SOUVENIRS

colonel fut de réintégrer, dans leurs fonctions respectives, le procureur-général et le collecteur
des douanes.
Si la conduite administrative du général Hall a été généralement blâmée, c'est qu'elle
méritait de l'être. Ses manières empreintes de rudesse étaient celles d'un visir, et toujours il se
croyait à la tête de ses grenadiers ou de ses sapeurs. Quelques règlements sur les corvées, sur la
bienfaisance et sur quelques autres parties de l'administration lui sont dus; mais pendant la
durée de son court gouvernement, il se montra plus occupé du soin de rapporter les loi, de
son prédécesseur que d'en proclamer de nouvelles; démolir sans réédifier, tel fut, en général,
le caractère de son administration. Quant à la traite, il la voyait partout, ainsi que nous
l'avons dit; l'idée qu'on pouvait s'y livrer, avait tellement grandi dans son imagination,
qu'elle s'était pour ainsi dire transformée en une monomanie véritable. Une illusion, une
ombre, une chimère devenait pour lui une effrayante réalité, dès qu'il s'agissait de traite, et,
sous ce rapport, il ne ressemblait pas mal à Don Quichatte, toujours prêt à combattre des
moulins à vent, croyant voir clans chacun d'eux autant de chevaliers armés de toutes pièces.
Après cela rendons-lui justice. Raisonnant bien une affaire, il en saisissait parfaitement
l'esprit; mais qu'un incident inattendu vînt toucher la fatale corde du trafic des noirs, et ce
n'était plus le même homme; il perdait de vue la question principale pour se cramponner à
l'accessoire et se perdre au milieu d'un déluge de suppositions sans fondement. Ennemi de
sir Robert et de tous ceux qui avaient contribué au bonheur et à la tranquillité du pays,
chaque fois qu'il en trouvait l'occasion, il rabaissait les talents administratifs du premier, et
tourmentait, destituait les autres, par cela seul qu'ils lui étaient restés attachés. Un pareil
gouverneur l'on pouvait bien parvenir à se faire craindre, mais non pas à se faire aimer. Son
rappel fut regardé comme un bienfait.
Le dernier acte du colonel d'Alrymple fut de réintégrer dans ses hautes fonctions de
commissaire de la justice, M. Georges Smith. Après avoir réparé, autant que possible, le mal
dont l'administration de son prédécesseur avait été la source, après avoir rassuré les esprits sur
les intentions futures de la métropole, le colonel fut remplacé, le 6 février 1819, par le général
Darling.
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