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Les yeux jaunes des crocodiles

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— Hortense, qu’est-ce que c’est que cette tenue ?<br />

— Enfin, maman… C’est un maillot de bain. Et ne crie pas si<br />

fort ! On n’est pas à la piscine de Courbevoie, ici.<br />

— Bonjour, Joséphine, articula Iris, se redressant pour<br />

s’interposer entre la mère et la fille.<br />

— Bonjour, éructa Joséphine qui revint aussitôt à sa fille.<br />

Hortense, explique-moi d’où vient ce maillot.<br />

— C’est moi qui le lui ai acheté cet été et il n’y a pas de quoi<br />

te mettre dans cet état. Hortense est ravissante…<br />

— Hortense est indécente ! Et jusqu’à nouvelle information,<br />

Hortense est ma fille et pas la tienne !<br />

— Oh là là ! Maman… ça y est ! <strong>Les</strong> grands mots.<br />

— Hortense, tu vas aller te changer immédiatement.<br />

— Il n’en est pas question ! Ce n’est pas parce que tu te<br />

caches dans un sac que je dois me déguiser en thon.<br />

Hortense affrontait sans ciller le regard ivre de colère de sa<br />

mère. Des mèches cuivrées s’échappaient de la barrette qui<br />

retenait ses cheveux et ses joues s’étaient empourprées, lui<br />

donnant un air enfantin que contredisait sa tenue de femme<br />

fatale. Joséphine ne put s’empêcher d’être touchée par la pique<br />

de sa fille et perdit toute contenance. Elle balbutia une réponse<br />

qui n’en fut pas une, tellement elle était inaudible.<br />

— Voyons, les filles, du calme, dit Iris, souriant pour<br />

détendre l’atmosphère. Ta fille a grandi, Joséphine, ce n’est plus<br />

un bébé. Je comprends que ça te fasse un choc mais tu n’y peux<br />

rien ! À moins de la coincer entre deux dictionnaires.<br />

— Je peux l’empêcher de s’exhiber comme elle le fait.<br />

— Elle est comme la plupart <strong>des</strong> filles de son âge…<br />

ravissante.<br />

Joséphine chancela et dut s’asseoir sur la chaise longue<br />

proche d’Iris. Affronter sa sœur et sa fille en même temps était<br />

au-<strong>des</strong>sus de ses forces. Elle détourna la tête pour ravaler les<br />

larmes de rage et d’impuissance qu’elle sentait monter en elle.<br />

Cela finissait toujours de la même façon quand elle s’opposait à<br />

Hortense : elle perdait la face. Elle avait peur d’elle, de son<br />

orgueil, du mépris qu’elle affichait à son endroit mais, en plus,<br />

elle devait le reconnaître, Hortense voyait souvent juste. Si elle<br />

était sortie de la cabine, fière de sa ligne, épanouie dans son<br />

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