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4 péchés givrés sarah truong-qui - Spirit Magazine

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des pierres<br />

à l’édifice<br />

La maison du docteur Guy Auriol a été conçue par l’un<br />

des architectes français les plus doués de sa génération.<br />

Fidèle à ses convictions, Edmond Lay a façonné la pierre<br />

pour construire ce repaire, abolissant les frontières entre<br />

l’intérieur et l’extérieur.<br />

Texte : Léa Daniel / Photos : arnaud Saint-Germès<br />

À<br />

la voir, enracinée dans cette lourde terre béarnaise, on pourrait croire que la maison<br />

conçue par Edmond Lay a toujours existé. Elle aurait pu naître dans un caprice tellurique<br />

ou émerger tel le dommage collatéral d’une inconstante tectonique des plaques.<br />

Pas du tout ! Malgré ses courbes revêches et sa silhouette rocheuse, cette étonnante<br />

demeure est l’œuvre d’un visionnaire. Natif de Lannemezan dans les Hautes-Pyrénées, l’homme<br />

a grandi rebelle à toute forme d’académisme. Alors qu’il étudie l’architecture aux Beaux-Arts de<br />

Paris, il est sur le point de tout abandonner, lassé par le conformisme de l’enseignement. Heureusement,<br />

il rencontre Louis Arretche. Professeur à l’atelier, celui-ci donne un nouveau souffle<br />

à ses études. Très vite, ils travaillent ensemble. Lui le salarié. Arretche, le patron à <strong>qui</strong> il doit ses<br />

premiers voyages à l’étranger. Le plus marquant l’entraîne aux États-Unis, où Lay côtoie Franck<br />

Lloyd Wright, l’un de ses pères spirituels. Ainsi élevé à une nouvelle conception de l’habitat, il<br />

poursuit ses réflexions sur un courant naissant : « l’archologie », contraction d’architecture et<br />

d’écologie. De retour en France, il fonde sa propre agence et travaille principalement dans le<br />

Sud-Ouest où il réalise le siège de la Caisse d’Épargne dans le quartier Mériadeck de Bordeaux.<br />

Un immeuble organique, presque vivant.<br />

\ La première pierre \<br />

Emballé par cet impressionnant édifice bordelais signé de la main de Lay, Guy Auriol contacte<br />

l’architecte pour le projet personnel <strong>qui</strong> l’occupe. Nous sommes en 1978, et le plan est rapidement<br />

tracé. 180 m 2 de surface habitable, un grand espace de plain-pied ouvert sur le sud et réunissant,<br />

tout à la fois, le salon, la salle à manger, un petit salon et une cuisine ouverte dont on envie les<br />

crédences rocheuses. Quand la suite parentale se love tout près d’une salle de bain privative,<br />

les chambres des enfants investissent les volumes du toit, reliées par une galerie suspendue. La<br />

pierre et le bois sont partout. À l’image des murs de façade, ils sont un savant assemblage percé<br />

de fentes, ouvert par endroit, incliné à d’autres. En regardant cet épiderme poreux, on voit à quel<br />

point l’architecte s’intéresse aux relations <strong>qui</strong> existent entre l’intérieur et l’extérieur, aux rapports <strong>qui</strong><br />

naissent entre le paysage et l’habitat, l’habitat et l’homme. « Je ne recherche qu’à exprimer ce que<br />

je ressens. Je m’intéresse à la façon dont on vit dans ce que je construis » dira-t-il de son travail.<br />

\ Le mythe de la caverne \<br />

À l’intérieur, l’ambiance est surannée. On jurerait pouvoir siroter un whisky glace avec Tony Curtis<br />

et Roger Moore, confortablement installé dans le canapé en cascade <strong>qui</strong> borde la cheminée. Avec<br />

son mobilier sixties et ses influences seventies, cette maison a des allures de reine élégante <strong>qui</strong><br />

aurait gardé sa garde-robe d’antan. Elle comporte aussi sa part de mystère, ses zones d’ombre<br />

où la nature pourrait l’emporter. C’est le cas de la salle de bain où les parois rocheuses et le sol<br />

de pierre composent un décor de caverne. Mais alors qu’on se croit perdu dans les tréfonds de la<br />

terre, l’architecte rattrape les esprits déboussolés. Il suffit de se retourner pour ne pas sombrer :<br />

une vasque sculptée, des lumières disposées autour d’un miroir comme dans une loge de star, une<br />

baignoire « naturelle » du meilleur effet. Pourquoi choisir entre nature et culture ?<br />

Pierre de carrière :<br />

Guy Auriol et Edmond Lay sont allés chercher leur matière première à Bidache, une carrière près de Bayonne.<br />

Le propriétaire se rappelle que Lay est resté pendant tout le temps du gros-œuvre, orientant les maçons<br />

comme un sculpteur installerait ses blocs pour former son œuvre. Le résultat est impressionnant.<br />

<strong>Spirit</strong> # 46 / 17

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