SOUVENIRS
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Culottes, l'avait proposé comme garde-magasin à la distribution des rations et des autres objets<br />
du magasin-général. Mais il fallait changer de nom, car la République ne voulait pas de Roi.<br />
Fit-il? Il prit celui de République, (qui ne pouvait mieux choisir,) et depuis il signa de ce nom<br />
toutes les pièces qui lui passèrent entre les mains. Deux vieux noirs de l'Etat qui existaient<br />
encore, il y a peu de temps, nous disaient: ça citoyen la République été un bon blanc; avec Ii<br />
toujours bon poids. Lorsque l'exaspération Républicaine se fut un peu calmée et que le<br />
citoyen la République, comme employé du gouvernement, se fut bâti, avec ses économies,<br />
une petite maison, rue des Limites, ce nom de République lui devint un fardeau difficile a<br />
porter; en conséquence, il sollicita de la Chaumière la permission de s'appeler de nouveau<br />
non pas Le Roy, nom qu'il n'avait pris qu'au théâtre, mais bien Gally, qui était son véritable<br />
nom de famille. On voulut bien accéder à sa demande, après toutefois avoir reçu de lui la<br />
promesse que cette substitution ne changerait ni ses principes, ni son attachement pour ses<br />
amis de la Chaumière. Le lendemain, Gally se rendit chez M. Dupuy, l'intendant, qui, pour<br />
faire expédier son ordre de service, lui demanda son nom nouveau: Gally, répondit-il. - Votre<br />
nom de baptême?- Mathias.- Citoyen Gally, lui dit M. Dupuy, prenez garde qu'après avoir<br />
charmé l'Ile-de-France par vos talents, sous le nom de Le Roy, qu'après avoir bien servi le<br />
gouvernement sous celui de République, vous n'alliez faire à l'avenir du Gally-Mathias dans<br />
votre place! ....<br />
C'est sous le nom de Gally que ce brave homme est mort au Cap, en allant en France,<br />
où il était appelé par quelques vieux amis qu'il avait à Bordeaux. La colonie manque<br />
aujourd'hui de ces originaux de bonne compagnie, dont la ville était peuplée, et qui jetaient<br />
dans les sociétés une teinte d'esprit sans prétention et de joviale humeur. L'âge a sans doute<br />
donné pour nous d'autres couleurs à Maurice; mais nous ne voyons plus rire d'un rire franc et<br />
sincère, à moins que nous n'assistions aux scènes originales de M. Delmas. La raison dans ses<br />
progrès l'aurait elle défendu, et les générations futures seraient-elles destinées à raisonner en<br />
sortant du berceau? Les écoliers, qui le croirait sont devenus raisonnables, et, si l'on trouve<br />
parfois de la gaîté parmi eux, c'est une gaîté contrainte et réglée, et non cet abandon, cette folie<br />
de l'enfance qui n'a de bornes que la fatigue. Les apprentis eux-mêmes ont subi la commune et<br />
sérieuse influence. On dirait que la liberté a produit le même effet sur eux que la raison sur<br />
leurs anciens maîtres. Tout le monde, à Maurice, semble bouder ou conspirer; il n'est pas<br />
jusque dans les bals, où rien ne manque, rien, si ce n'est cet élan et cette vivacité qu'inspire le<br />
plaisir. Connue le bon Lafontaine, nous pourrions dire: Quand reviendront pour nous ces<br />
beaux jours de gaîté et de plaisir? Hélas! Il est à craindre qu'ils soient perdus sans retour.<br />
L'ambition et la cupidité rient fort peu; les libéraux et les saints simoniens, les<br />
méthodistes et les hommes à barbe qui menacent de faire irruption parmi nous, ne sont