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Les yeux jaunes des crocodiles

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virus dangereux. Avait-il fallu qu’elle fût aux abois pour épouser<br />

un homme aussi fruste ! Et il se portait comme un chêne, en<br />

plus. Cette vigueur la rendait de plus en plus irritable. Parfois<br />

elle était si énervée de le voir jovial et puissant qu’elle n’arrivait<br />

plus à respirer et avait <strong>des</strong> palpitations. Elle prenait <strong>des</strong><br />

comprimés pour se détendre. Combien de temps vais-je devoir<br />

encore le supporter ? Elle poussa un long soupir et préféra<br />

concentrer son attention sur sa fille qui, appuyée contre la<br />

fenêtre, contemplait le balancement <strong>des</strong> arbres alors qu’une<br />

faible brise s’était levée, répandant enfin un peu d’air frais sur<br />

cette soirée.<br />

— Viens par ici, ma chérie, que nous parlions toutes les deux,<br />

lui dit-elle en l’entraînant vers un canapé, au fond du salon.<br />

Iris vint aussitôt les rejoindre.<br />

— Alors… Joséphine, attaqua Henriette Grobz, que comptestu<br />

faire maintenant ?<br />

— Continuer…, répondit Joséphine, butée.<br />

— Continuer ? demanda Henriette Grobz, surprise.<br />

Continuer quoi ?<br />

— Eh bien… euh… Continuer ma vie…<br />

— Sérieusement, chérie…<br />

Quand sa mère l’appelait « chérie », l’heure était grave. La<br />

pitié, le sermon, la con<strong>des</strong>cendance allaient se succéder comme<br />

les couplets d’une rengaine éculée.<br />

— Enfin… Ça ne te regarde pas ! balbutia-t-elle. C’est mon<br />

problème.<br />

Joséphine avait donné à cette réponse, trop rapide pour<br />

qu’elle la maîtrise, un ton agressif auquel n’était pas habituée<br />

l’auteur de ses jours qui se rembrunit aussitôt.<br />

— En voilà une façon de me répondre ! répliqua Henriette<br />

Grobz, piquée.<br />

— Qu’as-tu décidé ? reprit Iris de sa voix douce et<br />

enveloppante.<br />

— De m’en sortir… et toute seule, répondit Joséphine d’une<br />

façon plus brusque qu’elle n’aurait voulu.<br />

— Ah ! C’est vraiment ingrat de refuser l’aide qu’on te<br />

propose, dit Henriette Grobz, pincée.<br />

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