29.06.2013 Views

Le père des pauvres

Le père des pauvres

Le père des pauvres

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

30 <strong>Le</strong> <strong>père</strong> <strong>des</strong> <strong>pauvres</strong> L’ascension d’une famille du Gâtinais sous l’Ancien Régime 31<br />

Cette famille, qu’on a pu suivre sur près de deux siècles,<br />

présente donc un cas très intéressant d’évolution sociale sous<br />

l’Ancien Régime. N’en retenons ici que quelques éléments<br />

révélateurs.<br />

<strong>Le</strong> passage de l’artisanat à <strong>des</strong> professions libérales,<br />

comme la médecine, le droit, mais aussi à <strong>des</strong> tâches<br />

administratives, au niveau local ou régional; sans oublier la<br />

participation à l’Église. Tout cela impliquant <strong>des</strong> alliances,<br />

qu’on a signalées; il a alors été possible de découvrir tout<br />

un réseau, dont il eût été fort opportun de pousser l’étude,<br />

parce qu’il aurait mis en valeur <strong>des</strong> convergences et <strong>des</strong><br />

influences dont on soupçonne déjà l’importance. Il faut<br />

également mentionner l’accès à un certain niveau de fortune :<br />

acquêt de propriétés dans la ville de Montargis ou dans les<br />

environs; beaucoup de rentes, <strong>des</strong> maisons bien garnies.<br />

Or cela n’oblitérait pas la dimension charité : aide aux<br />

démunis, participation à la gestion <strong>des</strong> hôpitaux. On peut<br />

voir là l’influence, qui ne se démentit pas au xviii e siècle,<br />

de Paul Dubé, qualifié par ses contemporains de « <strong>père</strong><br />

<strong>des</strong> <strong>pauvres</strong> ». Il avait su inculquer à ses enfants cet intérêt<br />

pour le bénévolat ou ce qu’on pourrait aussi appeler le<br />

service du prochain, issu d’un christianisme fervent qu’il<br />

avait adopté.<br />

La dimension géographique est aussi intéressante<br />

à retenir. <strong>Le</strong>s noms qui n’ont cessé de revenir dans nos<br />

considérations sont Montargis, Bléneau, Gien, Saint-Fargeau,<br />

Sens; mais, à côté de ces endroits, il ne faut pas oublier<br />

les campagnes environnantes – et tout spécialement pour<br />

le médecin Paul Dubé. <strong>Le</strong>s relations avec Paris sont bien<br />

présentes – on en verra un bel exemple quand on parlera <strong>des</strong><br />

contacts du médecin avec l’Académie <strong>des</strong> sciences –, mais<br />

elles n’oblitèrent pas l’intérêt pour la province, qui demeure<br />

pendant deux siècles le centre <strong>des</strong> préoccupations <strong>des</strong><br />

personnes que nous avons étudiées ici. Une seule exception<br />

à ce scénario : François Dubé, le fils de François et de<br />

Anne Collesson, qui décida, on ne sait pour quelle raison,<br />

d’aller s’établir, avant 1733, à Saint-Domingue, où il mourut<br />

en 1756.<br />

Il convient, croyons-nous, pour compléter notre réflexion,<br />

d’esquisser une comparaison qui nous permettra d’apprécier<br />

la représentativité de la famille Dubé. <strong>Le</strong> cas que nous<br />

voulons brièvement aborder est celui d’une famille issue de<br />

la paysannerie qui émergea, au milieu du xvi e siècle, grâce à<br />

la profession médicale, et dont le <strong>des</strong>tin est, lui aussi, assez<br />

exceptionnel 102 .<br />

Louis Du Laurens naquit en 1511 (m. 1574). Ses parents,<br />

qui étaient paysans et habitaient près de Chambéry,<br />

déménagèrent à Turin. C’est dans cette ville qu’il commença<br />

ses étu<strong>des</strong>; puis, accompagnant à Paris un jeune Piémontais<br />

qui allait y étudier la médecine, il réussit à se faire admettre,<br />

lui aussi, à la faculté. Il se lia d’amitié avec un célèbre docteur,<br />

Honoré Castellan, lequel passa une partie de sa vie au service<br />

de la famille royale. Une fois son doctorat terminé, il alla<br />

s’établir à Tarascon, où il épousa la sœur de Castellan. Il y<br />

pratiqua la médecine avec succès.<br />

Nous ne donnons ici qu’un bref aperçu <strong>des</strong> carrières<br />

remarquables que connurent ses cinq fils.<br />

Honoré (1554-1612) étudia d’abord la médecine, qu’il<br />

abandonna ensuite pour le droit (voir le cas, signalé plus<br />

haut, de Pierre I Dubé). Il devint avocat général au parlement<br />

de Provence. Puis il fit partie de la Ligue; il décida peu après<br />

d’accéder au sacerdoce, et il termina sa vie archevêque<br />

d’Embrun. Une vie peu banale, faut-il conclure.<br />

André (1558-1609) étudia, lui, à la faculté de médecine de<br />

Montpellier, et il y enseigna après l’obtention de son doctorat;<br />

il fut même quelques années chancelier de l’université de<br />

Montpellier. Il devint premier médecin d’Henri IV en 1606.<br />

Il publia quelques livres, qui l’ont rendu célèbre; retenons<br />

l’Apologia pro Galeno, et l’Historia anatomica humani corporis.<br />

Il avait épousé la fille d’un magistrat.<br />

Antoine (1564-1629) étudia en droit et devint avocat au<br />

conseil du roi. Un de ses fils, Richard, fut médecin à Lyon.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!