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Les yeux jaunes des crocodiles

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Philippe demanda deux cafés avec deux grands verres d’eau.<br />

Joséphine acquiesça. Puis il commença son récit.<br />

— C’était il y a environ vingt ans, j’étais avocat depuis peu,<br />

j’avais déjà travaillé deux ou trois ans en France et je faisais un<br />

stage chez Dorman et Steller à New York, au département <strong>des</strong><br />

droits d’auteur. Je n’étais pas peu fier, je peux te l’assurer ! Un<br />

jour, j’ai reçu un coup de fil d’un dirigeant de studio de cinéma<br />

américain, dont je tairai le nom, qui avait un dossier très<br />

embêtant sur les bras et qui pensait que ça pouvait<br />

m’intéresser : cela concernait une jeune Française. J’ai demandé<br />

de quoi il s’agissait et voilà ce qu’il m’a expliqué… Il y avait eu<br />

un travail collectif réalisé par les étudiants de dernière année de<br />

creative writing à l’université de Columbia, département<br />

cinéma. Un scénario écrit à plusieurs, récompensé à la fin de<br />

l’année par le staff enseignant de Columbia comme étant le<br />

scénario le plus original, le plus brillant, le plus achevé de tous<br />

ceux produits par les étudiants. Ce scénario avait été mis en<br />

scène ensuite par un certain Gabor Minar. Il en avait fait un<br />

moyen-métrage d’une trentaine de minutes, financé par<br />

l’université de Columbia, qui lui valut les félicitations de ses<br />

professeurs et lui permit par la suite de trouver <strong>des</strong> contrats<br />

pour <strong>des</strong> projets plus ambitieux. Ce film fut, comme il est<br />

d’usage, montré dans le circuit universitaire et, chaque fois, il<br />

remporta un prix. Or il se trouvait qu’Iris était étudiante dans le<br />

même groupe que Gabor et qu’elle avait participé à l’écriture du<br />

scénario. Jusque-là, rien de gênant. C’est après que ça se gâte…<br />

Iris remania le scénario, changea deux ou trois détails dans<br />

l’histoire, en fit une version longue qu’elle présenta à un studio<br />

de Hollywood, le studio où travaillait l’homme qui m’appelait,<br />

comme un projet original. Le studio, enchanté par l’histoire, lui<br />

signa sur-le-champ un contrat de scénariste pour sept ans. Avec<br />

beaucoup, beaucoup de zéros. C’était une première, un coup<br />

d’éclat, et on en parla dans la presse spécialisée.<br />

— Je me souviens, on ne parlait aussi que de ça à la maison.<br />

Ma mère ne touchait plus terre.<br />

— Et pour cause ! C’était la première fois qu’une élève<br />

fraîchement sortie de l’université se voyait proposer un tel<br />

contrat. Tout se serait très bien passé si une étudiante qui avait<br />

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