T4 - La Place de Vérité

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— Je l’admets également. Acceptez-vous cependant que l’équipement d’éternité de Siptah soit complété comme je l’ai indiqué ? — J’accepte le principe, mais... — Je ne toucherai pas au Trésor, promit la reine, mais les objets en or seront néanmoins façonnés. Ai-je votre approbation ? — Avec quelle magie comptez-vous réussir ? — Je demanderai à la Place de Vérité de faire le nécessaire. Le regard de Seth-Nakht s’assombrit. — Comptez-vous lui livrer de l’or en secret ? — Vous savez bien que c’est impossible. — Vous croyez donc à la légende ! La confrérie serait-elle vraiment capable de fabriquer de l’or ? — J’ose l’espérer. — En réalité, Majesté, vous ne cherchez qu’à gagner du temps. — Je cherche à rendre la demeure d’éternité de Siptah aussi efficace et puissante qu’elle doit l’être, selon nos rites et nos symboles. Si vous êtes en désaccord avec ce devoir, jugé essentiel par nos ancêtres, proclamez-le devant le grand conseil. — Combien de temps le maître d’œuvre exige-t-il ? — À lui de le dire. — Il me le dira, Majesté, soyez-en sûre ! La femme sage soignait Ouâbet la Pure pour une grave dépression, mais le meilleur remède était la présence attentive de la petite Séléna qui s’occupait de sa mère comme une aide-soignante expérimentée, suivant à la lettre les prescriptions de Claire. — Où est ton père ? demanda Ouâbet quand elle consentit enfin à parler. — Papa travaille, répondit la fillette. La femme sage a dit que lorsque tu prononcerais quelques mots, tu commencerais à guérir. — Guérir... Comment le pourrais-je ? Ton frère est parti ! — Non, il a été expulsé du village parce qu’il a commis des crimes. Ouâbet n’avait pas eu le courage d’expliquer à Séléna que cette - 254 -

décision équivalait à une condamnation à mort. N’étant plus membre de la confrérie, Aperti serait jugé pour viol comme n’importe quel criminel, et la peine capitale serait prononcée contre lui. Jamais Ouâbet n’avait pensé que son mari serait aussi sévère. Mais il était aussi le maître d’œuvre et il avait choisi la voie de sa fonction et non celle du père... Comment la mère d’Aperti pouvaitelle l’admettre ? Certes, Paneb n’était pas le seul responsable, puisque le tribunal aurait pu modérer la sentence ; mais aucun de ses membres n’avait décelé de circonstances atténuantes. Et comme Aperti avait quitté le village en injuriant les artisans et les femmes qu’il avait séduites, nul n’avait regretté la sévérité du jugement. Un monstre... Oui, Aperti était un monstre, mais il restait son fils, et elle ne pardonnerait pas à Paneb de l’avoir envoyé à la mort. Si le colosse avait plaidé la cause de son enfant, les jurés l’auraient écouté. — Il faut manger un peu de purée de fèves, maman... C’est moi qui l’ai préparée. Ouâbet sourit. — Je n’ai pas faim, chérie. — Fais un effort... Tu veux bien, dis ? La malade céda. — Toi, tu es déjà une magicienne ! Enfin une nuit sombre, grâce à la nouvelle lune et à quelques nuages ! Muni d’un ciseau, le traître sortit du village en passant par la nécropole afin d’éviter Vilaine Bête qui, selon son habitude, devait sommeiller près de la grande porte d’entrée. C’était le moment idéal pour gagner la Vallée des Reines avant la distribution des tâches que Paneb annoncerait le lendemain matin. L’expulsion d’Aperti avait à la fois réjoui et peiné les villageois. Réjoui, parce que ce garçon « au mauvais fond », selon l’expression de Niout la Vigoureuse, aurait fini par nuire gravement à la confrérie ; peiné, parce que Paneb et son épouse étaient atteints dans leur chair. Mais chacun avait apprécié la rigueur du maître d’œuvre qui avait su oublier qu’Aperti était son fils pour - 255 -

décision équivalait à une condamnation à mort. N’étant plus<br />

membre <strong>de</strong> la confrérie, Aperti serait jugé pour viol comme<br />

n’importe quel criminel, et la peine capitale serait prononcée contre<br />

lui.<br />

Jamais Ouâbet n’avait pensé que son mari serait aussi sévère.<br />

Mais il était aussi le maître d’œuvre et il avait choisi la voie <strong>de</strong> sa<br />

fonction et non celle du père... Comment la mère d’Aperti pouvaitelle<br />

l’admettre ? Certes, Paneb n’était pas le seul responsable,<br />

puisque le tribunal aurait pu modérer la sentence ; mais aucun <strong>de</strong><br />

ses membres n’avait décelé <strong>de</strong> circonstances atténuantes. Et comme<br />

Aperti avait quitté le village en injuriant les artisans et les femmes<br />

qu’il avait séduites, nul n’avait regretté la sévérité du jugement.<br />

Un monstre... Oui, Aperti était un monstre, mais il restait son<br />

fils, et elle ne pardonnerait pas à Paneb <strong>de</strong> l’avoir envoyé à la mort.<br />

Si le colosse avait plaidé la cause <strong>de</strong> son enfant, les jurés l’auraient<br />

écouté.<br />

— Il faut manger un peu <strong>de</strong> purée <strong>de</strong> fèves, maman... C’est moi<br />

qui l’ai préparée.<br />

Ouâbet sourit.<br />

— Je n’ai pas faim, chérie.<br />

— Fais un effort... Tu veux bien, dis ?<br />

<strong>La</strong> mala<strong>de</strong> céda.<br />

— Toi, tu es déjà une magicienne !<br />

Enfin une nuit sombre, grâce à la nouvelle lune et à quelques<br />

nuages ! Muni d’un ciseau, le traître sortit du village en passant par<br />

la nécropole afin d’éviter Vilaine Bête qui, selon son habitu<strong>de</strong>,<br />

<strong>de</strong>vait sommeiller près <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> porte d’entrée.<br />

C’était le moment idéal pour gagner la Vallée <strong>de</strong>s Reines avant<br />

la distribution <strong>de</strong>s tâches que Paneb annoncerait le len<strong>de</strong>main<br />

matin. L’expulsion d’Aperti avait à la fois réjoui et peiné les<br />

villageois. Réjoui, parce que ce garçon « au mauvais fond », selon<br />

l’expression <strong>de</strong> Niout la Vigoureuse, aurait fini par nuire gravement<br />

à la confrérie ; peiné, parce que Paneb et son épouse étaient atteints<br />

dans leur chair. Mais chacun avait apprécié la rigueur du maître<br />

d’œuvre qui avait su oublier qu’Aperti était son fils pour<br />

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