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Les yeux jaunes des crocodiles

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— She knocks me down too ! balbutia Gary. C’est la première<br />

fois que je vois ça à la télé. Je veux dire pas dans un film parce<br />

que le coup de Jeanne d’Arc, je l’ai déjà vu mais bon, c’était une<br />

actrice et elle avait une perruque.<br />

— Tu veux dire qu’elle a plus de cheveux pour de bon ?<br />

s’écria Zoé, au bord <strong>des</strong> larmes.<br />

— À mon avis, non !<br />

Zoé regarda sa mère qui n’avait rien dit.<br />

— Mais c’est horrible, maman, c’est horrible. J’écrirai jamais<br />

de livre, moi, et j’irai jamais à la télé !<br />

— Tu as raison, c’est horrible…, parvint à dire Joséphine<br />

avant de se précipiter dans les toilettes de Shirley pour vomir.<br />

— Fin du film et suite au prochain numéro ! lança Shirley en<br />

éteignant la télé. Car, à mon avis, ça ne fait que commencer.<br />

Ils entendirent la chasse d’eau se déclencher dans les<br />

toilettes et Joséphine revint, livide, en s’essuyant la bouche du<br />

revers de la main.<br />

— Pourquoi elle est malade, maman ? chuchota Zoé à<br />

Shirley.<br />

— C’est de voir ta tante se conduire comme ça ! Allez, vous<br />

mettez la table et je sors mon poulet de grain qui doit être en<br />

train de rissoler au four. Encore heureux qu’elle soit passée la<br />

première sinon il aurait été carbonisé.<br />

Gary se leva le premier et ce fut un mètre quatre-vingt-douze<br />

qui se déplia d’un seul coup. Joséphine n’arrivait pas à<br />

s’habituer. Elle ne l’avait pas reconnu quand il était revenu en<br />

septembre. Elle l’avait aperçu de dos dans le hall de l’immeuble<br />

et avait pensé que c’était un nouveau locataire. Il avait encore<br />

grandi et dépassait sa mère d’une tête et demie. Il avait forci<br />

aussi. Ses épaules semblaient à l’étroit dans sa chemise à<br />

carreaux ouverte sur un tee-shirt noir où on pouvait lire « Fuck<br />

Bush ». Il n’avait plus rien de l’adolescent qu’elle avait quitté<br />

début juillet. Ses cheveux noirs mi-longs encadraient son visage<br />

et soulignaient le vert de ses <strong>yeux</strong>, ses dents blanches et bien<br />

alignées. Une barbe légère marquait son menton. Sa voix avait<br />

mué. Presque dix-sept ans ! Il était devenu un homme mais<br />

conservait encore, par moments, la grâce maladroite de<br />

l’adolescent qui surgissait dans un sourire, une manière<br />

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