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Les yeux jaunes des crocodiles

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Elle rangea ses affaires, son livre de comptes, son crayon,<br />

son Bic rouge. Resta encore un instant pensive, à suçoter le<br />

capuchon du Bic, puis se leva, enfila un manteau et rejoignit<br />

Shirley.<br />

Shirley l’attendait sur le palier en tapant du pied. Son fils<br />

Gary se tenait debout dans l’embrasure de la porte. Il fit un<br />

signe de la main à Jo puis referma la porte. Joséphine étouffa<br />

une exclamation de surprise qui n’échappa pas à Shirley.<br />

— Qu’est-ce que tu as ? Tu as vu un fantôme ?<br />

— Non mais Gary… je viens de le voir en homme, l’homme<br />

qu’il sera dans quelques années. Qu’est-ce qu’il est beau !<br />

— Oui, je sais, les femmes commencent à le reluquer.<br />

— Il le sait ?<br />

— Non ! Et c’est pas moi qui vais le lui dire… J’ai pas envie<br />

qu’il soit imbibé de sa personne.<br />

— Imbu de sa personne, Shirley, pas imbibé.<br />

Shirley haussa les épaules. Elle avait empilé les cagettes où<br />

reposaient, enveloppés dans <strong>des</strong> linges blancs, les gâteaux<br />

qu’elle devait livrer.<br />

— Dis-moi… Le père devait être pas mal ?<br />

— Le père était l’homme le plus beau du monde… C’était sa<br />

principale qualité, d’ailleurs !<br />

Elle fronça les sourcils et balaya l’air de la main comme si<br />

elle chassait un mauvais souvenir.<br />

— Bon, alors… Comment fait-on ?<br />

— Comme tu veux… C’est toi qui sais, c’est toi qui déci<strong>des</strong>.<br />

Joséphine la laissa échafauder un plan.<br />

— On <strong>des</strong>cend tout en bas, tu gar<strong>des</strong> les gâteaux pendant que<br />

je vais chercher la voiture, on charge et hop ! c’est parti…<br />

Appelle l’ascenseur et bloque la porte.<br />

— Il vient avec nous, Gary ?<br />

— Non. Son prof de français est malade, il est tout le temps<br />

malade… Plutôt que de rester à l’étude, il rentre à la maison et<br />

lit Nietzsche ! Y en a qui ont <strong>des</strong> ados boutonneux, moi j’ai un<br />

intello ! Allez ! On perd du temps à bavarder, move on !<br />

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