiter la structure et la zone<br />
panoramique environnante<br />
Montebello<br />
Forteresse des Guidi<br />
di Bagno<br />
Château de Montebello<br />
tél/fax 0541 675180<br />
• ouverture: toute l’année<br />
En haut, la forteresse de San<br />
Leo. En bas, la tour<br />
cylindrique et la petite église<br />
de la Madonna di Saiano.<br />
21<br />
calcaire aux flancs escarpés; la petite localité est dominée par une<br />
forteresse pratiquement imprenable, modifiée par Francesco di<br />
Giorgio Martini pour Federico da Montefeltro. San Leo, l’ancienne<br />
Mons Feretri, est en un certain sens la capitale “historique” du<br />
Montefeltro - auquel elle a d’ailleurs donné son nom - et peut-être<br />
même le lieu d’origine de la famille des Montefeltro, qui la disputèrent<br />
aux Malatesta au cours des XIV e et XV e siècles. S’agissant d’un<br />
lieu de grande importance stratégique pour la domination de l’arrièrepays,<br />
elle fut au centre de longs combats entre Lombards et<br />
Byzantins. Il faut rappeler que c’est à San Leo que se conclut la lutte<br />
de Bérenger II contre l’empereur Othon I er , qui, le 26 décembre 963,<br />
après un interminable siège, réussit à conquérir la ville et à capturer<br />
son ennemi. Plus que la forteresse, ce sont l’église paroissiale et la<br />
cathédrale, splendides exemples d’architecture romane, qui portent<br />
les marques du plus pur Moyen Age. Sur la route qui côtoie le fleuve<br />
Marecchia (la via Marecchiese), deux rochers pittoresques surveillent<br />
la zone de Rimini et la partie romagnole: celui de Pietracuta et celui<br />
de Saiano. Ce dernier, qui s’élance de la grève du fleuve, est couronné<br />
par une ancienne église dédiée à la Vierge, flanquée d’un presbytère<br />
en forme de trèfle (contenant des fresques de la Renaissance,<br />
malheureusement lacunaires) qui rappelle les “cellules tréflées”<br />
byzantines, et par une grande tour au splendide parement de moellons<br />
arénacés, dont la forme cylindrique rappelle les campaniles<br />
ravennates. Les tours cylindriques ne sont pas rares dans le<br />
Montefeltro et, bien qu’elles s’inspirent d’un type de tour romain et<br />
byzantin, elles ne semblent pas être antérieures au XIII e siècle. Il en<br />
existe dans les communes de Pennabilli (Maciano), de Casteldelci<br />
(Torre di Monte), de Badia Tedalda (Cicognaia), de Montegrimano<br />
(Ca’ Manente), de Sestino (Monte Romano) et de Borgopace (Torre<br />
di San Martino).<br />
Un autre barrage fortifié se dresse un peu plus loin, comme pour<br />
marquer par une vraie “limite” la frontière entre le Montefeltro et la<br />
Romagne: il est constitué par les collines de Verucchio et de<br />
Scorticata (aujourd’hui Torriana), situées sur les berges opposées de<br />
la vallée; ces fortifications étaient équipées pour empêcher tout passage<br />
et pour transmettre à Rimini des informations (par des feux et<br />
des fumées) sur l’immense territoire qu’elles parvenaient à surveiller,<br />
tant vers la mer que vers les collines de la Romagne et des Marches et<br />
vers Saint-Marin. La tour de Scorticata, qui dépendait de la forteresse<br />
sous-jacente, réussissait à communiquer, par l’intermédiaire de la forteresse<br />
voisine de Montebello, jusqu’à San Giovanni in Galilea,<br />
impliquant pour ce faire toute une chaîne de forteresses et de châ-
En haut, l’entrée au château<br />
de Torriana. En bas, un<br />
chemin de ronde sur les glacis<br />
du château de Montebello.<br />
22<br />
teaux entre la vallée de l’Uso, la vallée du Rubicon et Rimini.<br />
Il nous faut traverser le Marecchia à Ponte Verucchio pour monter<br />
à Torriana et à Montebello, ce dernier ravissant petit village offrant<br />
une intéressante forteresse; cette construction (des marquis de<br />
Bagno), restructurée à maintes reprises, mérite d’être visitée pour ses<br />
structures et pour la vue magnifique que ses glacis offrent sur les vallées<br />
du Marecchia et de l’Uso. Nous pourrons ensuite descendre la<br />
vallée en restant sur la rive gauche du fleuve, traversant un paysage<br />
qui s’adoucit rapidement. Nous passerons devant Poggioberni à<br />
gauche, avec son palais Marcosanti qui domine la route d’une petite<br />
hauteur: ancienne ferme fortifiée des Malatesta, il conserve encore<br />
une partie de la structure du XIV e siècle. La partie centrale du corps<br />
principal, restructuré au XVIIe siècle, offre une belle plongée, des portails<br />
ogivaux en pierre et en terre cuite ainsi qu’une grande cour.<br />
Un peu plus bas et désormais complètement dans la plaine,<br />
nous apercevons la magnifique tour des Battagli (une importante<br />
famille médiévale de Rimini), construite au XIII e siècle et couronnée de<br />
créneaux gibelins. La tour défendait une ferme fortifiée (dite<br />
“tomba”), c’est-à-dire un enclos muré - regroupant les habitations<br />
des paysans, les étables, les greniers pour les récoltes et les abris<br />
pour les outils - placé naturellement au centre d’un vaste domaine.<br />
A quelques kilomètres se dresse Santarcangelo, construite sur<br />
une colline entre le Marecchia et l’Uso; son architecture modeste et<br />
ses ruelles pittoresques qui gravissent le col débouchant sur de<br />
petites places silencieuses font d’elle l’un des petits centres les mieux<br />
conservés et les plus charmants de la zone. Les remparts du XV e<br />
siècle, qui entourent encore la plus grande partie de l’ancien noyau,<br />
ont été restaurés et partiellement refaits en 1447 par Sigismondo, qui<br />
y fit alors apposer des épigraphes en marbre. C’est à lui que l’on doit<br />
également la construction de la forteresse, édifiée à une extrémité du<br />
col, à côté d’une grande tour voulue par Carlo Malatesta en 1386.<br />
Selon les écrivains de l’époque, cette tour, de par sa hauteur, était<br />
considérée comme l’une des merveilles italiennes. Mais un demisiècle<br />
plus tard, bien que suscitant encore l’émerveillement pour sa<br />
majesté et sa beauté, Sigismondo dû la faire abaisser, car les assauts<br />
se faisaient désormais plus avec des bombardes en bronze qu’avec<br />
des catapultes en bois: il fit de la partie inférieure le donjon angulaire<br />
d’une nouvelle forteresse (en partie construite avec le matériel obtenu<br />
de la démolition) de forme quadrangulaire aux tours polygonales,<br />
capable d’abriter une bonne garnison: cette précaution dérivait de<br />
l’instabilité et de l’intolérance des habitants de Santarcangelo à<br />
l’égard de la seigneurie des Malatesta et de la nécessité de surveiller
Santarcangelo di Romagna<br />
Forteresse malatestienne<br />
via Rocca Malatestiana, 4<br />
tél/fax 0541 620832<br />
tél. 081 5751828<br />
www.sigismondomalatesta.it<br />
sig.ma@flashnet.it<br />
• ouverture: en été sur<br />
réservation<br />
Page ci-contre, la forteresse<br />
malatestienne de<br />
Santarcangelo.<br />
24<br />
constamment les cours inférieurs du Marecchia et de l’Uso ainsi que<br />
la via Emilia à proximité de Rimini.<br />
Bien que cette forteresse ait elle aussi perdu son couronnement<br />
de corbeaux et de créneaux, elle est ornée de belles inscriptions aux<br />
anciens caractères épigraphiques latins, selon une mode humaniste<br />
qui commençait alors à s’affirmer. De la cour, par un pittoresque<br />
cailloutage coiffant une citerne médiévale encore fonctionnante, l’on<br />
peut accéder au donjon constituant la base de la grande tour de Carlo<br />
Malatesta construite au XIV e siècle; ses énormes murs cachent une<br />
partie des anciens escaliers en colimaçon qui offraient des accès<br />
indépendants aux différents étages (il en reste quatre). C’est dans<br />
une salle de cette tour que mourut, à l’aube du 10 octobre 1432, à<br />
vingt et un ans à peine, Galeotto Roberto Malatesta, dit le bienheureux,<br />
neveu et successeur de Carlo et frère de Sigismondo et de<br />
Malatesta Novello. Certains écrivains fantaisistes du XIX e siècle y ont<br />
situé l’histoire qui aboutit au “crime d’honneur” de Gianciotto, c’està-dire<br />
au meurtre de Paolo il bello et de Francesca da Rimini.<br />
Le paysage qui s’offre à nos yeux de la terrasse du donjon, sur<br />
lequel se dressait il n’y a pas longtemps encore un petit cyprès aussi<br />
pittoresque que nuisible pour la cohésion de la maçonnerie, est<br />
magnifique: la vallée du Marecchia s’étire dans toute son ampleur,<br />
d’un côté jusqu’aux collines et à Saint-Marin et de l’autre jusqu’à<br />
Cesena et à la mer. Tout près du fleuve, l’observateur attentif pourra<br />
apercevoir la Pieve, une basilique byzantine à nef unique construite<br />
au VI e siècle à côté du petit centre romain: c’est l’église paroissiale la<br />
plus ancienne et la mieux conservée de toute la Romagne.
Coriano<br />
Antiquarium del Castello<br />
tél. 0541 657113-659811<br />
fax 0541 657469<br />
biblioteca@comune.coriano.it<br />
• ouverture: toute l’année<br />
En haut, deux vues du<br />
château de Coriano. En bas, à<br />
gauche, la tour municipale de<br />
Montecolombo; à droite,<br />
l’église de la Paix de Trarivi.<br />
26<br />
Itinéraire 4 > La vallée du Conca<br />
Partant de Rimini, il convient de rejoindre directement les premières<br />
collines de la vallée du Conca, en traversant obliquement le<br />
territoire de Rimini jusqu’à Morciano di Romagna. Il suffit pour cela<br />
de suivre la route de Coriano qui serpente doucement entre des collines<br />
savamment cultivées, semblables à des jardins. Les champs, les<br />
vignobles et les oliveraies tapissent les doux coteaux parsemés de<br />
fermes, de petites églises, de saules et de peupliers plantés sur les<br />
rives de torrents qui gravent profondément le terrain.<br />
Coriano conserve les ruines d’un château aux murs en talus et<br />
aux courtines à corbeaux, ainsi qu’une porte portant les traces très<br />
visibles de l’ancien pont-levis, couronnée par l’écusson en pierre des<br />
Sassatelli d’Imola (feudataires de Coriano de 1528 à 1580). L’on accède<br />
à l’intérieur de l’enceinte fortifiée de forme polygonale par la porte<br />
d’une tour archaïque, haute et droite, de construction antérieure, qui<br />
conserve quelques créneaux. La plus grande partie du château a été<br />
restaurée tout récemment; son intérieur abrite un Antiquarium qui<br />
conserve des pièces, des objets et des fragments de céramique,<br />
retrouvés lors des travaux de restructuration.<br />
Dès la sortie de Coriano, une route secondaire s’enfonce sur la<br />
gauche dans la petite vallée de la rivière du Mordano, pour gagner le<br />
pont Scaricalasino et réapparaître en pente raide jusqu’au hameau de<br />
Castelleale: il s’agissait de la ferme fortifiée de l’évêque Leale<br />
Malatesta, qui y mourut en 1400. L’enceinte extérieure du petit village<br />
recèle des murs et des arcs du XIV e siècle, d’anciennes fenêtres<br />
aux jambages de pierre et les restes d’une muraille et d’une tour à<br />
porte en ogive; la partie donnant sur la montagne offre encore les<br />
vestiges d’une porte charretière, flanquée d’une plus petite porte piétonnière,<br />
toutes deux présentant d’élégantes formes ogivales.<br />
L’évêque Leale laissa à la cathédrale de Rimini un bel ostensoir, par la<br />
suite transformé en reliquaire (“de l’épine sacrée”), sur le pied duquel<br />
il est représenté en prière devant saint Georges, patron de la cavalerie.<br />
La colline opposée abrite une unité analogue à celle de<br />
Castelleale: Agello; de construction probablement antérieure, elle<br />
est encerclée de murs en ruine dissimulés sous la végétation et dont<br />
la seule entrée est dominée par une grande tour s’étant en partie<br />
récemment écroulée.<br />
La route rejoint ensuite San Clemente, autre siège d’anciennes<br />
fortifications, puis descend vers la vallée du Conca qu’elle atteint à<br />
Morciano: parcourant la descente tortueuse, l’on peut apercevoir, sur
En haut, vue de Gemmano et,<br />
en bas, de Morciano.<br />
29<br />
l’autre versant de la vallée, Saludecio, Montefiore et Gemmano,<br />
autant de petits pays fortifiés qui couronnent des hauteurs à la végétation<br />
luxuriante. De Morciano, nous remontons la vallée pour<br />
rejoindre Montescudo et Montecolombo, deux petits pays intéressants<br />
sur la gauche du fleuve, qui (avec Gemmano) ont été en partie<br />
détruits lors de la dernière guerre.<br />
Montescudo se distingue pour les grands murs de sa forteresse,<br />
dont les vastes plongées très inclinées rendaient tout assaut pratiquement<br />
impossible. Le bastion méridional porte encore la plaque en<br />
marbre d’une inscription latine au texte solennel, dont la disposition<br />
et le caractère des lettres présentent l’habituel soin formel.<br />
Sigismondo y affirme avoir construit la grande forteresse a fundamentis<br />
en 1460, comme “bouclier” pour la ville de Rimini.<br />
Montescudo, qui dominait toute la moyenne vallée du Conca ainsi<br />
que celle du torrent Marano et se dressait en face des fortifications<br />
ennemies de Saint-Marin, constituait effectivement l’élément clé de<br />
tout le système défensif malatestien et un véritable bouclier pour la<br />
protection de la ville de Rimini; elle était reliée à celle-ci par une route<br />
d’une vingtaine de kilomètres qui suivait l’arête de la montagne sans<br />
offrir de structures défensives particulières.<br />
Le 31 mars 1954, lors de la restauration de l’enceinte orientale<br />
de Montescudo, vingt-deux médailles au type de Sigismondo furent<br />
mises au jour. Ce sont des exemplaires des célèbres et splendides<br />
monnaies fondues par Matteo de’ Pasti vers la moitié du XV e siècle.<br />
Plusieurs exemplaires de ces monnaies ont également été découverts<br />
dans les murs d’autres constructions malatestiennes. Le seigneur de<br />
Rimini les faisait en fait cacher dans les murs pour que la mémoire de<br />
son nom et de son visage survécût à la destruction de ses architectures,<br />
comme la mémoire et l’effigie des empereurs romains avaient<br />
survécu, grâce aux monnaies, à la destruction des édifices alors les<br />
plus grandioses. Une “préoccupation” de ce genre ne pouvait certainement<br />
pas être comprise par les gens du commun qui finirent par<br />
considérer ces dépôts comme de véritables trésors: ainsi, plusieurs<br />
légendes de trésors cachés dans les murs des forteresses malatestiennes<br />
se répandirent alors que Sigismondo était encore vivant, et, à<br />
Montefiore, on en raconte encore.<br />
Le versant opposé de la vallée est essentiellement dominé par<br />
Gemmano, dont les fortifications ont été détruites, et par Montefiore<br />
(dont on parlera plus loin), facilement accessible depuis Morciano. A<br />
Morciano naît également la route qui permet de gagner Saludecio, et<br />
qui, après avoir suivi l’arête de la colline où se dressent Mondaino et<br />
Montegridolfo, descend dans la vallée du Foglia (presque entière-
Mondaino<br />
Forteresse malatestienne<br />
piazza Maggiore, 1<br />
tél. 0541 981674<br />
fax 0541 982060<br />
www.mondaino.com<br />
cedmondaino@mondaino.com<br />
• ouverture: toute l’année<br />
En haut, la place du XIXe siècle de Mondaino devant la<br />
forteresse malatestienne. En<br />
bas, une fresque du XVe siècle<br />
dans l’église San Rocco de<br />
Montegridolfo.<br />
30<br />
ment incluse dans le territoire des Marches).<br />
Nous nous trouvons de nouveau dans une localité de frontière<br />
d’une grande valeur stratégique et donc soigneusement fortifiée. A<br />
Saludecio, qui a toujours gravité autour de Rimini et des Malatesta<br />
tout en ayant eu ses propres petits seigneurs (les Ondidei, tués par<br />
une famille rivale en 1344, sous l’influence probable des Malatesta), il<br />
ne reste que quelques ruines de l’ancienne forteresse; elles sont<br />
englobées dans le Palais communal du XIX e siècle, dont l’aile extérieure<br />
est décorée par un écusson malatestien du XIV e siècle.<br />
A Mondaino, qui après la défaite malatestienne gravita longuement<br />
vers Fano, les murailles, la porte nord et la forteresse (siège<br />
actuel de la mairie) au grand embasement en talus, forment un noyau<br />
très pittoresque, agrémenté par l’adjonction d’une splendide place<br />
semi-circulaire à arcades du XIX e siècle.<br />
Une raide et longue galerie souterraine, qui reliait vraisemblablement<br />
la forteresse au fleuve, a été récemment découverte: elle<br />
constituait probablement une voie de fuite ou un passage secret pour<br />
l’envoi de messagers. La littérature relative aux fortifications évoque<br />
souvent l’existence de passages secrets mais celui-ci est le seul, jusqu’à<br />
présent, à être documenté par une découverte.<br />
Dans la première moitié du XIV e siècle, Saludecio et Mondaino,<br />
comme les autres petits pays de la zone, furent le théâtre de luttes<br />
intérieures de la famille malatestienne, entre les cousins Ferrantino<br />
Novello, Galeotto et Malatesta Guastafamiglia; le premier, fils de<br />
Ferrantino et neveu de Malatestino dall’occhio, les seconds, fils de<br />
Pandolfo I er (frère de Malatestino). Ces luttes aboutirent à la défaite<br />
de Ferrantino, qui s’était allié aux Montefeltro et avait constitué une<br />
sorte de seigneurie personnelle sur les collines romagnoles à proximité<br />
d’Urbin. Ces luttes eurent pour victime tout le petit village de<br />
Montegridolfo; détruit en 1337 par Ferrantino, il fut reconstruit cinq<br />
ans plus tard par Galeotto et Malatesta selon un plan urbanistique<br />
très précis, encore presque intact: l’aménagement du terre-plein du<br />
relief, délimité par de hauts murs en talus, est caractérisé par des<br />
constructions modestes, alignées avec soin entre trois rues parallèles;<br />
l’accès au pays est consenti par une seule porte-tour à pontlevis,<br />
qui a été modifiée. Sur l’autre côté du village se dressait une<br />
petite forteresse dont il ne reste que quelques vestiges englobés<br />
dans un édifice (transformé de nos jours en hôtel): il s’agissait peutêtre<br />
de la forteresse donnée en 1503 par Cesare Borgia, dit le<br />
Valentin, à son “bourreau” adoré, don Micheletto. Tout le village a été<br />
récemment restauré avec énormément de soin.<br />
A la sortie de cet ancien village se dresse la petite église San
En haut, à gauche, Porta<br />
Marina et campanile de<br />
Saludecio; à droite, détail<br />
d’une fresque du XVe siècle de<br />
l’église de l’Hôpital de<br />
Montefiore. En bas, à gauche,<br />
vue aérienne de<br />
Montegridolfo; à droite,<br />
l’église de l’Ecole à San<br />
Giovanni in Marignano.<br />
33<br />
Rocco, conservant des fresques du XV e et du XVI e siècle qui représentent<br />
une Vierge à l’Enfant et les saints Sébastien et Roch, ainsi qu’un<br />
retable du XVII e siècle qui en reproduit le sujet (de Guido Cagnacci).<br />
La vallée du Conca conserve d’autres précieuses fresques du dernier<br />
quart du XV e siècle: une Vierge à l’Enfant sur le trône entourée<br />
d’anges musiciens à Mondaino (actuellement auprès de la mairie<br />
mais provenant du couvent des Clarisses); une décoration fragmentaire<br />
représentant le Jugement dernier et le Paradis dans la petite<br />
église de l’hôpital Santa Maria della Misericordia à Montefiore.<br />
Redescendant les collines jusqu’à Morciano, nous pouvons nous<br />
diriger vers la mer en prenant la route qui côtoie le lit du Conca. Nous<br />
rencontrons bien vite une autre “terre” malatestienne importante,<br />
San Giovanni in Marignano, d’origine bénédictine, dont les murs et la<br />
tour d’accès datent des XIV e -XV e siècles. A l’époque du Haut Moyen<br />
Age, toute la zone plate comprise entre le Conca, le Ventena et le<br />
Tavollo, de Morciano à la mer, était marécageuse; elle fut bonifiée par<br />
les Bénédictins qui y construisirent de nombreuses abbayes,<br />
s’installant sur de vastes propriétés qui appartenaient déjà en partie<br />
à l’Eglise de Ravenne.<br />
La route aboutit à Cattolica (dont l’ancienne église Saint-<br />
Apollinaire était des Bénédictins de Classe), située à quelques kilomètres<br />
du grand château de Gradara, sur le territoire de Pesaro.
Montefiore Conca<br />
Forteresse malatestienne<br />
via Roma, 2<br />
tél. 0541 980035<br />
fax 0541 980206<br />
www.comune.montefioreconca.rn.it<br />
utribmontefiore@email.it<br />
• ouverture: Pâques - octobre<br />
En haut, margelle de puits du<br />
XIVe siècle dans la cour de la<br />
forteresse de Montefiore. En<br />
bas, “Bataille de chevaliers”,<br />
fresque de Jacopo Avanzi<br />
(1370 env.) dans la forteresse<br />
de Montefiore.<br />
34<br />
Itinéraire 5 > Des résidences de vacances:<br />
Montefiore et Gradara<br />
Dans la deuxième moitié du XIV e siècle, une fois consolidée leur<br />
seigneurie et obtenue la charge officielle de “vicaires”, les Malatesta<br />
modifièrent certaines forteresses pour les adapter à l’accueil de leur<br />
cour qui, par sa richesse et son raffinement, rivalisait désormais avec<br />
les grandes cours de l’Italie centrale. Ainsi, Montefiore et Gradara,<br />
cette dernière en particulier, ne furent pas seulement des forteresses<br />
pratiquement imprenables mais aussi de somptueuses résidences<br />
temporaires (nous dirions aujourd’hui “de vacances”), surtout pendant<br />
les périodes les plus propices à la chasse. Certains édifices<br />
auraient même été construits comme de véritables “lieux de délices”<br />
puis transformés par la suite en forteresses: c’est le cas de la villa<br />
“delle Caminate”, à trois milles de Fano, fait construire par Galeotto<br />
en 1365 et décorée par Pace da Faenza, malheureusement entièrement<br />
détruite.<br />
Montefiore est très visible, de Rimini et de toute sa plaine.<br />
Dominant la moyenne vallée du Conca et celle du Ventena, ce château<br />
fait partie de la chaîne la plus sûre et la plus cohérente de tout le<br />
système défensif malatestien; pour en comprendre l’importance stratégique,<br />
il suffit d’en considérer la position par rapport aux forteresses<br />
ennemies de Tavoleto et de Sassofeltrio. C’est peut-être le<br />
plus caractéristique de tous les châteaux malatestiens, pour sa forme<br />
prismatique et pour le contraste que présente la roche, lisse, compacte<br />
et cristalline, d’un aspect presque surréel; il ne faut pas s’étonner<br />
s’il resta dans les yeux, et peut-être dans les carnets de voyage, de<br />
Giovanni Bellini, qui le reproduisit sur le fond d’au moins deux de ses<br />
tableaux. Vu de près, il déçoit pourtant un peu, à cause des nombreuses<br />
interventions effectuées sur la structure après la guerre avec<br />
une rare insensibilité, celles-ci ayant dénaturé et effacé de nombreux<br />
éléments originaux capables de fournir des indices utiles pour sa<br />
compréhension et pour une plus sûre reconstruction (idéale, bien<br />
entendu).<br />
Dès le XIII e siècle, l’édifice présentait une masse imposante et un<br />
aménagement fonctionnel, avec une tour flanquée d’un palais résidentiel,<br />
légèrement en retrait; ils étaient tous deux protégés par une<br />
enceinte - qui comprenait également une cour centrale dotée de citerne<br />
- modelée sur le sommet de la colline. Du siècle successif date la<br />
réalisation d’importants agrandissements et des murs qui entourent<br />
tout le village, formant une grande enceinte défensive qui inclut également<br />
la forteresse. Les restaurations et les modifications dues à
Gradara<br />
Forteresse<br />
piazza Alberta Porta Natale<br />
tél. 0541 964181-964115<br />
fax 0541 823035<br />
www.gradara.org<br />
info@gradara.org<br />
• ouverture: toute l’année<br />
En haut, vue de Montefiore et<br />
de son église paroissiale<br />
depuis la forteresse. En bas,<br />
le château de Gradara.<br />
36<br />
Sigismondo furent précédées par celles de Malatesta Ungaro, qui<br />
préférait cet édifice aux autres et le fit orner d’un magnifique écusson<br />
en pierre, dont il existe encore le “cimier”, et de tableaux en partie<br />
subsistants. La grande “chambre de l’Empereur” (flanquée d’une<br />
“salle du trône” et d’une “salle du Pape”) conserve quelques “portraits”<br />
d’anciens héros et deux scènes incomplètes de bataille,<br />
peintes à fresque par Jacopo Avanzi vers 1370. Il s’agit des seuls<br />
restes de décorations picturales appartenant à des édifices malatestiens<br />
privés. Les documents historiques témoignent de fresques et de<br />
peintures ayant décoré de nombreux autres châteaux malatestiens: à<br />
Pesaro, à Montelevecchie, à San Costanzo di Fano, à Brescia, à Rimini<br />
et à Gradara, mais il n’en reste aucune trace. Nous ne pouvons laisser<br />
Montefiore sans avoir admiré les constructions formant un demicercle<br />
au pied de la forteresse et l’église paroissiale avec son beau<br />
portail gothique et un Crucifix de Rimini du XIV e siècle. Sur la porte du<br />
pays, qui au Moyen Age était dotée de pont-levis, est murée une<br />
plaque en pierre portant les armoiries du pape Pie II Piccolomini et du<br />
cardinal légat Niccolò Forteguerri: oeuvre d’un certain Giacomo, lapicide<br />
ferrarais, elle remplaça en 1464 (après la défaite de Sigismondo<br />
Malatesta) un écusson malatestien.<br />
Gradara est un autre grand château qui unissait à la fonction<br />
défensive celle de résidence somptueuse. Il s’agissait - tout comme<br />
pour Montefiore - d’un bien allodial des Malatesta, c’est-à-dire d’une<br />
vraie propriété, dérivant d’un achat et non pas d’une concession pontificale.<br />
Comme structure de défense, il faut la considérer “en rapport<br />
direct” avec Rimini et “en système” avec les forteresses de Gabicce,<br />
Casteldimezzo et Fiorenzuola, sur les collines du littoral, et avec celle<br />
de Tavullia, à l’intérieur. En 1364, Malatesta Guastafamiglia assignait<br />
par testament Montefiore et Gradara respectivement à<br />
Malatesta Ungaro et à Pandolfo, ses fils. Pandolfo est un ami de<br />
Pétrarque et le père du Malatesta des sonnets qui, en 1429, mourut<br />
justement dans la forteresse de Gradara. De lui, on connaît son intérêt<br />
pour la peinture ainsi que pour la poésie (il envoya un peintre chez<br />
Pétrarque pour qu’il en fit secrètement le portrait); de Malatesta, on<br />
sait qu’il recruta des artistes à Florence (dont le jeune Lorenzo<br />
Ghiberti) pour décorer sa résidence de Pesaro. La plupart des décorations<br />
à fresque (représentant des héros de l’antiquité et d’anciennes<br />
batailles) du château de Gradara et de son palais de Pesaro, mentionnées<br />
dans les documents historiques, étaient probablement dues à<br />
Pandolfo; elles n’étaient peut-être même pas très différentes des<br />
décorations fait peindre à Montefiore par Ungaro.<br />
La forteresse de Gradara abrite encore des fresques du XV e
38<br />
siècle, représentant des héros et des batailles, mais celles-ci ont été<br />
commissionnées par les Sforza, qui occupèrent le château à partir de<br />
1463. Dès l’entrée dans le pays, l’on peut apercevoir sur l’ancienne<br />
porte les armoiries d’Alessandro Sforza (avec celles de Guidobaldo II<br />
Della Rovere et de Vittoria Farnese), alors que sur la porte de la véritable<br />
forteresse triomphe une belle inscription de Giovanni Sforza,<br />
attestant une importante restauration de 1494. Le château devait certainement<br />
en avoir eu besoin, bien que Sigismondo Malatesta eut<br />
déjà réparé les dommages causés par le siège éprouvant de<br />
Francesco Sforza qui, en 1446, avait inutilement tenté de le lui soustraire<br />
pour le donner à son frère Alessandro, devenu depuis peu seigneur<br />
de Pesaro (1445) avec la connivence, ou plutôt la complicité, de<br />
Federico da Montefeltro.<br />
Dans l’ensemble, le pays - entièrement cerclé de murs crénelés -<br />
et sa forteresse sont en bon état de conservation et présentent de<br />
nombreuses parties originales, malgré les successives restaurations<br />
(importantes, bien que nécessaires, celles effectuées dans les années<br />
20 du XX e siècle). L’on accède à la forteresse par un pont-levis, après<br />
avoir franchi toute une série de protections; la cour intérieure, quadrangulaire,<br />
est ornée sur trois côtés d’un porche et d’une loggia (du<br />
début du XIV e siècle et de la fin du XV e siècle), portant les armoiries de<br />
Pandolfo Malatesta et de Giovanni Sforza. Dans un coin, le donjon,<br />
autrefois isolé, s’élève nu et puissant et s’affirme comme la partie la<br />
plus ancienne de tout l’ensemble. Le corps d’un guerrier, armé de<br />
pied en cap, fut retrouvé debout sous son plancher vers la moitié du<br />
XVIII e siècle, dans une salle contenant aujourd’hui une pittoresque<br />
salle de torture: il avait peut-être était condamné, trois cents ans plus<br />
tôt, à mourir suffoqué sous un tas de terre. Le donjon fut certainement<br />
utilisé comme prison et comme tribunal: sur l’inscription à<br />
l’extérieur de la lucarne de la salle basse figure l’expression “antidote<br />
contre la malhonnêteté”.<br />
La cour permet d’accéder directement à la chapelle, celle-ci<br />
conservant un beau retable en majolique blanche et bleue d’Andrea<br />
della Robbia représentant la Vierge à l’Enfant et quatre saints (sur la<br />
prédelle, l’Annonciation entre saint François qui reçoit les stigmates<br />
et sainte Marie d’Egypte qui reçoit la communion d’un ange), et, par<br />
un escalier du XVI e siècle, à l’étage supérieur; l’on peut y visiter des<br />
salles dotées d’un mobilier ancien plutôt éclectique et de décorations<br />
de style médiéval complètement fausses et souvent de mauvais goût,<br />
remontant aux premières décennies du XX e siècle. La “chambre de<br />
Francesca”, elle aussi complètement fausse, a été dotée dans les<br />
années 20 de tous les éléments (lit et pupitre, rideaux et trappe, pas-
39<br />
sage secret, balcon, etc.) pour “situer” la tragédie des “deux amants”<br />
et la rendre vraisemblable, tragédie qui, si toutefois ella a eu lieu, a<br />
eu lieu ailleurs. C’est évidemment l’expression d’un goût décadent,<br />
caractéristique du romantisme finissant, plus enclin au roman-feuilleton<br />
qu’au respect pour les témoignages historiques. Mais la structure<br />
de la forteresse est heureusement fondamentalement authentique,<br />
comme authentiques et fascinantes sont certaines de ses décorations<br />
à fresque de l’époque de la Renaissance: celles du petit salon de<br />
Lucrezia Borgia (qui fut pendant quelques années la femme de<br />
Giovanni Sforza), de la salle des putti et de la galerie, qui conserve<br />
également quelques fragments sculpturaux. Tout le charme de la<br />
construction réside cependant dans sa complexité, dans la stratification<br />
de ses parties, dans la grandeur de sa structure et dans son rapport<br />
avec le village fortifié et le paysage environnant.<br />
Gradara, “étendue sur la crête de la colline avec une sorte de<br />
mollesse armée et vigilante, comme un fauve au repos mais prêt à se<br />
lancer” (Luigi Michelini Tocci), regarde vers l’est et vers le nord, vers<br />
la mer et vers la Romagne, celle-ci s’ouvrant à la plaine immédiatement<br />
après le promontoire de Gabicce, avec le Cattolica fondé en<br />
1273 entre le Ventena et le Tavollo comme pour remplacer l’antique,<br />
ou mieux, la mythique “ville submergée de Conca” et pour créer une<br />
limite visible au territoire de Rimini. Terre des Malatesta et des<br />
Marches, Gradara respire le vent de la mer et les dernières brumes de<br />
la vallée du Pô, dans lesquelles résonnent les voix et les musiques et<br />
déteignent les couleurs et les manières des grandes cours du nord,<br />
des familles des ducs d’Este, des Gonzague et des Visconti. Plus que<br />
tout autre château malatestien, Gradara est encore empreint d’une<br />
atmosphère de chevalerie courtoise et cruelle, mêlée au souvenir des<br />
dernières prouesses du seigneur impulsif et courageux qu’était<br />
Sigismondo avant son déclin.
40<br />
Bibliographie > Pour en savoir plus<br />
Autori vari<br />
Sigismondo Pandolfo<br />
Malatesta e il suo tempo<br />
Mostra storica (Rimini), Neri<br />
Pozza editore, Vicenza 1970<br />
Autori Vari<br />
<strong>Rocche</strong> e Castelli<br />
di Romagna, III,<br />
Alfa ed., Bologna 1972<br />
G. Franceschini<br />
I Malatesta<br />
Dall’Oglio, Milano 1973<br />
F.V. Lombardi<br />
Le torri del Montefeltro e<br />
della Massa Trabaria<br />
Bruno Ghigi ed., Rimini 1981<br />
Autori vari<br />
Natura e cultura<br />
nella valle del Conca<br />
Biblioteca co munale<br />
di Cattolica e Cassa<br />
di Risparmio di Rimini,<br />
Rimini 1982<br />
P. G. Pasini<br />
I Malatesti e l’arte<br />
Silvana ed., Milano 1983<br />
A. Vasina<br />
Comuni e signorie<br />
in Emilia e in Romagna<br />
UTET, Torino 1986<br />
Autori vari<br />
<strong>Rocche</strong> fortilizi <strong>castelli</strong><br />
in Emilia Romagna Marche<br />
Sil vana ed., Milano 1988<br />
Autori vari<br />
Maricla, otto lezioni<br />
per conoscere il fiume<br />
Marecchia e la sua valle<br />
Maggioli ed., Rimini 1989<br />
Autori vari<br />
Storia illustrata di Rimini, I-III,<br />
Nuova Editoriale Aiep,<br />
Milano 1990<br />
Autori vari<br />
<strong>Rocche</strong> e bombarde fra Marche<br />
e Romagna nel XV secolo<br />
a c. di M. Mauro, Ravenna 1995<br />
C. Curradi<br />
Alle origini dei Malatesti<br />
in “Romagna arte e storia”,<br />
48, 1996<br />
P. G. Pasini<br />
Arte in Valconca, I-II,<br />
Silvana ed., Milano 1996-1997<br />
G. Rimondini, D. Palloni,<br />
Il castello e la rocca di<br />
Mondaino<br />
Rimini 1998<br />
Medioevo romantico, paesi<br />
e <strong>castelli</strong> tra Romagna e<br />
Marche nei disegni di<br />
Romolo Liverani<br />
Rimini 1999<br />
Volando sul Marecchia<br />
fotografie di L. Liuzzi<br />
e V. Raggi, Ramberti ed.,<br />
Rimini 2000