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SOUVENIRS

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Naguère encore, n'avons-nous pas vu des gens se livrer à des promenades nocturnes,<br />

hurler la Parisienne et troubler le repos des habitants tranquilles, et cela au moment où l'on<br />

s'armait, disait-on, pour prévenir un soulèvement parmi les esclaves? Certes, ceux-ci n'y<br />

songeaient nullement, mais ils auraient fini par en prendre la résolution, si quatre hommes<br />

déterminés eussent risqué leur vie à l'entreprise d'un projet aussi monstrueux. Quel était le but<br />

de ceux qui poussaient à ces excès? Nous le dirons plus tard, et alors l'on se convaincra que<br />

l'intérêt public dont ils couvraient leurs sottises, n'entrait pour rien dans la levée de boucliers<br />

qu'ils préparaient. Les colonies ne sont pas faites pour les révolutions: elles ont trop à perdre à<br />

cela. Pour qu'elles jouissent d'une sécurité parfaite, il faut qu'elles laissent aux gouvernements<br />

et au temps le soin d'opérer les changements nécessités par la force des choses. Les<br />

gouvernements et le temps sont deux grands maîtres. Les premiers exécutent sans secousse et<br />

sans trouble ce que l'autre a préparé, et la société recueille le fruit de leur travail, sans craindre<br />

ces brusques innovations qui portent une atteinte profonde à la fortune publique en froissant la<br />

masse des intérêts particuliers.<br />

Chacun connaît et apprécie la distance qui séparait alors les diverses classes de la<br />

société; mais pense-t-on qu'il y eût entre elles cette ligne de démarcation tranchée que nous<br />

remarquons aujourd'hui? Non, sans doute. Il existait à cette époque une espèce de patronage<br />

destiné à faire disparaître ce que la loi pouvait avoir de dur et d'humiliant. On n'écrivait rien, il<br />

est vrai; vous n'aviez pas le plaisir ou l'ennui d'entendre prononcer de beaux discours sur<br />

l'égalité; mais en revanche on se rendait des services mutuels; mais on avait sous les yeux le<br />

spectacle de la concorde et de l'harmonie. Cela valait tout autant et même mieux. Les Augustin<br />

Desgrange, les Maurel, les Jean Poitevin et les Maingard, tous quatre créoles de l'ouest et de la<br />

ville, tous quatre appartenant à l'opinion conservatrice et modérée, ont rendu plus de services à<br />

la chose publique que jamais n'en pourront rendre nos gazetiers et nos sauveurs actuels. A la<br />

tête des compagnies de leurs quartiers, ils maintinrent la tranquillité parmi une population<br />

nombreuse que l'on appelait pour la première fois à l'exercice de tous les droits; mais jamais,<br />

dans nos émeutes, dans nos insurrections, on ne les vit, obéissant aux conseils provocateurs<br />

des Sans- Culottes, trahir la cause dont la saine partie du public avait embrassé la défense et au<br />

triomphe de laquelle les destinées du pays étaient attachées. Ce ne fut jamais de leurs rangs<br />

que sortirent les cris insurrectionnels de Vive la liberté! L'égalité ou la mort! - Non, Saint-<br />

Domingue avait épouvanté le monde, et l'Ile-de-France, qui avait sous les yeux le tableau des<br />

hurleurs dont il avait été le théâtre, reculait devant l'idée d'ajouter un second acte à cette<br />

affreuse tragédie, l'une des taches ineffaçables du 18 e siècle. Les honorables citoyens que nous<br />

avons cités plus haut, ont vécu longtemps parmi nous. Un seul existe encore. Tous ont joui de

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