La Gaule indépendante et la Gaule romaine - Hautefort, notre ...
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Toujours est-il que <strong>la</strong> plèbe, dans son immense majorité, se composait de<br />
clients.<br />
Trois causes, nous dit César, <strong>la</strong> réduisaient à c<strong>et</strong> état : les vexations des grands,<br />
les d<strong>et</strong>tes, les impôts. Le mot tributa perm<strong>et</strong> de croire qu’il s’agissait d’un impôt<br />
foncier. Nous aurions donc affaire à de p<strong>et</strong>its propriétaires renonçant à leur droit<br />
de propriété pour n’avoir pas à en supporter les charges. Les débiteurs (obaerati),<br />
qui forment une catégorie importante, pourraient être les mêmes qui, avant d’en<br />
venir là, auraient eu recours à l’emprunt. Ils se seraient trouvés dans <strong>la</strong> situation<br />
des nexi romains, qui devaient leur travail à leurs créanciers. Rien n’empêche de<br />
croire qu’on leur prêtait de l’argent, mais il est probable qu’on leur prêtait aussi<br />
du bétail <strong>et</strong> des terres, <strong>et</strong> dans le nombre il s’en trouvait sans doute qui, en fait<br />
de terres <strong>et</strong> de bétail, ne possédaient que ce qu’on leur avait prêté. Ceux-là<br />
n’étaient pas des propriétaires ruinés, mais des tenanciers. Le mot obaerati a<br />
quelquefois ce sens dans les écrivains <strong>la</strong>tins de c<strong>et</strong>te époque. César nous dit que<br />
le patron avait sur ses clients les mêmes droits que le maître sur ses esc<strong>la</strong>ves. Il<br />
distingue pourtant entre les esc<strong>la</strong>ves <strong>et</strong> les clients. L’assimi<strong>la</strong>tion ne doit donc<br />
pas être absolue.<br />
<strong>La</strong> clientèle se présente sous un aspect différent, avec un caractère plus relevé,<br />
quand elle est contractée en vue d’obligations militaires. Non que les clients en<br />
général fussent dispensés de ce service. Mais il y avait des clients dont les armes<br />
étaient le métier.<br />
[LA CLIENTÈLE GUERRIÈRE] En 56 av. J.-C., P. Crassus, dans sa campagne contre<br />
les Aquitains, rencontra chez les Sotiates une troupe de six cents combattants<br />
qui s’appe<strong>la</strong>ient, dans <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue de ces peuples, soldurii. Ces hommes s’étaient<br />
liés à leur chef par un vœu dont les dieux étaient garants. Ils lui appartenaient<br />
sans réserve dans <strong>la</strong> bonne <strong>et</strong> <strong>la</strong> mauvaise fortune. Ils vivaient de ses dons <strong>et</strong><br />
étaient traités par lui en amis. S’il venait à succomber, leur devoir était de se<br />
faire tuer sur son corps ou de se tuer eux-mêmes. C<strong>et</strong>te clientèle, sous forme de<br />
camaraderie guerrière, existait chez toutes les nations ibériques. On <strong>la</strong> rencontre<br />
chez les Germains. Rien ne ressemble aux soldurii de César comme les comites<br />
ou compagnons de Tacite. Elle était connue aussi des Gaulois. Polybe, décrivant<br />
les mœurs des Celtes Cisalpins au me siècle av. J.-C., se sert du mot hétairie ou<br />
compagnonnage pour caractériser les rapports du chef avec les gens de sa suite.<br />
<strong>La</strong> même expression reparaît dans les Commentaires de César. Le Trévire<br />
Ambiorix, surpris dans ses domaines par <strong>la</strong> cavalerie des Romains, échappe à<br />
leur poursuite grâce au dévouement de ses compagnons, de ses familiers,<br />
comites familiaresque ejus. L’Arverne Litavieus, après <strong>la</strong> défaite de son armée,<br />
s’enfuit à Gergovie avec ses clients, car c’est un crime, un sacrilège (nefas) chez<br />
les Gaulois d’abandonner son patron dans une situation désespérée. Ces clients<br />
dévoués jusqu’à <strong>la</strong> mort, ces familiers, ces compagnons qui montent <strong>la</strong> garde<br />
autour de leur chef, ne sont pas les tenanciers, les ouvriers ruraux qui, r<strong>et</strong>enus<br />
aux champs, ne s’arrachaient que par exception à leurs occupations pacifiques.<br />
Ce sont les hommes d’armes que chaque patron a l’habitude de soudoyer en<br />
aussi grand nombre que possible, <strong>et</strong> qu’il entr<strong>et</strong>ient à ses frais.<br />
Le système de <strong>la</strong> protection est une conséquence <strong>et</strong> une cause de I’impuissance<br />
de l’État. Par le fait qu’il existe, il aggrave le mal d’où il est sorti. Le conflit<br />
inévitable entre l’État <strong>et</strong> ces organismes indépendants condamne <strong>la</strong> cité gauloise<br />
à une anarchie permanente, à une irrémédiable faiblesse.<br />
[LA CITÉ ET LES PAGI] <strong>La</strong> cité avait un gouvernement central, mais elle ne formait<br />
pas un tout absolument homogène <strong>et</strong> unifié. Elle comprenait un certain nombre