T4 - La Place de Vérité
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7. À peine Béken le potier, chef des auxiliaires, était-il arrivé dans la zone qui leur était réservée, que Sobek l’interpella. — Rassemble tes subordonnés devant la forge d’Obed, ordonna le policier nubien. Teigneux, le potier lui tint tête. — Qu’est-ce qui ne va pas ? — Tu le verras bien. — J’exige des explications. Sobek gratta la cicatrice qu’il avait sous l’œil gauche, souvenir d’une lutte à mort avec un léopard dans la savane de Nubie. Pour qui connaissait bien le chef de la police de la Place de Vérité, ce geste trahissait une irritation croissante, préludant à une colère dévastatrice. — Ne t’énerve pas, recommanda Béken, dont la voix vacillait. Je souhaitais simplement savoir si... — Rassemble les auxiliaires. Béken jugea préférable d’obéir, mais il éprouva les pires difficultés à regrouper « ceux de l’extérieur » parmi lesquels figuraient blanchisseurs, bouchers, boulangers, brasseurs, chaudronniers, tanneurs, tisserands, coupeurs de bois, poissonniers et jardiniers, tous nommés pour assurer le bien-être des villageois. Obed le forgeron fut le premier à protester avec vigueur. — Tu nous traites moins bien que des bœufs destinés à l’abattoir ! Qu’est-ce qui te prend, Béken ? — Ordre du chef Sobek... Moi, je n’y suis pour rien ! — N’es-tu pas chargé de plaider notre cause en cas d’abus d’autorité ? — Plains-toi auprès des responsables. - 38 -
D’origine syrienne, barbu, court sur pattes, Obed le forgeron était un homme de caractère. Aussi n’hésita-t-il pas à affronter Sobek qui observait la pagaille d’un air impatient. — Nous sommes des travailleurs libres, déclara le forgeron, et tu n’as aucun droit sur nous. — Tu manques de mémoire, assena le Nubien ; en cas de faute grave de la part d’un auxiliaire, j’ai le devoir de l’arrêter. Obed fronça les sourcils. — Alors, on aurait tous commis une faute grave ? Tu te moques de nous, Sobek, et je vais immédiatement prévenir le scribe de la Tombe ! — J’agis sur son ordre, car vous êtes tous soupçonnés de meurtre sur la personne de Néfer le Silencieux. Le forgeron demeura bouche bée. Comme par miracle, le brouhaha s’interrompit pour laisser place à un silence pesant. — Mettez-vous en ligne, ordonna le policier, et tenez-vous tranquilles. Je vous interrogerai un par un dans mon bureau. — J’exige que Béken soit présent pour me défendre ! intervint le chaudronnier. On connaît tes méthodes... Tu ferais avouer n’importe qui ! Sobek toisa le contestataire. — Un exemple précis à citer ? Le chaudronnier baissa les yeux. — Non, non... — Il me faudra des réponses claires, et je prendrai le temps nécessaire pour les obtenir. Comme les innocents ont les mains propres, ils n’ont rien à redouter et seront rapidement relâchés. N’essayez surtout pas de me mentir : je possède le flair d’un chien de chasse. Béken s’approcha du policier. — Je peux te parler seul à seul ? — Ça tombe bien... Je comptais t’interroger en premier. Les deux hommes pénétrèrent dans la forge. L’endroit plaisait à Sobek, car il symbolisait de façon parfaite l’antichambre de l’enfer où brûlerait l’assassin. - 39 -
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À peine Béken le potier, chef <strong>de</strong>s auxiliaires, était-il arrivé dans<br />
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— Qu’est-ce qui ne va pas ?<br />
— Tu le verras bien.<br />
— J’exige <strong>de</strong>s explications.<br />
Sobek gratta la cicatrice qu’il avait sous l’œil gauche, souvenir<br />
d’une lutte à mort avec un léopard dans la savane <strong>de</strong> Nubie.<br />
Pour qui connaissait bien le chef <strong>de</strong> la police <strong>de</strong> la <strong>Place</strong> <strong>de</strong><br />
<strong>Vérité</strong>, ce geste trahissait une irritation croissante, préludant à une<br />
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— Ne t’énerve pas, recommanda Béken, dont la voix vacillait. Je<br />
souhaitais simplement savoir si...<br />
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Béken jugea préférable d’obéir, mais il éprouva les pires<br />
difficultés à regrouper « ceux <strong>de</strong> l’extérieur » parmi lesquels<br />
figuraient blanchisseurs, bouchers, boulangers, brasseurs,<br />
chaudronniers, tanneurs, tisserands, coupeurs <strong>de</strong> bois, poissonniers<br />
et jardiniers, tous nommés pour assurer le bien-être <strong>de</strong>s villageois.<br />
Obed le forgeron fut le premier à protester avec vigueur.<br />
— Tu nous traites moins bien que <strong>de</strong>s bœufs <strong>de</strong>stinés à<br />
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