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Les yeux jaunes des crocodiles

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parce que tu as fait un beau mariage, qu’elle parade en parlant<br />

de son gendre merveilleux, de ton grand appartement, de tes<br />

amis, de ton train de vie mais moi… elle me méprise.<br />

— Jo, ça fait près de huit mois que tu ne l’as pas vue. Imagine<br />

qu’il lui arrive quelque chose… C’est ta mère tout de même !<br />

— Il ne lui arrivera rien : la méchanceté conserve ! Papa est<br />

mort à quarante ans d’une crise cardiaque, elle, elle finira<br />

centenaire.<br />

— Là, tu es carrément méchante.<br />

— Non, pas méchante, vivante ! Depuis que je ne la vois plus,<br />

je me porte à merveille…<br />

Iris ne répondit pas. Elle jeta un regard aiguisé sur une<br />

ravissante blonde qui entrait en éclatant de rire.<br />

— Tu changes, Jo, tu changes. Tu t’endurcis… fais attention !<br />

— Dis-moi, Iris, tu ne m’as pas donné rendez-vous dans ce<br />

café porte d’Asnières pour me parler de notre mère et me faire<br />

la morale ?<br />

Iris haussa les épaules et soupira.<br />

— Je suis passée chez Chef avant de venir, Hortense était<br />

dans ses bureaux : elle cherche un stage pour le mois de juin,<br />

pour son école ; je peux te dire que les petits gars de l’entrepôt<br />

avaient le sang en ébullition. La vie s’est arrêtée quand<br />

Hortense est arrivée…<br />

— Je sais, elle fait cet effet-là à tout le monde…<br />

À l’intérieur du Café <strong>des</strong> Carrefours, Jo et Iris déjeunaient.<br />

<strong>Les</strong> camions faisaient trembler les parois vitrées de<br />

l’établissement en freinant juste avant de tourner et de se lancer<br />

sur le périphérique ; <strong>des</strong> habitués entraient en faisant battre les<br />

portes. Des jeunes, pour la plupart, qui devaient travailler dans<br />

les bureaux avoisinants. Ils arrivaient en se poussant, criaient<br />

qu’ils mouraient de faim et choisissaient le menu à dix euros,<br />

quart de vin compris. Iris avait demandé <strong>des</strong> œufs au platjambon,<br />

Joséphine une salade verte avec un yaourt.<br />

— J’ai vu Serrurier… l’éditeur, commença Iris. Il a lu… et…<br />

— Et ? souffla Joséphine, nouée d’angoisse.<br />

— Et… Il est enchanté par ton idée, enchanté par les vingt<br />

feuillets que tu m’as donnés, il m’a noyée sous les compliments<br />

et… et…<br />

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