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SOUVENIRS

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assaisonnés des cris de Vive la République! et du chant: Aux armes, citoyens! Ce fut réellement<br />

une fête pour les Sans-Culottes et leurs amis, ainsi que pour les noirs, car d'ordinaire, dans<br />

leurs réunions républicaines, ils faisaient, bon gré mal gré peut-être, œuvre de sobriété, ne<br />

mangeant que de la soupe composée de légumes et de lard, et ne buvant que de l'eau. Au reste,<br />

cette journée ne fut marquée par aucun désordre, et dans la manifestation de leur joie, ils se<br />

bornèrent à arrêter les passants, à les inviter à boire et à crier vive la République, à peu près<br />

comme on obligeait en quelque sorte les habitants à crier en 1832 : A bas Jérémie!<br />

La quatrième fête, consacrée à faire des vœux pour la mort du dernier tyran, fut toute<br />

sérieuse. On prononça des discours à la Chaumière où chacun vociférait à son aise contre les<br />

rois, sans oublier Pitt et Cobourg. Une triple promenade dans les rues de la ville était de<br />

rigueur; et le soir, à 10 heures, c'était la farandole.<br />

Ce jour là, toutefois, la Chaumière devint le théâtre d'une dispute assez vive- qui s'éleva<br />

entre le bossu dont nous avons déjà parlé et un gascon récemment arrivé dans le pays. Ou notre<br />

bossu, qui était parisien, ne comprenait pas le gascon, ou notre gascon ne savait pas le français.<br />

Ce dernier donc arrivait de France où il avait vu et fréquenté les clubs. Il abordait souvent la<br />

tribune: sa manie était de pérorer. Toujours confiant dans ses forces oratoires, il prit la parole<br />

en cette circonstance et déblatéra si longtemps, sans que personne put le comprendre, que notre<br />

bossu, cédant à une impatience bien naturelle, l'interrompit tout-à-coup en lui demandant s'il<br />

savait lire. Offensé de cette brusque et rude apostrophe, le gascon, pour toute réponse, lui<br />

donne un soufflet, mais un soufflet si vigoureux, si bien appliqué, que le pauvre bossu s'en va<br />

rouler sous la table du secrétaire. De là grand tumulte dans l'assemblée. Deux camps se<br />

forment, et bientôt une de ces luttes scandaleuses, comme on en avait vu quelquefois, allait<br />

s'en suivre, quand les citoyennes des tribunes intervinrent. Amenés devant l'aréopage<br />

féminin, les deux champions s'expliquèrent, et comme il faut toujours rendre les armes au<br />

beau sexe, la paix fut scellée par une accolade amicale et tout-à-fait fraternelle.<br />

La cinquième fête fut consacrée à honorer l'Innocence. Une jeune fille de douze ans,<br />

belle comme un ange, appartenant à de braves gens qui demeuraient une de la Harpe, fut<br />

chargée de remplir ce rôle, et elle s'en acquitta avec tant de douceur et d'intelligence, que<br />

l'on courait de rue en rue pour la voir passer sur son petit char orné de fleurs et traîné par<br />

deux amours. On eût dit que la vue de cette aimable enfant avait adouci les manières<br />

farouches des Sans-Culotles qui, devant elle, se tenaient décemment et ne prononçaient<br />

aucune parole qui pût blesser son innocence, tant est puissant l'empire de la vertu, même sur<br />

les cœurs les plus dépravés! Par malheur, on ne mesura pas les forces de cette jeune

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