28.06.2013 Views

Les yeux jaunes des crocodiles

Les yeux jaunes des crocodiles

Les yeux jaunes des crocodiles

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

— Parce que toi, t’es un homme ? Il est vieux, l’argument ! Il<br />

sent son petit Napoléon ! Elles ont changé les bonnes femmes,<br />

figure-toi. Elles sont comme nous, maintenant, et quand elles<br />

ont un petit Chaval bien gominé qui leur emboîte la croupe,<br />

elles se prennent un petit acompte mais ça veut rien dire du<br />

tout. C’est de la roupie de sansonnet. Elle t’a à la bonne, la<br />

Josiane ! Y a qu’à voir la gueule qu’elle déroule derrière son<br />

burlingue. Tu l’as regardée, au moins ? Non. Tu passes devant<br />

elle raide comme une saucisse avec ta fierté en visière. T’as pas<br />

vu qu’elle avait perdu du poids, qu’elle flotte dans son jersey et<br />

qu’elle a le brushing qui tète les mites ? T’as pas vu que le rose<br />

qu’elle se peinturlure, il est tout faux, elle l’achète en pack de six<br />

au Monoprix parce que sinon elle rivalise avec le bidet ?<br />

Marcel secouait la tête, obstiné et triste. Et René reprenait,<br />

mélangeait la gouaille et le sentiment, le bon sens et la raison,<br />

pour remettre sur pied son vieux copain qui menaçait de<br />

s’étrangler dans son bas nylon.<br />

Soudain il eut une idée et son œil s’alluma.<br />

— Tu me deman<strong>des</strong> même pas pourquoi je suis monté te voir<br />

alors que j’avais juré de te couper la parole ? Tu es si habitué à<br />

ce qu’on te cire les pompes que tu trouves normal que je vienne<br />

te relancer à domicile. Ma parole, tu vas finir par me vexer !<br />

Marcel le regarda, se passa la main dans la nuque et, jouant<br />

avec un stylo qui avait échappé au raz de marée sur le bureau, il<br />

demanda :<br />

— Je te demande pardon… Tu voulais me dire quelque<br />

chose ?<br />

René croisa les bras, et prenant tout son temps, annonça à<br />

Marcel que sa plus grande frousse risquait bien de devenir<br />

réalité : les Chinois avaient recopié ses ordres de travers. Ils<br />

avaient mélangé les centimètres et les pieds english !<br />

— Je viens de m’en apercevoir en détaillant les bons de<br />

commande de ton usine près de Pékin. Ils ont tout compris de<br />

travers et si tu veux empêcher le pire, faut que tu viennes voir<br />

tout de suite et que tu leur bigophones.<br />

— Nom de Dieu ! rugit Marcel. Y en a pour <strong>des</strong> milliards ! Et<br />

tu me le disais pas.<br />

- 183 -

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!