COSI FAN TUTTE - Opéra de Lyon

WOLFGANG AMADEUS MOZART
COSI FAN TUTTE
ossia
LA SCUOLA DEGLI AMANTI
Livret de Lorenzo Da Ponte
Dramma giocoso
en deux actes
K. 588
1790
OPERA de LYON

Illustration.
Gravure de G. Scotin d’après WATTEAU, Les Jaloux.

LIVRET
5 Fiche technique
9 L’argument
16 Les personnages
COSI FAN TUTTE
20 Atto Primo / Acte I
128 Atto Secondo/ Acte II
CAHIER de LECTURES
225 Philippe Sollers
Et tous aussi bien sûr
226 Jean & Brigitte Massin
La création de Così fan tutte :
un honnête succès
228 Sophie Weber-Haibl
Portait de Mozart à l’époque de C o s ì . . .
229 Dominique Fernandez
Da Ponte, abbé, séducteur et poète
231 Reynaldo Hahn
Une fantaisie à la Shakespeare
232 Rémy Stricker
Comique ou tragique ?
233 Goethe
Chimie des couples
234 Marivaux
La première inconstance
237 Alfred de Musset
Le cœur des femmes
238 Giorgio Strehler
La terrible légèreté
239 Alfred de Musset
Tous les hommes sont menteurs
CARNET de NOTES
Wolfgang Amadeus Mozart
242 Repères biographiques
250 Notice bibliographique
Così fan tutte
251 Discographie sélective
3

LIVRET
Le livret est le troisième écrit pour Mozart par Emanuele
Conegliano plus connu sous le nom de Lorenzo Da Po n t e
(1749-1838). Parmi les sources du livret : Les Métamorphoses
d’Ovide (histoire de Céphale et Procris) et Orlando Fu r i o s o
de L’Arioste (chant XLII et XLIII). La documentation sur la
commande et la conception de l’œuvre est quasi inexistante.
Dans ses mémoires, Lorenzo Da Ponte ne mentionne Così fan
t u t t e q u’une fois, incidemment, en évoquant Adriana Gabrielli
Del Bene, créatrice du rôle de Fiordiligi, et dont il
était amoureux.
PARTITION
La documentation manque également en ce qui concerne la
composition musicale. Mozart n’évoque l’œuvre dans sa correspondance
qu’à trois reprises, et sans jamais donner son
titre. On sait seulement que Mozart donne une audition privée
de Così fan tutte chez lui fin décembre 1789 ; et qu’ i l
assiste avec Haydn à la première répétition d’orchestre le 21
janvier 1790.
Le manuscrit de la partition est conservé à la Bibliothèque
Jagellon de Cracovie pour l’acte I et à la Deutsche Staatsbibliothek
de Berlin pour l’acte II.
5

6
PERSONNAGES
FIORDILIGI Soprano
dame de Ferrare habitant Naples
DORABELLA Soprano
dame de Ferrare habitant Naples
sœur de Fiordiligi
GUGLIELMO Baryton
amant de Fiordiligi
FERRANDO Ténor
amant de Dorabella
DESPINA Soprano
camériste
DON ALFONSO Basse
vieux philosophe
CHŒUR : soldats, serviteurs, marins
ORCHESTRE
2 flûtes
2 hautbois
2 clarinettes dont 1 cor de basset
2 bassons
2 cors
2 trompettes
Timbales
Cordes
Continuo : clavecin, violoncelle
DURÉE MOYENNE
2 heures 50

CRÉATION
26 janvier 1790 au Burgtheater de Vienne.
AvecAdriana Gabrielli Del Bene, dite Adriana Ferrarese
(Fiordiligi), Louise Villeneuve (Dorabella),
Francesco Benucci (Guglielmo), Vincenzo Calvesi
(Ferrando), Dorothea Bussani (Despina),
Francesco Bussani (Don Alfonso)
On donna cinq représentations. La mort de l’empereur
Joseph II interrompit la série. L’été suivant, l’œuvre est
reprise pour cinq représentations, puis disparaît du répertoire
viennois jusqu’en 1819.
CRÉATION en FRANCE
1 er février 1809. Création française de Così fan tutte au
Théâtre des Italiens.
L’ŒUVRE à LYON
24 février 1932. Création de Così fan tutte,
vraisemblablement dans une version en français
avec notamment Gabrielle Ritter-Ciampi dans le rôle
de Fiordiligi.
1975
Direction musicale. Theodor Guschlbauer
Mise en scène. Jean Aster
Décors, costumes. Jacques Rapp
AvecSylvia Geszty (Fiordiligi), Rosanne Creffield
(Dorabella), Peter Christoph Runge (Guglielmo),
Michael Cousins (Ferrando), Daniel Perriers (Despina),
Renato Capecchi (Don Alfonso)
1983
Direction musicale. Serge Baudo
Mise en scène. Guy Coutance
Décors, costumes. Yannis Kokkos
AvecMichèle Lagrange (Fiordiligi), Magali Damonte
7

8
(Dorabella), François Le Roux (Guglielmo), Léonard
Pezzino (Ferrando), Rosemary Musoleno / Colette Alliot-
Lugaz (Despina), Pierre-Yves le Maigat (Don Alfonso)
1984
Direction musicale. John Eliot Gardiner
En concert
AvecPamela Coburn (Fiordiligi), Diane Montague
(Dorabella), Gilles Cachemaille (Guglielmo),
Manfred Fink (Ferrando), Colette Alliot-Lugaz (Despina),
Gabriel Bacquier (Don Alfonso)
1996
Direction musicale. Neville Marriner / Laurent Pillot
Mise en scène. Denis Llorca
Décors. Jean-Paul Moye
Costumes. Mine Barral-Vergez
AvecRossella Ragatzu (Fiordiligi), Monica Bacelli
(Dorabella), Ludovic Tézier / Christophe Lacassage
(Guglielmo), Kurt Streit / Gunnar Gudbjörnsson
(Ferrando), Virginie Pochon / Stéphanie Morales,
(Despina), José van Dam / Jean-Marie Frémeau
(Don Alfonso)
2001
Direction musicale. Sylvain Cambreling
Mise en scène. Stefan Bachmann
Décors. Hugo Gretler
Costumes. Annabelle Witt
AvecAnja Harteros (Fiordiligi), Claudia Mahnke
(Dorabella), Stéphane Degout (Guglielmo), Yann Beuron
(Ferrando), Catherine Dubosc (Despina),
Gilles Cachemaille (Don Alfonso)

PREMIER ACTE
SCÈNE 1
Dans un café, DO N AL F O N S O « vieux philosophes », et
deux de ses jeunes amis – FERRANDO et GUGLIELMO – ont
une dispute. Le thème : la fidélité des femmes, et en particulier
celle de Fiordiligi – l’amante de Guglielmo – et
de Dorabella – amante de Ferrando. Les deux jeunes gens
n’en doutent aucunement. DO N AL F O N S O n’y croit pas et
prend le pari d’apporter la preuve de ce qu’il avance. Pari
tenu. FE R R A N D O et GU G L I E L M O devront suivre en tout la
mise en scène que réalisera AL F O N S O pour appuyer sa
démonstration. Sûrs de gagner, ils se réjouissent de la fête
qu’ils donneront avec l’argent gagné.
SCÈNE 2
Dans leur jardin du bord de mer, FI O R D I L I G I et sa sœur
DORABELLA rêvent de mariage, contemplent le portrait de
leurs amants, en attendant leur arrivée.
SCÈNE 3
Mais c’est DON ALFONSO qui vient, décomposé, porteur de
nouvelles funestes : FERRANDO et GUGLIELMO doivent partir
pour la guerre.
SCÈNE 4
Avant de partir, les amants viennent dire adieu. Ad i e u x
déchirants. DO N AL F O N S O est ravi, ses deux amis jouent
leur rôle à la perfection.
9

10
On entend le tambour, le départ est proche. Les deux
femmes sont au bord de l’évanouissement.
SCÈNE 5
Dernières promesses – s’écrire tous les jours et même
deux fois par jour – désespoir des amantes, rire retenu de
DON ALFONSO, et les deux fiancés s’en vont.
SCÈNE 6
Leur faisant signe de la main, FI O R D I L I G I, DO R A B E L L A e t
DON ALFONSO leur disent adieu et demandent aux vents et
à la mer de leur être favorables.
SCÈNE 7
Seul, Don Alfonso plaint ses deux amis d’avoir parié cent
sequins sur la fidélité des femmes : autant labourer la
mer et semer dans le désert, s’exclame-t-il.
SCÈNE 8
DESPINA, camériste de FIORDILIGI et DORABELLA, leur prépare
un chocolat chaud ; elle se plaint de son métier
ingrat, mais trouve une compensation en goûtant le
savoureux breuvage.
SCÈNE 9
Elle est interrompue dans sa dégustation par l’entrée en
trombe de ses maîtresses, folles de désespoir. Après
avoir appris de leur bouche la raison de leur anéantissement,
DE S P I N A tente de les stimuler et leur donne en
riant sa vision des choses : les hommes sont inconstants,
il faut agir comme eux et ne prendre l’amour que
pour le plaisir.
SCÈNE 10
Craignant l’esprit rusé de DESPINA, DON ALFONSO décide
de la mettre de son côté dans la machination et, en partie,
dans la confidence. Contre promesse d’argent, il s’attache
son assistance pour introduire auprès de ses maîtresses
deux de ses amis, hommes charmants, qui pourraient les
consoler de l’absence de leurs amants...

SCÈNE 11
Il lui les présente sans attendre : il s’agit de FERRANDO et
GUGLIELMO déguisés et méconnaissables. Même cette fine
mouche de DESPINA ne les reconnaît pas, ce qui rassure
les trois compères sur la suite des opérations. Les présentations
sont interrompues par l’arrivée de FI O R D I L I G I e t
DO R A B E L L A. DO N AL F O N S O se cache. Les deux femmes
sont furieuses que DE S P I N A ait introduit deux hommes
chez elles, en ce jour funeste. Leur fureur ravit les deux
amants déguisés mais, pour DE S P I N A et AL F O N S O e l l e
paraît trop excessive pour être honnête.
Sortant de sa cachette et feignant d’arriver, DO N
AL F O N S O s’étonne du vacarme. Alors que deux femmes
lui expliquent la situation, il joue la surprise et la
r e c o n n a i s s a n c e : ces deux étrangers sont en fait deux
de ses très chers amis, qu’il recommande chaleureusement
aux deux esseulées. FE R R A N D O et GU G L I E L M O Co mmencent
alors leurs tentatives de séduction. En vain :
DO R A B E L L A et FI O R D I L I G I, outrées, restent de marbre. Le
plaidoyer que fait GU G L I E L M O pour lui et son ami – vantant
leur bel aspect – achève d’effaroucher les belles
qui quittent la place.
SCÈNE 12
Riant à gorge déployée, GUGLIELMO et FERRANDO croient
avoir gagné leur pari. AL F O N S O demeure sceptique. Po u r
lui, l’expérience n’est pas terminée.
SCÈNE 13
Mais, resté seul, il doute : ces deux-là seraient-elles des
exc e p t i o n s ? DE S P I N A lui rappelle son efficacité et lui
garantit la réussite de la machination.
SCÈNE 14
FI O R D I L I G I et DO R A B E L L A se lamentent sur leur destin et
leur nouvelle solitude.
SCÈNE 15
On entend soudain de terribles cris : par désespoir
d’amour, les deux jeunes étrangers se sont empoisonnés.
Panique des deux femmes. DESPINA et DON ALFONSO vont
11

12
chercher un médecin. Restées seul avec les prétendus
mourants, elles s’adoucissent un peu ; et DO R A B E L L A
découvre que leurs visages ne sont pas désagréables...
SCÈNE 16
Le médecin – DE S P I N A déguisée – arrive. Il n’a aucun
mal, bien sûr, à être efficace : les deux étrangers, sortant
de leur faux évanouissement, reprennent leur entreprise
de séduction – GUGLIELMO se concentrant sur DORABELLA,
FERRANDO sur FIORDILIGI – et vont jusqu’à demander un
b a i s e r. FI O R D I L I G I et DO R A B E L L A redoublent de fureur ;
une colère que DESPINA et DON ALFONSO sont sûrs de voir
se transformer en amour ; une colère que FE R R A N D O e t
GUGLIELMO craignent de voir se transformer en amour.
ACTE DEUX
SCÈNE 1
Pour la deuxième fois, DE S P I N A fait la leçon à ses maît
r e s s e s : il faut jouir de la vie, saisir les occasions,
« traiter l’amour en bagatelle », bref répondre aux
avances de ces oiseaux de passage.
SCÈNE 2
Les deux sœurs commencent à être sensibles à cette philosophie.
Surtout DO R A B E L L A, qui a déjà choisi celui
qu’elle veut : le brun, c’est-à-dire GUGLIELMO, c’est-à-dire
l’amant de FIORDILIGI, à qui le blond – FERRANDO – va par
ailleurs très bien.
SCÈNE 3
DON ALFONSO survient, qui les invite à se rendre au jardin
où se donne un brillant spectacle.
SCÈNE 4
FIORDILIGI et DORABELLA y retrouvent les deux étrangers,
qui leur ont préparé sérénade, fleurs, etc. Pour les aider à
surmonter leur timidité, DON ALFONSO et DESPINA rapprochent
les couples qu’ils laissent ensuite seuls, sûrs qu’à
présent, elles vont craquer.

SCÈNE 5
Encore intimidés, les deux nouveaux couples se promènent.
FI O R D I L I G I et FE R R A N D O s’éloignent.
GU G L I E L M O et DO R A B E L L A restent en scène. Après
quelques réticences, DO R A B E L L A tombe sous le charme
de son partenaire. Il lui offre un pendentif en forme de
c œ u r, elle l’accepte ; en échange, il lui subtilise le
portrait de FE R R A N D O q u’elle porte en médaillon. To u s
deux chantent leur amour tout neuf.
SCÈNE 6
FE R R A N D O a beaucoup plus de mal à convaincre
FI O R D I L I G I. Néanmoins, le regard et les soupirs de la
jeune femme le convainquent qu’elle est amoureuse.
SCÈNE 7
Restée seule, FI O R D I L I G I laisse parler son trouble : « J e
brûle, et mon ardeur n’est plus l’effet d’un amour vertueux.
» Déjà coupable à ses yeux, elle se promet de faire
taire son désir.
SCÈNE 8
FERRANDO très joyeux annonce à son ami que FIORDILIGI
n’a pas cédé, ne doutant pas d’autre part de la fidélité de
DORABELLA. GUGLIELMO le détrompe avec précaution, puis
lui montre le médaillon, comme une pièce à conviction.
SCÈNE 9
FE R R A N D O exprime sa colère et sa souffrance. Po u r t a n t ,
même trahi par elle, il aime encore DO R A B E L L A, faisant
ainsi l’admiration ironique de DON ALFONSO. Le pari est à
moitié gagné et DON ALFONSO est prêt à payer cinquante
sequins à GUGLIELMO. Mais auparavant, il veut faire une
autre expérience. L’épreuve n’est pas finie...
SCÈNE 10
Alors qu’en compagnie de DESPINA, DORABELLA se réjouit
d’avoir cédé, FI O R D I L I G I est horrifiée d’avoir découvert
q u’elle pouvait aimer deux personnes à la fois.
DORABELLA lui conseille de faire comme elle : se laisser
guider par l’amour.
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14
SCÈNE 11
Pour se mettre définitivement hors de portée de la tentation,
FI O R D I L I G I a une idée. Elle demande à DE S P I N A d e
lui apporter deux épées et deux uniformes laissés dans la
maison par leurs amants.
SCÈNE 12
L’idée de FIORDILIGI est de se vêtir en soldat et, avec sa
sœur, de rejoindre les amants partis. Mais, dans ses préparatifs,
elle est surprise par FERRANDO, en plein désespoir.
Elle ne résiste pas longtemps à ses désirs : « Fais de
moi ce que tu veux », finit-elle par lui dire.
SCÈNE 13
Caché avec DON ALFONSO, GUGLIELMO a vu toute la scène.
Il explose de colère. Pour punir les infidèles, DO N
AL F O N S O, magnanime et philosophe, conseille de les
épouser le soir même.
SCÈNE 14
Toute fière, DESPINA vient annoncer aux faux fiancés que
ses maîtresses consentent au mariage et ont déjà commandé
le notaire pour le contrat.
SCÈNE 15
Dans une salle richement illuminée, DE S P I N A veille aux
derniers préparatifs de la noce.
SCÈNE 16
UN CHŒUR accueille les quatre futurs époux. On dîne, on
chante, on trinque, on boit.
SCÈNE 17
DO N AL F O N S Oannonce l’arrivée du notaire – DE S P I N Ad é g u isée.
Les deux femmes viennent de le signer lorsqu’ o n
entend le tambour et un chœur militaire qui marque le
retour des vrais amants. FI O R D I L I G I et DO R A B E L L A s o n t
terrifiées. Vite on fait disparaître table, vaisselle, flambeaux,
etc. On cache le faux notaire dans une pièce, les fiancés
dans une autre, d’où ils sortent vite, sans être vus. DO N
AL F O N S Oessaye de calmer les angoisses des deux femmes.

DERNIÈRE SCÈNE
FE R R A N D O et GU G L I E L M O entrent, avec leurs uniformes,
tels qu’ils étaient partis. Pr é t extant le dépôt d’un coffre
dans la pièce contiguë, il y découvrent le faux notaire et
feignent l’étonnement. A leur grande admiration, DESPINA
rattrape la situation : elle se dévoile et affirme qu’ e l l e
revient d’un bal masqué.
Quant au contrat de mariage, DON ALFONSO l’a habilement
laissé traîner. Quand FERRANDO et GUGLIELMO feignent de
le découvrir, ils crient à la trahison et à la vengeance.
FI O R D I L I G Iet DO R A B E L L A avouent leur faute, mais accusent
DE S P I N A et DO N AL F O N S O de les avoir détournées du droit
chemin. DO N AL F O N S O approuve, en désignant la chambre
où sont cachés les étrangers. FE R R A N D O et GU G L I E L M O y
entrent et en ressortent, exhibant les déguisements utilisés,
s’inclinant ironiquement devant leurs amantes. GU G L I E L M O
rend son médaillon à DO R A B E L L A.
Les femmes, dupées, promettent de désormais adorer
toujours leurs hommes qui assurent qu’ils n’en demanderont
jamais la preuve.
Tous chantent la morale de l’histoire : heureux celui qui
se laisse guider par la raison, prend la vie du bon côté et
sait en rire.

16
Tout paraît clair dans le livret de Così fan tutte : trois
femmes, trois hommes ; deux amantes, deux amants, deux
m a n i p u l a t e u r s : FI O R D I L I G I et DO R A B E L L A, FE R R A N D O e t
GUGLIELMO, DON ALFONSO et DESPINA. L’opéra ressemble à la
démonstration d’un théorème, au développement d’une
épreuve – presque au sens photographique du terme.
Tout commence par un pari : Così fan tutte est un jeu, un
jeu dangereux peut-être, mais un jeu. DON ALFONSO s ’ o ppose
à ses deux amis, GU G L I E L M O et FE R R A N D O. Il est décrit
dans la partition comme un vieux philosophe. « J’ai déjà les
cheveux gris », dit-il. Il ne se définit au départ que par son
scepticisme radical sur la fidélité féminine. Ce qui l’a conduit
à ce doute, on ne le sait pas ; ce qu’ont été sa vie et son ex p érience
de l’amour est laissé à l’imagination du spectateur.
Durant toute l’œuvre, DO N AL F O N S O mène le jeu : c’est lui qui
propose le pari, qui imagine le stratagème, qui le met en
scène, qui console, magnanime, les amants ayant perdu leur
p a r i ; avant le finale, il tire la leçon philosophique de l’histoire
– « tout le monde accuse les femmes, moi je les exc u s e »
– mélange de scepticisme, de raison et d’indulgence profonde.

D E S P I N A, femme de chambre de FI O R D I L I G I et DO R A-
BELLA, est intelligente et rusée. DON ALFONSO le sait et craint
sa perspicacité. C’est pourquoi il la fait entrer dans son jeu,
et l’engage comme assistante en manipulation, sans toutefois
lui révéler l’intégralité de la machination : elle ne découvrira
q u’à la fin l’identité des deux étrangers, qu’elle contribue
avec efficacité à installer dans la maison et dans le cœur de
ses maîtresses. Dans ces deux airs, elle expose une philosophie
de l’amour symétrique à celle de DON ALFONSO : les
hommes sont infidèles, les femmes doivent les traiter en
conséquence. Ses prestations masquées – le médecin, le
notaire – lui permettent de donner toute la mesure des ses
talents de comédiennes. Mais, arroseuse arrosée, DESPINA est
dupée par le jeu de DON ALFONSO et son amertume est réelle
au moment où elle le découvre.
Les deux garçons, FERRANDO et G U G L I E L M O,
peuvent apparaître comme de simples marionnettes manipulées
par DO N AL F O N S O ; une des conditions du pari est
d’ailleurs qu’ils suivent en tout les demandes du vieux phil
o s o p h e : feindre un départ pour la guerre, revenir déguisés
en Albanais, etc. Au départ, FE R R A N D O aime DO R A B E L L A, et
GU G L I E L M O – FI O R D I L I G I ; puis, sous leur déguisement et
leur maquillage, les deux hommes changent de partenaire.
FE R R A N D O séduit FI O R D I L I G I, GU G L I E L M O séduit DO R A B E L L A.
C’est la grande idée de Così fan tutte, sans qu’on sache
vraiment, de DO N AL F O N S O, GU G L I E L M O ou FE R R A N D O, qui
l’a eue ; tout ce qu’on peut noter dans les indications scéniques,
c’est que chacun des garçons, dès les premiers
assauts, s’adresse à l’amante de l’autre. Ainsi, la démonstration
sur la fidélité amoureuse se double d’une réflex i o n
sur les intermittences du cœur, la fragilité et la volatilité
du désir. Sur le plan de la couleur et du caractères des
voix, les faux couples sont mieux appariés que les vrais :
soprano et ténor (FI O R D I L I G I et FE R R A N D O), soprano plus
sombre et baryton (DO R A B E L L A et GU G L I E L M O).
Les deux femmes, les deux sœurs, F I O R D I L I G I e t
D O R A B E L L A, paraissent à première vue les victimes de la
farce, prises en flagrant délit d’infidélité. Mais, à y regarder de
plus près, ce sont les seuls personnages sincères de la pièce,
17

18
les seules à tout ignorer du stratagème dont elles occupent la
place centrale. Victimes de la philosophie des uns, de la vanité
des autres, elles sont peut-être les seules, malgré le ridicule, à
s’en tirer avec les honneurs : victimes sans doute, marionnettes
non. En effet, FI O R D I L I G I et DO R A B E L L A suivent chacune leur
propre trajectoire, sans calcul, sans écouter d’autre voix que
celle de leur désir : de façon très simple et très rapide pour
DO R A B E L L A ; en un combat plus âpre pour FI O R D I L I G I qui ne
cède et qui ne craque qu’en toute dernière extrémité.
Mais, si les deux femmes cèdent et se révèlent
« infidèles », les hommes sont-ils vraiment irréprochables ?
Il y a, dans la scène-clé où FI O R D I L I G I – habillée en soldat
pour rejoindre son amant sur le champ de bataille (projet
aussi héroïque que celui de la Léonore de Fidelio) – finit par
répondre à l’amour de FE R R A N D O, un détail éclairant : la
jeune femme et son faux soupirant chantent, à part mais
ensemble,les paroles suivantes : « Ah che omai la mia costan -
za / A quei sguardi, a quel che dice / Incomincia a vacillar.
[Ah combien maintenant ma fidélité / A ces regards, à ses
paroles/ Commence à vaciller.] » Autrement dit, FERRANDO a
cessé de faire semblant : le jeu est devenu réalité ; lui aussi,
aime FIORDILIGI. Le livret n’en dira pas plus...
On a parfois pointé l’absurdité du livret du troisième
opéra signé par Mozart et Da Ponte. En fait, l’œuvre est un
pur jeu et si l’on accepte la convention et les codes théâtraux
– le maquillage, le déguisement – l’histoire devient lisible et
cohérente dans son déroulement. Mais avant tout, il faut
écouter le chant et la musique que Mozart a inventés pour ces
personnages et pour cette intrigue : c’est dans leurs rapports
avec le texte et l’action que peuvent s’entendre le mieux les
sens de Così fan tutte.
Jean Spenlehauer

W.A. MOZART
COSI FAN TUTTE
ossia
LA SCUOLA DEGLI AMANTI

20
MOZART DIE ZAUBERFLÖTE
ATTO PRIMO
Ouvertura
SCENA PRIMA
Bottega di caffè.
N o 1. Terzetto
FERRANDO
La mia Dorabella capace non è, capace non è:
Fedel quanto bella il cielo la fe’,
Fedel quanto bella il cielo la fe’ !
GUGLIELMO
La mia Fiordiligi tradirmi non sa, tradirmi non sa:
Uguale in lei credo costanza e beltà,
Uguale in lei credo costanza e beltà.
DON ALFONSO
Ho i crini già grigi, ex cathedra parlo;
Ma tali litigi finiscano qua,
Ma tali litigi finiscano qua!
FERRANDO E GUGLIELMO
No, detto ci avete che infide esser ponno,
Provar cel dovete, se avete onestà.

ACTE I SCÈNE 1
PREMIER ACTE
Ouverture
SCÈNE 1
Un café.
N o 1. Terzetto
FERRANDO
Ma Dorabella n’en est pas capable, n’en est pas capable :
Fidèle autant que belle le ciel la fit,
Fidèle autant que belle le ciel la fit !
GUGLIELMO
Ma Fiordiligi ne saurait me trahir, ne saurait me trahir :
En elle je crois égales constance et beauté,
En elle je crois égales constance et beauté.
DON ALFONSO
J’ai déjà les cheveux gris, je parle d’expérience;
Mais que ces querelles s’arrêtent là,
Mais que ces querelles s’arrêtent là !
FERRANDO & GUGLIELMO
Non, vous avez dit qu’elles pouvaient être infidèles,
Vous devez le prouvez, si vous êtes honnête.
21

22
DON ALFONSO
Tai prove lasciamo...
FERRANDO E GUGLIELMO (Metton mano alla spada)
No, no, le vogliamo:
O, fuori la spada, o fuori la spada
O fuori la spada, rompiam l’amistà.
DON ALFONSO (a parte)
O pazzo desire!
FERRANDO E GUGLIELMO (a parte)
Sul vivo mi tocca,
DON ALFONSO (a parte)
O pazzo desire!
FERRANDO E GUGLIELMO (a parte)
Sul vivo mi tocca,
Chi lascia di bocca sortire un accento
Che torto le fa, che torto le fa...
DON ALFONSO
Cercar di scoprire
Quel mal che trovato,
Meschini, meschini ci fa...
MOZARTCOSI FAN TUTTE
Recitativo
GUGLIELMO
Fuor la spada : scegliete qual di noi più vi piace.
DON ALFONSO (placido)
Io son uomo di pace, e duelli non fo se non a mensa.
FERRANDO
O battervi, o dir subito perché d’infedeltà le nostre amanti
sospettate capaci!
DON ALFONSO
Cara semplicità, quanto mi piaci!

DON ALFONSO
Laissons de telles preuves...
FERRANDO & GUGLIELMO (mettant la main à l’épée)
Non, non, nous le voulons :
Ou tirons l’épée, ou tirons l’épée
Ou tirons l’épée, rompons notre amitié.
DON ALFONSO (à part)
O désir insensé !
FERRANDO & GUGLIELMO (à part)
Il me touche au vif,
DON ALFONSO (à part)
O désir insensé...
ACTE I SCÈNE 1
FERRANDO & GUGLIELMO (à part)
Il me touche au vif,
Qui laisse sortir de sa bouche un mot
Qui lui fait du tort, qui lui fait du tort...
DON ALFONSO
... Que de chercher à découvrir
Ce mal qui, une fois trouvé,
Nous fait mal, nous fait mal...
Récitatif
GUGLIELMO
En garde : choisissez entre nous, comme il vous plaira.
DON ALFONSO (calme)
Je suis un homme de paix : pas de duel, sauf à table.
FERRANDO
Ou vous vous battez, ou vous dites immédiatement pourquoi
vous soupçonnez nos amantes de pouvoir être infidèles.
DON ALFONSO
Chère innocence, comme tu me plais !
23

24
FERRANDO
Cessate di scherzar, o giuro al cielo!...
DON ALFONSO
Ed io, giuro alla terra, non scherzo, amici miei; solo saper
vorrei che razza di animali son queste vostre belle, se han
come tutti noi carne, ossa e pelle, se mangian come noi,
se veston gonne, alfin, se dee, se donne son...
FERRANDO E GUGLIELMO
Son donne : ma... son tali, son tali...
DON ALFONSO
E in donne pretendete di trovar fedeltà? Quanto mi piaci
mai, semplicità!
N o 2. Terzetto
DON ALFONSO (scherzando)
E’ la fede delle femmine come l’araba fenice:
Che vi sia ciascun lo dice, ciascun lo dice
Dove sia, dove sia, nessun lo sa.
FERRANDO (con fuoco)
La fenice è Dorabella!
GUGLIELMO
La fenice è Fiordiligi!
FERRANDO
Dorabella!
GUGLIELMO
Fiordiligi!
FERRANDO
La fenice è Dorabella!
GUGLIELMO
La fenice è Fiordiligi!
MOZART COSI FAN TUTTE

FERRANDO
Cessez de plaisanter, ou jurez par le ciel !...
DON ALFONSO
Et moi, je jure par la terre, je ne plaisante pas mes amis ;
seulement, je voudrais savoir à quelle race d’animaux
appartiennent vos belles, si elles ont comme nous tous chair,
os et peau, si elles mangent comme nous, si elle portent des
jupes, enfin si elles sont déesses, si elles sont femmes...
FERRANDO & GUGLIELMO
Elles sont femmes : mais... elle sont tellement, tellement...
DON ALFONSO
Et dans des femmes vous prétendez trouvez de la
fidélité ? Comme tu me plais vraiment, innocence !
N o 2. Terzetto
DON ALFONSO (plaisantant)
La fidélité des femmes est comme le phénix arabe :
Chacun dit qu’il existe, chacun le dit
Où il est, où il est, personne ne le sait.
FERRANDO (avec flamme)
Le phénix, c’est Dorabella !
GUGLIELMO
Le phénix, c’est Fiordiligi !
FERRANDO
Dorabella !
GUGLIELMO
Fiordiligi !
ACTE I SCÈNE 1
FERRANDO
Le phénix, c’est Dorabella !
GUGLIELMO
Le phénix, c’est Fiordiligi !
25

26
DON ALFONSO
Non è questa, non è quella, non fu mai, non vi sarà,
Non vi sarà, non vi sarà.
E’ la fede delle femmine
Come l’araba fenice...
FERRANDO
La fenice è Dorabella! Dorabelle è la fenice!
GUGLIELMO
La fenice è Fiordiligi! Fiordiligi è la fenice!
DON ALFONSO
... Che vi sia, ciascun lo dice...
FERRANDO
Dorabella!
GUGLIELMO
Fiordiligi!
DON ALFONSO
Dove sia...
GUGLIELMO
Fiordiligi!
DON ALFONSO
Dove sia...
FERRANDO
Dorabella!
DON ALFONSO
... Nessun lo sa.
FERRANDO
Dorabella!
GUGLIELMO
Fiordiligi!
MOZARTCOSI FAN TUTTE

DON ALFONSO
Ce n’est pas celle-ci, ce n’est pas celle-là, il n’en fut
jamais, il n’en sera pas,
Il n’en sera pas, il n’en sera pas.
La fidélité des femmes est
Comme le phénix arabe...
FERRANDO
Le phénix c’est Dorabella ! Dorabella est le phénix !
GUGLIELMO
Le phénix c’est Fiordiligi ! Fiordiligi c’est le phénix !
DON ALFONSO
... Qu’il existe, chacun le dit...
FERRANDO
Dorabella !
GUGLIELMO
Fiordiligi !
DON ALFONSO
Où il est...
GUGLIELMO
Fiordiligi !
DON ALFONSO
Où il est...
FERRANDO
Dorabella !
DON ALFONSO
... Personne ne le sait.
FERRANDO
Dorabella !
GUGLIELMO
Fiordiligi !
ACTE I SCÈNE 1
27

28
DON ALFONSO
Nessun lo sa.
FERRANDO
Scioccherie di poeti!
GUGLIELMO
Scempiaggini di vecchi!
Recitativo
DON ALFONSO
Orbene, udite: ma senza andare in collera.
Qual prova avete voi, che ognor costanti vi sien
le vostre amanti?
Chi vi fe’ sicurtà che invariabili sono i lor cori?
FERRANDO
Lunga esperienza...
GUGLIELMO
Nobil educazion...
FERRANDO
Pensar sublime...
GUGLIELMO
Analogia d’umor...
FERRANDO
Disinteresse...
GUGLIELMO
Immutabil carattere...
FERRANDO
Promesse...
GUGLIELMO
Proteste...
MOZARTCOSI FAN TUTTE

DON ALFONSO
Personne ne le sait.
FERRANDO
Fariboles de poètes !
GUGLIELMO
Balivernes de vieillards !
Récitatif
DON ALFONSO
Eh bien, écoutez : mais sans vous mettre en colère.
Quelle preuve avez-vous que vos amantes vous seront
toujours fidèles ?
Qui vous fait si certains que leurs cœurs seront toujours
constants ?
FERRANDO
Une longue expérience...
GUGLIELMO
Une noble éducation...
FERRANDO
Pensée sublime...
GUGLIELMO
Affinité...
FERRANDO
Abnégation...
GUGLIELMO
Humeur égale...
FERRANDO
Promesses...
GUGLIELMO
Protestations...
ACTE I SCÈNE 1
29

30
FERRANDO
Giuramenti...
DON ALFONSO
Pianti, sospir, carezze, svenimenti. Lasciatemi un po’ ridere...
FERRANDO
Cospetto! Finite di deriderci?
DON ALFONSO
Pian piano: e se toccar con mano oggi vi fo che come
l’altre sono?
GUGLIELMO
Non si può dar.
FERRANDO
Non è.
DON ALFONSO
Giochiam.
FERRANDO
Giochiamo.
DON ALFONSO
Cento zecchini.
GUGLIELMO
E mille se volete.
DON ALFONSO
Parola...
FERRANDO
Parolissima.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DON ALFONSO
E un cenno, un motto, un gesto giurate di non far di tutto
questo alle vostre Penelopi.

FERRANDO
Serments...
DON ALFONSO
Pleurs, soupirs, caresses, pâmoisons. Laissez-moi rire
un peu...
FERRANDO
Parbleu ! Arrêtez de vous moquer !
DON ALFONSO
D o u c e m e n t : et si aujourd’hui, je vous fais toucher du
doigt qu’elle sont comme les autres ?
GUGLIELMO
Vous ne le pourrez pas.
FERRANDO
Pas possible.
DON ALFONSO
Parions.
FERRANDO
Parions.
DON ALFONSO
Cent sequins.
GUGLIELMO
Et mille si vous voulez.
DON ALFONSO
Parole...
FERRANDO
Parole absolue.
ACTE I SCÈNE 1
DON ALFONSO
Et signe, mot, geste, vous jurez de n’en n’avoir aucun pour
vos Pénélopes.
31

32
FERRANDO
Giuriamo.
DON ALFONSO
Da soldati d’onore?
GUGLIELMO
Da soldati d’onore.
DON ALFONSO
E tutto quel farete ch’io vi dirò di far?
FERRANDO
Tutto!
GUGLIELMO
Tuttissimo!
DON ALFONSO
Bravissimi!
FERRANDO E GUGLIELMO
Bravissimo, Signor Don Alfonsetto!
FERRANDO
A spese vostre or ci divertiremo.
GUGLIELMO (a Ferrando)
E de’ cento zecchini, che faremo?
N o 3. Terzetto
FERRANDO
Una bella serenata far io voglio alla mia dea,
Far io voglio, far io voglio alla mia dea.
GUGLIELMO
In onor di Citerea un convito io voglio far.
In onor di Citerea un convito io voglio far.
DON ALFONSO
Sarò anch’io de’ convitati?
MOZARTCOSI FAN TUTTE

FERRANDO
Nous jurons.
DON ALFONSO
Sur l’honneur des soldats ?
GUGLIELMO
Honneur de soldats.
DON ALFONSO
Et que vous ferez tout ce que je vous dirai de faire ?
FERRANDO
Tout !
GUGLIELMO
Vraiment tout !
DON ALFONSO
Bravissimi !
FERRANDO & GUGLIELMO
Bravissimo, Monsieur Don Alfonsetto!
FERRANDO
A vos dépens alors, nous nous divertirons.
GUGLIELMO (a Ferrando)
Et avec cent sequins, que ferons-nous ?
N o 3. Terzetto
FERRANDO
Une belle sérénade je veux donner à ma déesse,
Je veux donner, je veux donner à ma déesse.
GUGLIELMO
En l’honneur de Vénus, je veux donner un festin.
En l’honneur de Vénus, je veux donner un festin.
DON ALFONSO
Serai-je convié aussi ?
ACTE I SCÈNE 1
33

34
FERRANDO E GUGLIELMO
Ci sarete, sì signor, ci sarete, sì signor, ci sarete, sì signor.
FERRANDO, GUGLIELMO E DON ALFONSO
E che brindis replicati far vogliamo al Dio d’amor!
E che brindis replicati far vogliamo al Dio d’amor!...
(Partono tutti.)
SCENA SECONDA
Giardino sulla spiaggia del mare.
Fiordiligi e Dorabella guardano un ritratto
che lor pende al fianco.
N o 4. Duetto
FIORDILIGI
Ah guarda, sorella, ah guarda, sorella,
Guarda ! Guarda ! Se bocca più bella, se aspetto
più nobile
Si può ritrovar, si può ritrovar.
DORABELLA
Osserva tu un poco, osserva che fuoco ha ne’ sguardi!
Se fiamma, se dardi non sembran scoccar.
Se fiamma, se dardi non sembran scoccar,
non sembran scoccar.
FIORDILIGI
Si vede un sembiante guerriero, ed amante.
DORABELLA
Si vede una faccia che alletta, che alletta, che alletta
E minaccia, e minaccia, e minaccia.
FIORDILIGI
Felice
Son’io felice son’io:
MOZARTCOSI FAN TUTTE

FERRANDO & GUGLIELMO
Vous le serez, oui Monsieur, vous le serez, oui Monsieur.
FERRANDO, GUGLIELMO & DON ALFONSO
Et quels toasts répétés, nous voulons porter
au Dieu d’amour !
Et quels toasts répétés, nous voulons porter
au Dieu d’amour !
(Tous sortent.)
SCÈNE 2
Jardin sur le rivage de la mer.
Fiordiligi et Dorabella contemplent des portraits
qu’elles portent en médaillon.
N o 4. Duetto
FIORDILIGI
Ah regarde, sœur, ah regarde, sœur,
Re g a r d e! Re g a r d e! Si bouche plus belle, si plus noble aspect
Se peut retrouver, se peut retrouver.
DORABELLA
Observe un peu, observe quel feu il a dans le regard !
Ne semble-t-il point lancer des flammes, des flèches,
Ne semble-t-il point lancer des flammes, des flèches ?
FIORDILIGI
On y voit l’image et d’un guerrier et d’un amant.
DORABELLA
On y voit un visage, qui fascine, qui fascine, qui fascine
Et menace, et menace, et menace.
FIORDILIGI
Heureuse
Je suis heureuse, je suis :
ACTE I SCÈNE 2
35

36
DORABELLA
Io sono, io sono felice:
FIORDILIGI E DORABELLA
Se questo mio core mai cangia desio,
Mai cangia, mai cangia desio,
Amore, amore mi faccia vivendo penar...
DORABELLA
Amore mi faccia vivendo
Penar......
FIORDILIGI
Se questo mio core mai cangia desio,
Amore mi faccia vivendo penar,
DORABELLA E FIORDILIGI
Amore mi faccia vivendo penar.
FIORDILIGI
Amore mi faccia vivendo
Penar......
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DORABELLA
Se questo mio core mai cangia desio,
Amore mi faccia vivendo penar,
DORABELLA E FIORDILIGI
Amore mi faccia vivendo penar...
Recitativo
FIORDILIGI
Mi par che stamattina volentieri farei la pazzarella: ho un
certo foco, un certo pizzicor entro le vene...
Quando Guglielmo viene... se sapessi che burla gli vo’ far!
DORABELLA
Per dirti il vero, qualche cosa di nuovo anch’io nell’alma
provo: io giurerei che lontane non siam dagli Imenei.

DORABELLA
Je suis, je suis heureuse :
ACTE I SCÈNE 2
FIORDILIGI & DORABELLA
Si mon cœur changeait de désir
Changeait, changeait de désir,
Qu’Amour, Amour me fasse toute ma vie souffrir...
DORABELLA
Qu’Amour me fasse toute ma vie
Souffrir......
FIORDILIGI
Si mon cœur changeait de désir
Qu’Amour me fasse toute ma vie souffrir,
DORABELLA & FIORDILIGI
Qu’Amour me fasse toute ma vie souffrir.
FIORDILIGI
Qu’amour me fasse toute ma vie
Souffrir......
DORABELLA
Si mon cœur changeait de désir,
Qu’amour me fasse toute ma vie souffrir,
DORABELLA & FIORDILIGI
Qu’amour me fasse toute ma vie souffrir...
Récitatif
FIORDILIGI
Il me semble que ce matin, je ferais volontiers la petite
folle : j’ai un certain feu, une certaine démangeaison dans
les veines... Quand Guglielmo viendra... si tu savais quel
tour je veux lui jouer !
DORABELLA
Pour te dire le vrai, je sens aussi du nouveau en mon
âme : je jurerais que l’hymen n’est pas loin.
37

38
FIORDILIGI
Dammi la mano: io voglio astrologarti. Uh, che
bell’Emme! E questo è un Pi: va bene: matrimonio presto.
DORABELLA
Affé che ci avrei gusto!
FIORDILIGI
Ed io non ci avrei rabbia.
DORABELLA
Ma che diavol vuol dir che i nostri sposi ritardano a
venir? Son già le sei...
FIORDILIGI
Eccoli.
SCENA TERZA
FIORDILIGI
Non son essi: è Don Alfonso l’amico lor.
DORABELLA
Ben venga il signor Don Alfonso!
DON ALFONSO
Riverisco!
DORABELLA
Cos’è? Perché qui solo? Voi piangete? Parlate per pietà!
Che cosa è nato? L’amante...
DORABELLA
L’idol mio...
DON ALFONSO
Barbaro fato!
MOZART COSI FAN TUTTE
N o 5. Aria

FIORDILIGI
Donne-moi ta main : je veux faire la voyante. Ouh, quel
beau M ! Et voici un P : tout va bien : mariage prompt.
DORABELLA
Que j’en serais heureuse !
FIORDILIGI
Et moi, je n’en serais pas fâchée.
DORABELLA
Mais pourquoi diable nos époux tardent-ils à venir ? Il est
déjà six heures...
FIORDILIGI
Les voici.
SCÈNE 3
FIORDILIGI
Ce n’est pas eux : c’est Don Alfonso, leur ami.
DORABELLA
Bienvenue à Monsieur Don Alfonso !
DON ALFONSO
Mes hommages !
DORABELLA
Qu’y a-t’il ? Pourquoi seul ici ? Vous pleurez ? Parlez, de
grâce ! Qu’est-il arrivé ? Mon amant...
DORABELLA
Mon idole...
DON ALFONSO
Destin barbare !
ACTE I SCÈNE 3
N o 5. Aria
39

40
DON ALFONSO
Vorrei dir, e cor non ho, e cor non ho: balbettando
il labbro va.
Fuor la voce uscir non può... ma mi resta mezza qua.
Che farete? Che farò? Oh, che gran fatalità!
Dar di peggio non si può, ah non si può.
Ho di voi, di lor pietà. Ho di voi, di lor pietà
Di voi pietà, di lor pietà.
Recitativo
FIORDILIGI
Stelle! Per carità, signor Alfonso, non ci fate morir.
DON ALFONSO
Convien armarvi, figlie mie, di costanza.
DORABELLA
Oh dei! Qual male è addivenuto mai, qual caso rio? Forse
è morto il mio bene?
FIORDILIGI
E morto il mio?
DON ALFONSO
Morti non son, ma poco men che morti.
DORABELLA
Feriti?
DON ALFONSO
No!
FIORDILIGI
Ammalati?
DON ALFONSO
Neppur.
FIORDILIGI
Che cosa dunque?
MOZARTCOSI FAN TUTTE

DON ALFONSO
Je voudrais dire, et je n’ai pas le courage :
mes lèvres balbutient
Ma voix ne peut sortir... mais elle me reste là, à mi-c h e m i n .
Qu’allez-vous faire ? Que ferai-je ?
Oh, quelle grande fatalité !
Rien de pire ne pouvait survenir, ah non.
De vous et d’eux j’ai pitié. De vous et d’eux j’ai pitié
De vous j’ai pitié, d’eux j’ai pitié.
Récitatif
FIORDILIGI
C i e l ! Par pitié, Monsieur Alfonso, ne nous faites pas mourir.
DON ALFONSO
Il faut, mes filles, vous armer de courage.
DORABELLA
Oh dieux ! Quel malheur est arrivé, quel mauvais pas ?
Peut-être mon aimé est-il mort ?
FIORDILIGI
Et mort le mien ?
DON ALFONSO
Morts non, mais pas beaucoup mieux.
DORABELLA
Blessés ?
DON ALFONSO
Non !
FIORDILIGI
Malades ?
DON ALFONSO
Non plus.
FIORDILIGI
Alors quoi ?
ACTE I SCÈNE 3
41

42
DON ALFONSO
Al marzial campo ordin regio li chiama.
FIORDILIGI E DORABELLA
Ohimè! Che sento!
FIORDILIGI
E partiran?
DON ALFONSO
Sul fatto.
DORABELLA
E non v’è modo d’impedirlo?
DON ALFONSO
Non v’è.
FIORDILIGI
Nè un solo addio...
DON ALFONSO
Gl’infelici non hanno coraggio di vedervi. Ma se voi lo
bramate, son pronti...
DORABELLA
Dove son?
DON ALFONSO
Amici, entrate.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
SCENA QUARTA
N o 6. Quintetto
GUGLIELMO
Sento oddio, che questo piede
È restio nel girle avante.

DON ALFONSO
Au champ de bataille les appelle un ordre du roi.
FIORDILIGI & DORABELLA
Hélas ! Qu’entends-je !
FIORDILIGI
Et ils partiront ?
DON ALFONSO
Sur-le-champ.
DORABELLA
Et il n’y a pas moyen de les en empêcher ?
DON ALFONSO
Aucun.
FIORDILIGI
Pas un seul adieu...
DON ALFONSO
Les malheureux n’ont pas le courage de vous voir. Mais si
vous le désirez, ils sont prêts...
DORABELLA
Où sont-ils ?
DON ALFONSO
Amis, entrez.
ACTE I SCÈNE 4
SCÈNE 4
N o 6. Quintette
GUGLIELMO
Je sens, ô dieu, que ces pieds
Résistent à avancer.
43

44
FERRANDO
Il mio labbro, palpitante,
Non può detto pronunziar.
DON ALFONSO
Nei momenti i più terribili sua virtù l’eroe palesa.
FIORDILIGI E DORABELLA
Or che abbiam la nuova intesa,
Or che abbiam la nuova intesa
A voi resta a fare il meno.
Fate core, fate core: a entrambe in seno
Immergeteci l’acciar, immergeteci l’acciar.
FERRANDO E GUGLIELMO
Idol mio, la sorte incolpa se ti deggio abbandonar.
DORABELLA
Ah, no, no, non partirai!
FIORDILIGI
No crudel, non te ne andrai!
DORABELLA
Voglio pria cavarmi il core!
FIORDILIGI
Pria ti vo’ morire ai piedi!
FERRANDO (piano a Don Alfonso)
Cosa dici?
GUGLIELMO (piano a Don Alfonso)
Te n’avvedi?
DON ALFONSO (piano)
Saldo, amico, saldo amico: finem lauda, finem lauda!
FIORDILIGI E DORABELLA
Il destin...
MOZART COSI FAN TUTTE

FERRANDO
Mes lèvres, palpitantes
Ne peuvent rien dire.
DON ALFONSO
C’est dans les moments les plus terribles, que le héros
révèle sa vertu.
FIORDILIGI & DORABELLA
A présent que nous avons appris la nouvelle,
A présent que nous avons appris la nouvelle,
Il vous reste peu à faire.
Prenez courage, prenez courage, dans notre sein
Plongez le fer, plongez le fer.
FERRANDO & GUGLIELMO
Mon idole, n’accuse que le sort si je dois t’abandonner.
DORABELLA
An, non, non, tu ne partiras pas !
FIORDILIGI
Non cruel, tu n’iras pas !
DORABELLA
Je veux d’abord m’arracher le cœur !
FIORDILIGI
Je veux d’abord mourir à tes pieds !
FERRANDO (bas, à Don Alfonso)
Qu’en dis-tu ?
GUGLIELMO (bas, à Don Alfonso)
Ne te l’avais-je pas dit ?
DON ALFONSO (bas)
Patience, ami, patience, ami : les louanges à la fin, les
louanges à la fin !
FIORDILIGI & DORABELLA
Le destin...
ACTE I SCÈNE 4
45

46
TUTTI
... Il destin così defrauda
FIORDILIGI E DORABELLA
Le speranze...
TUTTI
... De’ mortali.
Ah, chi mai fra tanti mali,
Chi mai può la vita amar?
Chi? Chi? Chi? Chi?
DORABELLA
Ah, no, no, non partirai!
FIORDILIGI
No crudel, non te ne andrai!
DORABELLA
Voglio pria cavarmi il core!
FIORDILIGI
Pria ti vo’ morire ai piedi!
FERRANDO (piano a Don Alfonso)
Cosa dici?
GUGLIELMO (piano a Don Alfonso)
Te n’avvedi?
DON ALFONSO (piano)
Saldo, amico, saldo amico: finem lauda, finem lauda!
FIORDILIGI E DORABELLA
Il destin...
TUTTI
... Il destin così defrauda
FIORDILIGI E DORABELLA
Le speranze...
MOZARTCOSI FAN TUTTE

TOUS
... Le destin confisque ainsi
FIORDILIGI & DORABELLA
Les espoirs...
TOUS
... Des mortels.
Ah, qui parmi tant de malheurs,
Qui peut aimer la vie ?
Qui ? Qui ? Qui ? Qui ?
DORABELLA
Ah, non, non, tu ne partiras pas !
FIORDILIGI
Non cruel, tu n’iras pas !
DORABELLA
Je veux d’abord m’arracher le cœur !
FIORDILIGI
Je veux d’abord mourir à tes pieds !
FERRANDO (bas, à Don Alfonso)
Qu’en dis-tu ?
GUGLIELMO (bas, à Don Alfonso)
Ne te l’avais-je pas dit ?
DON ALFONSO (bas)
Patience, ami, patience, ami : les louanges à la fin, les
louanges à la fin !
FIORDILIGI & DORABELLA
Le destin...
TOUS
... Le destin confisque ainsi
FIORDILIGI & DORABELLA
Les espoirs...
ACTE I SCÈNE 4
47

48
TUTTI
... De’ mortali.
Ah, chi mai fra tanti mali,
Chi mai può la vita amar?
Chi? Chi? Chi? Chi?
Chi mai può la vita amar.
GUGLIELMO
Non piangere, idol mio.
Recitativo
FERRANDO
Non disperarti, adorata mia sposa!
DON ALFONSO
Lasciate lor tal sfogo: è troppo giusta la cagion di quel
pianto.
(Gli amanti si abbracciano teneramente.)
FIORDILIGI
Chi sa s’io più ti veggio!
DORABELLA
Chi sa se più ritorni!
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FIORDILIGI
Lasciami questo ferro: ei mi dia morte, se mai barbara
sorte in quel seno a me caro...
DORABELLA
Morrei di duol, d’uopo non ho d’acciaro.
FERRANDO E GUGLIELMO
Non farmi, anima mia, quest’infausti presagi; proteggeran
gli dei la pace del tuo cor ne’ giorni miei.
N o 7. Duettino

TOUS
... Des mortels.
Ah, qui parmi tant de malheurs,
Qui peut aimer la vie ?
Qui ? Qui ? Qui ? Qui ?
Qui peut aimer la vie.
GUGLIELMO
Ne pleure pas, mon idole.
ACTE I SCÈNE 4
Récitatif
FERRANDO
Ne te désespère pas, mon épouse adorée !
DON ALFONSO
Laissez-leur cette consolation : ces pleurs ne sont que
trop justifiés.
(Les amants s’embrassent tendrement.)
FIORDILIGI
Qui sait si je te reverrai encore !
DORABELLA
Qui sait si tu reviendras jamais !
FIORDILIGI
L a i s s e-moi cette épée : elle me donnera la mort, si un
destin barbare dans ce sein qui m’est cher...
DORABELLA
Je mourrais de douleur, je n’aurai pas besoin de cette lame.
FERRANDO & GUGLIELMO
Ne me représente pas, mon âme, ces présages funestes ;
les dieux protégeront la paix de ton cœur et mes jours.
N o 7. Duettino
49

50
FERRANDO E GUGLIELMO
Al fato dàn legge quegli occhi vezzosi:
Amor li protegge, né i loro riposi
Le barbare stelle ardiscon turbar.
Il ciglio sereno, mio bene, a me gira, mio bene, a me gira;
Felice al tuo seno io spero tornar, io spero tornar...
Recitativo
DON ALFONSO (fra sé)
La commedia è graziosa, e tutti due fan ben la loro parte.
(Si sente un tamburo.)
FERRANDO
Oh cielo! Questo è il tamburo funesto, che a divider mi
vien dal mio tesoro.
DON ALFONSO
Ecco, amici, la barca.
FIORDILIGI
Io manco.
DORABELLA
Io moro.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
SCENA QUINTA
Marcia militare in qualche distanza.
N o 8. Coro
CORO
Bella vita militar! Bella vita militar!
Ogni dì si cangia loco, oggi molto, doman poco,
Ora in terra ed or sul mar.
Il fragor di trombe e pifferi;
Lo sparar di schioppi e bombe,

FERRANDO & GUGLIELMO
Le destin reçoit sa loi de ces yeux gracieux :
Amour les protège ; et leur repos,
Les étoiles barbares n’osent pas le troubler.
Tourne vers moi ton regard serein, mon amour, vers moi,
mon amour, vers moi ;
Heureux, sur ton sein, j’espère revenir, j’espère revenir...
Récitatif
DON ALFONSO (pour lui)
La comédie est charmante, et tous deux tiennent bien leur rôle.
(On entend le tambour.)
FERRANDO
Oh ciel ! Voici le tambour funeste, qui vient me séparer
de mon trésor.
DON ALFONSO
Voici, mes amis, le bateau.
FIORDILIGI
Je défaille.
DORABELLA
Je meurs.
ACTE I SCÈNE 5
SCÈNE 5
Marche militaire à quelque distance.
N o 8. Chœur
CHŒUR
La belle vie militaire ! La belle vie militaire !
Tous les jours on change de coin, aujourd’hui beaucoup,
demain peu
Parfois sur terre, parfois en mer.
Le tonnerre des trompettes et des fifres ;
Le feu des fusils et des bombardes
51

52
Forza accresce al braccio, e all’anima,
Vaga sol di trionfar.
Bella vita militar! Bella vita militar!
Recitativo
DON ALFONSO
Non v’è più tempo, amici; andar conviene ove il destino,
anzi il dover v’invita.
FIORDILIGI
Mio cor...
DORABELLA
Idolo mio...
FERRANDO
Mio ben...
GUGLIELMO
Mia vita...
FIORDILIGI
Ah, per un sol momento...
DON ALFONSO
Del vostro reggimento già è partita la barca. Raggiungerla
convien coi pochi amici che su legno più lieve attendendo
vi stanno.
FERRANDO E GUGLIELMO
Abbracciami, idol mio.
FIORDILIGI E DORABELLA
Muoio d’affanno.
FIORDILIGI (piangendo)
Di... scri... ver...mi o...
Gni... gior... no...
MOZARTCOSI FAN TUTTE
N o 8 A. Quintetto

Redoublent la force du bras et de l’âme
Qui ne veut que triompher !
La belle vie militaire ! La belle vie militaire !
Récitatif
DON ALFONSO
Il n’est plus temps, amis ; il faut aller où le destin, et
même le devoir, vous invitent.
FIORDILIGI
Mon cœur...
DORABELLA
Mon idole...
FERRANDO
Mon amour...
GUGLIELMO
Ma vie...
FIORDILIGI
Ah, pour un seul moment...
DON ALFONSO
Le bateau de votre régiment est déjà parti. Il faut le
rejoindre avec les quelques amis qui vous attendent sur
une embarcation plus légère.
FERRANDO & GUGLIELMO
Embrasse-moi, mon idole.
FIORDILIGI & DORABELLA
Je meurs d’angoisse.
FIORDILIGI (pleurant)
De... m’é... cri... re... cha
Que... jou... our...
ACTE I SCÈNE 5
N o 8 A. Quintette
53

54
DORABELLA (piangendo)
Due... vol... te an...
Co...
...Ra
Tu...
GUGLIELMO
Non... du...
GUGLIELMO
...bitar, mio bene.
Non...
FERRANDO
Sii... cer... ta...
DORABELLA
...Scri...vi...
FIORDILIGI
Giu... ra... mi...
DON ALFONSO (fra sé)
Io crepo, se non rido.
Io crepo, se non rido.
GUGLIELMO
du... bitar... mio be... ne...
FERRANDO
Sii... cer... ta... o ca... ra....
DORABELLA
... Mi... se puo... i...
FIORDILIGI
... Vi... ta... mi... a...
FIORDILIGI
Sii costante a me sol...
MOZARTCOSI FAN TUTTE

DORABELLA (pleurant)
Deux... fois... mê...
Me...
...Tu
M’é...
GUGLIELMO
Ne... dou...
GUGLIELMO
...te pas, mon amour.
Non...
FERRANDO
Sois en... cer... taine...
DORABELLA
...Cri... ras...
FIORDILIGI
Ju... re... moi...
DON ALFONSO (à part)
Je vais crever, si je ne ris pas.
Je vais crever, si je ne ris pas.
GUGLIELMO
Ne dou... te pas... mon a... mour...
FERRANDO
Sois en... cer... taine... ô ché... rie....
DORABELLA
... A moi... si tu... peux...
FIORDILIGI
... Ma... vie... à... moi...
FIORDILIGI
Sois fidèle à moi seule...
ACTE I SCÈNE 5
55

56
DORABELLA
Serbati fido!
FERRANDO
Addio!
GUGLIELMO
Addio!
FIORDILIGI E DORABELLA
Addio!
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO E GUGLIELMO
Mi si divide il cor, bell’idol mio.
Mi si divide il cor, bell’idol mio.
DON ALFONSO
Io crepo se
Non rido
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO E GUGLIELMO
Addio!
DON ALFONSO
Io crepo se
Non rido
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO E GUGLIELMO
Addio!
DON ALFONSO
Io crepo se
Non rido, se non rido, se non rido.
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO E GUGLIELMO
Addio!
(Le amanti restando immobili sulla sponda del mare ;
la barca allontanasi tra suon di tamburi ecc.)
N o 9. Coro

DORABELLA
Garde-moi ta foi !
FERRANDO
Adieu !
GUGLIELMO
Adieu !
FIORDILIGI & DORABELLA
Adieu !
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
Mon cœur se déchire, ma belle idole.
Mon cœur se déchire, ma belle idole.
DON ALFONSO
Je vais crever si
Je ne ris pas.
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
Adieu !
DON ALFONSO
Je vais crever si
Je ne ris pas
ACTE I SCÈNE 5
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
Adieu !
DON ALFONSO
Je vais crever si
Je ne ris pas, je ne ris pas, je ne ris pas.
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
Adieu !
(Les amants restent immobiles sur le rivage ;
l’embarcation s’éloigne dans le bruit des tambours, etc.)
N o 9. Chœur
57

58
CORO
Bella vita militar! Bella vita militar!
Ogni dì si cangia loco, oggi molto, doman poco,
Ora in terra ed or sul mar.
Il fragor di trombe e pifferi;
Lo sparar di schioppi e bombe,
Forza accresce al braccio, e all’anima,
Vaga sol di trionfar.
Bella vita militar! Bella vita militar!
SCENA SESTA
DORABELLA (in atto di chi rinviene da un letargo)
Dove son?
DON ALFONSO
Son partiti.
FIORDILIGI
Oh dipartenza crudelissima amara!
DON ALFONSO
Fate core, carissime figliuole.
(Da lontano facendo motto col fazzoletto)
Guardate: da lontano vi fan cenno con mano i cari sposi.
FIORDILIGI
Buon viaggio, mia vita!
DORABELLA
Buon viaggio!
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FIORDILIGI
Oh Dei! Come veloce se ne va quella barca! Già sparisce!
Già non si vede più! Deh faccia il cielo ch’abbia prospero
corso.
DORABELLA
Faccia che al campo giunga con fortunati auspici.

CHŒUR
La belle vie militaire ! La belle vie militaire !
Tous les jours on change de coin, aujourd’hui beaucoup,
demain peu
Parfois sur terre, parfois en mer.
Le tonnerre des trompettes et des fifres ;
Le feu des fusils et des bombardes
Redoublent la force du bras et de l’âme
Qui ne veut que triompher !
La belle vie militaire ! La belle vie militaire !
SCÈNE 6
DORABELLA (comme s’il elle sortait de léthargie)
Où sont-ils ?
DON ALFONSO
Ils sont partis.
FIORDILIGI
Oh, départ amer et très cruel !
DON ALFONSO
Faites front, très chères petites filles.
(Faisant signe de loin avec un mouchoir)
Vo y e z : au loin, les chers fiancés vous font signe de la main.
FIORDILIGI
Bon voyage, ma vie
DORABELLA
Bon voyage !
ACTE I SCÈNE 6
FIORDILIGI
Oh dieux ! Comme cette barque va vite ! Elle disparaît
d é j à ! On ne les voit déjà plus ! Fasse le ciel que son
cours soit heureux.
DORABELLA
Qu’il fasse qu’elle joigne le champ de bataille sous d’heureux
auspices.
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60
DON ALFONSO
E a voi salvi gli amanti, e a me gli amici.
N o 10. Terzettino
FIORDILIGI, DORABELLA E DON ALFONSO
Soave sia il vento, tranquilla sia l’onda,
Ed ogni elemento benigno risponda ai nostri desir.
Soave sia il vento, tranquilla sia l’onda,
Ed ogni elemento benigno risponda ai nostri desir,
Ai nostri desir...
(Partono le due donne.)
MOZARTCOSI FAN TUTTE
SCENA SETTIMA
Recitativo
DON ALFONSO
Non son cattivo comico! Va bene: al concertato loco i due
campioni di Ciprigna e di Marte mi staranno attendendo;
or senza indugio raggiungerli conviene... Quante smorfie...
quante buffonerie... Tanto meglio per me: cadran più facilmente;
questa razza di gente è la più presta a cangiarsi
d’umore. Oh, poverini! Per femmina giocar cento zecchini?
“Nel mare solca
E nell’arena semina,
E il vago vento spera in rete accogliere
Chi fonda sue speranze in cor di femmina.”
SCENA OTTAVA
Camera gentile con diverse sedie, un tavolino, ecc.
Tre porte: due laterali, una di mezzo.
Recitativo
DESPINA (che sta facendo il cioccolatte)
Che vita maledetta è il far la cameriera! Dal mattino alla
sera, si fa, si suda, si lavora, e poi di tanto che si fa nulla

ACTE I SCÈNES 7 & 8
DON ALFONSO
Et qu’il garde vos amants, et mes amis.
N o 10. Terzettino
FIORDILIGI, DORABELLA & DON ALFONSO
Que suave soit la brise, que la mer soit calme,
Et que chaque élément réponde avec bonté à nos désirs.
Que suave soit la brise, que la mer soit calme,
Et que chaque élément réponde avec bonté à nos désirs
A nos désirs...
(Les deux femmes partent.)
SCÈNE 7
Récitatif
DON ALFONSO
Je ne suis pas un mauvais comique ! Tout va bien : au
lieu convenu vont m’attendre les deux champions de
Vénus et de Mars ; il me faut les rejoindre sans délai...
Que de minauderies... que de sottises... Tant mieux pour
moi : elles chuteront plus facilement ; cette sorte de gens
est la plus rapide à changer d’humeur. Oh, pauvrets !
Jouer cent sequins sur les femmes ?
« Il laboure la mer
Et il sème dans le sable
Et il espère prendre le vent joli dans ses filets,
Celui qui fonde ses espoirs dans le cœur de la femme. »
SCÈNE 8
Une chambre raffinée avec différents sièges, une petite table, etc.
Trois portes : deux latérales, une au centre.
Récitatif
DESPINA (en train de faire du chocolat)
Quelle maudite vie de faire la femme de chambre ! Du
matin au soir, on fait, on sue, on travaille, et de tout ça on
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62
è per noi; è mezza ora, che sbatto; il cioccolatte è fatto, ed
a me tocca restar ad odorarlo a secca bocca? Non è forse
la mia come la vostra, o garbate signore, che a voi dèssi
l’essenza, e a me l’odore? Per Bacco, vo’ assaggiarlo: com’
è buono! (Si forbe la bocca.)
Vien gente. O ciel, son le padrone!
SCENA NONA
DESPINA (presenta il cioccolatte sopra una guantiera)
Madame, ecco la vostra colazione.
(Dorabella gitta tutto a terra.)
Diamine, cosa fate?
FIORDILIGI
Ah!
DORABELLA
Ah!
(Si cavano entrambe tutti gli ornamenti donneschi, ecc.)
DESPINA
Che cosa è nato?
FIORDILIGI
Ov’è un acciaro?
Un veleno dov’è?
DESPINA
Padrone, dico!...
MOZART COSI FAN TUTTE
DORABELLA
Ah, scostati, aventa il tristo effetto d’un disperato affetto!
Chiudi quelle finestre... odio la luce... odio l’aria che
spiro... odio me stessa... Chi schernisce il mio duol... chi
mi consola...
Deh fuggi per pietà, fuggi, fuggi, fuggi per pietà, lasciami
sola.

ne retire rien pour nous ; ça fait une demi-heure que je
touille ; le chocolat est fait et je ne pourrais que le humer,
la bouche sèche ? La mienne n’est peut-être pas comme
la vôtre, ô gracieuses dames qui vous a donné l’essence,
et à moi le parfum ? Parbleu, je vais le goûter : comme il
est bon ! (Elle s’essuie la bouche.)
On vient. O ciel, ce sont les maîtresses !
SCÈNE 9
DESPINA (présentant le chocolat sur un plateau)
Mesdames, voici votre petit déjeuner.
(Dorabella jette tout par terre.)
Diable, que faites-vous ?
FIORDILIGI
Ah !
DORABELLA
Ah !
(Elles s’arrachent tous leurs ornements féminins, etc.)
DESPINA
Qu’est-il arrivé ?
FIORDILIGI
Où y a-t-il une épée ?
Du poison, où ?
DESPINA
Maîtresses, voyons !...
ACTE I SCÈNE 9
DORABELLA
Ah, va-t-en, crains le triste effet d’un sentiment
d é s e s p é r é ! Ferme ces fenêtre... je hais la lumière... je
hais l’air que je respire... je me hais moi-même... Qui
bafoue mon deuil... qui me console...
De grâce va-t-en par pitié, va-t-en, va-t-en, va-t-en par
pitié, laisse-moi seule.
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64
N o 11. Aria
DORABELLA
Smanie implacabili che m’agitate,
Dentro quest’anima più non cessate
Finchè l’angoscia mi fa morir
Mi fa morir.
Esempio misero
D’amor funesto, d’amor funesto
Darò all’Eumenidi, se viva resto,
Col suono orribile de’ miei sospir,
De’ miei sospir, de’ miei sospir...
(Dorabella e Fiordiligi si metton sedere in disparte
da forsennate.)
Recitativo
DESPINA
Signora Dorabella, signora Fiordiligi, ditemi: che cosa
è stato?
DORABELLA
Oh, terribil disgrazia!
DESPINA
Sbrigatevi in buon’ora.
FIORDILIGI
Da Napoli partiti sono gli amanti nostri.
DESPINA (ridendo)
Non c’e altro? Ritorneran.
DORABELLA
Chi sa!
DESPINA (come sopra)
Come, chi sa? Dove son iti?
DORABELLA
Al campo di battaglia.
MOZARTCOSI FAN TUTTE

N o 11. Aria
DORABELLA
Implacables passions qui me tourmentez,
En cette âme ne cessez plus
Jusqu’à ce que l’angoisse
Me fasse mourir.
Je donnerai aux Euménides, si je reste en vie,
Un triste exemple
D’amour funeste, d’amour funeste,
Par le terrible éclat de mes soupirs,
De mes soupirs, de mes soupirs...
(Dorabella et Fiordiligi s’assoient à l’écart,
comme ayant perdu la raison.)
Récitatif
DESPINA
Madame Dorabella, Madame Fiordiligi, dites-moi : que
s’est-il passé ?
DORABELLA
Oh, terrible disgrâce !
DESPINA
Lâchez le morceau, vite.
FIORDILIGI
Nos amants ont quitté Naples.
DESPINA (riant)
Ce n’est que ça ? Ils reviendront.
DORABELLA
Qui le sait !
DESPINA (même jeu)
Comment, qui le sait ? Où sont-ils allés ?
DORABELLA
Au champ de bataille.
ACTE I SCÈNE 9
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66
DESPINA
Tanto meglio per loro. Li vedrete tornar carchi d’alloro.
FIORDILIGI
Ma ponno anche perir.
DESPINA
Allora, poi tanto meglio per voi.
FIORDILIGI (sorge arrabbiata)
Sciocca, che dici?
MOZART COSI FAN TUTTE
DESPINA
La pura verità: due ne perdete, vi restan tutti gli altri.
FIORDILIGI
Ah, perdendo Guglielmo mi pare ch’io morrei!
DORABELLA
Ah, Ferrando perdendo mi par che viva a seppellirmi
andrei.
DESPINA
Brave, vi par, ma non è ver: finora non vi fu donna che
d’amor sia morta. Per un uomo morir! Altri ve n’ hanno
che compensano il danno.
DORABELLA
E credi che potria altr’uom amar chi s’ebbe per amante un
Guglielmo, un Ferrando?
DESPINA
Han gli altri ancora tutto quello ch’han essi. Un uom
adesso amate, un altro n’amerete: uno val l’altro, perché
nessun val nulla. Ma non parliam di ciò; sono ancor vivi e
vivi torneran; ma son lontani, e piuttosto che in vani pianti
perdere il tempo, pensate a divertirvi.
FIORDILIGI (con trasporto di collera)
Divertirci?

DESPINA
Tant mieux pour eux. Vous les verrez revenir couverts de
lauriers.
FIORDILIGI
Mais ils peuvent aussi mourir.
DESPINA
Alors tant mieux pour vous.
FIORDILIGI (en colère)
Stupide, que dis-tu ?
ACTE I SCÈNE 9
DESPINA
La pure vérité : vous en perdez deux, il vous reste tous les autres.
FIORDILIGI
Ah, si je perdais Guglielmo, je crois que je mourrais !
DORABELLA
Ah, si je perdais Ferrando, je crois que j’irais m’enterrer vivante.
DESPINA
Bien, vous croyez, mais ce n’est pas vrai : jusqu’à présent,
il n’y a pas eu de dame morte d’amour ! Mourir pour un
homme ! D’autres compenseront la perte.
DORABELLA
Et tu crois que qui eut pour amant, un Guglielmo, un
Ferrando, pourrait aimer un autre homme ?
DESPINA
Les autres ont aussi tout ce que ceux-là ont eu. Vo u s
aimez un homme maintenant, vous en aimerez un autre :
l’un vaut l’autre, car aucun ne vaut rien. Mais ne parlons
pas de ça : ils sont encore vivants et vivants ils reviendront
; mais ils sont loin, et plutôt que perdre votre temps
en vains pleurs, pensez à vous divertir.
FIORDILIGI (transportée de colère)
Nous divertir ?
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68
DESPINA
Sicuro! E, quel ch’è meglio, far all’amor come assassine, e
come faranno al campo i vostri cari amanti?
DORABELLA
Non offender così quelle alme belle, di fedeltà, d’intatto
amore esempi.
DESPINA
Via, via, passaro i tempi da spacciar queste favole ai
bambini.
N o 12. Aria
DESPINA
In uomini! In soldati
Sperare fedeltà?
In uomini sperare fedeltà?
In soldati sperare fedeltà? Fedeltà?Fedeltà ?
(Ridendo) Non vi fate sentir per carità!
Non vi fate sentir per carità!
Di pasta simile son tutti quanti, son tutti quanti:
Le fronde mobili, l’aure incostanti
Han più degli uomini stabilità.
Mentite lagrime, fallaci sguardi,
Voci ingannevoli, vezzi bugiardi,
Son le primarie lor qualità,
Son le primarie lor qualità.
In noi non amano che il lor diletto,
Poi ci dispregiano, neganci affetto,
Né val da’ barbari chieder pietà,
Né val da’ barbari chieder pietà,
Chieder pietà, chieder pietà.
Paghiam, o femmine, d’ugual moneta
Questa malefica razza indiscreta;
Amiam per comodo, per vanità,
Amiam per comodo, per vanità,
Amiam per comodo, per vanità.
La ra la, la ra la, la ra la la.
Amiam per comodo, per vanità...
(Partono tutte.)
MOZARTCOSI FAN TUTTE

ACTE I SCÈNE 9
DESPINA
Bien sûr ! Et quoi de mieux qu’aimer comme des tueuses,
et comme le feront vos chers amants à la guerre ?
DORABELLA
N’insulte pas ainsi ces belles âmes, exemples de fidélité
et de pur amour.
DESPINA
Allons, allons, les temps sont passés de débiter ces fables
d’enfants.
N o 12. Aria
DESPINA
Chez les hommes ! Chez les soldats
Espérer de la fidélité ?
Chez les hommes espérer de la fidélité.
Chez les soldats espérer de la fidélité ? Fi d é l i t é? Fi d é l i t é?
(Riant) Qu’on ne vous entende pas par pitié !
Qu’on ne vous entende pas par pitié !
Ils sont tous faits de la même pâte, tous :
Le feuillage frémissant, la brise inconstante,
Ont plus de constance que les hommes.
Larmes menteuses, regards trompeurs,
Paroles piégeuses, fausses caresses,
Sont les premiers de leurs dons,
Sont les premiers de leurs dons.
En nous ils n’aiment que leur plaisir,
Puis nous rejettent, nous privant d’amour,
A ces barbares, n’allez pas demander grâce,
A ces barbares, n’allez pas demander grâce,
Demander grâce, demander grâce.
Payons, ô femmes, de la même monnaie
Cette race maléfique et insolente ;
Aimons pour le plaisir, pour rien,
Aimons pour le plaisir, pour rien,
Aimons pour le plaisir, pour rien,
La ra la, la ra la, la ra la la.
Aimons pour le plaisir, pour rien...
(Elles sortent toutes les trois.)
69

70
SCENA DECIMA
Recitativo
DON ALFONSO
Che silenzio! Che aspetto di tristezza spirano queste stanze!
Poverette! Non han già tutto il torto: bisogna consolarle.
Infin che vanno i due creduli sposi, com’io loro commisi,
a mascherarsi, pensiam cosa può farsi... Temo un po’
per Despina... quella furba potrebbe riconoscerli...
potrebbe rovesciarmi le macchine... Vedremo... se mai
farà bisogno, un regaletto a tempo, un zecchinetto per una
cameriera è un gran scongiuro. Ma per esser sicuro, si
potria metterla in parte a parte del segreto... Eccellente è
il progetto... la sua camera è questa... (Batte.) Despinetta!
DESPINA
Chi batte?
DON ALFONSO
Oh!
DESPINA
Ih!
DON ALFONSO
Despina mia, di te bisogno avrei.
DESPINA
Ed io niente di lei.
DON ALFONSO
Ti vo’ fare del ben.
DESPINA
A una fanciulla un vecchio come lei non può far nulla.
DON ALFONSO
Parla piano (mostrandole una moneta d’oro) ed osserva.
DESPINA
Me la dona?
MOZART COSI FAN TUTTE

SCÈNE 10
Récitatif
DON ALFONSO
Quel silence ! Quelle tristesse respirent ces pièces ! Pauvrettes
! Elles n’ont pas encore tous les torts : il faut les
c o n s o l e r. Pendant que les crédules amants se déguisent,
ainsi que je leur ai demandé, pensons à ce qui peut se
faire... J’ai un peu peur de Despina... cette fourbe pourrait
les reconnaître et faire rater mes machinations... On
verra... si besoin est, un petit cadeau au bon moment,
pour une camériste, un petit sequin est un grand arg ument.
Mais par sécurité, je pourrais la mettre en partie
dans la confidence... Excellent projet... voici sa chambre.
(Il frappe.) Despinetta !
DESPINA
Qui frappe ?
DON ALFONSO
Oh !
DESPINA
Ih !
DON ALFONSO
Ma Despina, j’aurais besoin de toi.
DESPINA
Et moi pas du tout de vous.
DON ALFONSO
Je veux te faire du bien.
DESPINA
A une fille, un vieux comme vous ne peut rien faire du tout.
DON ALFONSO
Parle bas (lui montrant une pièce d’or)et regarde.
DESPINA
Vous me la donnez ?
ACTE I SCÈNE 10
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72
DON ALFONSO
Sì, se meco sei buona.
DESPINA
E che vorebbe? È l’oro il mio giulebbe.
DON ALFONSO
Ed oro avrai, ma ci vuol fedeltà.
DESPINA
Non c’è altro? Son qua.
DON ALFONSO
Prendi; ed ascolta. Sai che le tue padrone han perduti gli
amanti.
DESPINA
Lo so.
DON ALFONSO
Tutti i lor pianti, tutti i deliri loro ancor tu sai.
DESPINA
So tutto!
MOZART COSI FAN TUTTE
DON ALFONSO
Or ben: se mai per consolarle un poco e trar, come
diciam, chiodo per chiodo, tu ritrovassi il modo da metter
in lor grazia due soggetti di garbo, che vorrieno provar,
già mi capisci... c’è una mancia per te di venti scudi, se
li fai riuscir.
DESPINA
Non mi dispiace questa proposizione. Ma con quelle buffone...
basta, udite: son giovani, son belli, et sopra tutto,
hanno una buona borsa i vostri concorrenti?
DON ALFONSO
Han tutto quello che piacer può alle donne di giudizio: li
vuoi veder?

DON ALFONSO
Oui, si tu es gentille avec moi.
DESPINA
Et que voulez-vous ? L’or est mon délice.
DON ALFONSO
Et tu auras de l’or, mais il faut ici de la loyauté.
DESPINA
Rien d’autre ? Je suis là.
DON ALFONSO
Prends ; et écoute. Tu sais que tes maîtresses ont perdu
leurs amants.
DESPINA
Je sais.
DON ALFONSO
Tous leurs pleurs, tous leurs délires, tu sais aussi.
DESPINA
Je sais tout !
ACTE I SCÈNE 10
DON ALFONSO
B i e n : si jamais, pour les consoler un peu et chasser,
comme on dit, un clou avec l’autre, tu trouvais le moyen
de mettre dans leurs grâces deux sujets charmants qui
voudraient tenter, tu me comprends déjà... vingt écus pour
toi si tu les fais réussir.
DESPINA
Cette proposition ne me déplaît pas. Mais, avec ces
sottes... bon, écoutez : vos concurrents sont-il jeunes,
beaux et surtout ont-il une belle bourse ?
DON ALFONSO
Ils ont tout ce qui peut plaire à des femmes intelligentes :
veux-tu les voir ?
73

74
DESPINA
E dove son?
DON ALFONSO
Son lì.
(Fa entrar gli amanti, che son travestiti.)
Li posso far entrar?
DESPINA
Direi di sì.
DON ALFONSO
Alla bella Despinetta
Vi presento, amici miei;
Non dipende che da lei
Consolar il vostro cor.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
SCENA UNDICESIMA
N o 13. Sestetto
FERRANDO E GUGLIELMO (con tenerezza affettata)
Per la man, che lieto io bacio,
Per quei rai di grazia pieni,
Fa’ che volga a me sereni
I begli occhi il mio tesor.
DESPINA (da sé, ridendo)
Che sembianze! Che vestiti!
Che figure! Che mustacchi!
Io non so se son Vallacchi, o se Turchi son costor.
Vallachi, Turchi, Turchi, Vallachi!
DON ALFONSO (piano a Despina)
Che ti par di quell’aspetto?
DESPINA (sottovoce a Don Alfonso)
Per parlarvi schietto schietto,
Hanno un muso fuor dell’uso,
Vero antidoto d’amor.

DESPINA
Et où sont-ils ?
DON ALFONSO
Ils sont là.
(Il fait entrer les amants, qui sont déguisés.)
Puis-je les faire entrer ?
DESPINA
Je dirais oui.
ACTE I SCÈNE 11
SCÈNE 11
N o 13. Sextuor
DON ALFONSO
A la belle Despinetta
Mes amis, je vous présente ;
Il ne dépend que d’elle
De consoler votre cœur.
FERRANDO & GUGLIELMO (avec une tendresse affectée)
Par la main que je baise avec joie,
Par ce regard plein de grâce,
Puisse mon trésor, vers moi,
Tourner ses beaux yeux.
DESPINA (à part, riant)
Quel aspect ! Quels habits !
Quelles figures ! Quelles moustaches !
Je ne sais pas s’ils sont valaques ou turcs.
Valaques, Turcs, Turcs, Valaques !
DON ALFONSO (bas à Despina)
Que te semble leur allure ?
DESPINA (à mi-voix à Don Alfonso)
Pour dire, franchement, franchement,
Ils ont une gueule pas commune,
Un vrai antidote à l’amour.
75

76
Che figure!
Che mustacchi!
FERRANDO, GUGLIELMO E DON ALFONSO
Or la cosa
E appien decisa...
DESPINA
Io non so se
Son Valacchi o se Turchi son costor.
Io non so se son Valacchi o se Turchi son costor...
FERRANDO ET GUGLIELMO
... Se costei non ci ravvisa
Non c’è più nessun timor...
DON ALFONSO
... Se costei non li ravvisa
Non c’è più nessun timor...
FIORDILIGI E DORABELLA (dentro le quinte)
Ehi Despina! Olà Despina!
DESPINA
Le padrone!
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DON ALFONSO (a Despina)
Ecco l’istante! Fa’ con arte:io qui m’ascondo.
(Si ritira.)
FIORDILIGI E DORABELLA (entrando)
Ragazzaccia tracotante,
Che fai lì con simil gente?...
Ragazzaccia tracotante,
Che fai lì con simil gente, con simil gente, con simil gente?
Falli uscire immantinente, immantinente, immantinente
O ti fo pentir con lor, o ti fo pentir con lor, o ti fo pentir con lor.
DESPINA, FERRANDO E GUGLIELMO
(Tutti e tre s’inginocchiano.)
Ah, madame, perdonate!
Al bel piè languir mirate due meschin,

Quelles figures !
Quelles moustaches !
FERRANDO, GUGLIELMO & DON ALFONSO
Maintenant la chose
Est tout a fait assurée...
DESPINA
Je ne sais
S’ils sont valaques ou turcs.
Je ne sais s’ils sont valaques ou turcs...
FERRANDO & GUGLIELMO
... Si celle-là ne nous reconnaît pas
Il n’y a plus aucune crainte...
DON ALFONSO
... Si celle-là ne les reconnaît pas
Il n’y a plus aucune crainte...
FIORDILIGI & DORABELLA (dans la coulisse)
Eh, Despina ! Holà, Despina !
DESPINA
Mes maîtresses !
ACTE I SCÈNE 11
DON ALFONSO (à Despina)
C’est le moment ! Sois habile : je me cache là.
(Il se retire.)
FIORDILIGI & DORABELLA (entrant)
Fille arrogante,
Que fais-tu là avec de pareilles gens ?...
Fille arrogante,
Que fais-tu là avec de pareilles gens, de pareilles gens,
de pareilles gens ?
Fa i s-les sortir immédiatement, immédiatement,
Où je ferais que tu te repentes avec eux.
DESPINA, FERRANDO & GUGLIELMO
(Tous les trois s’agenouillent.)
Ah, Madame, pardonnez !
A vos pieds, devant votre valeur,
77

78
Di vostro merto spasimanti adorator,
Spasimanti adorator.
FIORDILIGI E DORABELLA
Giusti Numi! Cosa sento?
Dell’enorme tradimento
Chi fu mai l’indegno autor?
DESPINA, FERRANDO E GUGLIELMO
Deh, calmate,
FIORDILIGI E DORABELLA
Chi?
DESPINA, FERRANDO E GUGLIELMO
Deh, calmate,
FIORDILIGI E DORABELLA
Chi?
DESPINA, FERRANDO E GUGLIELMO
Quello
Sdegno!
FIORDILIGI E DORABELLA
Chi fu
Mai l’indegno autor?
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DESPINA, FERRANDO E GUGLIELMO
Deh calmate quello sdegno!
FIORDILIGI ET DORABELLA
Ah, che più non ho ritegno!
Tutta piena ho l’alma in petto di dispetto e di terror!
DESPINA
Mi dà un poco di sospetto
Quella rabbia e quel furor...
DON ALFONSO (dalla porta)
Mi dà un poco di sospetto
Quella rabbia e quel furor...

Voyez languir deux pauvres adorateurs soupirant,
Adorateurs soupirant.
FIORDILIGI & DORABELLA
Dieux justes ! Qu’entends-je ?
Cette immense trahison,
Qui peut bien en être l’indigne auteur ?
DESPINA, FERRANDO & GUGLIELMO
De grâce, calmez,
FIORDILIGI & DORABELLA
Qui ?
DESPINA, FERRANDO & GUGLIELMO
De grâce, calmez,
FIORDILIGI & DORABELLA
Qui ?
ACTE I SCÈNE 11
DESPINA, FERRANDO & GUGLIELMO
Cette
Colère !
FIORDILIGI & DORABELLA
Qui peut
Bien en être l’indigne auteur ?
DESPINA, FERRANDO & GUGLIELMO
De grâce, calmez cette colère !
FIORDILIGI & DORABELLA
Ah, je ne puis plus me contenir !
Mon âme en mon sein est pleine de dépit et d’horreur !
DESPINA
Elles me donnent un vague soupçon,
Cette rage et cette fureur...
DON ALFONSO (de la porte)
Elles me donnent un vague soupçon,
Cette rage et cette fureur...
79

80
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FERRANDO E GUGLIELMO
Qual diletto è a questo petto
Quella rabbia e quel furor!...
FIORDILIGI E DORABELLA (fra sé)
Ah, perdon, mio bel diletto,
Innocente è questo cor.
Tutta piena ho l’alma in petto di dispetto e di terror!
FIORDILIGI E DORABELLA
Ah, che più non ho ritegno!
DESPINA E DON ALFONSO
Mi dà un poco di sospetto...
FERRANDO E GUGLIELMO
Qual diletto è a questo petto...
FIORDILIGI E DORABELLA
Ah, che più non ho ritegno!
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO, GUGLIEMO
... Quella rabbia e quel furor.
FIORDILIGI E DORABELLA
Tutta piena ho l’alma in petto di dispetto e di terror!
DESPINA E DON ALFONSO
Mi dà un poco di sospetto
Quella rabbia e quel furor...
FERRANDO E GUGLIELMO
Qual diletto è a questo petto
Quella rabbia e quel furor...
FIORDILIGI E DORABELLA
Tutta piena ho l’alma in petto di dispetto e di terror!
Ah, che più non ho ritegno!
Tutta piena ho l’alma in petto di dispetto e di terror!...
Recitativo

ACTE I SCÈNE 11
FERRANDO & GUGLIELMO
Quel délice font en mon cœur
Cette rage et cette fureur !...
FIORDILIGI & DORABELLA (à part)
Ah, pardonne, mon bel aimé,
Ce cœur est innocent.
Mon âme en mon sein est pleine de dépit et d’horreur !
FIORDILIGI & DORABELLA
Ah, je ne puis plus me contenir !
DESPINA & DON ALFONSO
Ils me donnent un vague soupçon...
FERRANDO & GUGLIELMO
Quel délice font en mon cœur...
FIORDILIGI & DORABELLA
Ah, je ne puis plus me contenir !
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO, GUGLIELMO
... Cette rage et cette fureur.
FIORDILIGI & DORABELLA
Mon âme en mon sein est pleine de dépit et d’horreur !
DESPINA & DON ALFONSO
Elles me donnent un vague soupçon,
Cette rage et cette fureur...
FERRANDO & GUGLIELMO
Quel délice font en mon cœur
Cette rage et cette fureur...
FIORDILIGI & DORABELLA
Mon âme en mon sein est pleine de dépit et d’horreur !
Ah, je ne puis plus me contenir !
Mon âme en mon sein est pleine de dépit et d’horreur !
Récitatif
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82
DON ALFONSO (come entrando)
Che sussurro! Che strepito! Che scompiglio è mai questo!
Siete pazze, care le mie ragazze? Volete sollevar il vicinato?
Cosa avete? Ch’è nato?
DORABELLA (con furore)
Oh, ciel! Mirate: uomini in casa nostra?
DON ALFONSO (senza guardarli)
Che male c’è?
FIORDILIGI (con fuoco)
Che male? In questo giorno? Dopo il caso funesto?
DON ALFONSO
Stelle! Sogno, o son desto? Amici miei, miei dolcissimi
amici? Voi qui? Come? Perché? Quando? In qual modo?
Numi! Quanto ne godo!
(Sottovoce)Secondatemi.
FERRANDO
Amico Don Alfonso!
GUGLIELMO
Amico caro!
(Si abbracciano con trasporto.)
DON ALFONSO
Oh bella improvvisata!
DESPINA (a Don Alfonso)
Li conoscete voi?
DON ALFONSO
Se li conosco! Questi sono i più dolci amici ch’io m’abbia
in questo mondo, e vostri ancor saranno.
FIORDILIGI
E in casa mia che fanno?
MOZART COSI FAN TUTTE

DON ALFONSO (comme s’il arrivait)
Quel murmure ! Quel vacarme ! Quelle confusion est-c e
l à ! Vous êtes folles, mes chères jeunes filles ? Vous voulez
ameuter le voisinage ? Qu’ a v e z - v o u s ? Qu’est-il arrivé ?
DORABELLA (en fureur)
Oh, ciel ! Regardez : des hommes dans notre maison ?
DON ALFONSO (sans les regarder)
Quel mal y a-t-il ?
FIORDILIGi (avec flamme)
Quel mal ? En ce jour ? Après l’événement funeste ?
DON ALFONSO
Ciel ! Je rêve, ou je suis éveillé ? Mes amis, mes très
aimables amis ? Vous ici ? Comment ? Po u r q u o i ?
Quand ? De quelle façon ? Dieux ! Que cela me réjouit !
(A mi-voix) Imitez-moi.
FERRANDO
Ami Don Alfonso!
GUGLIELMO
Cher ami !
(Ils s’embrassent avec transport.)
DON ALFONSO
Oh, belle surprise !
DESPINA (à Don Alfonso)
Les connaissez-vous ?
ACTE I SCÈNE 11
DON ALFONSO
Si je les connais ! Ils sont les plus aimables amis que j’ai
en ce monde, et ils seront les vôtres.
FIORDILIGI
Et que font-ils dans ma demeure ?
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84
GUGLIELMO
Ai vostri piedi due rei, due delinquenti, ecco madame!
Amor...
DORABELLA
Numi! che sento?
FERRANDO
Amor, il Nume... sì possente, per voi qui ci conduce.
(Le donne si ritirano, essi le inseguono.)
GUGLIELMO
Vista appena la luce di vostre fulgidissime pupille...
FERRANDO
... Che alle vive faville...
GUGLIELMO
... Farfallette amorose e agonizzanti...
FERRANDO
... Vi voliamo davanti...
GUGLIELMO
... Ed ai lati ed a retro...
FERRANDO E GUGLIELMO
... per implorar pietade in flebil metro!
FIORDILIGI
Stelle! Che ardir!
DORABELLA
Sorella, che facciamo?
MOZART COSI FAN TUTTE
FIORDILIGI
Temerari (Despina sorte impaurita.), sortite fuori di questo
loco, e non profani l’alito infausto degli infami detti nostro
cor, nostro orecchio e nostri affetti. Invan per voi, per gli
altri invan si cerca le nostr’alme sedur. L’intatta fede che

GUGLIELMO
A vos pieds voici Madame deux coupables, deux hors-laloi
! Amour...
DORABELLA
Dieux ! Qu’entends-je ?
FERRANDO
Amour, le dieu... si puissant, nous conduit à vous.
(Les femmes battent en retraite, les hommes les suivent.)
GUGLIELMO
A peine vue la lumière de vos brillantissimes prunelles...
FERRANDO
... Qu’à ces vives étincelles...
GUGLIELMO
... Petits papillons amoureux et mourants...
FERRANDO
... Nous volons devant vous...
GUGLIELMO
... Et à côté et derrière...
FERRANDO & GUGLIELMO
... pour implorer votre pitié avec de pauvres rimes.
FIORDILIGI
Ciel ! Quelle audace !
ACTE I SCÈNE 11
DORABELLA
Ma sœur, que faisons-nous ?
FIORDILIGI
Téméraires (Despina sort apeurée.), sortez de ce lieu, et
que le souffle infâme de vos paroles ne profane pas notre
c œ u r, notre oreille et notre amour. Pour vous, pour les
autres, il est vain de chercher à séduire notre âme. La foi
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86
per noi già si diede ai cari amanti saprem loro serbar
infino a morte, a dispetto del mondo, e della sorte.
N o 14. Aria
FIORDILIGI
Come scoglio immoto resta
Contra i venti, e la tempesta, e la tempesta,
Così ognor quest’alma è forte
Nella fede e nell’amor.
Con noi nacque quella face
Che ci piace, e ci consola;
E potrà la morte sola, la morte sola
Far che cangi affetto il cor, far che cangi
Far che cangi affetto il cor,
Far che cangi affetto il cor.
Come scoglio immoto resta
Contra i venti e la tempesta,
Così ognor quest’alma è forte
Nella fede e nell’amor.
Rispettate, anime ingrate,
Questo esempio di costanza,
E una barbara speranza
Non vi renda audaci ancor,
E una barbara speranza
Non vi renda audaci ancor...
(Van per partire. Ferrando la richiama,
Guglielmo richiama l’altra.)
FERRANDO (a Fiordiligi)
Ah non partite!
MOZARTCOSI FAN TUTTE
Recitativo
GUGLIELMO (a Dorabella)
Ah barbare, restate!
(a Don Alfonso) Che vi pare?
DON ALFONSO
Aspettate.
Per carità, ragazze, non mi fate più far trista figura.

pure que nous avons déjà donnée à nos chers amants,
nous saurons la servir jusqu’à la mort, contre le monde et
contre le destin.
N o 14. Aria
FIORDILIGI
Comme le roc reste de marbre
Contre les vents et la tempête,
Ainsi pour jamais cette âme est forte
En sa foi et en son amour.
Avec nous naquit cette lumière
Que nous aimons et qui nous console ;
Et seule la mort, la mort seule, pourra
Faire changer l’inclination de notre cœur, faire changer
Faire changer l’inclination de notre cœur,
Faire changer l’inclination de notre cœur.
Comme le roc reste de marbre
Contre les vents et la tempête
Ainsi pour jamais cette âme est forte
En sa foi et en son amour.
Respectez, âmes sans grâce,
Cet exemple de constance
Et qu’une espérance barbare
Ne vous rende plus audacieux,
Et qu’une espérance barbare
Ne vous rende plus audacieux...
(Elle s’apprête à sortir. Ferrando la rappelle.
Guglielmo rappelle l’autre.)
FERRANDO (à Fiordiligi)
Ah, ne partez pas !
ACTE I SCÈNE 11
Récitatif
GUGLIELMO (à Dorabella)
Ah, restez, barbare, restez !
(à Don Alfonso) Que vous en semble ?
DON ALFONSO
Attendez.
De grâce, jeunes filles, ne me faites plus faire triste figure.
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88
DORABELLA (con fuoco)
E che pretendereste?
DON ALFONSO
Eh, nulla... ma mi pare... che un pochin di dolcezza...
Alfin son galantuomini, e sono amici miei.
FIORDILIGI
Come! E udire dovrei?
MOZART COSI FAN TUTTE
GUGLIELMO
. . . Le nostre pene e sentirne pietà! La celeste beltà
degl’occhi vostri la piaga aprì nei nostri cui rimediar può
solo il balsamo d’amore. Un solo istante il core aprite, o
belle, a sue dolci facelle; o a voi davanti spirar vedrete i
più fedeli amanti.
N o 15. Aria
GUGLIELMO
Non siate ritrosi occhietti vezzosi;
Due lampi amorosi vibrate un po’ qua.
Felici rendeteci,
Amate con noi,
E noi felicissime faremo anche voi;
Guardate, toccate, il tutto osservate;
Siam due cari matti,
Siam forti e ben fatti,
E come ognun vede, sia merto, sia caso,
Abbiamo bel piede, bell’occhio, bel naso;
Guardate, bel piede, osservate, bell’occhio,
Toccate, bel naso, il tutto osservate;
E questi mustacchi chiamare si possono
Trionfi degli uomini, pennacchi d’amor,
(Qui partono le donne.)
Trionfi degli uomini, pennacchi d’amor,
Trionfi, pennachi, mustacchi!
(Guglielmo et Ferrando ride smoderamente.)

DORABELLA (avec flamme)
Et que prétendiez-vous ?
ACTE I SCÈNE 11
DON ALFONSO
Eh, rien... mais il me semble... qu’un peu de douceur. . .
Après tout, ils sont gentilshommes et ils sont mes amis.
FIORDILIGI
Comment ! Et je devrais entendre ?...
GUGLIELMO
... Nos souffrances, et en éprouver de la pitié ! La céleste
beauté de vos yeux a ouvert la blessure dans les nôtres, que
le baume d’amour seul peut soigner. Pour un seul instant,
ouvrez votre cœur, ô belles, à ses douces lueurs ; vous verrez
alors expirer devant vous les plus fidèles amants.
N o 15. Aria
GUGLIELMO
Ne soyez pas timides, petits yeux jolis ;
Dardez un peu vers là deux rayons amoureux.
Rendez-nous heureux,
Aimez avec nous,
Et nous vous rendrez bienheureuses aussi ;
Regardez, touchez, examinez le tout ;
Nous sommes deux gentils fous,
Nous sommes forts et bien faits,
Et comme chacun peut le voir, soit mérite, soit hasard,
Nous avons beaux pieds, beaux yeux, beaux nez ;
Regardez, beaux pieds, examinez, beaux yeux
Touchez, beaux nez, examinez le tout ;
Et ces moustaches qu’on peut baptiser
Triomphes des hommes, panaches d’amour,
(A ce moment, les femmes sortent.)
Triomphes des hommes, panaches d’amour,
Triomphes, panaches, moustaches !
(Guglielmo et Ferrando rient à gorge déployée.)
89

90
DON ALFONSO
E voi ridete?
FERRANDO E GUGLIELMO
Certo ridiamo.
DON ALFONSO
Ma cosa avete?
FERRANDO E GUGLIELMO
Già lo sappiamo.
DON ALFONSO
Ridete piano!
FERRANDO E GUGLIELMO
Parlate invano,
SCENA DODICESIMA
N o 16. Terzetto
DON ALFONSO
Ridete piano piano piano piano!
FERRANDO E GUGLIELMO
Parlate invano, parlate invano.
DON ALFONSO
Se vi sentissero, se vi scoprissero,
Si guasterebbe tutto l’affar,
Si guasterebbe tutto l’affar.
FERRANDO E GUGLIELMO
Ah, che dal ridere...
DON ALFONSO
Mi fa da ridere,
FERRANDO E GUGLIELMO
L’alma dividere,
MOZARTCOSI FAN TUTTE

DON ALFONSO
Et vous riez ?
FERRANDO & GUGLIELMO
C’est sûr nous rions.
DON ALFONSO
Mais qu’avez-vous ?
FERRANDO & GUGLIELMO
Nous le savons déjà.
DON ALFONSO
Riez doucement !
FERRANDO & GUGLIELMO
Vous parlez en vain,
SCÈNE 12
N o 16. Terzetto
DON ALFONSO
Riez doucement, doucement !
FERRANDO & GUGLIELMO
Vous parlez en vain, vous parlez en vain.
DON ALFONSO
Si elles vous entendaient, si elles vous découvraient,
Toute l’affaire serait gâchée,
Toute l’affaire serait gâchée.
FERRANDO & GUGLIELMO
Ah, par un tel rire...
DON ALFONSO
Il me fait rire,
FERRANDO & GUGLIELMO
L’âme se déchire,
ACTE I SCÈNE 12
91

92
DON ALFONSO
Questo lor ridere,
Ma so che in piangere
Dèe terminar,
In piangere dèe terminar...
FERRANDO E GUGLIELMO
Ah ah ah ah ah
Ah ah ah ah ah
Che le viscere sento scoppiar...
Recitativo
DON ALFONSO
Si può sapere un poco la cagion di quel riso?
GUGLIELMO
Eh cospettaccio! Non vi pare che abbiam giusta ragione,
il mio caro padrone?
FERRANDO (scherzando)
Quanto pagar volete, e a monte è la scommessa?
GUGLIELMO (scherzando)
Pagate la metà.
FERRANDO (come sopra)
Pagate solo ventiquattro zecchini.
DON ALFONSO
Poveri innocentini! Venite qui, vi voglio porre il ditino in bocca!
GUGLIELMO
E avete ancora coraggio di fiatar?
DON ALFONSO
Avanti sera ci parlerem.
FERRANDO
Quando volete.
MOZARTCOSI FAN TUTTE

DON ALFONSO
Leur rire,
Mais je sais qu’en pleurs
Il doit se terminer,
En pleurs il doit se terminer...
FERRANDO & GUGLIELMO
Ah ah ah ah ah
Ah ah ah ah ah
Et je sens mes entrailles crever...
Récitatif
DON ALFONSO
Peut on savoir un peu la raison de ce rire.
GUGLIELMO
Eh morbleu ! Ne croyez-vous pas qu’il y a de bonnes raisons,
mon cher maître ?
FERRANDO (plaisantant)
Combien voulez-vous payer, le pari est à l’eau ?
GUGLIELMO (plaisantant)
Payez la moitié.
FERRANDO (même jeu)
Payez seulement vingt-quatre sequins.
DON ALFONSO
Pauvres petits innocents ! Venez là, je vais vous faire
sucer le pouce !
GUGLIELMO
Et vous avez encore le courage d’ouvrir la bouche ?
DON ALFONSO
Nous en parlerons avant ce soir.
FERRANDO
Quand vous voulez.
ACTE I SCÈNE 12
93

94
DON ALFONSO
Intanto silenzio, e ubbidienza fino a doman mattina.
GUGLIELMO
Siam soldati, e amiam la disciplina.
DON ALFONSO
Orbene: andate un poco ad attendermi entrambi in giardinetto:
colà vi manderò gli ordini miei.
GUGLIELMO
Ed oggi non si mangia?
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FERRANDO
Cosa serve? A battaglia finita fia la cena per noi più saporita.
N o 17. Aria
FERRANDO
Un’aura amorosa del nostro tesoro
Un dolce ristoro al cor porgerà.
Un’aura amorosa del nostro tesoro
Un dolce ristoro al cor porgerà,
Un dolce ristoro al cor porgerà.
Al cor che nudrito da speme d’amore,
Da speme d’amore
Di un’esca migliore bisogno non ha,
Di un’esca migliore bisogno non ha,
Bisogno non ha, bisogno non ha.
Un’aura amorosa del nostro tesoro
Un dolce ristoro al cor porgerà.
Un’aura amorosa del nostro tesoro
Un dolce ristoro al cor porgerà,
Un dolce ristoro al cor porgerà.
(Ferrando e Guglielmo partono.)

ACTE I SCÈNE 12
DON ALFONSO
En attendant silence et obéissance jusqu’à demain matin.
GUGLIELMO
Nous sommes soldats et nous aimons la discipline.
DON ALFONSO
Eh bien ! Allez un peu m’attendre tous les deux dans le
petit jardin : là, je vous ferai envoyer mes ordres.
GUGLIELMO
Et on ne mange pas aujourd’hui ?
FERRANDO
Pourquoi faire ? Après la bataille, le dîner sera plus savoureux.
N o 17. Aria
FERRANDO
Une brise amoureuse de notre trésor
Donnera à notre cœur un délicieux réconfort.
Une brise amoureuse de notre trésor
Donnera à notre cœur un délicieux réconfort,
Donnera à notre cœur un délicieux réconfort.
A un cœur nourri par l’espoir de l’amour,
Par l’espoir de l’amour,
Il n’est pas besoin d’un meilleur aliment,
Il n’est pas besoin d’un meilleur aliment,
Pas besoin, pas besoin.
Une brise amoureuse de notre trésor
Donnera à notre cœur un délicieux réconfort.
Une brise amoureuse de notre trésor
Donnera à notre cœur un délicieux réconfort,
Donnera à notre cœur un délicieux réconfort.
(Ferrando et Guglielmo sortent.)
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96
SCENA TREDICESIMA
Recitativo
DON ALFONSO
Oh, la saria da ridere: sì poche son le donne costanti in
questo mondo; e qui ve ne son due... Non sarà nulla...
(Entra Despina.) Vieni, vieni, fanciulla, e dimmi un poco
dove sono, e che fan le tue padrone.
DESPINA
Le povere padrone stanno nel giardinetto a lagnarsi
coll’aria, e colle mosche d’aver perso gli amanti.
DON ALFONSO
E come credi che l’affar finirà?
Vogliam sperare che faranno giudizio?
DESPINA
Io lo farei; e dove piangon esse io riderei. Disperarsi,
strozzarsi, perché parte un amante? Guardate che pazzia!
Se ne pigliano due, s’uno va via.
DON ALFONSO
Brava, questa è prudenza. (Fra sé) Bisogna impuntigliarla.
DESPINA
È legge di natura e non prudenza sola: amor cos’è?
P i a c e r, comodo, gusto, gioia, divertimento, passatempo,
allegria: non è più amore se incomodo diventa: se invece
di piacer nuoce e tormenta.
DON ALFONSO
Ma intanto quelle pazze...
DESPINA
Quelle pazze faranno a modo nostro. È buon che sappiano
d’esser amate da color.
DON ALFONSO
Lo sanno.
MOZART COSI FAN TUTTE

SCÈNE 13
Récitatif
DON ALFONSO
Oh, il y aurait matière à rire : les femmes fidèles sont si
peu nombreuses en ce monde ; et ici, en voici deux... Ça
ne va pas être rien... (Entre Despina.) Viens, viens, jeune
fille, et dis-moi un peu où sont et que font tes maîtresses.
DESPINA
Les pauvres maîtresses sont dans le jardinet à se lamenter
avec la brise et avec les mouches d’avoir perdu leurs
amants.
DON ALFONSO
Et comment crois-tu que l’affaire finira ?
Pouvons-nous espérer qu’elles feront preuve de sagesse ?
DESPINA
Moi, je ferais preuve ; et au lieu de pleurer, je rirais. Se
d é s e s p é r e r, s’asphyxier parce qu’un amant est parti ?
Voyez quelle folie ! Si l’un s’en va, on en saisit deux.
DON ALFONSO
Bravo, ça, c’est de la prévoyance. (A part) Il faut la flatter.
DESPINA
C’est la loi naturelle, pas seulement de la prévoyance :
q u’ e s t -ce que l’amour ? Plaisir, agrément, délice, joie,
divertissement, passe-temps, allégresse : ce n’est plus
l ’ a m o u r s’il devient désagréable, si au lieu de plaire, il
blesse et tourmente.
DON ALFONSO
Mais en attendant, ces folles...
DESPINA
Ces folles feront à notre manière. Il faut qu’elles sachent
être aimées par ceux-là.
DON ALFONSO
Elles le savent.
ACTE I SCÈNE 13
97

98
DESPINA
Dunque riameranno. Diglielo, si suol dire, e lascia fare al
diavolo.
DON ALFONSO
Ma come far vuoi perché ritornino or che partiti sono, e
che li sentano e tentare si lascino queste due bestioline?
DESPINA
A me lasciate la briga di condur tutta la macchina.
Quando Despina macchina una cosa non può mancar
d’effetto: ho già menati mill’uomini pel naso, saprò menar
due femmine. Son ricchi i due Monsieurs Mustacchi?
DON ALFONSO
Son ricchissimi!
DESPINA
Dove son?
DON ALFONSO
Sulla strada attendendo mi stanno.
DESPINA
Ite, e sul fatto per la picciola porta a me riconduceteli:
v’aspetto nella camera mia: purché tutto facciate quel
c h’io v’ordinerò, pria di domani, i vostri amici canteran
vittoria: ed essi avranno il gusto, ed io la gloria.
(Partono.)
MOZARTCOSI FAN TUTTE
SCENA QUATTORDICESIMA
Giardinetto gentile. Due sofà d’erba ai lati.
N o 18. Finale
FIORDILIGI E DORABELLA
Ah che tutta in un momento
Si cangiò la sorte mia...

DESPINA
Donc elles aimeront à nouveau. Comme on dit, dis-le lui
et laisse faire le diable.
DON ALFONSO
Mais comment veux-tu faire pour que reviennent ceux qui
sont partis, et que ces deux bêtasses les entendent et se
laissent tenter ?
DESPINA
Laissez-moi le soin de mener toute la machination. Quand
Despina machine quelque chose, l’effet ne peut manquer : j’ai
déjà mené mille hommes par le bout du nez, je saurai mener
deux femmes. Ils sont riches, les deux M o n s i e u r sM o u s t a c h e s?
DON ALFONSO
Ils sont richissimes !
DESPINA
Où sont-ils ?
DON ALFONSO
Dans la rue, ils m’attendent.
DESPINA
Allez, et ramenez-les moi tout de suite par la petite porte :
je vous attends dans ma chambre : pourvu que vous fassiez
tout ce que je vous ordonnerai, avant demain, vos amis
chanteront victoire : ils auront les délices et moi la gloire.
(Ils sortent.)
ACTE I SCÈNE 14
SCÈNE 14
Joli petit jardin. De côté, deux bancs de gazon.
N o 18. Finale
FIORDILIGI & DORABELLA
Ah comme tout mon destin
S’est changé en un instant...
99

100
FIORDILIGI
Ah che un mar pien di tormento,
DORABELLA E FIORDILIGI
Ah che un mar pien di tormento,
È la vita omai per me.
Finché meco il caro bene
Mi lasciar le ingrate stelle,
Non sapea cos’eran pene,
Non sapea languir cos’è, non sapea cos’eran pene,
Non sapea languir cos’è, no.
Ah che tutta in un momento
Si cangiò la sorte mia...
FIORDILIGI
Ah che un mar pien di tormento,
DORABELLA E FIORDILIGI
Ah che un mar pien di tormento,
È la vita omai per me.
SCENA QUINDICESIMA
FERRANDO E GUGLIELMO (dentro le quinte)
Si mora, sì, si mora
Onde appagar le ingrate.
DON ALFONSO (dentro le quinte)
C’è una speranza ancora;
Non fate, oh dei, non fate.
FIORDILIGI E DORABELLA
Stelle, che grida orribili!
FERRANDO E GUGLIELMO
Lasciatemi!
DON ALFONSO
Aspettate!
MOZARTCOSI FAN TUTTE

FIORDILIGI
Ah, une mer emplie de tourment,
DORABELLA & FIORDILIGI
Ah, une mer emplie de tourment,
Est désormais la vie pour moi.
Tant qu’avec moi, le ciel ingrat
A laissé mon cher aimé,
J’ignorais ce qu’était les peines,
Je ne savais pas ce qu’est souffrir,
je ne savais pas ce qu’étaient les peines,
Je ne savais pas ce qu’est souffrir, non.
Ah, comme tout mon destin
S’est changé en un instant...
FIORDILIGI
Ah, une mer emplie de tourment,
DORABELLA & FIORDILIGI
Ah, une mer emplie de tourment,
Est désormais la vie pour moi.
SCÈNE 15
FERRANDO & GUGLIELMO (dans la coulisse)
Mourons, oui, mourons
Pour assouvir les ingrates.
DON ALFONSO (dans la coulisse)
Il y a encore un espoir ;
Ne faites pas ça, oh dieux, ne faites pas ça.
FIORDILIGI & DORABELLA
Ciels, quels cris horribles !
FERRANDO & GUGLIELMO
Laissez-moi !
DON ALFONSO
Attendez !
ACTE I SCÈNE 15
101

102
FERRANDO E GUGLIELMO
Lasciatemi!
DON ALFONSO
Aspettate!
(Ferrando e Guglielmo, portando ciascuno una boccetta,
entrano seguiti da Don Alfonso.)
FERRANDO E GUGLIELMO
L’arsenico mi liberi
Di tanta crudeltà.
(Bevono e gittan via il boccette;
nel voltarsi vedono le due donne.)
FIORDILIGI E DORABELLA
Stelle, un velen fu quello?
DON ALFONSO
Veleno buono e bello,
Che ad essi in pochi istanti la vita toglierà.
FIORDILIGI E DORABELLA
Il tragico spettacolo
Gelare il cor mi fa.
FERRANDO E GUGLIELMO
Barbare, avvicinatevi,
Barbare, avvicinatevi;
D’un disperato affetto
Mirate il triste effetto
E abbiate almen pietà.
FIORDILIGI E DORABELLA
Il tragico spettacolo
Gelare il cor mi fa.
MOZART COSI FAN TUTTE
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO, DON ALFONSO, GUGLIELMO
Ah, che del sole il raggio
Fosco per me diventa.

FERRANDO & GUGLIELMO
Laissez-moi !
DON ALFONSO
Attendez !
(Portant chacun un flacon, Ferrando et Guglielmo
entrent, suivis de Don Alfonso.)
FERRANDO & GUGLIELMO
Que l’arsenic me libère
De tant de cruauté.
(Ils boivent et jettent les flacons ; en se tournant,
ils voient les deux femmes.)
FIORDILIGI & DORABELLA
Ciel, était-ce du poison ?
DON ALFONSO
Du poison, bel et bon,
Qui en peu d’instants leur enlèvera la vie.
FIORDILIGI & DORABELLA
Ce spectacle tragique
Me glace le cœur.
FERRANDO & GUGLIELMO
Barbares, approchez-vous,
Barbares, approchez-vous;
D’un sentiment désespéré,
Regardez le triste effet
Et ayez au moins pitié.
FIORDILIGI & DORABELLA
Ce spectacle tragique
Me glace le cœur.
ACTE I SCÈNE 15
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO, DON ALFONSO, GUGLIELMO
Ah, comme les rayons du soleil
Deviennent sombres à mes yeux.
103

104
Tremo: le fibre e l’anima
Par che mancar si senta,
Né può la lingua, o il labbro
Accenti articolar.
Né può la lingua, o il labbro
Accenti articolar.
DON ALFONSO
Giacché a morir vicini
Sono quei meschinelli,
Pietade almeno a quelli
Cercate di mostrar.
FIORDILIGI E DORABELLA
Gente, gente, accorrete, gente!
Nessuno, oddio, ci sente!
Despina! Despina!
DESPINA (di dentro)
Chi mi chiama?
FIORDILIGI E DORABELLA
Despina! Despina!
DESPINA (in scena)
Cosa vedo!
Morti i meschini io credo,
O prossimi a spirar.
DON ALFONSO
Ah che purtroppo è vero!
Furenti, disperati,
Si sono avvelenati:
Oh, amore singolar!
DESPINA
Abbandonar i miseri
Saria per voi vergogna:
Soccorrerli bisogna.
MOZART COSI FAN TUTTE
FIORDILIGI, DORABELLA E DON ALFONSO
Cosa possiam
Mai far?

Je tremble : la chair et l’âme
Semblent se dérober,
La langue ni les lèvres
Ne peuvent articuler un son.
La langue ni les lèvres
Ne peuvent articuler un son.
DON ALFONSO
Puisque ces deux malheureux
Sont proches de la mort,
Au moins essayez
De leur montrer de la pitié.
FIORDILIGI & DORABELLA
Nos gens, nos gens, accourez, nos gens !
Personne, oh dieu, ne nous entend !
Despina ! Despina !
DESPINA (de l’intérieur)
Qui m’appelle ?
FIORDILIGI & DORABELLA
Despina ! Despina !
DESPINA (en scène)
Que vois-je !
Je crois que les malheureux sont morts
Ou tout près d’expirer.
DON ALFONSO
Ah ce n’est que trop vrai !
Furieux, désespérés,
Ils se sont empoisonnés :
Oh, amour étrange !
ACTE I SCÈNE 15
DESPINA
Abandonnez les malheureux
Serait un déshonneur pour vous :
Il faut les secourir.
FIORDILIGI, DORABELLA & DON ALFONSO
Que pouvons-nous
Bien faire ?
105

106
DESPINA
Soccorrerli
Bisogna
FIORDILIGI, DORABELLA E DON ALFONSO
Cosa possiam mai far?
DESPINA
Di vita ancor dàn segno:
Colle pietose mani
Fate un po’ lor sostegno;
(a Don Alfonso) E voi con me correte: un medico,
Un antidoto voliamo a ricercar.
Un medico, un antidoto, voliamo a ricercar
Voliamo a ricercar, voliamo a ricercar.
(Parte con Don Alfonso.)
FIORDILIGI E DORABELLA
Dei, che cimento è questo!
FERRANDO E GUGLIELMO (a parte)
Più bella commediola...
FIORDILIGI E DORABELLA
Dei, che cimento è questo!
FERRANDO E GUGLIELMO (a parte)
... Non si potea
Trovar.
FIORDILIGI E DORABELLA
Evento
Più
Funesto
Non si potea trovar...
FERRANDO E GUGLIELMO
Più bella commediola
Non si potea trovar...
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FERRANDO E GUGLIELMO (ad alta voce)
Ah!

DESPINA
Il faut
Les secourir.
FIORDILIGI, DORABELLA & DON ALFONSO
Que pouvons-nous bien faire ?
DESPINA
Ils donnent encore des signes de vie :
De vos mains charitables,
Donnez-leur un peu de réconfort ;
(à Don Alfonso) Et vous, courez avec moi : un médecin
Un antidote, nous volons à leur recherche.
Un médecin, un antidote, nous volons à leur recherche,
Volons à leur recherche, volons à leur recherche.
(Elle sort avec Don Alfonso.)
FIORDILIGI & DORABELLA
Dieux, quelle épreuve !
FERRANDO & GUGLIELMO (à part)
Une plus belle petite comédie...
FIORDILIGI & DORABELLA
Dieux, quelle épreuve !
FERRANDO & GUGLIELMO (à part)
... On ne pouvait
L’inventer.
FIORDILIGI & DORABELLA
Evénement
Plus
Funeste
On ne pouvait en trouver...
ACTE I SCÈNE 15
FERRANDO & GUGLIELMO
Une plus belle petite comédie
On ne pouvait l’inventer...
FERRANDO & GUGLIELMO (à voix haute)
Ah !
107

108
FIORDILIGI E DORABELLA (stando lontano dagli amanti)
Sospiran gli infelici.
FIORDILIGI
Che facciamo?
DORABELLA
Tu che dici?
FIORDILIGI
In momenti sì dolenti,
Chi potriali abbandonar?
DORABELLA (si accosta un poco)
Che figure interessanti!
FIORDILIGI (si accosta un poco)
Possiam farci un poco avanti.
DORABELLA
Ha freddissima la testa.
FIORDILIGI
Fredda fredda è ancora questa.
DORABELLA
Ed il polso?
FIORDILIGI
Io non gliel sento.
DORABELLA
Questo batte lento lento.
FIORDILIGI
Ah se tarda ancor l’aita,
FIORDILIGI E DORABELLA
Ah se tarda ancor l’aita
Speme più non v’è di vita.
MOZARTCOSI FAN TUTTE

FIORDILIGI & DORABELLA (se tenant éloignées des amants)
Les malheureux soupirent !
FIORDILIGI
Que faire ?
DORABELLA
Qu’en dis-tu ?
FIORDILIGI
En des instants si douloureux,
Qui pourrait les abandonner ?
DORABELLA (s’approchant un peu)
Quels visages intéressants !
FIORDILIGi (s’approchant un peu)
Nous pourrions nous approcher un peu.
DORABELLA
Il a le front glacé.
FIORDILIGI
Froid, froid est aussi celui-ci.
DORABELLA
Et le pouls ?
FIORDILIGI
Je ne le sens pas.
ACTE I SCÈNE 15
DORABELLA
Celui-ci bat lentement, lentement.
FIORDILIGI
Ah, si les secours tardent encore
FIORDILIGI & DORABELLA
Ah, si les secours tardent encore,
Plus d’espoir de vie pour eux.
109

110
FERRANDO E GUGLIELMO (sotto voce)
Più domestiche e trattabili
Sono entrambe diventate:
FIORDILIGI E DORABELLA (sotto voce)
Poverini!
La lor morte
FERRANDO E GUGLIELMO
Sta’ a veder che lor pietate
Va in amore a terminar.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FIORDILIGI E DORABELLA
Mi farebbe lagrimar.
Si, mi farebbe lagrimar,
Lagrimar, lagrimar, lagrimar.
FERRANDO E GUGLIELMO
Va in amore a terminar,
A terminar, a terminar, a terminar
SCENA SEDICESIMA
DON ALFONSO
Eccovi il medico, signore belle!
FERRANDO E GUGLIELMO
Despina in maschera, che trista pelle!
DESPINA (travestita da medico)
Salvete, amabiles bones puelles!
FIORDILIGI E DORABELLA
Parla un linguaggio che non sappiamo.
DESPINA
Come comandano dunque parliamo:
So il greco e l’arabo,
So il turco e il vandalo;
Lo svevo e il tartaro
So ancor parlar.

FERRANDO & GUGLIELMO (à mi-voix)
Plus cordiales et plus affables,
Toutes deux le sont devenues :
FIORDILIGI & DORABELLA (à mi-voix)
Pauvres petits!
Leur mort...
FERRANDO & GUGLIELMO
Reste à voir si leur pitié
En amour va se terminer.
FIORDILIGI & DORABELLA
... Me ferait pleurer.
Oui, me ferait pleurer,
Pleurer, pleurer, pleurer.
ACTE I SCÈNE 16
FERRANDO & GUGLIELMO
En amour va se terminer,
Se terminer, se terminer, se terminer.
SCÈNE 16
DON ALFONSO
Voici le médecin, belles dames !
FERRANDO & GUGLIELMO
Despina déguisée, ce n’est pas triste !
DESPINA (déguisée en médecin)
Salvete, amabiles bones puelles !
FIORDILIGI & DORABELLA
Il parle une langue que nous ne connaissons pas.
DESPINA
Parlons donc, comme vous le commandez :
Je sais le grec et l’arabe,
Je sais le turc et le vandale ;
Je sais aussi parler
Le souabe et le tartare.
111

112
DON ALFONSO
Tanti linguaggi per sé conservi,
Quei miserabili per ora osservi:
Preso hanno il tossico; che si può far?
FIORDILIGI E DORABELLA
Signor dottore, che si può far?
DESPINA (tocca il polso e la fronte all’uno ed all’altro)
Saper bisognami
Pria la cagione e quinci l’indole
Della pozione;
Se calda o frigida, se poca o molta,
Se in una volta ovvero in più.
FIORDILIGI, DORABELLA E DON ALFONSO
Preso han l’arsenico, signor dottore;
Qui dentro il bebbero, la causa è amore,
Ed in un sorso sel mandar giù.
DESPINA
Non vi affannate, non vi turbate,
Non vi turbate, non vi affannate,
Non vi affannate, non vi turbate;
Ecco una prova di mia virtù.
FIORDILIGI E DORABELLA
Egli ha di un ferro
La man fornita.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DESPINA
Questo è quel pezzo di calamita:
Pietra mesmerica!
Ch’ebbe l’origine nell’Alemagna,
Che poi sì celebre là in Francia fu.
(Tocca con un pezzo di calamita la testa ai finti infermi
e striscia dolcemente i loro corpi per lungo.)
FIORDILIGI, DORABELLA E DON ALFONSO
Come si muovono, torcono, scuotono,
In terra il cranio presto percuotono.

DON ALFONSO
Gardez pour vous tant de langues,
Pour l’instant examinez ces malheureux :
Ils ont pris du poison ; que peut-on faire ?
FIORDILIGI & DORABELLA
Monsieur le docteur, que peut-on faire ?
DESPINA (prenant le pouls et touchant le front
de l’un et de l’autre)
J’ai besoin de savoir
D’abord la cause, ensuite la nature
De la potion ;
Si chaude ou froide, peu ou beaucoup,
Si prise en une ou plusieurs fois.
FIORDILIGI, DORABELLA & DON ALFONSO
Ils ont pris de l’arsenic, Monsieur le docteur ;
Ils l’ont bu là-dedans, le motif est l’amour,
Et ils l’ont absorbé en un seul trait.
DESPINA
Ne vous angoissez pas, ne vous tourmentez pas,
Ne vous tourmentez pas, ne vous angoissez pas,
Ne vous angoissez pas, ne vous tourmentez pas ;
Voici une preuve de mon pouvoir.
FIORDILIGI & DORABELLA
Il a un bout de fer
Dans la main.
ACTE I SCÈNE 16
DESPINA
Ceci est ce morceau d’aimant :
La pierre de Mesmer !
Qui eut son origine en Allemagne,
Qui ensuite fut si célèbre en France.
(Elle touche avec un morceau d’aimant la tête des faux
malades et caresse doucement leurs corps de haut en bas.)
FIORDILIGI, DORABELLA & DON ALFONSO
Comme ils se bougent, tordent, secouent,
Ils vont se fracasser le crâne par terre.
113

114
DESPINA
Ah lor la fronte tenete su.
FIORDILIGI E DORABELLA (metton la mano alla fronte dei
amanti)
Eccoci pronte! Eccoci pronte!
DESPINA
Tenete forte! Tenete forte!
Forte, forte! Corraggio!
Or liberi siete da morte.
FIORDILIGI, DORABELLA E DON ALFONSO
Attorno guardano,
Forze riprendono:
Ah questo medico vale un Perù.
Ah questo medico vale un Perù.
FERRANDO E GUGLIELMO (sorgono in piedi)
Dove son!
Che loco è questo!
Chi è colui! Color chi sono!
Son di Giove innanzi al trono?
(Ferrando a Fiordiligi, e Guglielmo a Dorabella)
Sei tu Palla, o Citerea?
No, tu sei l’alma mia Dea:
Ti ravviso al dolce viso
E alla man ch’or ben conosco
E che sola è il mio tesor.
(Ferrando e Guglielmo abbracciano le amanti teneramente
e bacian loro la mano.)
DESPINA E DON ALFONSO
Sono effetti ancor del tosco,
Non abbiate alcun timor.
FIORDILIGI E DORABELLA
Sarà ver, ma tante smorfie
Fanno torto al nostro onor.
MOZARTCOSI FAN TUTTE

DESPINA
Ah, soutenez-leur la tête.
ACTE I SCÈNE 16
FIORDILIGI ET DORABELLA (mettant la main au front
des amants)
Nous voici prêtes ! Nous voici prêtes !
DESPINA
Tenez bon ! Tenez bon !
Bon, bon ! Courage !
A présent, vous êtes libérés de la mort.
FIORDILIGI, DORABELLA & DON ALFONSO
Ils regardent autour d’eux,
Il reprennent des forces :
Ah, ce médecin, c’est le Pérou.
Ah, ce médecin, c’est le Pérou.
FERRANDO & GUGLIELMO (se relevant)
Où suis-je ?
Quel endroit est celui ci ?
Qui est celui-là ? Qui sont ceux là ?
Suis-je devant le trône de Jupiter ?
(Ferrando à Fiordiligi, et Guglielmo à Dorabella)
Es-tu Pallas ou Vénus ?
Non, tu es la déesse de mon âme :
Je te reconnais à ton doux visage
Et à la main qu’à présent je reconnais
Et qui est mon seul trésor.
(Ferrando et Guglielmo enlacent tendrement les amantes
et leur baisent la main.)
DESPINA & DON ALFONSO
Ce sont encore les effets du poison,
N’ayez aucune crainte.
FIORDILIGI & DORABELLA
Il est vrai, mais tant de séductions,
Portent tort à notre honneur.
115

116
DESPINA E DON ALFONSO
Sono effetti ancor del tosco,
Non abbiate alcun timor, non abbiate alcun timor.
FERRANDO E GUGLIELMO
Dalla voglia ch’ho di ridere
Il polmon mi scoppia or or.
Dalla voglia ch’ho di ridere
Il polmon mi scoppia or or.
FIORDILIGI E DORABELLA
Sarà ver, ma tante smorfie
Fanno torto al nostro onor.
FERRANDO E GUGLIELMO (a Fiordiligi e a Dorabella)
Per pietà, bell’idol mio!
FIORDILIGI E DORABELLA
Più resister non poss’io.
FERRANDO E GUGLIELMO
Volgi a me le luci liete!
DESPINA E DON ALFONSO
Sono effetti ancor del tosco.
FIORDILIGI E DORABELLA
Più resister non poss’io
DESPINA E DON ALFONSO
In poch’ore, lo vedrete,
Per virtù del magnetismo
Finirà quel parossismo,
Torneranno al primo umor.
FERRANDO E GUGLIELMO
Dalla voglia ch’ho di ridere...
FIORDILIGI E DORABELLA
Più resister non poss’io.
MOZARTCOSI FAN TUTTE

DESPINA & DON ALFONSO
Ce sont encore les effets du poison,
N’ayez aucune crainte.
FERRANDO & GUGLIELMO
J’ai si grande envie de rire
Que mes poumons vont éclater.
J’ai si grande envie de rire
Que mes poumons vont éclater.
FIORDILIGI & DORABELLA
Il est vrai, mais tant de séductions,
Portent tort à notre honneur.
FERRANDO & GUGLIELMO (à Fiordiligi et à Dorabella)
Par pitié, ma belle idole !
FIORDILIGI & DORABELLA
Je ne puis plus résister.
FERRANDO & GUGLIELMO
Tourne vers moi ton regard heureux !
DESPINA & DON ALFONSO
Ce sont encore les effets du poison.
FIORDILIGI & DORABELLA
Je ne puis plus résister.
DESPINA & DON ALFONSO
En peu temps, vous le verrez,
Par la vertu du magnétisme
Finira ce paroxysme,
Ils reviendront à leur humeur initiale.
FERRANDO & GUGLIELMO
J’ai si grande envie de rire...
FIORDILIGI & DORABELLA
Je ne puis plus résister.
ACTE I SCÈNE 16
117

118
FERRANDO E GUGLIELMO
... Il polmon mi scoppia or or.
DESPINA E DON ALFONSO
Sono effetti ancor del
Tosco...
FERRANDO E GUGLIELMO
Ah
Tu sei l’alma mia dea...
DESPINA E DON ALFONSO
... Non abbiate alcun timor.
FERRANDO E GUGLIELMO
... Ti raviso al dolce viso.
FIORDILIGI E DORABELLA
Più resister non poss’io.
DESPINA E DON ALFONSO
Sono effetti ancor del tosco,
Non abbiate alcun timor, non abbiate alcun timor,
Non abbiate alcun timor, non abbiate alcun timor.
FERRANDO E GUGLIELMO
Dalla voglia ch’ho di ridere il polmon mi scoppia or or.
Dalla voglia ch’ho di ridere il polmon mi scoppia or or.
Dalla voglia ch’ho di ridere il polmon mi scoppia or or.
FIORDILIGI E DORABELLA
Sarà ver, ma tante smorfie fanno torto al nostro onor,
Al nostro onor, al nostro onor.
FERRANDO E GUGLIELMO
Dammi un bacio, o mio tesoro;
Un sol bacio, o qui mi moro.
FIORDILIGI E DORABELLA
Stelle! Un bacio?
MOZART COSI FAN TUTTE

FERRANDO & GUGLIELMO
... Que mes poumons vont éclater.
DESPINA & DON ALFONSO
Ce sont encore les effets
Du poison...
FERRANDO & GUGLIELMO
Ah !
Tu es la déesse de mon âme...
DESPINA & DON ALFONSO
... N’ayez aucune crainte.
FERRANDO & GUGLIELMO
... Je te reconnais à ton doux visage.
FIORDILIGI & DORABELLA
Je ne puis plus résister.
DESPINA & DON ALFONSO
Ce sont encore les effets du poison,
N’ayez aucune crainte, n’ayez aucune crainte.
N’ayez aucune crainte, n’ayez aucune crainte.
FERRANDO & GUGLIELMO
J’ai si grande envie de rire que mes poumons vont éclater.
J’ai si grande envie de rire que mes poumons vont éclater.
J’ai si grande envie de rire que mes poumons vont éclater.
FIORDILIGI & DORABELLA
Il est vrai, mais tant de séductions portent tort
à notre honneur,
A notre honneur, à notre honneur.
FERRANDO & GUGLIELMO
Donne-moi un baiser, ô mon trésor ;
Un seul baiser, ou je meurs ici
FIORDILIGI & DORABELLA
Ciel ! Un baiser ?
ACTE I SCÈNE 16
119

120
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DESPINA E DON ALFONSO
Secondate per effetto di bontate.
FIORDILIGI E DORABELLA
Ah che troppo si richiede
Da una fida onesta amante,
Oltraggiata è la mia fede,
Oltraggiato è questo cor, oltraggiato è questo cor!
DESPINA E DON ALFONSO
Un quadretto più giocondo
Non si vide in tutto il mondo;
Quel che più mi fa da ridere
È quell’ira e quel furor.
FERRANDO E GUGLIELMO
Un quadretto più giocondo
Non s’è visto in questo mondo;
Ma non so se finta o vera
Sia quell’ira e quel furor.
FIORDILIGI E DORABELLA
Disperati, attossicati, ite al diavol quanti siete!
Tardi inver vi pentirete,
Se più cresce, se più cresce il mio furor!
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO E GUGLIELMO
Un quadretto più giocondo...
FIORDILIGI E DORABELLA
Disperati, attossicati, ite al diavol quanti siete;
Tardi inver vi pentirete,
Se più cresce il mio furor, il mio furor!
DESPINA E DON ALFONSO
... Non si vide in tutto il mondo;
Quel che più mi fa da ridere, da ridere, da ridere
È quell’ira e quel furor, e quel furor.
FERRANDO E GUGLIELMO
... Non s’è visto in questo mondo;
Ma non so se finta o vera, se finta o vera,
Sia quell’ira e quel furor, e quel furor.

ACTE I SCÈNE 16
DESPINA & DON ALFONSO
Aidez-les, par l’effet de votre bonté.
FIORDILIGI & DORABELLA
Ah, on exige trop.
D’une amante fidèle et honnête,
Ma foi est outragée,
Outragé est ce cœur, outragé est ce cœur !
DESPINA & DON ALFONSO
Une scène plus joyeuse
On n’en voit pas dans le monde entier;
Ce qui me fait le plus rire
C’est cette colère et cette fureur.
FERRANDO & GUGLIELMO
Un scène plus joyeuse
On n’en a pas vu dans ce monde
Mais je ne sais si feintes ou vraies
Sont cette colère et cette fureur.
FIORDILIGI & DORABELLA
Désespérés, intoxiqués, allez au diable autant que vous êtes !
Vous vous repentirez plus tard
Car elle grandit, elle grandit ma fureur.
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO & GUGLIELMO
Une scène plus joyeuse...
FIORDILIGI & DORABELLA
Désespérés, intoxiqués, allez au diable autant que vous êtes ;
Vous vous repentirez plus tard,
Car elle grandit, elle grandit ma fureur !
DESPINA & DON ALFONSO
... On n’en voit pas dans le monde entier;
Ce qui me fait le plus rire, rire, rire
C’est cette colère et cette fureur et cette fureur.
FERRANDO & GUGLIELMO
... On n’en a pas vu dans ce monde ;
Mais je ne sais si feintes ou vraies, si feintes ou vraies
Sont cette colère et cette fureur et cette fureur.
121

122
DESPINA E DON ALFONSO
Ch’io ben so che tanto foco
Cangerassi in quel d’amor.
FERRANDO E GUGLIELMO
Dammi un bacio, o mio tesoro...
FIORDILIGI E DORABELLA
Disperati, attossicati, ite al diavol quanti
Siete!
FERRANDO E GUGLIELMO
... Un
Sol bacio, o qui mi moro...
FIORDILIGI E DORABELLA
Tardi inver vi pentirete se più cresce il mio furor.
FERRANDO E GUGLIELMO
... Un sol bacio!
FIORDILIGI E DORABELLA
Stelle! Un bacio?
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DESPINA E DON ALFONSO
Secondate per effetto di bontate.
FIORDILIGI ET DORABELLA
Ah che troppo
Si richiede da una fida onesta amante,
Oltraggiata è la mia fede,
Oltraggiato è questo cor, oltraggiato è questo cor!
DESPINA E DON ALFONSO
Secondate, secondate per effetto di bontate.
FERRANDO E GUGLIELMO
Dalla voglia ch’ho di ridere
Il polmon mi scoppia or or, mi scoppia or or.
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO E GUGLIELMO
Un quadretto...

DESPINA & DON ALFONSO
Je sais bien que tant de feu
Tournera en feu d’amour.
FERRANDO GUGLIELMO
Donne-moi un baiser, ô mon trésor...
FIORDILIGI & DORABELLA
Désespéré, intoxiqués, allez au diable autant que
Vous êtes !
FERRANDO & GUGLIELMO
... Un
Seul baiser, ou je meurs ici...
FIORDILIGI & DORABELLA
Vous vous repentirez plus tard car elle grandit ma fureur.
FERRANDO & GUGLIELMO
... Un seul baiser !
FIORDILIGI & DORABELLA
Ciel ! Un baiser ?
ACTE I SCÈNE 16
DESPINA & DON ALFONSO
Aidez-les, par l’effet de votre bonté.
FIORDILIGI & DORABELLA
Ah on exige trop
D’une amante fidèle et honnête,
Ma foi est outragée,
Outragé est ce cœur, outragé est ce cœur !
DESPINA & DON ALFONSO
Aidez-les, par l’effet de votre bonté...
FERRANDO & GUGLIELMO
J’ai si grande envie de rire
Que mes poumons vont éclater, mes poumons vont éclater.
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO & GUGLIELMO
Une scène...
123

124
FIORDILIGI E DORABELLA
Disperati, attossicati...
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO E GUGLIELMO
... Più giocondo...
FIORDILIGI E DORABELLA
... ite al diavol quanti
Siete...
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO E GUGLIELMO
... Non
Si vide...
FIORDILIGI E DORABELLA
... Ite al diavol
Quanti siete,
Disperati, attossicati;
Tardi inver vi pentirete se più cresce il mio furor.
DESPINA E DON ALFONSO
... In tutto il mondo
Quel che più mi fa da ridere
E quell’ira et quel furor.
FERRANDO E GUGLIELMO
... In questo mondo
Ma non so se finta o vera
Sia quell’ ira et quel furor.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FIORDILIGI E DORABELLA
Disperati, attossicati, ite al diavol quanti siete!
Tardi inver vi pentirete se più cresce
Se più cresce il mio furor.
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO E GUGLIELMO
Un quadretto più giocondo...
DESPINA E DON ALFONSO
... Non si vide in tutto il mondo;
Quel che più mi fa da ridere, da ridere, da ridere

FIORDILIGI & DORABELLA
Désespérés, intoxiqués...
ACTE I SCÈNE 16
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO & GUGLIELMO
... Plus joyeuse...
FIORDILIGI & DORABELLA
... allez au diable autant que
Vous êtes...
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO & GUGLIELMO
... On n’en
Voit pas...
FIORDILIGI & DORABELLA
... Allez au diable
Autant que vous êtes,
Désespérés, intoxiqués ;
Vous vous repentirez plus tard car elle grandit ma fureur.
DESPINA & DON ALFONSO
... Dans le monde entier
Ce qui me fait le plus rire
C’est cette colère et cette fureur.
FERRANDO & GUGLIELMO
... En ce monde
Mais je ne sais si feintes ou vraies
Sont cette colère et cette fureur.
FIORDILIGI & DORABELLA
Désespérés, intoxiqués, allez au diable autant que vous êtes !
Vous vous repentirez plus tard car elle grandit,
Car elle grandit ma fureur.
DESPINA, FERRANDO, DON ALFONSO & GUGLIELMO
Une scène plus joyeuse...
DESPINA & DON ALFONSO
... On n’en voit pas dans le monde entier ;
Ce qui me fait le plus rire, rire, rire
125

126
MOZARTCOSI FAN TUTTE
È quell’ira e quel furor, e quel furor.
Ch’io ben so che tanto foco
Cangerassi in quel d’amor, cangerassi in quel d’amor,
Ch’io ben so che tanto foco, terminasse in quel d’amor...
FERRANDO E GUGLIELMO
... Non s’è visto in questo mondo;
Ma non so se finta o vera, se finta o vera,
Sia quell’ira e quel furor, e quel furor.
Né vorrei che tanto foco terminasse in quel d’amor.
Né vorrei che tanto foco terminasse in quel d’amor.
Né vorrei che tanto foco terminasse in quel d’amor...
FIORDILIGI ET DORABELLA
Disperati, attossicati, ite al diavol quanti siete!
Tardi inver vi pentirete se più cresce
Se più cresce il mio furor, il mio furor,
Se più cresce il mio furor, il mio furor.
Tardi inver vi pentirete se più cresce
Se più cresce il mio furor, il mio furor,
Se più cresce il mio furor, il mio furor.

ACTE I SCÈNE 16
C’est cette colère et cette fureur, et cette fureur.
Je sais bien que tant de feu
Tournera en feu d’amour, tournera en feu d’amour,
Je sais bien que tant de feu tournera en feu d’amour...
FERRANDO & GUGLIELMO
... On n’en a pas vu dans ce monde ;
Mais je ne sais si feintes ou vraies, si feintes ou vraies
Sont cette colère et cette fureur et cette fureur.
Je ne voudrais pas que tant de feu se termine en feu d’amour.
Je ne voudrais pas que tant de feu se termine en feu d’amour.
Je ne voudrais pas que tant de feu se termine en feu d’amour. . .
FIORDILIGI & DORABELLA
Désespérés, intoxiqués, allez au diable autant que vous êtes !
Vous vous repentirez plus tard car elle grandit,
Car elle grandit ma fureur, ma fureur,
Car elle grandit ma fureur, ma fureur.
Vous vous repentirez plus tard car elle grandit,
Car elle grandit ma fureur, ma fureur,
Car elle grandit ma fureur, ma fureur. 127

128
ATTO SECONDO
SCENA PRIMA
Camera.
Recitativo
DESPINA
Andate là, che siete due bizzarre ragazze!
FIORDILIGI
Oh cospettaccio! Cosa pretenderesti?
DESPINA
Per me nulla.
FIORDILIGI
Per chi dunque?
DESPINA
Per voi.
DORABELLA
Per noi?
MOZART COSI FAN TUTTE
DESPINA
Per voi. Siete voi donne, o no?

ACTE DEUX
SCÈNE 1
Une chambre.
Récitatif
DESPINA
Avouez que vous êtes deux filles bizarres !
FIORDILIGI
Oh morbleu ! Qu’est-ce que tu voudrais ?
DESPINA
Pour moi, rien.
FIORDILIGI
Pour qui alors ?
DESPINA
Pour vous.
DORABELLA
Pour nous ?
ACTE II SCÈNE 8
DESPINA
Pour vous. Vous êtes femmes ou non ?
129

130
FIORDILIGI
E per questo?
DESPINA
E per questo dovete far da donne.
DORABELLA
Cioè?
DESPINA
Trattar l’amore en bagatelle. Le occasioni belle non negliger
giammai; cangiar a tempo, a tempo esser costanti,
coquettizzar con grazia, prevenir la disgrazia, sì comune a
chi si fida in uomo, mangiar il fico e non gittare il pomo.
FIORDILIGI (fra sé)
Che diavolo!
(A Despina)Tai cose falle tu, se n’hai voglia.
DESPINA
Io già le faccio. Ma vorrei che anche voi per gloria del bel
sesso faceste un po’ lo stesso: per esempio, i vostri
Ganimedi son andati alla guerra; infin che tornano fate
alla militare: reclutate.
DORABELLA
Il cielo ce ne guardi.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DESPINA
Eh che noi siamo in terra, e non in cielo! Fidatevi al mio
zelo: già ché questi forastieri v’adorano, lasciatevi adorar.
Son ricchi, belli, nobili, generosi, come fede fece a voi
Don Alfonso; avean coraggio di morire per voi; questi son
merti che sprezzar non si denno da giovani qual voi belle
e galanti; che pon star senza amor, non senza amanti.
(Fra sé) Par che ci trovin gusto.
FIORDILIGI
Per Bacco, ci faresti dar delle belle cose. Credi tu che
vogliamo favola diventar degli oziosi? Ai nostri cari sposi
credi tu che vogliam dar tal tormento?

FIORDILIGI
Et après ?
DESPINA
Et après vous devez agir en femmes.
DORABELLA
C’est-à-dire ?
DESPINA
Traiter l’amour en bagatelle. Ne jamais négliger les
bonnes occasions ; changer au bon moment, au bon
moment être fidèles, faire la coquette avec grâce, prévenir
la disgrâce, si ordinaire pour qui se fie à l’homme, manger
la figue et ne pas jeter la pomme.
FIORDILIGI (à part)
Quel diable !
(A Despina)Fais de telles choses, si tu en as envie.
DESPINA
Je les fais déjà. Mais je voudrais que vous aussi, pour la
gloire du beau sexe, fassiez un peu de même : par
exemple, vos Ganymèdes sont allés à la guerre ; avant
qu’ils ne reviennent, agissez militairement : recrutez.
DORABELLA
Que le ciel nous en garde.
ACTE II SCÈNE 1
DESPINA
Eh, nous sommes sur terre, pas au ciel ! Fiez-vous à mon
z è l e: ces étrangers vous adorent, laissez-vous adorer. Ils sont
riches, beaux, nobles, généreux, comme Don Alfonso vous l’a
a s s u r é; ils ont eu le courage de mourir pour vous ; mérites
qui ne sont pas à dédaigner pour de jeunes et galantes belles
telles que vous ; qui peuvent rester sans amour, mais pas sans
amants. (A part)On dirait qu’elles y prennent goût.
FIORDILIGI
Pardieu, tu nous ferais faire de belles choses. Crois-tu que
nous voulons devenir la fable des bavards ? Crois-tu que
nous voulons donner un tel tourment à nos chers fiancés ?
131

132
DESPINA
E chi dice che abbiate a far loro alcun torto?
DORABELLA
Non ti pare che sia torto bastante se noto si facesse che
trattiamo costor?
DESPINA
Anche per questo c’è un mezzo sicurissimo: io voglio
sparger fama che vengono da me.
DORABELLA
Chi vuoi che il creda?
DESPINA
Oh bella! Non ha forse merto una cameriera d’aver due
cicisbei? Di me fidatevi.
FIORDILIGI
No, no: son troppo audaci questi tuoi forastieri. Non
ebber la baldanza fin di chieder dei baci?
DESPINA (fra sé)
Che disgrazia!
(Alle padrone) Io posso assicurarvi che le cose che han
fatto furo effetti del tossico che han preso. Convulsioni,
deliri, follie, vaneggiamenti; ma or vedrete come son discreti,
manierosi, modesti e mansueti. Lasciateli venir.
DORABELLA
E poi?
DESPINA
E poi... caspita ! Fate voi.
(Fra sé) L’ho detto che cadrebbero.
FIORDILIGI
Cosa dobbiamo far?
MOZART COSI FAN TUTTE
DESPINA
Quel che volete. Siete d’ossa e di carne, o cosa siete?

DESPINA
Et qui dit que vous devez leur faire du tort ?
DORABELLA
Il ne te semble pas que ce serait un tort suffisant si on
savait que nous recevions ces hommes ?
DESPINA
Pour ça aussi, il y a un moyen très sûr : je vais répandre
la rumeur qu’ils viennent pour moi.
DORABELLA
A qui veux-tu faire croire ça ?
DESPINA
C’est la meilleure ! Une camériste n’a peut-être pas les qualités
pour avoir deux chevaliers servants ? Fa i t e s-moi confiance.
FIORDILIGI
Non, non : tes deux étrangers sont trop audacieux. N’ontil
pas eu le front de nous demander des baisers ?
DESPINA (à part)
Quelle pitié !
(A ses maîtresses) Je peux vous assurer que ce qu’ils ont
fait fut l’effet du poison qu’ils ont pris. Convulsions,
délires, folies, divagations ; mais maintenant vous verrez
comme ils sont discrets, courtois, modestes et doux.
Laissez-les venir.
DORABELLA
Et après !
DESPINA
Et après... Assez ! A vous de jouer.
(A part) Je l’avais dit, qu’elles tomberaient.
FIORDILIGI
Que devons-nous faire ?
ACTE II SCÈNE 1
DESPINA
Ce que vous voulez. Vous êtes d’os et de chair, ou quoi ?
133

134
N o 19. Aria
DESPINA
Una donna a quindici anni dèe saper ogni gran moda:
Dove il diavolo ha la coda, cosa è bene e mal cos’è.
Dèe saper le maliziette che innamorano gli amanti;
Finger riso, finger pianti, inventar i bei perché,
Finger riso, finger pianti, inventar i bei perché.
Dèe in un momento dar retta a cento,
Colle pupille parlar con mille,
Dar speme a tutti, sien belli o brutti,
Saper nascondersi senza confondersi,
Senza arrossire saper mentire, saper mentire,
E qual regina dall’alto soglio
Col posso e voglio
Farsi ubbidir,
E qual regina dall’alto soglio
Col posso e voglio
Farsi ubbidir.
(Fra sé) Par ch’abbian gusto
Di tal dottrina,
Viva Despina che sa servir, che sa servir...
(Parte.)
FIORDILIGI
Sorella, cosa dici?
MOZARTCOSI FAN TUTTE
SCENA SECONDA
Recitativo
DORABELLA
Io son stordita dallo spirto infernal di tal ragazza.
FIORDILIGI
Ma credimi: è una pazza. Ti par che siamo in caso di
seguir suoi consigli?
DORABELLA
Oh, certo, se tu pigli pel rovescio il negozio.

N o 19. Aria
DESPINA
A quinze ans, une femme doit savoir tout sur tout :
Où est la queue du diable, ce qui est bien, ce qui est mal.
Elle doit savoir les petites ruses qui enamourent les amants ;
Feindre le rire, feindre les pleurs, trouver les bonnes exc u s e s ,
Feindre le rire, feindre les pleurs, trouver les bonnes exc u s e s .
Elle doit en un instant se faire entendre de cent,
Avec les yeux, parler à mille,
Donner espoir à tous, beaux ou vilains,
Savoir se dissimuler, sans se brouiller,
Savoir mentir sans rougir, savoir mentir,
Et telle la reine, du haut de son trône,
Avec un « je peux » et un « je veux »,
Se faire obéir.
Et telle la reine, du haut de son trône,
Avec un « je peux » et un « je veux »,
Se faire obéir.
(A part) On dirait qu’elles prennent goût
A cette doctrine,
Vive Despina qui sait servir, qui sait servir...
(Elle part.)
FIORDILIGI
Ma sœur, qu’en dis-tu ?
ACTE II SCÈNE 2
SCÈNE 2
Récitatif
DORABELLA
Je suis étourdie par l’esprit diabolique de cette fille.
FIORDILIGI
Mais crois-moi : c’est une folle. Crois-tu que nous puissions
suivre ses conseils ?
DORABELLA
Oh, certainement, si tu prends l’affaire à l’envers.
135

136
FIORDILIGI
Anzi, io lo piglio per il suo vero dritto: non credi tu delitto
per due giovani omai promesse spose il far di queste cose?
DORABELLA
Ella non dice che facciamo alcun mal.
FIORDILIGI
È mal che basta il far parlar di noi.
DORABELLA
Quando si dice che vengon per Despina!
FIORDILIGI
Oh, tu sei troppo larga di coscienza! E che diran gli sposi
n o s t r i ?
DORABELLA
Nulla: o non sapran l’affare ed è tutto finito; o sapran
qualche cosa, e allor diremo che vennero per lei.
FIORDILIGI
Ma i nostri cori?
DORABELLA
Restano quel che sono; per divertirsi un poco, e non morire
dalla malinconia non si manca di fè, sorella mia.
FIORDILIGI
Questo è ver.
DORABELLA
Dunque?
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FIORDILIGI
Dunque fa’ un po’ tu: ma non voglio aver colpa se poi
nasce un imbroglio.
DORABELLA
Che imbroglio nascer deve con tanta precauzion? Per altro
ascolta: per intenderci bene, qual vuoi sceglier per te de’
due Narcisi?

FIORDILIGI
Au contraire, je la prends du bon côté : tu ne crois pas
qu’il serait criminel, pour deux jeunes fiancées, de faire
pareille chose ?
DORABELLA
Elle dit que nous ne faisons aucun mal.
FIORDILIGI
C’est un mal suffisant de faire parler de nous.
DORABELLA
Si on dit qu’ils viennent pour Despina !
FIORDILIGI
Oh, tu es trop large d’esprit ! Et que diront nos fiancés ?
DORABELLA
R i e n : ou il ne sauront rien de l’affaire et tout est réglé ; ou
ils l’apprennent et nous dirons qu’ils venaient pour elle.
FIORDILIGI
Mais nos cœurs ?
DORABELLA
Ils restent ce qu’ils sont ; se divertir un peu et ne pas
mourir de mélancolie ne nous fait pas manquer à la fidélité,
ma sœur.
FIORDILIGI
Cela est vrai.
DORABELLA
Alors ?
ACTE II SCÈNE 2
FIORDILIGI
Alors fais comme tu veux : mais je ne veux pas être coupable
si ensuite il y a des histoires.
DORABELLA
Quelles histoires, avec tant de précautions ? D’ a i l l e u r s
é c o u t e : pour qu’on s’entende bien, lequel des deux
Narcisses veux-tu te choisir ?
137

138
FIORDILIGI
Decidi tu, sorella.
DORABELLA
Io già decisi.
N o 20. Duetto
DORABELLA
Prenderò quel brunettino che più lepido mi par.
FIORDILIGI
Ed intanto io col biondino vo’ un po’ ridere e burlar.
DORABELLA
Scherzosetta ai dolci detti io di quel risponderò.
FIORDILIGI
Sospirando i sospiretti io dell’altro imiterò.
DORABELLA
Mi dirà: ben mio, mi moro!
FIORDILIGI
Mi dirà: mio bel tesoro!
DORABELLA
Ed intanto che diletto!
FIORDILIGI
Ed intanto che diletto!
FIORDILIGI E DORABELLA
Che spassetto io proverò,
Che spassetto io proverò,
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DORABELLA
Prenderò quel
Brunettino che più lepido mi par.
Scherzosetta...

FIORDILIGI
Décide toi, sœur.
DORABELLA
J’ai déjà décidé.
N o 20. Duetto
DORABELLA
Je prendrai ce brunet, qui me semble plus amusant.
FIORDILIGI
Pendant ce temps, avec le blondinet, je veux rire un peu
et plaisanter.
DORABELLA
Facétieuse, je répondrai aux douces paroles de celui-ci
FIORDILIGI
Soupirant, j’imiterai les soupirs de celui-là.
DORABELLA
Il me dira : mon amour, je meurs !
FIORDILIGI
Il me dira : mon beau trésor.
DORABELLA
Et alors quel délice !
FIORDILIGI
Et alors quel délice !
FIORDILIGI & DORABELLA
Quel plaisir j’en aurai,
Quel plaisir j’en aurai,
ACTE II SCÈNE 2
DORABELLA
Je prendrai
Ce brunet qui me semble plus amusant.
Facétieuse...
139

140
FIORDILIGI
Ed intanto io col biondino vo’ un po’ ridere e burlar.
DORABELLA
... Ai dolci detti...
FIORDILIGI
Sospirando i sospiretti...
DORABELLA
... io di quel risponderò.
FIORDILIGI
... L’altro imitero.
DORABELLA
Mi dirà: ben mio, mi moro!
FIORDILIGI
Mi dirà: mio bel tesoro!
DORABELLA
Ed intanto...
FIORDILIGI
Ed intanto...
DORABELLA
... Che diletto!
FIORDILIGI
... Che diletto!
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FIORDILIGI E DORABELLA
Ed intanto che diletto! Che spassetto io proverò.
Ed intanto che diletto! Che spassetto io proverò...
(Partono e s’incontrano in Don Alfonso.)

FIORDILIGI
Pendant ce temps, avec le blondinet, je veux rire un peu
et plaisanter.
DORABELLA
... Je répondrai aux douces paroles...
FIORDILIGI
Soupirant j’imiterai...
DORABELLA
... De celui-ci.
FIORDILIGI
... Les soupirs de celui-là.
DORABELLA
Il me dira : mon amour, je meurs !
FIORDILIGI
Il me dira : mon beau trésor !
DORABELLA
Et alors...
FIORDILIGI
Et alors...
DORABELLA
... Quel délice !
FIORDILIGI
... Quel délice !
ACTE II SCÈNE 2
FIORDILIGI & DORABELLA
Et alors quel délice ! Quel plaisir j’en aurai.
Et alors quel délice ! Quel plaisir j’en aurai...
(En sortant, elles rencontrent Don Alfonso.)
141

142
SCENA TERZA
Recitativo
DON ALFONSO
Ah, correte al giardino, le mie care ragazze! Che allegria!
Che musica! Che canto! Che brillante spettacolo! Che
incanto. Fate presto, correte!
DORABELLA
Che diamine esser può?
DON ALFONSO
Tosto vedrete.
(Partono.)
MOZART COSI FAN TUTTE
SCENA QUARTA
Giardino alla riva del mare con sedili d’erba e due tavolini
di pietra. Barca ornata di fiori, con banda di stromenti.
Servi riccamente vestiti. Coro di musici ecc.
N o 21. Duetto con coro
FERRANDO E GUGLIELMO
Secondate, aurette amiche, secondate i miei desiri;
E portate i miei sospiri alla dea di questo cor, di questo cor.
Voi che udiste mille volte il tenor delle mie pene,
Ripetete al caro bene tutto quel che udiste allor,
Tutto quel che udiste allor.
(Nel tempo del ritornello di questo coro, Ferrando
e Guglielmo scendono con catene di fiori; Don Alfonso
e Despina li conducono davanti le due amanti
che resteranno ammutite ed attonite.)
CORO
Secondate, aurette amiche, il desir di sì bei cor,
Il desir di sì bei cor

SCÈNE 3
Récitatif
DON ALFONSO
Ah, courez jusqu’au jardin, mes chères filles ! Quelle
joie ! Quelle musique ! Quels chants ! Quel brillant spectacle
! Quel enchantement. Faites vites, courez !
DORABELLA
Que diantre cela peut-il être ?
DON ALFONSO
Vous le verrez tout de suite.
(Ils sortent.)
ACTE II SCÈNES 3 & 4
SCÈNE 4
Jardin au bord de la mer avec bancs de gazon et deux tables
de pierre. Embarcation ornée de fleurs, avec des musiciens.
Serviteurs richement vêtus. Chœur, etc.
N o 21. Duetto avec chœur
FERRANDO & GUGLIELMO
Soutenez, brises amies, soutenez mes désirs ;
Et portez mes soupirs à la déesse de ce cœur, de ce cœur.
Vous qui mille fois avez entendu mes peines,
Redites à mon aimée ce qu’alors vous entendiez,
Tout ce qu’alors vous entendiez.
(Pendant la reprise de ce chœur, Ferrando et Guglielmo
débarquent avec des guirlandes de fleurs ; Don Alfonso
et Despina les conduisent devant les deux amantes
qui demeurent muettes et étonnées.)
CHŒUR
Soutenez, brises amies, le désir d’un cœur si beau,
Le désir d’un cœur si beau.
143

144
Recitativo
DON ALFONSO (ai servi che portano bacile con fiori)
Il tutto deponete sopra quei tavolini, e nella barca ritiratevi,
amici.
FIORDILIGI E DORABELLA
Cos’è tal mascherata?
DESPINA
Animo, via, coraggio: avete perso l’uso della favella?
FERRANDO
Io tremo, e palpito dalla testa alle piante.
GUGLIELMO
Amor lega le membra a vero amante.
DON ALFONSO (alle donne)
Da brave incoraggiateli.
FIORDILIGI (agli amanti)
Parlate.
DORABELLA
Liberi dite pur quel che bramate.
FERRANDO
Madama...
GUGLIELMO
Anzi, madame...
FERRANDO
Parla pur tu.
GUGLIELMO (a Ferrando)
No no, parla pur tu.
MOZART COSI FAN TUTTE
DON ALFONSO
Oh cospetto del diavolo! Lasciate tali smorfie del secolo
passato. Despinetta, terminiam questa festa, fa’ tu con lei
quel ch’io farò con questa.

Récitatif
DON ALFONSO (aux serviteurs portant des vases pleins de fleurs)
Déposez le tout sur ces petites tables et retirez-vous dans
l’embarcation, mes amis.
FIORDILIGI & DORABELLA
Que signifie une telle mascarade ?
DESPINA
Haut les cœurs, allons, courage : vous avez perdu l’usage
de la parole ?
FERRANDO
Je tremble et frémis de la tête aux pieds.
GUGLIELMO
Amour lie les membres du véritable amant.
DON ALFONSO (aux femmes)
Par gentillesse, encouragez-les.
FIORDILIGI (aux amants)
Parlez.
DORABELLA
Dites librement ce que vous désirez.
FERRANDO
Madame...
GUGLIELMO
Plutôt, mesdames...
FERRANDO
Parle toi, plutôt.
GUGLIELMO (à Ferrando)
Non non, parle toi plutôt.
ACTE II SCÈNE 4
DON ALFONSO
Oh tonnerre du diable ! Laissez ces minauderies du siècle
dernier. Despinette, finissons cette fête, fais avec celle-ci
ce que je ferai avec celle-là.
145

146
N o 22.
DON ALFONSO (prendendo per mano Dorabella,
mentre Despina prende Fiordiligi)
La mano a me date, movetevi un po’.
(Agli amanti) Se voi non parlate, per voi parlerò,
Per voi parlerò, per voi parlerò.
Perdono vi chiede un schiavo tremante;
V’offese, lo vede, ma solo un istante.
Or pena, ma tace,
FERRANDO E GUGLIELMO
Tace,
DON ALFONSO
Or lasciavi in pace;
FERRANDO E GUGLIELMO
... In pace;
DON ALFONSO
Non può quel che vuole, vorrà quel che può.
FERRANDO E GUGLIELMO (con un sospiro)
Non può quel che vuole, vorrà quel che può,
DON ALFONSO
Vorrà quel che può,
FERRANDO E GUGLIELMO
Vorrà quel che può,
DON ALFONSO
Vorrà quel che può.
FERRANDO E GUGLIELMO
Vorrà quel che può.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DON ALFONSO
Su via, rispondete, su via, rispondete:
Guardate e ridete?

N o 22.
DON ALFONSO (prenant Dorabella par la main,
tandis que Despina fait de même avec Fiordiligi)
Donnez-moi la main, bougez-vous un peu.
(Aux amants) Si vous ne parlez pas, je parlerai pour vous,
Je parlerai pour vous, je parlerai pour vous.
Un esclave tremblant vous demande pardon ;
Il vous a offensée, il le sait, mais un seul instant.
Maintenant il souffre, mais se tait,
FERRANDO & GUGLIELMO
Il se tait,
DON ALFONSO
Maintenant il vous laisse en paix ;
FERRANDO & GUGLIELMO
... En paix ;
DON ALFONSO
Il ne peut ce qu’il veut, il voudra ce qu’il peut.
FERRANDO & GUGLIELMO (avec un soupir)
Il ne peut ce qu’il veut, il voudra ce qu’il peut,
DON ALFONSO
Il voudra ce qu’il peut,
FERRANDO & GUGLIELMO
Il voudra ce qu’il peut,
DON ALFONSO
Il voudra ce qu’il peut.
FERRANDO & GUGLIELMO
Il voudra ce qu’il peut.
ACTE II SCÈNE 4
DON ALFONSO
Allez, répondez, allez, répondez :
Vous regardez et vous riez ?
147

148
DESPINA (mettendosi davanti le due donne)
Per voi la risposta a loro darò. Per voi la risposta a loro darò.
Per voi la risposta a loro darò.
Quello ch’è stato è stato. Scordiamci del passato;
(Despina prende la mano di Dorabella, Don Alfonso quella
di Fiordiligi e fa rompere i lacci agli amanti, cui mettono
al braccio dei medesimi.)
Rompasi omai quel laccio, segno di servitù.
A me porgete il braccio, né sospirate più,
Né sospirate più né sospirate più.
DESPINA E DON ALFONSO (a parte)
Per carità, partiamo, quel che san far veggiamo.
Per carità, partiamo, quel che san far veggiamo.
Le stimo più del diavolo, del diavolo, del diavolo
S’ora non cascan giù, non cascan giù,
Le stimo più del diavolo, del diavolo, del diavolo
S’ora non cascan giù, non cascan giù,
S’ora non cascan giù, s’ora non cascan giù,
S’ora non cascan giù.
(Partono.)
SCENA QUINTA
Guglielmo a braccio di Dorabella, Ferrando e Fiordiligi
senza darsi braccio. Fanno una piccola scena muta
guardandosi, sospirando, ridendo ecc.
FIORDILIGI
Oh che bella giornata!
FERRANDO
Caldetta anzi che no.
DORABELLA
Che vezzosi arboscelli!
MOZARTCOSI FAN TUTTE
GUGLIELMO
Certo, certo, son belli: han più foglie che frutti.

DESPINA (se mettant devant les deux femmes)
Pour vous je leur ferai réponse.
Pour vous je leur ferai réponse.
Pour vous je leur ferai réponse.
Ce qui est arrivé est arrivé. Oublions le passé ;
(Despina prend la main de Dorabella, Don Alfonso celle de
Fiordiligi et font rompre les guirlandes aux amants et leur
mettent sur les bras.)
Que soit rompu désormais ce lien, signe de servitude.
Donnez-moi le bras, ne soupirez plus,
Ne soupirez plus, ne soupirez plus.
DESPINA & DON ALFONSO (à part)
Par pitié, partons, voyons ce qu’ils savent faire.
Par pitié, partons, voyons ce qu’ils savent faire.
Elles sont plus fortes que le diable, que le diable,
Si elles ne chutent pas maintenant, ne chutent pas maintenant,
Elles sont plus fortes que le diable, que le diable,
Si elles ne chutent pas maintenant, ne chutent pas maintenant,
Ne chutent pas maintenant, ne chutent pas maintenant,
Ne chutent pas maintenant.
(Ils partent.)
SCÈNE 5
Guglielmo au bras de Dorabella, Ferrando et Fiordiligi
sans se donner le bras. Petite scène muette,
ils se regardent, soupirent, rient, etc.
FIORDILIGI
Oh, quelle belle journée !
FERRANDO
Plutôt chaude que le contraire.
DORABELLA
Quels gracieux arbustes !
ACTE II SCÈNE 5
GUGLIELMO
Certes, certes, il sont beaux : il ont plus de feuilles que
de fruits.
149

150
FIORDILIGI
Quei viali come son leggiadri. Volete passeggiar?
FERRANDO
Son pronto, o cara, ad ogni vostro cenno.
FIORDILIGI
Troppa grazia!
FERRANDO (nel passare a Guglielmo)
Eccoci alla gran crisi.
FIORDILIGI
Cosa gli avete detto?
FERRANDO
Eh gli raccomandai di divertirla bene.
DORABELLA
Passeggiamo anche noi.
GUGLIELMO
Come vi piace.
(Passeggiano. Dopo un momento di silenzio) Ahimè!
DORABELLA
Che cosa avete?
MOZARTCOSI FAN TUTTE
GUGLIELMO
Io mi sento sì male, sì male, anima mia, che mi par di
morire.
(Gli altri due fanno scena muta in lontananza.)
DORABELLA (fra sé)
Non otterrà nientissimo.
(Forte) Saranno rimasugli del velen che beveste.
GUGLIELMO (con fuoco)
Ah, che un veleno assai più forte io bevo in questi crudi e
focosi Mongibelli amorosi!

FIORDILIGI
Ces allées, comme elles sont avenantes. Voulez-vous vous
promener ?
FERRANDO
Je suis prêt, ma chère, au moindre signe de vous.
FIORDILIGI
Trop aimable.
FERRANDO (en passant près de Guglielmo)
Nous voici au moment crucial.
FIORDILIGI
Que lui avez-vous dit ?
FERRANDO
Eh, je lui recommandais de bien la divertir.
DORABELLA
Promenons-nous également.
GUGLIELMO
Comme il vous plaira.
(Ils se promènent. Après un moment de silence) Hélas !
DORABELLA
Qu’avez-vous ?
ACTE II SCÈNE 5
GUGLIELMO
Je me sens si mal, si mal, mon âme, je crois que je vais mourir.
(Au lointain, les deux autres font un tableau muet.)
DORABELLA (à part)
Il n’obtiendra rien du tout.
(A voix haute) Ce sera un reste du poison que vous avez bu.
GUGLIELMO (avec flamme)
Ah, c’est un poison plus puissant que je bois dans cet
ardent et cruel Vésuve d’amour !
151

152
(Gli altri due entrano in atto di passeggiare.)
DORABELLA
Sarà veleno calido: fatevi un poco fresco.
GUGLIELMO
Ingrata, voi burlate ed intanto io mi moro!
(Fra sé) Son spariti: dove diamin son iti?
DORABELLA
Eh, via, non fate...
GUGLIELMO
Io mi moro, crudele, e voi burlate?
DORABELLA
Io burlo! Io burlo!
GUGLIELMO
Dunque datemi qualche segno, anima bella, della vostra pietà.
DORABELLA
Due, se volete: dite quel che far deggio, e lo vedrete.
GUGLIELMO (fra sé)
Scherza, o dice davvero?
(Forte) Questa picciola offerta d’accettare degnatevi.
DORABELLA
Un core?
GUGLIELMO
Un core: è simbolo di quello ch’arde, languisce e spasima
per voi.
DORABELLA (fra sé)
Che dono prezioso!
GUGLIELMO
L’accettate?
MOZARTCOSI FAN TUTTE

(Les deux autres sortent en se promenant.)
DORABELLA
Ce doit être un poison brûlant : rafraichissez-vous.
GUGLIELMO
Ingrate, vous plaisantez pendant que je meurs !
(A part) Ils ont disparu : où diable sont-ils allés ?
DORABELLA
Eh, allons, ne faites...
GUGLIELMO
Je me meurs, cruelle, et vous vous moquez ?
DORABELLA
Je me moque ! Je me moque ?
GUGLIELMO
Alors donnez-moi quelque signe, belle âme, de votre pitié.
DORABELLA
Deux, si vous voulez : dites ce que je dois faire et vous verrez.
GUGLIELMO (à part)
Elle plaisante ou elle est sincère ?
(A voix haute)Daignez accepter cette petite offrande.
DORABELLA
Un cœur ?
GUGLIELMO
Un cœur : le symbole de celui-ci, qui brûle, languit et
tremble pour vous.
DORABELLA (à part)
Quel cadeau précieux !
GUGLIELMO
L’acceptez-vous ?
ACTE II SCÈNE 5
153

154
DORABELLA
Crudele! Di sedur non tentate un cor fedele.
GUGLIELMO (fra sé)
La montagna vacilla: mi spiace, ma impegnato è l’onor di
soldato.
(A Dorabella) V’adoro!
DORABELLA
Per pietà...
GUGLIELMO
Son tutto vostro!
DORABELLA
Oh dei!
GUGLIELMO
Cedete, o cara...
DORABELLA
Mi farete morir...
MOZART COSI FAN TUTTE
GUGLIELMO
Morremo insieme, amorosa mia speme. L’accettate?
DORABELLA (dopo breve intervallo, con un sospiro)
L’accetto.
GUGLIELMO (fra sé)
Infelice Ferrando!
(A Dorabella) O che diletto!
N o 23. Duetto
GUGLIELMO
Il core vi dono, bell’idolo mio;
Ma il vostro vo’ anch’io, via, datelo a me.
DORABELLA
Mel date, lo prendo, ma il mio non vi rendo,
Invan mel chiedete, più meco ei non è.

DORABELLA
Cruel ! Ne tentez pas de séduire un cœur fidèle.
GUGLIELMO (à part)
La montagne vacille : je suis désolé, mais mon honneur
de soldat est en jeu.
(A Dorabella) Je vous adore.
DORABELLA
Par pitié...
GUGLIELMO
Je suis tout à vous !
DORABELLA
Oh dieux !
GUGLIELMO
Cédez, ô chère...
DORABELLA
Vous me tuez...
ACTE II SCÈNE 5
GUGLIELMO
Mourons ensemble, mon espoir amoureux. Vous l’acceptez ?
DORABELLA (après une courte pause, avec un soupir)
Je l’accepte.
GUGLIELMO (à part)
Malheureux Ferrando !
(A Dorabella) O quel délice !
N o 23. Duetto
GUGLIELMO
Ce cœur je vous le donne, ma belle idole ;
Mais je veux le vôtre aussi, allez, donnez-le moi.
DORABELLA
Vous me le donnez, je le prends, mais ne rends pas le mien,
Vous le demandez en vain, il n’est plus avec moi.
155

156
GUGLIELMO
Se teco non l’hai perché batte qui?
DORABELLA
Se a me tu lo dai, che mai balza lì?
GUGLIELMO
Perché batte batte batte qui?
DORABELLA
Che mai balza balza balza lì?
DORABELLA E GUGLIELMO
È il mio coricino che più non è meco,
Che più non è meco, ei venne a star teco,
Ei batte così, ei batte così
Ei batte così ei batte così.
GUGLIELMO (vuol metterle il core dov’ha il ritratto dell’amante)
Qui lascia che il metta.
DORABELLA
Ei qui non può star.
GUGLIELMO
T’intendo, furbetta, t’intendo, furbetta.
DORABELLA
Che fai?
GUGLIELMO
Non guardar.
(Le torce dolcemente la faccia dall’altra parte,
le cava il ritratto e vi mette il core.)
DORABELLA (fra sé)
Nel petto un Vesuvio
D’avere mi par.
GUGLIELMO (fra sé)
Ferrando meschino!
MOZARTCOSI FAN TUTTE

GUGLIELMO
Si tu ne l’as plus avec toi, pourquoi bat-il là ?
DORABELLA
Si tu me le donnes, qu’est-ce alors qui bondit là ?
GUGLIELMO
Pourquoi bat-il bat-il bat-il là ?
DORABELLA
Qu’est-ce alors qui bondit bondit bondit là ?
DORABELLA & GUGLIELMO
C’est mon petit cœur, qui n’est plus avec moi,
Qui n’est plus avec moi, il est venu chez toi,
Et il bat comme ça, et il bat comme ça
Et il bat comme ça, et il bat comme ça
GUGLIELMO (veut mettre le cœur là elle porte le portrait
de son amant)
Consens que je le mette là.
DORABELLA
Il ne peut rester là.
GUGLIELMO
Je te comprends petite futée, je te comprends, petite futée.
DORABELLA
Que fais-tu ?
GUGLIELMO
Ne regarde pas.
(Il lui tourne délicatement le visage de l’autre côté
et remplace le portrait par le cœur.)
DORABELLA (à part)
En mon sein c’est le Vésuve
Que je crois avoir.
GUGLIELMO (à part)
Pauvre Ferrando !
ACTE II SCÈNE 5
157

158
DORABELLA
Nel petto un Vesuvio
D’avere mi par.
GUGLIELMO
Possibil non par
(A Dorabella) L’occhietto a me gira.
DORABELLA
Che brami?
GUGLIELMO
Rimira, rimira, se meglio può andar.
DORABELLA E GUGLIELMO
Oh cambio felice
Di cori e d’affetti!
Che nuovi diletti, che dolce penar,
Che nuovi diletti, che dolce penar!...
(Partono abbracciati.)
FERRANDO
Barbara! Perché fuggi?
MOZART COSI FAN TUTTE
SCENA SESTA
Recitativo
FIORDILIGI
Ho visto un aspide, un’idra, un basilisco!
FERRANDO
Ah, crudel, ti capisco! L’aspide, l’idra, il basilisco, e
quanto i libici deserti han di più fiero in me solo tu vedi.
FIORDILIGI
È vero, è vero! Tu vuoi tormi la pace.

DORABELLA
En mon sein c’est le Vésuve
Que je crois avoir.
GUGLIELMO
Ce n’est pas possible
(A Dorabella) Tourne les yeux vers moi.
DORABELLA
Que veux-tu ?
GUGLIELMO
Regarde, regarde, si cela peut aller mieux.
DORABELLA & GUGLIELMO
Oh, heureux changement
De cœurs et de sentiments !
Nouveaux délices, doux supplices,
Nouveaux délices, doux supplices !...
(Ils sortent enlacés.)
ACTE II SCÈNE 6
SCÈNE 6
Récitatif
FERRANDO
Barbare ! Pourquoi fuis-tu ?
FIORDILIGI
J’ai vu un aspic, une hydre, un basilic !
FERRANDO
Ah cruelle, je te comprends ! L’aspic, l’hydre, le basilic,
et tout ce que les déserts libyens ont de plus terribles, tu
les vois en moi ?
FIORDILIGI
C’est vrai, c’est vrai ! Tu veux détruire ma paix.
159

160
FERRANDO
Ma per farti felice.
FIORDILIGI
Cessa di molestarmi.
FERRANDO
Non ti chiedo che un guardo.
FIORDILIGI
Partiti.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FERRANDO
Non sperarlo, se pria gli occhi men fieri a me non giri.
O ciel! Ma tu mi guardi, e poi sospiri?
N o 24. Aria
FERRANDO (lietissimo)
Ah lo veggio, quell’anima bella
Al mio pianto resister non sa;
Non è fatta per esser rubella
Agli affetti di amica pietà;
Non è fatta per esser rubella, rubella,
Agli affetti di amica pietà.
In quel guardo, in quei cari sospiri
Dolce raggio lampeggia al mio cor, lampeggia al mio cor.
Già rispondi a’ miei caldi desiri,
Già tu cedi al più tenero amor,
Già tu cedi, tu cedi al piu tenero amor...
Già rispondi a’ miei caldi desiri,
Già tu cedi al più tenero amor,
Ma tu fuggi, spietata, tu taci
Ed invano mi senti languir!
Ah, cessate, speranze fallaci!
Speranze fallaci!
La crudel mi condanna a morir...
(Parte.)

FERRANDO
Mais pour te faire heureuse.
FIORDILIGI
Cesse de me harceler.
FERRANDO
Je ne te demande rien qu’un regard.
FIORDILIGI
Va-t-en.
ACTE II SCÈNE 6
FERRANDO
Ne l’espère pas, si tu ne tournes pas avant un regard
moins dur vers moi.
O ciel ! Mais tu me regardes et tu soupires ?
N o 24. Aria
FERRANDO (plein de joie)
Ah, je le vois, cette belle âme
A mes pleurs ne peut résister ;
Elle n’est pas faite pour être rebelle
Aux sentiments d’une amicale pitié ;
Elle n’est pas faite pour être rebelle, rebelle,
Aux sentiments d’une amicale pitié.
Dans ce regard, dans ces chers soupirs
Un doux rayon éclaire mon cœur, éclaire mon cœur.
Tu as déjà répondu à mes désirs brûlants,
Tu as déjà cédé à un plus tendre amour,
Tu as déjà cédé, tu as cédé à un plus tendre amour...
Tu as déjà répondu à mes désirs brûlants,
Tu as déjà cédé à un plus tendre amour,
Mais tu fuis, impitoyable, tu te tais
Et, sans bouger, tu m’entends gémir !
Ah, arrêtez, vains espoirs !
Vains espoirs !
La cruelle me condamne à mort...
(Il sort.)
161

162
MOZARTCOSI FAN TUTTE
SCENA SETTIMA
Recitativo
FIORDILIGI
Ei parte... senti!... Ah no... partir si lasci, si tolga ai
sguardi miei l’infausto oggetto della mia debolezza... A
qual cimento il barbaro mi pose!... Un premio è questo
ben dovuto a mie colpe!... In tale istante dovea di nuovo
amante i sospiri ascoltar?... L’altrui querele dovea volger
in gioco? Ah, questo core a ragione condanni, o giusto
amore! Io ardo, e l’ardor mio non è più effetto di un amor
virtuoso: è smania, affanno, rimorso, pentimento, leggerezza,
perfidia e tradimento!
N o 25. Rondò
FIORDILIGI
Per pietà, ben mio, perdona all’error di un’alma amante;
Fra quest’ombre e queste piante sempre ascoso,
oh Dio, sarà,
sempre ascoso, ascoso, oh Dio, sarà.
Svenerà quest’empia voglia l’ardir mio,
La mia costanza, perderà la rimembranza,
Che vergogna e orror mi fa,
Che vergogna e orror mi fa.
Per pietà, ben mio, perdona all’error di un’alma amante;
Fra quest’ombre e queste piante sempre ascoso,
oh Dio, sarà,
sempre ascoso, ascoso, oh Dio, sarà.
A chi mai mancò di fede questo vano ingrato cor!
Si dovea miglior mercede, caro bene, al tuo candor,
Caro bene, al tuo candor.
Per pietà, ben mio, perdona all’error di un’alma amante;
Svenerà quest’empia voglia l’ardir mio,
La mia costanza, perderà la rimembranza,
Che vergogna e orror mi fa.
A chi mai mancò di fede questo vano ingrato cor!
Si dovea miglior mercede, caro bene, al tuo candor,
Caro bene, al tuo candor...
(Parte.)

ACTE II SCÈNE 7
SCÈNE 7
Récitatif
FIORDILIGI
Il s’en va... écoute !... Ah non, laissons le aller, que se
retire de ma vue l’objet funeste de ma faiblesse... Quelle
épreuve le barbare m’impose !... Voila le prix bien mérité
de ma faute !... Dans un tel moment, devais-je écouter les
soupirs d’un nouvel amant ?... Le malheur de l’autre,
devais-je m’en jouer ? Ah, amour juste, tu condamnes ce
cœur justement ! Je brûle, et mon ardeur n’est plus l’effet
d’un amour vertueux : il est tourment, angoisse, remords,
repentir, désinvolture, perfidie et trahison !
N o 25. Rondo
FIORDILIGI
Par pitié, mon amour, pardonne l’erreur d’une âme aimante ;
Dans cette ombre et ces pleurs elle demeurera cachée,
ô Dieu, elle sera
Toujours cachée, cachée, ô Dieu, elle demeurera.
Ce désir impie, mon énergie le vaincra,
Et ma constance, perdant le souvenir
Qui me fait honte et me fait horreur,
Qui me fait honte et me fait horreur.
Par pitié, mon amour, pardonne l’erreur d’une âme aimante ;
Dans cette ombre et ces pleurs elle demeurera cachée,
ô Dieu, elle sera
Toujours cachée, cachée, ô Dieu, elle demeurera.
Envers qui ce cœur vaniteux et ingrat a-t-il manqué de foi !
Ta pureté, cher amour, méritait meilleur tribut,
Cher amour, ta pureté.
Par pitié, mon amour, pardonne l’erreur d’une âme aimante ;
Ce désir impie, mon énergie le vaincra,
Et ma constance, perdant le souvenir
Qui me fait honte et me fait horreur.
Envers qui ce cœur vaniteux et ingrat a-t-il manqué de foi !
Ta pureté, cher amour, méritait meilleur tribut,
Cher amour, ta pureté...
(Elle sort.)
163

164
FERRANDO (lietissimo)
Amico, abbiamo vinto!
GUGLIELMO
Un ambo, o un terno?
SCENA OTTAVA
Recitativo
FERRANDO
Una cinquina, amico; Fiordiligi è la modestia in carne.
GUGLIELMO
Niente meno?
FERRANDO
Nientissimo. Sta’ attento, e ascolta come fu.
GUGLIELMO
T’ascolto; di’ pur su.
FERRANDO
Pel giardinetto, come eravam d’accordo, a passeggiar mi
metto; le dò il braccio; si parla di mille cose differenti:
alfine viensi all’amor.
GUGLIELMO
Avanti!
FERRANDO
Fingo labbra tremanti, fingo di pianger, fingo di morir al
suo piè...
GUGLIELMO
Bravo assai per mia fè! Ed ella?
FERRANDO
Ella da prima ride, scherza, mi burla...
GUGLIELMO
E poi?
MOZARTCOSI FAN TUTTE

SCÈNE 8
Récitatif
FERRANDO (très joyeux)
Mon ami, nous avons gagné !
GUGLIELMO
Paire ou tierce ?
FERRANDO
Une quinte, mon ami : Fiordiligi est la vertu incarnée.
GUGLIELMO
Rien que ça ?
FERRANDO
Tout à fait. Fais attention et écoute comment ça s’est passé.
GUGLIELMO
Je t’écoute ; dis-moi vite.
FERRANDO
Dans le petit jardin, comme nous en étions convenus, promenade
; je lui donne le bras ; on parle de mille chose
différentes : finalement on en vient à l’amour.
GUGLIELMO
Vas toujours !
FERRANDO
Je joue les lèvres tremblantes, les pleurs, je joue la mort à
ses pieds...
GUGLIELMO
Bravo vraiment, par ma foi ! Et elle ?
FERRANDO
D’abord elle rit, plaisante, se joue de moi...
GUGLIELMO
Et puis ?
ACTE II SCÈNE 8
165

166
FERRANDO
E poi finge d’impietosirsi...
GUGLIELMO
Oh cospettaccio!
FERRANDO
Alfin scoppia la bomba: pura come colomba al suo caro
Guglielmo ella si serba, mi discaccia superba, mi maltratta,
mi fugge, testimonio rendendomi e messaggio, che una
femmina ell’è senza paraggio.
GUGLIELMO
Bravo tu, bravo io, brava la mia Penelope! Lascia un po’
c h’io ti abbracci per sì felice augurio, o mio fido
Mercurio!
(Si abbracciano.)
FERRANDO
E la mia Dorabella? Come s’è diportata? Ah, non ci ho
neppur dubbio!
(Con trasporto) Assai conosco quella sensibil alma.
GUGLIELMO
Eppur un dubbio, parlandoti a quattr’occhi, non saria
mal, se tu l’avessi?
FERRANDO
Come?
MOZARTCOSI FAN TUTTE
GUGLIELMO
Dico così per dir!
(Fra sé) Avrei piacere d’indorargli la pillola.
FERRANDO
Stelle! Cesse ella forse alle lusinghe tue? Ah, s’io potessi
sospettarlo soltanto!
GUGLIELMO
È sempre bene il sospettare un poco in questo mondo.

FERRANDO
Et puis elle feint de s’attendrir...
GUGLIELMO
Oh parbleu !
FERRANDO
A la fin la bombe éclate : pure comme une colombe elle
se dédie à son cher Guglielmo, me chasse, superbe, me
maltraite, me fuit, me faisant témoin et messager qu’elle
est une femme sans pareille.
GUGLIELMO
Bravo toi, bravo moi, bravo ma Pénélope ! Que je t’embrasse
un peu pour un si heureux augure, ô mon fidèle
Mercure !
(Ils s’embrassent.)
FERRANDO
Et ma Dorabella ? Comment s’est-elle comportée ? Ah, je
n’ai aucun doute sur elle !
(Avec transport)Je connais bien cette âme sensible.
GUGLIELMO
Et pourtant un doute, entre nous soit dit, ce ne serait pas
mal si tu l’avais.
FERRANDO
Comment ?
ACTE II SCÈNE 8
GUGLIELMO
Je dis ça pour parler !
(A part) J’aimerais bien lui dorer la pilule.
FERRANDO
Ciel ! Peut-être a-t-elle cédé à tes câlineries ? Ah, si je
pouvais seulement le soupçonner !
GUGLIELMO
C’est toujours bien en ce monde de soupçonner un peu.
167

168
FERRANDO
Eterni Dei! Favella: a foco lento non mi far qui morir; ma
no, tu vuoi prenderti meco spasso: ella non ama, non
adora che me.
GUGLIELMO
Certo: anzi in prova di suo amor, di sua fede, questo bel
ritrattino ella mi diede.
FERRANDO (furente)
Il mio ritratto! Ah, perfida!
GUGLIELMO
Ove vai?
FERRANDO
A trarle il cor dal scellerato petto e a vendicar il mio tradito
affetto.
GUGLIELMO
Fermati!
FERRANDO (risoluto)
No, mi lascia!
GUGLIELMO
Sei tu pazzo? Vuoi tu precipitarti per una donna che non
val due soldi?
(Fra sé) Non vorrei che facesse qualche corbelleria!
FERRANDO
Numi! Tante promesse, e lagrime, e sospiri, e giuramenti,
in sì pochi momenti come l’empia obliò?
GUGLIELMO
Perbacco, io non lo so.
MOZART COSI FAN TUTTE
FERRANDO
Che fare or deggio? A qual partito, a qual idea m’ a p p iglio?
Abbi di me pietà, dammi consiglio.

FERRANDO
Dieux éternels ! Pa r l e : ne me fais pas mourir à petit feu ;
mais non, tu veux te jouer de moi : elle n’aime, elle n’ a d o r e
que moi.
GUGLIELMO
Certes : et même, comme preuve de son amour, de sa foi,
elle m’a donné ce beau petit portrait.
FERRANDO (furieux)
Mon portrait ! Ah, perfide !
GUGLIELMO
Où vas-tu ?
FERRANDO
Arracher le cœur de ce sein scélérat et venger mon
amour trahi.
GUGLIELMO
Arrête !
FERRANDO (déterminé)
Non, laisse-moi !
GUGLIELMO
Es-tu fou ? Veux-tu te perdre pour une femme qui ne vaut
pas deux sous ?
(A part) Je ne voudrais pas qu’il fasse quelque bêtise !
FERRANDO
Dieux ! Tant de promesses et de larmes et de soupirs et de
serments, comment l’impie les a-t-elle oubliés en si peu
d’instants ?
GUGLIELMO
Parbleu, je n’en sais rien.
ACTE II SCÈNE 8
FERRANDO
Que dois-je faire maintenant ? Quel parti prendre, quelle
idée suivre ? Par pitié, conseille-moi.
169

170
MOZART COSI FAN TUTTE
GUGLIELMO
Amico, non saprei qual consiglio a te dar.
FERRANDO
Barbara, ingrata, in un giorno!... In poche ore!
GUGLIELMO
Certo, un caso quest’è da far stupore!
N o 26. Aria
GUGLIELMO
Donne mie, la fate a tanti a tanti a tanti a tanti a tanti,
Che, se il ver vi deggio dir, se si lagnano gli amanti
Li comincio a compatir, li comincio a compatir.
Io vo’ bene al sesso vostro, lo sapete, ognun lo sa:
Ogni giorno ve lo mostro, ve lo mostro, ve lo mostro
Vi dò segno d’amistà, ve lo mostro, ve lo mostro,
Vi dò segno d’amistà, vi dò segno d’amistà.
Ma quel farla a tanti a tanti a tanti a tanti
M’avvilisce in verità, m’avvilisce in verità.
Mille volte il brando presi per salvar il vostro onor.
Mille volte, mille volte, mille volte vi difesi
Colla bocca, e più col cor.
Ma quel farla a tanti a tanti a tanti a tanti
È un vizietto seccator, è un vizietto seccator.
Siete vaghe, siete amabili, più tesori il ciel vi diè,
E le grazie vi circondano dalla testa sin ai piè,
Dalla testa sin ai piè.
Ma, ma, ma la fate a tanti a tanti a tanti a tanti
Che credibile non è, che credibile non è.
Io vo’ bene al sesso vostro, ve lo mostro,
Mille volte il brando presi, vi difesi
Gran tesoro il ciel vi diè, fino ai piè.
Ma, ma, ma, la fate a tanti a tanti
A tanti a tanti a tanti,
La fate a tanti a tanti a tanti a tanti,
Che, se gridano gli amanti,
Hanno certo un gran perché,
Un gran perché...
(Parte.)

ACTE II SCÈNE 8
GUGLIELMO
Mon ami, je ne saurais quel conseil te donner.
FERRANDO
Barbare, ingrate, en un jour !... En peu d’heures !
GUGLIELMO
Certes, cet événement est stupéfiant !
N o 26. Aria
GUGLIELMO
Mes dames, vous la faites à tant à tant à tant à tant
Que, pour dire la vérité, si les amants se lamentent
Je commence à les comprendre, je commence à les comprendre.
Je vous aime bien, vous le savez, chacun le sait :
Chaque jour je vous le montre, vous le montre
Vous donne des signes d’amitié, vous le montre,
Vous donne des signes d’amitié, des signes d’amitié.
Mais la faire ainsi à tant à tant à tant à tant
Me déçoit en vérité, me déçoit en vérité.
Mille fois j’ai pris l’épée pour défendre votre honneur.
Mille fois, mille fois, mille fois je vous ai défendues
Par la parole et plus, par le cœur.
Mais la faire ainsi à tant à tant à tant à tant
Est un défaut irritant, est un défaut irritant.
Vous êtes belles et aimables, plus d’un trésor le ciel vous donna,
Et les grâces vous entourent de la tête jusques aux pieds
De la tête jusqu’aux pieds.
Mais mais mais vous la faites à tant à tant à tant à tant
Que c’en est incroyable, que c’en est incroyable.
Je vous aime bien, je vous le montre,
Mille fois j’ai pris l’épée pour vous défendre
Un grand trésor vous donna le ciel, jusqu’aux pieds.
Mais, mais, mais, vous la faites à tant à tant
A tant à tant à tant
Vous la faites à tant à tant à tant à tant,
Que si les amants crient,
Certes, ils ont une bonne raison
Une bonne raison...
(Il sort.)
171

172
SCENA NONA
Recitativo
FERRANDO
In qual fiero contrasto, in qual disordine di pensieri e di
affetti io mi ritrovo!
Tanto insolito e novo è il caso mio, che non altri, non io
basto per consigliarmi... Alfonso, Alfonso, quanto rider
vorrai della mia stupidezza! Ma mi vendicherò. Saprò dal
seno cancellar quell’iniqua... saprò cancellarla... cancellarla?
Troppo, oh dio, questo cor per lei mi parla.
N o 27. Cavatina
FERRANDO
Tradito, schernito dal perfido cor, dal perfido cor,
Io sento che ancora quest’alma l’adora,
Io sento per essa le voci d’amor,
Io sento per essa le voci d’amor,
Le voci d’amor, le voci d’amor.
Tradito, schernito dal perfido cor, dal perfido cor,
(Qui capita Don Alfonso con Guglielmo e sta a sentire.)
Io sento che ancora quest’alma l’adora,
Io sento per essa le voci d’amor,
Io sento per essa le voci d’amor,
Le voci d’amor, le voci d’amor...
DON ALFONSO
Bravo: questa è costanza!
MOZARTCOSI FAN TUTTE
Recitativo
FERRANDO
Andate, o barbaro, per voi misero sono.
DON ALFONSO
Via, se sarete buono vi tornerò l’antica calma. Udite:
Fiordiligi a Guglielmo si conserva fedel, e Dorabella infedel
a voi fu.

ACTE II SCÈNE 9
SCÈNE 9
Récitatif
FERRANDO
Dans quelle horrible peine, dans quel désordre de pensées
et de sentiments je me retrouve !
Si insolite et si nouvelle est ma situation que ni les autres
ni moi-même, ne peuvent me conseiller... Alfonso,
Alfonso, combien tu vas rire de ma stupidité ! Mais je me
vengerai. Je saurai éliminer de mon cœur cette injuste...
je saurai l’éliminer, l’éliminer ? Oh Dieu, ce cœur plaide
trop pour elle.
N o 27. Cavatine
FERRANDO
Trahi, bafoué, par ce cœur perfide, par ce cœur perfide,
Je sens que cette âme l’adore encore,
J’entends parler pour elle les voix de l’amour,
J’entends parler pour elle les voix de l’amour,
Les voix de l’amour, les voix de l’amour.
Trahi, bafoué, par ce cœur perfide, par ce cœur perfide,
(Entrent Don Alfonso et Guglielmo qui écoutent.)
Je sens que cette âme l’adore encore,
Je sens que cette âme l’adore encore,
J’entends parler pour elle les voix de l’amour,
Les voix de l’amour, les voix de l’amour...
Récitatif
DON ALFONSO
Bravo : ça, c’est de la constance !
FERRANDO
Allez-vous en, ô barbare, à cause de vous je suis malheureux.
DON ALFONSO
Allons, si vous êtes bon, vous retrouverez votre ancienne
sérénité. Ecoutez : Fiordiligi s’est gardée fidèle à
Guglielmo et Dorabella vous a été infidèle.
173

174
FERRANDO
Per mia vergogna.
GUGLIELMO
Caro amico, bisogna far delle differenze in ogni cosa. Ti
pare che una sposa mancar possa a un Guglielmo? Un
picciol calcolo... Non parlo per lodarmi, se facciamo tra
noi... Tu vedi, amico, che un poco più di merto...
DON ALFONSO
Eh, anch’io lo dico!
GUGLIELMO
Intanto mi darete cinquanta zecchinetti.
DON ALFONSO
Volentieri. Pria però di pagar vo’ che facciamo qualche
altra esperienza.
GUGLIELMO
Come!
DON ALFONSO
Abbiate pazienza; infin domani siete entrambi miei schiavi:
a me voi deste parola da soldati, di far quel ch’io dirò.
Venite; io spero mostrarvi ben che folle è quel cervello
che sulla frasca ancor vende l’uccello.
(Partono.)
MOZARTCOSI FAN TUTTE
SCENA DECIMA
Camera con diverse porte, specchio è tavolini.
Recitativo
DESPINA
Ora vedo che siete una donna di garbo.
DORABELLA
Invan, Despina, di resister tentai: quel demonietto ha un

FERRANDO
Pour ma honte.
GUGLIELMO
Cher ami, il faut faire la différence en tout. Crois- t u
q u’une fiancée puisse manquer de foi à un Guglielmo ?
Une petite estimation... Entre nous, je ne parle pas pour
me vanter... Tu vois, mon ami, qu’un peu plus de valeur...
DON ALFONSO
Eh, je le dis également !
GUGLIELMO
En attendant, vous me donnerez cinquante petits sequins.
DON ALFONSO
Volontiers. Mais avant de payer, je veux que nous fassions
une autre expérience.
GUGLIELMO
Comment !
DON ALFONSO
Patience : jusqu’à demain, vous êtes tous deux mes
e s c l a v e s: vous m’avez donné votre parole de soldats, de faire
ce que je dirai. Venez, j’espère vous montrer qu’est bien fou
celui qui vend l’oiseau qui est encore sur la branche.
(Ils sortent.)
ACTE II SCÈNE 10
SCÈNE 10
Une chambre avec plusieurs portes, miroir et petites tables.
Récitatif
DESPINA
Maintenant je vois que vous êtes une femme chic.
DORABELLA
En vain, Despina, j’ai tenté de résister : ce petit démon a
175

176
artifizio, un’eloquenza, un tratto che ti fa cader giù se sei
di sasso.
DESPINA
Corpo di satanasso, questo vuol dir saper! Tanto di raro
noi povere ragazze abbiamo un po’ di bene, che bisogna
pigliarlo allor ch’ei viene.
(Entra Fiordiligi.)
Ma ecco la sorella. Che ceffo!
FIORDILIGI
Sciagurate! Ecco per colpa vostra in che stato mi trovo!
DESPINA
Cosa è nato, cara madamigella?
DORABELLA
Hai qualche mal, sorella?
FIORDILIGI
Ho il diavolo che porti me, te, lei, Don Alfonso, i forastieri
e quanti pazzi ha il mondo.
DORABELLA
Hai perduto il giudizio?
FIORDILIGI
Peggio peggio; inorridisci: io amo! E l’amor mio non è sol
per Guglielmo.
DESPINA
Meglio meglio!
DORABELLA
E che sì, che anche tu se’ innamorata del galante biondino!
FIORDILIGI (sospirando)
Ah, purtroppo per noi.
DESPINA
Ma brava!
MOZART COSI FAN TUTTE

un art, une éloquence, des traits qui te font tomber, même
si tu es de pierre.
DESPINA
Diable, ça c’est du savoir-faire ! C’est si rare pour nous,
pauvres filles, d’avoir un peu de bonheur, qu’il faut le
cueillir quand il passe.
(Entre Fiordiligi.)
Mais voici votre sœur. Quelle tête !
FIORDILIGI
Misérables ! Voilà l’état où je me trouve, par votre faute !
DESPINA
Qu’est-il arrivé, chère mademoiselle ?
DORABELLA
As-tu quelque mal, sœur ?
FIORDILIGI
Que le diable m’emporte, moi, toi, elle, Don Alfonso, les
étrangers et tous les fous du monde.
DORABELLA
Tu as perdu la raison ?
FIORDILIGI
Pire pire ; sois horrifiée : j’aime ! Et mon amour n’est pas
seulement pour Guglielmo.
DESPINA
Mieux mieux !
DORABELLA
Et oui, tu es aussi amoureuse du blondinet galant !
FIORDILIGI (soupirant)
Ah, que trop pour nous.
DESPINA
Mais bravo !
ACTE II SCÈNE 10
177

178
DORABELLA
Tieni, settantamila baci: tu il biondino, io il brunetto,
eccoci entrambe spose!
FIORDILIGI
Cosa dici! Non pensi agli infelici che stamane partir! Ai
loro pianti, alla lor fedeltà tu più non pensi? Così barbari
sensi dove, dove apprendesti, sì diversa da te come ti
festi?
DORABELLA
Odimi: sei tu certa che non muoiano in guerra i nostri
vecchi amanti, e allora? Entrambe resterem colle man
piene di mosche: fra un ben certo, e un incerto c’è
sempre gran divario!
FIORDILIGI
E se poi torneranno?
DORABELLA
Se torneran, lor danno! Noi saremo allor mogli, noi saremo
lontane mille miglia.
FIORDILIGI
Ma non so come mai si può cangiar in un sol giorno un core.
DORABELLA
Che domanda ridicola! Siam donne!
E poi tu com’hai fatto?
FIORDILIGI
Io saprò vincermi.
DESPINA
Voi non saprete nulla!
FIORDILIGI
Farò che tu lo veda.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DORABELLA
Credi, sorella, è meglio che tu ceda.

DORABELLA
Tiens, soixante-dix mille baisers : toi le blondinet, moi le
brunet, nous voici toutes deux fiancées !
FIORDILIGI
Que dis-tu ! Tu ne penses pas aux malheureux partis ce
matin ! A leurs larmes, à leur fidélité tu ne penses plus ?
Où, où as-tu appris des sentiments si barbares, comment
t’es-tu faite si différente de toi ?
DORABELLA
Ecoute-moi : es-tu sûre que nos vieux amants ne mourront
pas à la guerre, et alors ? Toutes deux nous resterons
les mains vides : entre un bien sûr et un bien incertain, il
y a toujours une grande différence !
FIORDILIGI
Et s’ils reviennent ?
DORABELLA
S’ils reviennent, tant pis pour eux ! Nous serons mariés,
nous serons loin, à mille milles.
FIORDILIGI
Mais diantre, je ne sais comment un cœur peut en un seul
jour se transformer.
DORABELLA
Quelle question ridicule ! Nous sommes femmes !
Et alors toi, comment as-tu fait ?
FIORDILIGI
Je saurai me vaincre.
DESPINA
Vous ne saurez rien !
ACTE II SCÈNE 10
FIORDILIGI
Je ferai en sorte que tu le voies.
DORABELLA
Crois-moi, sœur, il vaut mieux que tu cèdes.
179

180
N o 28. Aria
DORABELLA
È amore un ladroncello, un serpentello è amor.
Ei toglie e dà la pace, la pace, come gli piace, ai cor.
Per gli occhi al seno appena un varco aprir si fa,
Che l’anima incatena e toglie libertà,
Che l’anima incatena e toglie libertà.
È amore un ladroncello, un serpentello è amor.
Ei toglie e dà la pace, la pace, come gli piace, ai cor.
Porta dolcezza, dolcezza e gusto se tu lo lasci far,
Ma t’empie di disgusto, ma t’empie di disgusto
Se tenti di pugnar.
Porta dolcezza e gusto se tu lo lasci far,
Ma t’empie di disgusto se tenti di pugnar.
È amore un ladroncello, un serpentello è amor.
Ei toglie e dà la pace, la pace, come gli piace, ai cor.
Se nel tuo petto ei siede, s’egli ti becca qui,
Fa’ tutto quel ch’ei chiede, che anch’io farò così.
Se nel tuo petto ei siede, s’egli ti becca qui,
Fa’ tutto quel ch’ei chiede, che anch’io farò così,
S’egli ti becca, s’egli ti becca, s’egli ti becca
Ti becca, ti becca, ti becca, ti becca,
Fa’ tutto quel ch’ei chiede, ch’ei chiede,
Che anch’io farò così, così,
Che anch’io farò così, così, che anch’io farò così.
(Parte con Despina.)
MOZARTCOSI FAN TUTTE
SCENA UNDICESIMA
Récitatif
FIORDILIGI
Come tutto congiura a sedurre il mio cor! Ma no... si mora e
non si ceda... errai quando alla suora io mi scopersi, ed alla
serva mia. Esse a lui diran tutto, ed ei più audace fia di
tutto capace... agli occhi miei mai più non comparisca... a
tutti i servi minaccierò il congedo (Guglielmo sulla porta.)
se lo lascian passar... veder nol voglio, quel seduttor!

N o 28. Aria
DORABELLA
Amour est un petit larron, un petit serpent.
Au cœur il enlève ou donne la paix, la paix, à sa guise.
Des yeux au cœur, à peine se fait-il ouvrir la voie,
Qu’il enchaîne l’âme et enlève la liberté,
Qu’il enchaîne l’âme et enlève la liberté.
Amour est un petit larron, un petit serpent.
Au cœur il enlève ou donne la paix, la paix, à sa guise.
Il t’apporte douceur, douceur et délice si tu le laisses faire
Mais il t’emplit de dégoût, mais il t’emplit de dégoût
Si tu tentes de lutter.
Il t’apporte douceur et délice si tu le laisses faire
Mais il t’emplit de dégoût si tu tentes de lutter.
Amour est un petit larron, un petit serpent.
Au cœur il enlève ou donne la paix, la paix, à sa guise.
S’il s’installe en ton sein, s’il te pique là,
Fais tout ce qu’il désire, car moi je ferai ainsi.
S’il s’installe en ton sein, s’il te pique là,
Fais tout ce qu’il désire, car moi je ferai ainsi,
S’il te pique, s’il te pique, s’il te pique
Te pique, te pique, te pique, te pique,
Fais tout ce qu’il désire, ce qu’il désire,
Car moi je ferai ainsi, ainsi,
Car moi je ferai ainsi, ainsi, car moi je ferai ainsi.
(Elle sort avec Despina.)
ACTE II SCÈNE 11
SCÈNE 11
Récitatif
FIORDILIGI
Comme tout conjure à séduire mon cœur ! Mais non... on
meurt, on ne cède pas... quelle erreur de me confier à ma
sœur et à ma servante. Elles lui diront tout et lui, plus
audacieux, sera capable de tout... qu’à mes yeux il n’apparaisse
plus jamais... je menacerai de renvoyer tous les
serviteurs (Guglielmo apparaît à la porte.) s’ils le laissent
passer... Je ne veux plus le voir, ce séducteur !
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182
GUGLIELMO (a parte)
Bravissima! La mia casta Artemisia! La sentite?
FIORDILIGI
Ma potria Dorabella senza saputa mia... piano... un pensiero
per la mente mi passa... in casa mia restar molte
uniformi di Guglielmo e Ferrando... ardir... Despina,
D e s p i n a . . .
DESPINA (entrando)
Cosa c’è?
FIORDILIGI
Tieni un po’ questa chiave, e senza replica, senza replica
alcuna prendi nel guardaroba, e qui mi porta due spade,
due cappelli e due vestiti de’ nostri sposi.
DESPINA
E che volete fare?
FIORDILIGI
Vanne; non replicare.
DESPINA (fra sé)
Comanda in abrégé Donna Arroganza.
(Parte.)
FIORDILIGI
Non c’è altro; ho speranza, che Dorabella stessa seguirà il
bell’esempio; al campo, al campo! Altra strada non resta
per serbarci innocenti.
DON ALFONSO (dalla porta a Despina)
Ho capito abbastanza: vanne pur, non temer.
DESPINA (che ritorna)
Eccomi.
MOZART COSI FAN TUTTE
FIORDILIGI
Vanne. Sei cavalli di posta voli un servo a ordinar; di’ a
Dorabella che parlar le vorrei.

GUGLIELMO (à part)
Bravissimo ! Ma chaste Artémise ! Vous l’entendez ?
FIORDILIGI
Mais Dorabella pourrait sans que je le sache... doucement...
une pensée me traverse l’esprit... il reste dans la
maison de nombreux uniformes de Guglielmo et de
Ferrando... Courage... Despina, Despina...
DESPINA (entrant)
Qu’y a-t-il ?
FIORDILIGI
Prends un peu cette clef, et sans répliquer, sans aucun commentaire,
prends dans la garde-robes deux épées, deux chapeaux
et deux manteaux de nos fiancés, et me les apporte.
DESPINA
Et que voulez-vous faire ?
FIORDILIGI
Va ; pas de question.
DESPINA (à part)
Elle commande en abrégé, Madame Arrogance.
(Elle sort.)
FIORDILIGI
Il n’y a pas d’autre voie ; j’espère que Dorabella elle- m ê m e
suivra ce bel exe m p l e ; au champ de bataille, au champ de
b a t a i l l e! Pas d’autre route pour se garder pures.
DON ALFONSO (à la porte à Despina)
J’en ai compris suffisamment : va, n’aie pas peur.
DESPINA (qui revient)
Me voici.
ACTE II SCÈNE 11
FIORDILIGI
Va. Je veux qu’un serviteur attelle six chevaux de poste ;
dis à Dorabella que je veux lui parler.
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184
DESPINA
Sarà servita.
(Fra sé) Questa donna mi par di senno uscita.
(Parte.)
SCENA DODICESIMA
FIORDILIGI
L’abito di Ferrando sarà buono per me; può Dorabella
prender quel di Guglielmo; in questi arnesi raggiungerem
gli sposi nostri, al loro fianco pugnar potremo, e morir se
fa d’uopo. (Si cava quello che tiene in testa.)Ite in malora,
ornamenti fatali!... Io vi detesto.
GUGLIELMO (fra sè)
Si può dar un amor simile a questo?
FIORDILIGI
Di tornar non sperate alla mia fronte pria ch’io qui torni
col mio ben; in vostro loco porrò questo cappello... Oh,
come ei mi trasforma le sembianze e il viso! Come appena
io medesma or mi ravviso!
N o 29. Duetto
FIORDILIGI
Fra gli amplessi in pochi istanti giungerò del fido sposo;
Sconosciuta a lui davanti, in quest’abito verrò, in
quest’abito verrò.
Oh, che gioia il suo bel core proverà nel ravvisarmi!
FERRANDO (entrando)
Ed intanto di dolore meschinello io mi morrò!
Meschinello io mi morrò!
FIORDILIGI
Cosa veggio! Son tradita! Deh, partite...
FERRANDO
Ah no, mia vita!
MOZARTCOSI FAN TUTTE

DESPINA
A votre service.
(A part) Cette dame me paraît avoir perdu le sens commun.
(Elle sort.)
SCÈNE 12
FIORDILIGI
Les habits de Ferrando iront pour moi ; Dorabella peut
prendre ceux de Guglielmo ; sous ces vêtements nous
rejoindrons nos fiancés, nous pourrons combattre à leur
côté et puis mourir, s’il le faut. (Elle arrache ce qu’ e l l e
porte sur la tête.)Allez au diable, fatals ornements !... Je
vous déteste.
GUGLIELMO (à part)
Peut-il y avoir un amour comparable à celui-là ?
FIORDILIGI
N’espérez pas retrouver mon front avant qu’ici je revienne
avec mon amour ; à votre place, je mettrai ce chapeau...
Oh, comme il me transforme l’apparence et le visage ! Je
me reconnais à peine à présent !
N o 29. Duetto
FIORDILIGI
Dans peu de temps, dans les étreintes, je rejoindrai le
fidèle fiancé ;
Devant lui, inconnue, dans cet habit, j’irai, dans cet
habit, j’irai.
Oh, quelle joie son cœur superbe aura en me reconnaissant !
FERRANDO (entrant)
Alors que, malheureux, je me meurs de douleur !
Malheureux, je me meurs !
FIORDILIGI
Que vois-je ! Je suis trahie ! De grâce, partez...
FERRANDO
Ah non, ma vie !
ACTE II SCÈNE 12
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(Prende la spada dal tavolino, la sfodera, ecc.)
Con quel ferro di tua mano questo cor tu ferirai,
E se forza oh dio, non hai, io la man ti reggerò,
Ti reggerò.
FIORDILIGI
Taci... ahimè! Son abbastanza tormentata, ed infelice!
FERRANDO
Ah che omai la mia costanza...
FIORDILIGI
Ah che omai la mia costanza...
FERRANDO
... A quei sguardi, a quel che dice...
FIORDILIGI
... A quei sguardi, a quel che dice...
FERRANDO E FIORDILIGI
... Incomincia a vacillar,
Incomincia a vacillar, incomincia a vacillar.
FIORDILIGI
Sorgi, sorgi...
FERRANDO
Invan lo credi.
MOZART COSI FAN TUTTE
FIORDILIGI
Per pietà, da me che chiedi?
FERRANDO
Il tuo cor, o la mia morte.
(Le prende la mano e glie la bacia.)
FIORDILIGI
Ah, non son, non
Son più forte... ah, non son, non son più forte!

(Il prend l’épée sur la petite table, la dégaine, etc.)
Avec cette lame, de ta main, tu frapperas ce cœur,
Et si tu n’en as la force, oh Dieu, je soutiendrai ta main,
Je soutiendrai ta main.
FIORDILIGI
Ta i s-toi... hélas ! Je suis déjà assez torturée et malheureuse !
FERRANDO
Ah, combien maintenant ma fidélité...
FIORDILIGI
Ah, combien maintenant ma fidélité...
FERRANDO
... A ces regards, à ses paroles...
FIORDILIGI
... A ces regards, à ses paroles...
FERRANDO & FIORDILIGI
... Commence à vaciller,
Commence à vaciller, commence à vaciller.
FIORDILIGI
Relève-toi, relève-toi...
FERRANDO
Tu le crois en vain.
ACTE II SCÈNE 12
FIORDILIGI
Par pitié, que veux-tu de moi ?
FERRANDO
Ton cœur, ou ma mort.
(Il lui prend la main et la baise.)
FIORDILIGI
Ah, non je ne suis, je ne suis
Plus forte... ah, je ne suis, je ne suis plus forte !
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188
FERRANDO
Cedi, cara... cedi, cara...
FIORDILIGI
Dei, consiglio!
FERRANDO
Cedi, cara...
FIORDILIGI
Ah non son più forte!
FERRANDO
Cedi, cara...
FIORDILIGI
Dei, consiglio!
FERRANDO (tenerissimamente)
Volgi a me pietoso il ciglio!
In me sol trovar tu puoi sposo, amante,
E più se vuoi. Idol mio, più non tardar.
FIORDILIGI (tremando)
Giusto ciel!...
FERRANDO
Sposo...
FIORDILIGI
Giusto ciel!...
FERRANDO
... Amante...
FIORDILIGI
Giusto ciel!...
FERRANDO
... E più
Se vuoi...
MOZARTCOSI FAN TUTTE

FERRANDO
Cède, mon aimée... cède, mon aimée...
FIORDILIGI
Dieux, aidez-moi !
FERRANDO
Cède, mon aimée...
FIORDILIGI
Ah, je faiblis !
FERRANDO
Cède, mon aimée...
FIORDILIGI
Dieux, aidez-moi !
FERRANDO (très tendrement)
Tourne vers moi un regard de pitié !
En moi seul tu trouveras un fiancé, un amant
Et plus si tu veux. Mon idole, ne tarde plus.
FIORDILIGI (tremblante)
Juste ciel !...
FERRANDO
Fiancé...
FIORDILIGI
Juste ciel !...
FERRANDO
... Amant...
FIORDILIGI
Juste ciel !...
FERRANDO
... Et plus
Si tu veux...
ACTE II SCÈNE 12
189

190
FIORDILIGI
Crudel...
FERRANDO
... Idol mio...
FIORDILIGI
... Hai vinto...
FERRANDO
... Più non tardar.
FIORDILIGI
Fa’ di me quel che ti par.
(Don Alfonso trattiene Guglielmo che vorrebbe uscire.)
FERRANDO E FIORDILIGI
Abbracciamci, o caro bene,
E un conforto a tante pene
Sia languir di dolce affetto,
Di diletto sospirar...
(Partono.)
SCENA TREDICESIMA
GUGLIELMO
Oh poveretto me! Cosa ho veduto! Cosa ho sentito mai.
DON ALFONSO
Per carità silenzio!
GUGLIELMO
Mi pelerei la barba! Mi graffierei la pelle! E darei colle
corna entro le stelle! Fu quella Fiordiligi! La Pe n e l o p e ,
l’Artemisia del secolo! Briccona! Assassina... furfante...
ladra... cagna...
DON ALFONSO
Lasciamolo sfogar...
MOZART COSI FAN TUTTE

FIORDILIGI
Cruel...
FERRANDO
... Mon idole...
FIORDILIGI
... Tu as gagné...
FERRANDO
... Ne tarde plus.
FIORDILIGI
Fais de moi ce que tu veux.
(Don Alfonso retient Guglielmo qui voudrait intervenir.)
FERRANDO & FIORDILIGI
Embrassons-nous, ô cher amour,
Cela console de tant de peines
De défaillir d’un doux amour,
De soupirer de plaisir...
(Ils sortent.)
SCÈNE 13
GUGLIELMO
Oh pauvre de moi ! Qu’ai-je vu ! Qu’ai-je donc entendu !
DON ALFONSO
Par pitié silence !
ACTE II SCÈNE 13
GUGLIELMO
Je m’arracherai la barbe ! Je m’écorcherai la peau ! Et
j’encornerai les étoiles ! C’était Fiordiligi ! La Pénélope,
l’Artémise du siècle ! Brigande ! Assassine... canaille...
voleuse... chienne...
DON ALFONSO
Laissons-le vider son cœur...
191

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FERRANDO (entrando, lieto)
Ebben!
GUGLIELMO
Dov’è?
FERRANDO
Chi? La tua Fiordiligi?
GUGLIELMO
La mia Fior... fior di diavolo, che strozzi lei prima
e dopo me!
FERRANDO
Tu vedi bene, v’han delle differenze in ogni cosa...
(ironicamente) un poco di più merto!
GUGLIELMO
Ah, cessa, cessa di tormentarmi; ed una via piuttosto
studiam di castigarle sonoramente.
DON ALFONSO
Io so qual è: sposarle.
GUGLIELMO
Vorrei sposar piuttosto la barca di Caronte!
FERRANDO
La grotta di Vulcano.
GUGLIELMO
La porta dell’inferno.
MOZART COSI FAN TUTTE
DON ALFONSO
Dunque, restate celibi in eterno.
FERRANDO
Mancheran forse donne ad uomin come noi?
DON ALFONSO
Non c’è abbondanza d’altro. Ma l’altre che faran, se ciò
fer queste? In fondo voi le amate queste vostre cornacchie
spennacchiate.

FERRANDO (entrant, joyeux)
Eh bien !
GUGLIELMO
Où est-elle ?
FERRANDO
Qui ? Ta Fiordiligi ?
GUGLIELMO
Ma Fior... fleur du diable ; qu’il l’étrangle, d’abord elle et
puis moi !
FERRANDO
Tu vois bien, il y a des différences en toutes choses...
(ironiquement) un peu plus de valeur !
GUGLIELMO
Ah cesse, cesse de me tourmenter ; et étudions plutôt un
moyen de les châtier avec éclat.
DON ALFONSO
Je sais lequel : les épouser.
GUGLIELMO
J’épouserais plutôt la barque de Charon !
FERRANDO
La grotte de Vulcain.
GUGLIELMO
La porte des Enfers.
ACTE II SCÈNE 13
DON ALFONSO
Donc, vous restez célibataire pour l’éternité.
FERRANDO
A des hommes comme nous, les femmes pourraient manquer ?
DON ALFONSO
Il n’y a pas abondance d’autre chose. Mais que feront les
autres, si celles-là ont agi ainsi ? Au fond vous les aimez,
vos pies plumées.
193

194
GUGLIELMO
Ah pur troppo!
FERRANDO
Pur troppo!
MOZART COSI FAN TUTTE
DON ALFONSO
Ebben pigliatele com’elle son. Natura non potea fare l’eccezione,
il privilegio di creare due donne d’altra pasta per
i vostri bei musi; in ogni cosa ci vuol filosofia; venite
meco; di combinar le cose studierem la maniera. Vo’ che
ancor questa sera doppie nozze si facciano; frattanto
un’ottava ascoltate: felicissimi voi, se la imparate!
N o 30.
DON ALFONSO
Tutti accusan le donne, ed io le scuso
Se mille volte al dì cangiano amore;
Altri un vizio lo chiama, ed altri un uso,
Ed a me par necessità del core.
L’amante che si trova alfin deluso
Non condanni l’altrui, ma il proprio errore:
Già che giovani, vecchie, e belle e brutte,
Ripetete con me: così fan tutte.
FERRANDO, GUGLIELMO E DON ALFONSO
Così fan tutte!
SCENA QUATTRODICESIMA
Recitativo
DESPINA (entrando)
Vittoria, padroncini! A sposarvi disposte son le care
madame; a nome vostro loro io promisi che in tre giorni
circa partiranno con voi: l’ordin mi diero di trovar un
notaio che stipuli il contratto; alla lor camera attendendo
vi stanno. Siete così contenti?

GUGLIELMO
Ah que trop !
FERRANDO
Que trop !
ACTE II SCÈNE 14
DON ALFONSO
Eh bien prenez-les comme elles sont. La nature ne pouvait
faire d’exception, de privilège, en créant pour vous
deux femmes d’une autre glaise ; en toute chose il faut de
la philosophie ; venez avec moi ; nous étudierons la
manière d’arranger les choses. Je veux que dès ce soir
nous fassions double noce ; entre-temps, écoutez ce huitain
: vous serez bienheureux si vous le retenez !
N o 30.
DON ALFONSO
Tout le monde accuse les femmes, moi je les excuse
Si mille fois par jour, elles changent d’amours ;
Pour certains c’est un vice, pour d’autres c’est l’usage,
Et moi j’y vois nécessité du cœur.
L’amant qui se trouve finalement déçu
Qui ne condamne pas l’erreur d’autrui mais la sienne :
Car jeunes, vieilles, et belles, et laides,
Répétez avec moi : elle font toutes comme ça.
FERRANDO, GUGLIELMO & DON ALFONSO
Elles font toutes comme ça !
SCÈNE 14
Récitatif
DESPINA (entrant)
Victoire, petits maîtres ! Les chères dames consentent à
vous épouser ; en votre nom je leur ai promis que dans trois
jours à peu près, elles partiront avec vous : elles m’ o n t
ordonné de trouver un notaire qui établisse le contrat ; elles
vous attendent dans leur chambre. Vous êtes contents ?
195

196
FERRANDO, GUGLIELMO E DON ALFONSO
Contentissimi.
DESPINA
Non è mai senza effetto quand’entra la Despina in un
progetto.
(Partono.)
MOZARTCOSI FAN TUTTE
SCENA QUINDICESIMA
Sala ricchissima illuminata. Orchestra in fondo.
Tavola per quattro persone con doppieri d’argento ecc.
Quattro servi ricamente vestiti.
N o 31. Finale
DESPINA
Fate presto, o cari amici, alle faci il foco date
E la mensa preparate con ricchezza e nobiltà!
Delle nostre padroncine gl’imenei son già disposti.
(Ai suonatori)
E voi gite ai vostri posti finché i sposi vengon qua,
Finché i sposi vengon qua.
CORO DI SERVI E SUONATORI
Facciam presto, o cari amici,
Alle faci il foco diamo
E la mensa prepariamo
Con ricchezza e nobiltà,
Con ricchezza e nobiltà,
Con ricchezza e nobiltà.
DON ALFONSO (entrando)
Bravi bravi! Ottimamente:
Che abbondanza! Che eleganza!
Una mancia conveniente l’un e l’altro a voi darà,
L’un e l’altro a voi darà.
(Mentre Don Alfonso canta, i suonatori accordano.)

FERRANDO, GUGLIELMO & DON ALFONSO
Très très contents.
DESPINA
Ce n’est jamais sans efficacité que la Despina s’investit
dans un projet.
(Ils sortent.)
ACTE II SCÈNE 15
SCÈNE 15
Salle richement illuminée. Orchestre au fond.
Table pour quatre personnes avec flambeaux d’argent, etc.
Quatre serviteurs richement vêtus.
N o 31. Finale
DESPINA
Faites vite, ô chers amis, allumez les flambeaux
Et préparez la table avec richesse et élégance !
De nos jeunes maîtresses, l’hymen est déjà préparé.
(Aux musiciens) Et vous, à vos postes, jusqu’à ce que les
époux arrivent,
Jusqu’à ce que les époux se rendent ici.
CHOEUR DE SERVITEURS ET DE MUSICIENS
Faisons vite, ô chers amis,
Allumons les flambeaux
Et préparons la table
Avec richesse et élégance,
Avec richesse et élégance,
Avec richesse et élégance.
DON ALFONSO (entrant)
Bravo bravo ! Impeccable :
Quelle richesse ! Quelle élégance !
L’un et l’autre vous offriront une bonne récompense,
L’un et l’autre vous l’offriront.
(Pendant l’intervention de Don Alfonso,
les musiciens s’accordent.)
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Le due coppie omai si avanzano,
Fate plauso al loro arrivo,
Lieto canto e suon giulivo
Empia il ciel d’ilarità, empia il ciel d’ilarità.
DESPINA E DON ALFONSO (piano, partendo per diverse porte)
La più bella commediola non s’è vista, o si vedrà...
SCENA SEDICESIMA
CORO
Benedetti i doppi coniugi e le amabili sposine!
Benedetti i doppi coniugi e le amabili sposine!
Splenda lor il ciel benefico, ed a guisa di galline
Sien di figli ognor prolifiche, che le agguaglino in beltà,
Che le agguaglino in beltà.
FIORDILIGI E DORABELLA, FERRANDO E GUGLIELMO
Come par che qui prometta tutto gioia e tutto amore!
FIORDILIGI E DORABELLA
Della cara Despinetta...
FERRANDO E GUGLIELMO
... Certo il merito sarà,
FIORDILIGI
... Certo il merito
MOZARTCOSI FAN TUTTE
DORABELLA, FERRANDO ET GUGLIELMO
Della cara Despinetta
FIORDILIGI E DORABELLA, FERRANDO E GUGLIELMO
Certo, certo il merito sarà, della cara Despinetta,
Certo, certo il merito sarà, della cara Despinetta.
Raddoppiate il lieto suono,
Replicate il dolce canto, e noi qui seggiamo intanto
In maggior giovialità, in maggior giovialità, in maggior
giovialità.

ACTE II SCÈNE 16
A présent, les deux couples s’avancent,
Applaudissez leur arrivée
Qu’un chant joyeux, une musique jubilante,
Emplissent le ciel de gaîté, emplissent le ciel de gaîté.
DESPINA & DON ALFONSO (à voix basse,
sortant par deux portes différentes)
Une petite comédie plus belle, on n’en a pas vue, et on
n’en verra pas...
SCÈNE 16
CHŒUR
Bénis soient les deux conjoints et les aimables mariées !
Bénis soient les deux conjoints et les aimables mariées !
Que le ciel leur soit bénéfique, et comme les oiseaux du ciel,
Q u’ils aient beaucoup d’enfants, qui les égalent en beauté,
Qui les égalent en beauté.
FIORDILIGI & DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
Comme on dirait qu’ici sont promis tout amour et toute joie !
FIORDILIGI & DORABELLA
De la chère Despinetta...
FERRANDO & GUGLIELMO
... Certes, c’est le mérite
FIORDILIGI
... Certes, c’est le mérite
DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
De la chère Despinetta
FIORDILIGI & DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
Certes, certes, c’est le mérite de la chère Despinetta,
Certes, certes, c’est le mérite de la chère Despinetta.
Reprenez la joyeuse musique,
Répétez le chant aimable, et nous, pendant ce temps, siégeons
Dans la plus grande allégresse, dans la plus grande allégresse.
199

200
(Gli sposi mangiano.)
CORO
Benedetti i doppi coniugi e le amabili sposine!...
Splenda lor il ciel benefico, ed a guisa di galline
Sien di figli ognor prolifiche, che le agguaglino in beltà,
Che le agguaglino in beltà, che le agguaglino in beltà.
FERRANDO E GUGLIELMO
Tutto, tutto, o vita mia, al mio fuoco or ben risponde.
FIORDILIGI E DORABELLA
Pel mio sangue l’allegria cresce, cresce e si diffonde.
FERRANDO E GUGLIELMO
Sei pur bella!
FIORDILIGI E DORABELLA
Sei pur vago!
FERRANDO E GUGLIELMO
Che bei rai!
FIORDILIGI E DORABELLA
Che bella bocca!
FERRANDO E GUGLIELMO
Tocca e bevi! (toccando i bicchieri)
FIORDILIGI E DORABELLA
Bevi e tocca!
FERRANDO E GUGLIELMO
Tocca!
FIORDILIGI E DORABELLA
Bevi!
FERRANDO E GUGLIELMO
Bevi!
MOZARTCOSI FAN TUTTE

(Les fiancés mangent.)
ACTE II SCÈNE 16
CHŒUR
Bénis soient les deux conjoints et les aimables mariées ! . . .
Que le ciel leur soit bénéfique, et comme les oiseaux du ciel,
Q u’ils aient beaucoup d’enfants, qui les égalent en beauté,
Qui les égalent en beauté, qui les égalent en beauté.
FERRANDO & GUGLIELMO
Tout, tout, ô ma vie, répond à ma flamme.
FIORDILIGI & DORABELLA
Dans mes veines la joie grandit, grandit et se répand.
FERRANDO & GUGLIELMO
Comme tu es belle !
FIORDILIGI & DORABELLA
Comme tu es aimable !
FERRANDO & GUGLIELMO
Quel beau regard !
FIORDILIGI & DORABELLA
Quel beau sourire !
FERRANDO & GUGLIELMO
Trinque et bois ! (trinquant)
FIORDILIGI & DORABELLA
Bois et trinque !
FERRANDO & GUGLIELMO
Trinque !
FIORDILIGI & DORABELLA
Bois !
FERRANDO & GUGLIELMO
Bois !
201

202
FIORDILIGI E DORABELLA
Tocca
Tocca ! Bevi bevi! Tocca!
FERRANDO E GUGLIELMO
Bevi! Tocca tocca! Bevi!
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FIORDILIGI
E nel tuo, nel mio bicchiero
Si sommerga ogni pensiero...
FERRANDO
E nel tuo, nel mio bicchiero
Si sommerga ogni pensiero,
FIORDILIGI
... E non resti, e non resti più memoria
Del passato ai nostri cor,
Ah no, non
Resti, non resti più memoria,
No, del passato ai nostri cor.
DORABELLA
E nel tuo, nel mio bicchiero
Si sommerga ogni pensiero,
FERRANDO
E non resti, e non resti più memoria
Del passato ai nostri cor,
FERRANDO
Ah no, non
Resti, non resti più memoria, no,
Del passato ai nostri cor.
FIORDILIGI
E nel tuo, nel mio bicchiero
Si sommerga ogni pensiero.
DORABELLA
E non resti, e non resti più memoria
Del passato ai nostri cor.

ACTE II SCÈNE 16
FIORDILIGI & DORABELLA
Trinque
Trinque ! Bois bois ! Trinque !
FERRANDO & GUGLIELMO
Bois ! Trinque trinque ! Bois !
FIORDILIGI
Dans ton verre, dans le mien
Que s’engloutisse toute pensée...
FERRANDO
Dans ton verre, dans le mien
Que s’engloutisse toute pensée,
FIORDILIGI
... Et que ne reste, et que ne reste plus souvenir
Du passé de notre cœur,
Ah non, que ne
Reste, que ne reste plus de souvenir,
Non, du passé de notre cœur.
DORABELLA
Dans ton verre, dans le mien
Que s’engloutisse toute pensée,
FERRANDO
Et que ne reste, et que ne reste plus de souvenir
Du passé de notre cœur,
FERRANDO
Ah non, que ne
Reste, que ne reste plus de souvenir, non,
Du passé de notre cœur.
FIORDILIGI
Dans ton verre, dans le mien
Que s’engloutisse toute pensée.
DORABELLA
Et que ne reste, et que ne reste plus de souvenir
Du passé de notre cœur.
203

204
GUGLIELMO (da sè)
Ah! Ah bevessero del tossico,
Ah bevessero bevessero del tossico, del tossico!
Queste volpi, questi volpi senza onor!
SCENA DICIASETTESIMA
DON ALFONSO (entrando)
Miei signori, tutto è fatto;
Col contratto nuziale il notaio è sulle scale
E ipso facto qui verrà.
FIORDILIGI E DORABELLA, FERRANDO E GUGLIELMO
Bravo bravo! Passi subito.
DON ALFONSO
Vo a chiamarlo, vo a chiamarlo: eccolo qua.
DESPINA (entrando, da notaio)
Augurandovi ogni bene il notaio Beccavivi
Coll’usata a voi sen viene notariale dignità.
E il contratto stipulato colle regole ordinarie
Nelle forme giudiziarie, pria tossendo, poi sedendo,
(Pel naso) Clara voce leggerà.
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO E GUGLIELMO
Bravo bravo in verità!
DESPINA
Per contratto da me fatto si congiunge in matrimonio
Fiordiligi con Sempronio e con Tizio Dorabella,
Sua legittima sorella quelle, dame ferraresi
Questi nobili albanesi e per dote e contradote...
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO E GUGLIELMO
Cose note, cose note
Vi crediamo, ci fidiamo soscriviam, date pur qua.
DESPINA E DON ALFONSO
Bravi, bravi in verità!
MOZART COSI FAN TUTTE

GUGLIELMO (à part)
Ah ! Ah, puissent-elles boire le poison,
Ah puissent-elles boire, puissent-elles boire le poison !
Ces hyènes, ces hyènes sans honneur !
SCÈNE 17
DON ALFONSO (entrant)
Messieurs, tout est prêt ;
Avec le contrat de mariage, le notaire est à la porte
Et ipso facto il va arriver.
FIORDILIGI & DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
Bravo bravo ! Qu’il vienne immédiatement.
DON ALFONSO
Je vais l’appeler, je vais l’appeler : le voilà.
DESPINA (entrant, en notaire)
Vous présentant tous ses vœux, le notaire Beccavivi
Vient à vous selon l’usage avec la dignité notariale.
Le contrat est établi selon les règles ordinaires
Dans les formes juridiques, d’abord toussant, puis siégeant,
(Parlant du nez) Il le lira d’une voix claire.
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
Bravo bravo vraiment !
DESPINA
Par contrat fait par moi-même s’unissent par le mariage
Fiordiligi et Sempronius et Titus et Dorabella,
Sa sœur légitime, celles-ci dames de Ferrare
Ceux-ci nobles albanais et en dot et en douaire...
FIORDILIGI, DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
On connaît, on connaît,
Nous vous croyons, nous signons de confiance, donnez.
DESPINA & DON ALFONSO
Bravo, bravo en vérité !
ACTE II SCÈNE 17
205

206
(Solamente le due donne sottoscrivono. La carta resta in
man di Don Alfonso. Si sente il tamburo.)
CORO (di dentro)
Bella vita militar! Bella vita militar!
Ogni dì si cangia loco, oggi molto e doman poco,
Ora in terra ed or sul mar, ora in terra ed or sul mar.
FIORDILIGI E DORABELLA, DESPINA, FERRANDO E GUGLIELMO
Che romor! Che canto è questo!
DON ALFONSO
State cheti, io vo a guardar. State cheti, io vo a guardar.
(Va alla finestra.)
Misericordia! Numi del cielo!
Che caso orribile! Io tremo, io gelo!
Gli sposi vostri...
FIORDILIGI E DORABELLA
Lo sposo mio...
DON ALFONSO
In questo istante tornaro, oh dio!
Ed alla riva sbarcano
Già!
FIORDILIGI E DORABELLA, FERRANDO E GUGLIELMO
Cosa
Mai sento! Barbare stelle!
In tal momento che si farà?
FIORDILIGI E DORABELLA
Presto partite.
(Il servi portano via la tavola e i suonatori
partono in furia.)
DESPINA E DON ALFONSO
Ma se li veggono?
MOZARTCOSI FAN TUTTE

(Les deux femmes signent solennellement. Le contrat reste
dans les mains de Don Alfonso. On entend le tambour.)
CHŒUR (de la coulisse)
La belle vie militaire ! La belle vie militaire !
Tous les jours on change de coin, aujourd’hui beaucoup,
demain peu,
Parfois sur terre, parfois en mer.
FIORDILIGI & DORABELLA, DESPINA, FERRANDO & GUGLIELMO
Quel bruit ! Quel est ce chant !
DON ALFONSO
Gardez votre calme, je vais voir. Gardez votre calme,
je vais voir.
(Il va à la fenêtre.)
Miséricorde ! Dieux du ciel !
Quel malheur ! Je tremble, je suis glacé !
Vos fiancés...
FIORDILIGI & DORABELLA
Mon fiancé...
DON ALFONSO
Revenir en cet instant, oh Dieu !
Et sur le rivage, ils débarquent
Déjà !
FIORDILIGI & DORABELLA, FERRANDO & GUGLIELMO
Qu’est-ce
Que j’entends ! Cieux barbares !
En un tel instant, que faire ?
FIORDILIGI & DORABELLA
Vite partez.
(Les serviteurs emportent la table et les musiciens
partent furieux.)
DESPINA & DON ALFONSO
Mais s’ils les voyaient ?
ACTE II SCÈNE 17
207

208
FERRANDO E GUGLIELMO
Ma se ci veggono?
FIORDILIGI E DORABELLA
Presto fuggite!
DESPINA E DON ALFONSO
Ma se li incontrano?
FERRANDO E GUGLIELMO
Ma se ci incontrano?
FIORDILIGI E DORABELLA
Là là, celatevi per carità, per carità.
(Conducono i due amanti in una camera.
Don Alfonso conduce Despina in una altra camera.
Gli amanti escono non veduti e partono.)
Numi soccorso!
DON ALFONSO
Rasserenatevi...
FIORDILIGI E DORABELLA
Numi
Consiglio!
DON ALFONSO
Ritranquillatevi.
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FIORDILIGI E DORABELLA (quasi frenetiche)
Chi dal periglio ci salverà? Chi?
DON ALFONSO
In me fidatevi ben tutto andrà.
FIORDILIGI E DORABELLA
Mille barbari pensieri tormentando il cor mi vanno,
Se discoprono l’inganno, ah di noi che mai sarà,
Ah di noi che mai sarà.

FERRANDO & GUGLIELMO
Mais s’ils nous voyaient ?
FIORDILIGI & DORABELLA
Vite fuyez !
DESPINA & DON ALFONSO
Mais s’ils les rencontrent ?
FERRANDO & GUGLIELMO
Mais s’ils nous rencontrent ?
FIORDILIGI & DORABELLA
Là, là, cachez-vous, par pitié, par pitié.
(Elles conduisent les deux amants dans une chambre.
Don Alfonso conduit Despina dans une autre chambre.
Les amants, sans être vus, en sortent et partent.)
Dieux, secourez-nous !
DON ALFONSO
Calmez-vous...
FIORDILIGI & DORABELLA
Dieux
A l’aide !
DON ALFONSO
Tranquillisez-vous.
ACTE II SCÈNE 17
FIORDILIGI & DORABELLA (presque frénétiques)
Qui nous sauvera du danger ? Qui ?
DON ALFONSO
Fiez-vous à moi, tout ira bien.
FIORDILIGI & DORABELLA
Mille pensées barbares me torturent le cœur,
S’ils découvrent la trahison, que va-t-il nous arriver,
Ah, que va-t-il nous arriver.
209

210
SCENA ULTIMA
FERRANDO E GUGLIELMO (con mantelli e cappelli militari ecc.)
Sani e salvi agli amplessi amorosi,
Delle nostre fidissime spose
Ritorniamo di gioia esultanti, di gioia esultanti
Per dar premio alla lor fedeltà.
DON ALFONSO
Giusti numi, Guglielmo! Ferrando!
Oh, che giubilo! Qui, come, e quando?
FERRANDO E GUGLIELMO
Richiamati da regio contrordine, da regio contrordine,
Pieno il cor di contento e di gaudio,
Ritorniamo alle spose adorabili, alle spose adorabili,
Ritorniamo alla vostra amistà,
Ritorniamo alla vostra amistà.
GUGLIELMO (a Fiordiligi)
Ma cos’è quel pallor, quel silenzio?
FERRANDO (a Dorabella)
L’idol mio perché mesto si sta?
DON ALFONSO
Dal diletto confuse, ed attonite, confuse
Ed attonite
Mute mute si restano là.
FIORDILIGI E DORABELLA
Ah che al labbro le voci mi mancano,
Se non moro un prodigio sarà.
(I servi portano un baule.)
MOZART COSI FAN TUTTE
GUGLIELMO
Permettete che sia posto
Quel baul in quella stanza. Dei, che veggio!
Un uom nascosto? Un notaio? Qui che fa?

ACTE II DERNIÈRE SCÈNE
DERNIÈRE SCÈNE
FERRANDO & GUGLIELMO (avec manteaux et chapeaux
militaires, etc.)
Sains et saufs, aux étreintes amoureuses
De nos fiancées très constantes
Nous revenons, exultant de joie, de joie exultant
Pour donner récompense à leur fidélité.
DON ALFONSO
Dieux justes, Guglielmo ! Ferrando !
Oh, quelle joie ! Qui, comment et quand ?
FERRANDO & GUGLIELMO
Rappelé par un contrordre du roi, contrordre du roi,
Le cœur content et plein de joie,
Nous revenons à nos adorables fiancées, adorables fiancées,
Nous revenons à votre amitié,
Nous revenons à votre amitié.
GUGLIELMO (à Fiordiligi)
Mais quelle est cette pâleur, ce silence ?
FERRANDO (à Dorabella)
Mon amour, pourquoi cette mélancolie ?
DON ALFONSO
Troublées par la joie, et étonnées, troublées
Et étonnées
Muettes, muettes elles sont plantées là.
FIORDILIGI & DORABELLA
Ah, les mots n’arrivent pas à me lèvres,
Ce sera un prodige si je ne meurs pas.
(Les serviteurs apportent un coffre.)
GUGLIELMO
Permettez que soit déposé
Ce coffre dans cette pièce. Dieux, que vois-je !
Un homme caché ? Un notaire ? Que fait-il là ?
211

212
DESPINA (esce ma senza cappello)
No, signor, non è un notaio;
È Despina mascherata, che dal ballo or è tornata,
E a spogliarsi or venne qua.
FERRANDO E GUGLIELMO
Una furba
Uguale a questa
Dove mai si troverà?
DESPINA
Una furba che m’agguagli
Dove mai si troverà!
(Don Alfonso lascia cadere accortamente il contratto
sottoscritto dalle donne.)
FIORDILIGI E DORABELLA
La Despina, la Despina!
Non capisco come va.
FERRANDO E GUGLIELMO
Dove mai si troverà,
Si troverà !
DESPINA
Dove mai
Si troverà!
FIORDILIGI E DORABELLA
La Despina!
DON ALFONSO (piano agli amanti)
Già cader lasciai le carte, accoglietele con arte!
FIORDILIGI E DORABELLA
Non capisco come va.
FERRANDO
Ma che carte sono queste?
MOZART COSI FAN TUTTE

DESPINA (sortant, mais sans chapeau)
Non monsieur, ce n’est pas un notaire ;
C’est Despina masquée, qui revient du bal,
Et est venue là pour enlever son déguisement.
FERRANDO & GUGLIELMO
Une futée
Egale à celle-là
Où donc la trouvera-t-on ?
DESPINA
Une futée égale à moi
Où donc la trouvera-t-on !
(Don Alfonso laisse tomber adroitement le contrat signé
par les femmes.)
FIORDILIGI & DORABELLA
La Despina, la Despina !
Je ne comprends pas ce qui se passe.
FERRANDO & GUGLIELMO
Où donc la trouvera-t-on,
La trouvera-t-on !
DESPINA
Où donc
La trouvera-t-on !
FIORDILIGI & DORABELLA
La Despina !
ACTE II DERNIÈRE SCÈNE
DON ALFONSO (bas aux amants)
J’ai déjà fait tomber les documents, ramassez-les habilement !
FIORDILIGI & DORABELLA
Je ne comprends pas ce qui se passe.
FERRANDO
Mais qu’est-ce que c’est que ces papiers ?
213

214
GUGLIELMO
Un contratto
Nuziale? Un contratto nuziale ?
FERRANDO E GUGLIELMO
Giusto ciel! Voi qui scriveste:
Contradirci omai non vale;
Tradimento tradimento!
Ah si faccia il scoprimento
E a torrenti, a fiumi, a mari
Indi il sangue scorrerà, sì,
E a torrenti, a fiumi, a mari
Indi il sangue, indi il sangue scorrerà.
(Vanno per entrar nell’altra camera, le donne li arrestano.)
FIORDILIGI E DORABELLA
Ah, signor, son rea di morte e la morte io sol vi chiedo ;
Il mio fallo tardi vedo, tardi vedo,
Con quel ferro un sen ferite che non merita pietà,
Non merita pietà.
FERRANDO E GUGLIELMO
Cosa fu?
MOZARTCOSI FAN TUTTE
FIORDILIGI E DORABELLA (additando Don Alfonso e Despina)
Per noi favelli il crudel, la seduttrice.
DON ALFONSO
Troppo vero è quel che dice,
(Accenna la camera dov’erano entrati li prima gli amanti.)
E la prova è chiusa lì, e la prova è chiusa lì.
FIORDILIGI E DORABELLA
Dal timor io gelo, io palpito: perché mai li discoprì?
(Ferrando e Guglielmo entrano un momento in camera, poi
sortono senza cappello, senza mantello e senza mustacchi,
ma coll’abito finto ecc., e burlano in modo ridicolo
le amanti e Despina.)

GUGLIELMO
Un contrat
De mariage ? Un contrat de mariage ?
FERRANDO & GUGLIELMO
Juste ciel ! Vous avez signé là :
Pas la peine de nier ;
Trahison trahison !
Ah qu’éclate la vérité
Et en torrents, en fleuves, en océans
Le sang coulera, oui,
Et en torrents, en fleuves, en océans,
Le sang, le sang coulera.
(Ils s’apprêtent à entrer dans l’autre chambre,
les femmes les arrêtent.)
FIORDILIGI & DORABELLA
Ah, monsieur, je mérite la mort
et ne vous demande que la mort ;
Je vois ma faute trop tard, trop tard
Avec cette lame frappez un sein qui ne mérite pas de pitié,
Ne mérite pas de pitié.
FERRANDO & GUGLIELMO
Que s’est-il passé ?
ACTE II DERNIÈRE SCÈNE
FIORDILIGI ET DORABELLA (désignant Don Alfonso et Despina)
Que parlent pour nous le cruel, la séductrice.
DON ALFONSO
Ce qu’elles disent n’est que trop vrai.
(Il montre la chambre où étaient entrés les amants.)
Et la preuve est enfermée là, et la preuve est enfermée là,
FIORDILIGI & DORABELLA
Je suis glacée de peur, je tremble : pourquoi donc les
livre-t-il ?
(Ferrando et Guglielmo entrent un moment dans
la chambre, puis sortent sans chapeau, sans manteau
et sans moustaches, mais avec les déguisements, etc.,
et tournent en ridicule les amants et Despina.)
215

216
FERRANDO (facendo dei complimenti affettati a Fiordiligi)
A voi s’inchina, bella damina,
Il cavaliere dell’Albania!
GUGLIELMO (a Dorabella)
Il ritrattino pel coricino
Ecco io le rendo, signora mia.
FERRANDO E GUGLIELMO (a Despina)
Ed al magnetico signor dottore
Rendo l’onore che meritò!
FIORDILIGI, DORABELLA E DESPINA
Stelle, che veggo!
FERRANDO, GUGLIELMO E DON ALFONSO
Son stupefatte!
FIORDILIGI, DORABELLA E DESPINA
Al duol non reggo!
FERRANDO, GUGLIELMO E DON ALFONSO
Son mezze matte...
FIORDILIGI E DORABELLA (accennando Don Alfonso)
Ecco là il barbaro che c’ingannò.
DON ALFONSO
V’ingannai, ma fu l’inganno
Disinganno ai vostri amanti,
Che più saggi omai saranno
Che faran quel ch’io vorrò.
(Li unisce e li fa abbracciare.)
Qua le destre: siete sposi!
Abbracciatevi e tacete.
Tutti quattro ora ridete,
Ch’io già risi e riderò.
FIORDILIGI E DORABELLA
Idol mio, se questo è vero,
Idol mio, se questo è vero,
MOZARTCOSI FAN TUTTE

ACTE II DERNIÈRE SCÈNE
FERRANDO (faisant des compliments affectés à Fiordiligi)
Devant vous s’incline, belle dame,
Le chevalier d’Albanie !
GUGLIELMO (à Dorabella)
Le petit portrait échangé contre le petit cœur
Le voici, je vous le rends, madame.
FERRANDO & GUGLIELMO (à Despina)
Et à monsieur le docteur magnétique
Rendons les honneurs qu’il mérite !
FIORDILIGI, DORABELLA & DESPINA
Ciel, que vois-je !
FERRANDO, GUGLIELMO & DON ALFONSO
Elles sont stupéfaites !
FIORDILIGI, DORABELLA & DESPINA
Je ne soutiens pas ma douleur !
FERRANDO, GUGLIELMO & DON ALFONSO
Elles sont à moitié folles...
FIORDILIGI & DORABELLA (montrant Don Alfonso)
Voici le barbare qui nous a dupées.
DON ALFONSO
Je vous ai dupées, mais la tromperie a
Détrompé vos amants,
Qui désormais seront plus sages
Et feront ce que vous voudrez.
(Il les réunit et les fait s’embrasser.)
Donnez-moi vos mains : vous êtes unis !
Embrassez-vous et taisez-vous.
Maintenant riez tous les quatre,
Comme moi j’ai ri et je rirai.
FIORDILIGI & DORABELLA
Mon amour, si cela est vrai
Mon amour, si cela est vrai
217

218
MOZARTCOSI FAN TUTTE
Colla fede e coll’amore
Compensar saprò il tuo core,
Adorarti ognor
Saprò...
FERRANDO E GUGLIELMO
Te lo
Credo, gioia
Bella,
Ma la prova io far non vo’,
Te lo credo, gioia bella,
Ma la prova io far non vo’, no,
Ma la prova io far non vo,
DESPINA
Io non so se veglio o sogno,
Mi confondo, mi vergogno:
Manco mal, se a me l’han fatta,
Ch’a molt’altri anch’io la fo.
FIORDILIGI E DORABELLA
... Colla fede e coll’amore
Compensar saprò il tuo core,
Adorarti ognor saprò...
DESPINA
Manco mal, se a
Me l’han fatta,
Ch’a molt’altri anch’io la fo.
Manco mal, se a me l’han fatta,
Ch’a molt’altri anch’io la fo.
FIORDILIGI E DORABELLA
... Ognor saprò, ognor saprò.
FERRANDO
Ma la prova, no, ma la prova io far non vo’.
GUGLIELMO
Io far, non vo, no, la prova io far non vo’.

ACTE II DERNIÈRE SCÈNE
Avec ma foi et mon amour
Je saurai dédommager ton cœur,
T’adorer toujours
Je saurai...
FERRANDO & GUGLIELMO
Je te
Crois, mon
Trésor
Mais je n’en veux pas la preuve,
Je te crois, mon trésor,
Mais je n’en veux pas la preuve, non,
Mais je n’en veux pas la preuve,
DESPINA
Je ne sais si je veille ou si je rêve,
Je suis confuse, je suis honteuse :
Mais heureusement, s’ils m’ont eue,
J’en ai eu beaucoup d’autres.
FIORDILIGI & DORABELLA
... Avec ma foi et mon amour
Je saurai dédommager ton cœur,
Je saurai t’adorer toujours...
DESPINA
Mais heureusement, s’ils
M’ont eue,
J’en ai eu beaucoup d’autres.
Mais heureusement, s’ils m’ont eue,
J’en ai eu beaucoup d’autres.
FIORDILIGI & DORABELLA
... Je saurai toujours, je saurai toujours.
FERRANDO
Mais la preuve, non, mais la preuve je n’en veux pas.
GUGLIELMO
Mais la preuve, non, mais la preuve je n’en veux pas.
219

220
MOZARTCOSI FAN TUTTE
TUTTI
Fortunato l’uom che prende ogni cosa pel buon verso,
E tra i casi e le vicende da ragion guidar si fa,
Da ragion guidar si fa.
Quel che suole altrui far piangere
Fia per lui cagion di riso, di riso, di riso, di riso
E del mondo in mezzo ai turbini, e del mondo in mezzo
ai turbini
Bella calma troverà, bella calma troverà, bella calma
troverà,
Bella calma troverà, si, troverà, si, troverà,
Bella calma troverà.
Fin dell’Opera

ACTE II DERNIÈRE SCÈNE
TOUS
Heureux l’homme qui prend tout chose du bon côté,
Et, dans les malheurs et les déboires, se laisse guider
par la raison,
Se laisse guider par la raison.
Ce qui fait pleurer les autres,
Est pour lui motif de rire, de rire, de rire, de rire,
Et dans le tourbillon du monde, dans le tourbillon
du monde,
Il trouvera le plus beau calme, le plus beau calme,
le plus beau calme ,
Il trouvera le plus beau calme, il trouvera, il trouvera
Il trouvera le plus beau calme.
Fin de l’opéra
Traduction : J.S.
Les filets rouges indiquent les passages chantés simultanément.
221

CAHIER DE LECTURES
Philippe Sollers
Et tous aussi bien sûr
Jean & Brigitte Massin
La création de Così fan tutte :
un honnête succès
Sophie Weber-Haibl
Portait de Mozart à l’époque de C o s ì. . .
Dominique Fernandez
Da Ponte, abbé, séducteur et poète
—
Reynaldo Hahn
Une fantaisie à la Shakespeare
Rémy Stricker
Comique ou tragique ?
Goethe
Chimie des couples
Marivaux
La première inconstance
—
Alfred de Musset
Le cœur des femmes
Giorgio Strehler
La terrible légèreté
Alfred de Musset
Tous les hommes sont menteurs

PHILIPPE SOLLERS
ET TOUS AUSSI BIEN SÛR
Mozart est maintenant dans l’insaisissable, comme un poisson.
Il peut se donner et nous donner une leçon. C’est L’ E c o l e
des amants, sous-titre de Così fan tutte, comme Les Instituteurs
immoraux ( « dialogues destinés à l’éducation des jeunes
d e m o i s e l l e s ») est celui de La Philosophie dans le boudoir.
Rien de sadien ici pourtant, sauf une virtuosité magnétique. La
philosophie est dans la musique et le boudoir est partout, mais
sans criminalité, sans noirceur, sans même désir de domination
comme dans Les Liaisons dangereusesde Laclos [...].
Dès l’ouverture de C o s ì au contraire, miracle de dialectique,
on sent que tout va se passer dans l’interchangeabilité,
les dialogues multiples superposés, la démonstration logique
par les contraires, aux limites, toujours harmonieuses, de
l’expérimentation du son, mais sans forcer, de l’autre côté du
mur, en souplesse. Bassons, cors, hautbois, flûtes, clarinettes.
CO – SÌ – FAN – TUT – TE
AIN – SI – FONT – ELLES – TOUTES
Et TOUS aussi bien sûr.
Allez.
MÊME EN RÊVE...
Extrait de Mystérieux Mozart, Plon, 2001
225

ALBAN BERG
JEAN & BRIGITTE MASSIN
LA CRÉATION DE COSI FAN TUTTE :
UN HONNÊTE SUCCÈS
1789...
Le résultat de ce succès – [la reprise des Noces de Figaro]
– est la commande faite à Mozart par la Cour d’un nouvel
opéra pour le carnaval suivant. [...]
Pour la première fois, depuis qu’il est adulte, Mozart doit
subir plutôt que choisir le sujet de son prochain opéra.
J o s e p h II l’a imposé lui-même, à partir d’une anecdote qui
court les salons de Vienne. Une fois de plus, Lorenzo Da Po n t e
écrit le livret pour Mozart, livret qui, ainsi que la partition ellemême,
sera très vite écrit puisque quatre mois seulement séparent
la reprise des Noces de Fi g a r o de la répétition de Così fan
t u t t e. Et tous les détails du travail nous sont plus inconnus
pour cet opéra que pour tous les autres de la maturité.
Pour Mozart, en tout cas, cette commande bien payée (les
honoraires prévus sont de deux cents ducats, donc plus que
pour ses opéras antérieurs), venant après le succès de la
reprise des Noces de Fi g a r o , peut concrétiser l’espoir d’une
nouvelle et féconde faveur auprès de Joseph II, et d’un rétablissement
de sa fortune.
Un triste événement familial vient pourtant encore assombrir
le mois de novembre. Rentrée de Baden, Constance met
au monde, le 16 novembre, une petite fille prénommée Anna.
Mais le bébé est si frêle qu’il ne vit qu’une heure. [...]
Cette année-là, Wolfgang fête la Saint-Sylvestre en organisant
chez lui, dans son nouveau logis, au numéro 245 de la
Judenplatz, une première audition intime de son opéra. Il n’y
invite que Puchberg et Joseph Haydn.
226

LA CRÉATION DE COSI FAN TUTTE
1790...
Joseph Haydn et Puchberg continuent à suivre de près la
naissance de Così fan tutte. Le 21 janvier, ils sont aux côtés
de Mozart pour la première répétition avec orchestre.
Puchberg continue, au fil des semaines, à avancer de l’argent
à Mozart sur la garantie de ses honoraires.
La première a lieu au théâtre national le 26 janvier
1790.Francesco Benucci, créateur de Figaro, est Guglielmo ;
la signora Bussani, créatrice de Chérubin est Despina. De
ces deux-là, Mozart se déclare satisfait ; par contre, il est loin
d’être enthousiaste de la façon de jouer et de chanter des
autres acteurs. [...]
Le succès est honnête. On ne crie pas au chef-d’œuvre –
on ne dénigre pas non plus. Les réactions des critiques sont
bonnes, un peu anodines, sans rien qui rappelle l’atmosphère
de dispute lors de la première des Noces de Figaro ou de la
reprise viennoise de Don Giovanni.
« J’ai à vous annoncer un nouveau et excellent ouvrage de
Mozart, que notre théâtre s’est attaché. Il a été représenté hier
pour la première fois sur la scène du théâtre impérial national.
De la musique, il suffit de dire qu’elle est de Mozart. »
Journal du luxe et des modes. 27 janvier 1790
« La musique est charmante et le sujet fort amusant. »
Journal du comte Karl von Zinzendorf
C’est la première fois, semble-t-il, que l’unanimité se fait
sur un opéra mozartien représenté à Vienne. Le choix impérial
du sujet y est certainement pour beaucoup. Et l’approbation
de Karl von Zinzendorf est, de ce point de vue, fort significative,
quand on se souvient des jugements péremptoires
qu’il avait émis lors de la création des Noces de Figaro.
Le lendemain de la première de Così fan tutte, le 27 janvier
1790, Mozart fête son trente-quatrième anniversaire.
C’est la dernière année qui lui reste à vivre en entier ; il
n’achèvera pas l’année 1791.
227
Extrait de Mozart. Fayard, 1990

ALBAN BERG
SOPHIE WEBER-HAIBL
PORTRAIT DE MOZART
À L’ÉPOQUE DE COSI FAN TUTTE
« Il était toujours de bonne humeur, mais, même dans sa
meilleure humeur, très absorbé, regardant dans les yeux d’un
regard perçant, répondant à tout, que ce fût gai ou triste, avec
à-propos, bien qu’il parût absorbé par tout autre chose dans
son travail. Même en se lavant les mains, le matin, il allait et
venait dans la chambre, ne restait jamais tranquille, choquant
un talon contre l’autre, et toujours réfléchissant.
« A table, il prenait souvent un coin de sa serviette, le
tordait, se le passait et repassait sous le nez, et, absorbé dans
ses pensées, semblait ne pas s’en rendre compte ; souvent, il
joignait à ce geste une grimace de la bouche. [...] Il était toujours
en mouvement des mains et des pieds, jouait toujours
avec quelque chose, son chapeau, ses poches, sa chaîne de
montre, des chaises, comme avec un clavier. »
Témoignage de la belle-sœur de Mozart,
cité par Jean & Brigitte Massin, dans Mozart, Fayard, 1990
228

DOMINIQUE FERNANDEZ
DA PONTE,
ABBÉ, SÉDUCTEUR et POÈTE
Qui était donc ce Lorenzo Da Po n t e ? Une canaille géniale,
un pur produit de cette Venise du X V I I I e siècle, aventurière,
jouisseuse, inventive, et qui a donné aussi Casanova, Gozzi et
Goldoni. On le connaît un peu par ses M é m o i r e s*, menteurs et
drôles. Fils d’un cordonnier juif converti, Emanuele
Conegliano prit le nom de l’évêque qui l’avait baptisé. Il devint
abbé, mais sa passion, outre celle qu’il vouait aux femmes,
était la poésie. La « g r a n d e » poésie, celle de Dante, de
Pétrarque et du Tasse, à l’imitation duquel il tournait des vers
creux et ampoulés. A cette époque, le métier d’improvisateur
nourrissait convenablement son homme : il suffisait de se produire
dans les salons et de trousser un sonnet ou une ode sur
un sujet proposé par un invité. Da Ponte aurait peut-être fini
comme un troubadour mondain, sans laisser de traces dans
l’histoire, s’il n’avait eu la bonne idée de manger du jambon un
v e n d r e d i : cela lui valut d’être banni de Venise. En réalité, on
pense qu’il avait dû s’empêtrer dans une intrigue amoureuse.
Le voila désormais errant à travers l’Europe, poussé çà et là
par sa fringale érotique et la fureur des maris trompés, comme
Don Juan, sans compter le déficit chronique de sa bourse, qu’ i l
partage avec Leporello.
* Editions Mercure de France.
MÊME EN RÊVE...
229

DA PONTE ABBÉ SÉDUCTEUR ET POÈTE
A Vienne, il réussit à se faire engager comme poète de
c o u r, c’est-à-dire, fabricant de livrets d’opéra. Son premier
trait de génie : avoir deviné celui de Mozart. L’ e m p e r e u r
Joseph II s’étonna que, parmi tant de musiciens en activité
dans la capitale, l’abbé ait offert ses services à quelqu’ u n
d’aussi obscur. Après le triomphe des Noces de Fi g a r o, les
deux plus célèbres compositeurs de l’époque lui commandèrent
chacun un livret à sujet mythologique ; Mozart, quant
à lui, voulut un Don Giovanni. Da Ponte dit à l’empereur :
« J’écrirai pour Mozart la nuit, en lisant quelques pages de
L’Enfer de Dante ; le matin pour Martini en lisant Pétrarque,
et le soir pour Salieri avec l’aide du Tasse. » [...]
Chassé de Vienne par Léopold II, le nomade se réfugia à
Londres, où il se maintint quelques années comme poète du
théâtre de Drury Lane. Mais ensuite, traqué par la meute de
ses créanciers, cet homme extraordinaire commença une troisième
carrière. En 1805, il s’embarqua pour New York, montrant
ainsi le chemin aux millions de ses compatriotes qui
devaient l’imiter tout au long du siècle.
Extrait d’un article
paru dans Le Nouvel Observateurn o 2146/2147, 2005
230

MÊME EN RÊVE...
REYNALDO HAHN
UNE FANTAISIE À LA SHAKESPEARE
Le livret de Così fan tutte, bâclé par Da Ponte, est plat et
vulgaire. Il est en outre monotone ; les mêmes situations s’y
reproduisent et s’y prolongent indûment. Les personnages sont
peu sympathiques : deux pécores écervelées, deux fiancés
lourdauds, une soubrette pétulante et un vieux sceptique plaisantin.
Les idées qu’ils expriment, les actes qu’ils accomplissent
indiquent des âmes communes.
Mais Mozart n’a rien voulu voir de tout cela ; il avait promis
à « son empereur » un nouvel opéra, il lui fallait un livret,
il a pris celui qu’on lui offrait, et il a inondé de beauté la piètre
élucubration de son collaborateur. Son sourire donne aux bouffonneries
de Da Ponte un enjouement radieux ; bien plus, il
méconnaît parfois, peut-être involontairement, le caractère
burlesque de la pièce, comme dans le court et sublime quintette
en f a m a j e u r, comme dans le second air de Ferrando, et y
substitue un pathétique enivrant. Les deux donzelles et leurs
amoureux ont par moment des accents si nobles, si profonds et
si purs, qu’on sent bien que Mozart ne se soucie guère de traduire
leurs sentiments, mais son âme à lui, la plus douce et la
plus généreuse qui ait jamais existé ici-bas.
Cette inadaptation même de la musique et du livret
répand sur le spectacle de Così fan tutte un illogisme charmant,
une sorte de frivolité symbolique, en fait une fantaisie
à la Shakespeare.
231

ALBAN BERG
RÉMY STRICKER
COMIQUE ou TRAGIQUE ?
On comprend que des gens très sérieux comme Beethoven
et Wagner se soient alarmés de l’immoralité de Così fan tutte .
Pourtant, comment se fait-il qu’une musique soit « i m -
m o r a l e » ? Il suffit qu’elle entretienne des rapports peu clairs
avec le texte, ce dont Mozart ne s’est pas privé. A-t-il réservé
à la seule Fiordiligi – le personnage le plus vertueux – les trésors
de son inspiration ? Pas du tout. Le duo où Guglielmo
séduit Dorabella (n o 23, Il cor vi dono) est tout aussi émouvant,
sans la moindre notation annexe d’ironie, sans qu’à un
seul instant se montre depuis la coulisse un Mozart souriant
d’un air entendu. Je ne crois pas non plus que l’air de
Dorabella au deuxième acte (n o 28, E amor un ladroncello) le
cède en irisations de couleurs instrumentales, en charme
mélodique, à l’air de Ferrando au premier acte (n o 17, U n’
aura amorosa ) .
D’un strict point de vue musical, n’est-il pas embarrassant
que fidèle ou infidèle, sincère ou menteur, le personnage nous
réduise également à merci ? D’où de savantes discussions
pour élucider ce qui est ici parodique ou bien ne l’est pas. Je
crains qu’elles ne soient pas closes. Ce qui ne veut pas dire
q u’elles soient fondées. De là, encore, les efforts de certains
interprètes ou metteurs en scène, pour engager telle ou telle
partie de rôle ou de la partition, en forçant le comique ou le
tragique. Comme s’il était décidément indispensable de savoir
où l’on est. C’est un jeu bien dangereux, lorsque Mozart a tout
fait pour ne pas le préciser. Sa musique se rétracte aussitôt et
fait paraître vulgaires toutes ces bonnes intentions.
Extrait de Mozart et ses opéras. Fiction et vérité, Gallimard, 1980
232

MÊME EN RÊVE...
JOHANN WOLFGANG VON GOETHE
CHIMIE des COUPLES
« Ce que nous appelons pierre à chaux est une terre calcaire
plus ou moins pure, intimement liée à un acide faible,
que nous avons appris à connaître sous sa forme aérienne.
Si l’on met un morceau de cette pierre dans de l’acide
sulfurique dilué, l’acide s’empare de la chaux et se manifeste,
avec ce morceau, à l’état de gypse, tandis que cet acide
faible, aérien, se dégage.
Il s’est opéré une séparation, une nouvelle combinaison et
l’on se croit désormais autorisé à employer l’expression d’affinité
élective, parce qu’on dirait, en effet, qu’une relation a été
préférée à l’autre, que l’une a été choisie plutôt que l’autre.
« Pardonnez-moi, dit Charlotte, comme je pardonne au
s a v a n t : je ne saurais jamais voir ici un choix, mais plutôt une
nécessité naturelle, et même à peine, car il ne s’agit peut-être
finalement que d’une affaire d’occasion. L’occasion fait les
combinaisons, comme elle fait le larron, et quand il est question
de vos substances naturelles, le choix me paraît se trouver
uniquement dans les mains du chimiste, qui rapproche
ces substances. Une fois qu’elles sont ensemble, Dieu leur
fasse grâce ! Dans le cas présent, je ne plains que le pauvre
acide aérien condamné à errer de nouveau dans l’infini. [...]
« Figurez-vous un certain A intimement uni avec un certain
B, et qui n’en saurait être séparé par beaucoup de moyens,
beaucoup d’efforts ; figurez vous un C qui se comporte de même
envers D ; mettez maintenant les deux couples en contact : A se
jettera sur D et C sur B sans qu’on puisse dire qui a quitté
l’autre le premier, et qui s’est réuni le premier à l’autre.
233
Extrait de Les Affinités électives , 1809

MARIVAUX
LA PREMIÈRE INCONSTANCE
HERMIANNE
Où allons-nous, Seigneur, voici le lieu du monde le plus
sauvage et le plus solitaire, et rien n’y annonce la fête que
vous m’avez promise.
LE PRINCE (en riant)
Tout est prêt.
ALBAN BERG
HERMIANNE
Je n’y comprends rien ; qu’est-ce que c’est que cette maison
où vous me faites entrer, et qui forme un édifice si
s i n g u l i e r ? Que signifie la hauteur prodigieuse de ces
murs qui l’environnent : où me menez-vous ?
LE PRINCE
A un spectacle très curieux ; vous savez la question que
nous agitâmes hier au soir. Vous souteniez contre toute la
cour que ce n’était pas votre sexe, mais le nôtre, qui avait
le premier donné l’exemple de l’inconstance et de l’infidélité
en amour.
234

HERMIANNE
Oui, Seigneur, je le soutiens encore. La première inconstance,
ou la première infidélité, n’a pu commencer que
par quelqu’un d’assez hardi pour ne rougir de rien. Oh !
comment veut-on que les femmes, avec la pudeur et la
timidité naturelle qu’elles avaient, et qu’elles ont encore
depuis que le monde et sa corruption durent, comment
v e u t -on qu’elles soient tombées les premières dans des
vices de cœur qui demandent autant d’audace, autant de
libertinage de sentiment, autant d’effronterie que ceux
dont nous parlons ? Cela n’est pas croyable.
LE PRINCE
Eh ! sans doute Hermianne, je n’y trouve pas plus d’apparence
que vous, ce n’est pas moi qu’il faut combattre làdessus,
je suis de votre sentiment contre tout le monde,
vous le savez.
HERMIANNE
Oui, vous l’êtes par pure galanterie, je l’ai bien remarqué.
LE PRINCE
Si c’est par galanterie, je n’en doute pas. Il est vrai que je
vous aime, et que mon extrême envie de vous plaire peut
fort bien me persuader que vous avez raison, mais ce qui
est de certain, c’est qu’elle me le persuade su finement
que je ne m’en aperçois pas. Je n’estime point le cœur des
hommes et je vous l’abandonne ; je le crois sans comparaison
plus sujet à l’inconstance et à l’infidélité que celui des
f e m m e s ; je n’en excepte que le mien, à qui même je ne
ferais pas cet honneur-là si j’en aimais une autre que vous.
HERMIANNE
Ce discours-là sent bien l’ironie.
LE PRINCE
J’en serai donc bientôt puni ; car je vais vous donner de
quoi me confondre, si je ne pense pas comme vous.
HERMIANNE
Que voulez-vous dire ?
LA PREMIÈRE INCONSTANCE
235

LE PRINCE
Oui, c’est la nature elle-même que nous allons interroger,
il n’y a qu’elle qui puisse décider la question sans
réplique, et sûrement elle prononcera en votre faveur.
HERMIANNE
Expliquez-vous, je ne vous entends point.
LE PRINCE
Pour bien savoir si la première inconstance ou la première
infidélité est venue d’un homme, comme vous le prétendez
et moi aussi, il faudrait avoir assisté au commencement du
monde et de la société.
HERMIANNE
Sans doute, mais nous n’y étions pas.
LE PRINCE
Nous allons y être…
LA PREMIÈRE INCONSTANCE
236
La Dispute, Scène 1, 1744

MÊME EN RÊVE...
ALFRED DE MUSSET
LE CŒUR DES FEMMES
Connaissez-vous le cœur des femmes, Pe r d i c a n ? Etesvous
sûr de leur inconstance, et savez-vous si elles changent
réellement de pensée en changeant quelquefois de langage ?
Il y en a qui disent que non.
Sans doute, il nous faut souvent jouer un rôle, souvent
mentir ; vous voyez que je suis franche ; mais êtes-vous sûr
que tout mente dans une femme, lorsque sa langue ment ?
Avez-vous bien réfléchi à la nature de cet être faible et violent,
à la rigueur avec laquelle on le juge, aux principes
qu’on lui impose ?
Et qui sait si, forcée à tromper par le monde, la tête de ce
petit être sans cervelle ne peut pas y prendre plaisir, et mentir
quelquefois par passe-temps, par folie, comme elle ment
par nécessité ?
On ne badine pas avec l’amour, Acte III, Scène 5
237

ALBAN BERG
GIORGIO STREHLER
LA TERRIBLE LÉGÈRETÉ
Mozart a adoré les femmes, il a trompé, il a été trompé, et
il a toujours pardonné. Il adore les femmes faibles, les
femmes qui cèdent, et il les comprend très bien. Così fan
t u t t e est un opéra sur les ambivalences des femmes. Et
Mozart a une tendresse pour elles, il en a pour les hommes
aussi, mais étant donné qu’il aime les femmes, il est plus
compréhensif avec les traîtresses qu’avec les traîtres. Mais il
place les sexes au même plan, il n’y a pas d’un côté, l’homme
conquérant et, de l’autre, la femme soumise. Et plus que la
légèreté de la femme, c’est la terrible légèreté de l’amour que
nous montre Mozart.
Extrait de Comment l’entendez-vous, émission de Claude Maupomé diffusée
sur France Musique, 1989. Archives de l’INA.
Repris dans Le Nouvel Observateur n o 2146/2147, 2005
238

MÊME EN RÊVE...
ALFRED DE MUSSET
TOUS LES HOMMES SONT MENTEURS
Adieu, Camille, retourne à ton couvent, et lorsqu’on te
fera de ces récits hideux qui t’ont empoisonnée, réponds ce
que je vais te dire : tous les hommes sont menteurs, inconstants,
faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables
et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses,
vaniteuses, curieuses et dépravées; le monde n’ e s t
qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent
et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au
monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de
ces êtres si imparfaits et si affreux.
On ne badine pas avec l’amour, Acte II, scène 5
239

CARNET de NOTES
Wolfgang Amadeus Mozart
Repères biographiques
&
Notice bibliographique
—
Così fan tutte
Discographie sélective

WOLFGANG AMADEUS MOZARTREPÈRES BIOGRAPHIQUES
242
H I S T O I R E M O Z A RT
1756.
Début de la Guerre de sept ans
opposant les principales
puissances européennes sur
le vieux continent,
en Amérique du Nord et aux
Indes. L’Autriche y est alliée
à la France.
1762.
Avènement de Catherine II
de Russie.
1763.
Le Traité de Paris termine
la guerre de sept ans.
La France abandonne
notamment le Canada.
1769.
Naissance de Bonaparte.
1756.
Naissance le 27 janvier
à Salzbourg.
1759.
Premiers essais musicaux sur le
clavier du clavecin de sa sœur
Maria Anna et premières
manifestations de ses talents :
oreille, mémoire, concentration.
Son père Leopold se charge de
son éducation musicale.
1762.
Munich et Vienne : première
des tournées que le père de
Mozart organise pour exposer
les dons de son enfant prodige.
Compose ses premières pièces
pour clavecin.
1763.
Début d’une tournée de trois
années : Allemagne, Belgique,
France (il séjourne et se produit
à Lyon en août 1766),
Angleterre, Hollande, Suisse.
1765.
Compose sa première
symphonie (K. 16).
1768.
Création à Vienne de Bastien
et Bastienne(K. 50).
1769.
Premier voyage en Italie.

M U S I Q U E L I T T É R AT U R E
SCIENCE & ART S
1749.
Naissance d’Emanuele Conegliano
dit Lorenzo Da Ponte, à Venise.
1757.
Mort de Domenico Scarlatti.
1759.
Mort de Haendel.
1761.
Premiers quatuors de Luigi
Boccherini.
1762.
Gluck, Orfeo ed Euridice.
1764.
Mort de Rameau.
1767.
Mort de Telemann.
Rousseau publie son
Dictionnaire de la musique.
1756.
A Lyon, inauguration d’un nouvel
opéra conçu par l’architecte
Soufflot.
1762.
Rousseau, Le Contrat social et
Emile ou de l’éducation.
1763.
Mort de Marivaux.
MOZART & SON TEMPS
1764.
Voltaire,
Dictionnaire philosophique.
1768.
Naissance de Chateaubriand.
243

WOLFGANG AMADEUS MOZARTREPÈRES BIOGRAPHIQUES
244
H I S T O I R E M O Z A RT
1770.
Mariage de Marie-Antoinette,
fille de l’impératrice
Marie-Thérèse d’Autriche avec
le Dauphin de France,
futur Louis XVI.
1773.
Interdiction de l’ordre des
Jésuites dans l’empire autrichien.
1774.
Avènement de Louis XVI en
France.
1776.
Déclaration d’indépendance
des Etats-Unis d’Amérique.
1770.
Création de Mitridate,
re di Ponto (K 87) à Milan.
1772.
Election de Colloredo au titre
de prince-archevêque de
Salzbourg.
Création de Lucio Silla
(K. 135) au Teatro Regio Ducal
de Milan.
1773.
Retour à Salzbourg.
1775.
Compose ses cinq concertos
pour violons.
1777.
Démission du poste de
Konzermeister qu’il occupait
à Salzbourg au service du
prince-archevêque Colloredo.
1778.
Séjour à Paris avec sa mère,
qui y meurt le 3 juillet.
Symphonie n o 31 “Paris”
(K. 297), Concerto pour flûte
et harpe (K. 299 ).
Sonate n o 8 et 11,
“Marche turque”.

M U S I Q U E L I T T É R AT U R E
SCIENCE & ART S
1770.
Naissance de Beethoven.
1774.
Gluck, Iphigénie en Aulide.
1775.
Premier oratorio de Haydn,
Il Ritorno di Tobia.
1776-78.
Construction de la Scala de
Milan.
1770-85.
Sturm und Drang en Allemagne.
1770.
Cugnot réalise la première
voiture automobile à vapeur.
1773.
Diderot, Paradoxe sur le
comédien.
1774.
Goethe, Les Souffrances
du jeune Werther.
1775.
Fragonard, La Fête à Saint-C l o u d .
Beaumarchais, Le Barbier de Séville.
1778.
Mort de Voltaire.
MOZART & SON TEMPS
245

WOLFGANG AMADEUS MOZARTREPÈRES BIOGRAPHIQUES
246
H I S T O I R E M O Z A RT
1780.
Mort de l’impératrice
Marie-Thérèse d’Autriche.
Avènement de Joseph II.
1781.
Réformes de Joseph II :
abolition du servage, édit de
tolérance, interdiction de tous
les ordres religieux hormis ceux
pratiquant l’enseignement
et la charité.
1785-1786.
En France, l’Affaire du collier
compromet Marie-Antoinette.
1786.
Mort de Frédéric II de Prusse.
1779.
Reprend son service auprès
de Colloredo.
1781.
Création d’Idoménéeau
Cuvilliès-Theater de Munich.
Sérénade pour 13 instruments
à vent “Gran Partita” (K. 361).
Rupture définitive
avec Colloredo.
1782.
Création de L’Enlèvement
au sérail au Burgtheater
de Vienne.
Epouse Constance Weber
le 4 août.
1783.
Grand Messe en ut mineur
(K. 427).
1784.
Devient franc-maçon.
1785.
Concertos pour piano n os 20
et 21 (K. 466 et 467).
Musique funèbre maçonnique
(K. 477).
1786.
Création des Noces de Figaro
au Burgtheater de Vienne
(K. 492).
Symphonie n o 38, “Prague”.

M U S I Q U E L I T T É R AT U R E
SCIENCE & ART S
1782.
Pa i s i e l l o , Le Barbier de Sé v i l l e .
1783.
Antonio Salieri, Les Danaïdes.
1786.
Naissance de Carl-Maria
von Weber.
MOZART & SON TEMPS
1781.
Kant, Critique de la raison pure.
1782.
Laclos, Les Liaisons dangereuses.
1783.
Naissance de Stendhal.
1784.
Beaumarchais, Le Mariage
de Figaro.
1785.
David, Le Serment des Horaces.
Wa t tinvente la machine à vapeur.
247

WOLFGANG AMADEUS MOZARTREPÈRES BIOGRAPHIQUES
248
H I S T O I R E M O Z A RT
1789.
Prise de la Bastille.
Déclaration des Droits
de l’homme et du citoyen.
1790.
Mort à Vienne de l’empereur
Joseph II.
1791.
Tentative de fuite à l’étranger
du roi Louis XVI, qui est arrêté
à Varennes.
1787.
Reçoit le jeune Beethoven à
Vienne au mois d’avril.
Mort de son père le 28 mai.
Sérénade n o 13, “Une petite
musique de nuit”.
Création de Don Giovanni
( K. 52) au Gräflich Nostitzsches
National-Theater de Prague.
Nommé compositeur
de la chambre par Joseph II.
1788.
Débuts des années de pauvreté
et de maladie.
Trois dernières symphonies,
n os 39, 40 et 41, “Jupiter”
(K. 543, 550 et 551).
1789.
Quintette pour clarinette et
cordes(K. 581 ).
1790.
Création de “Cosi fan tutte”
( K. 588) au Burgtheater de Vienne.
1791.
Création du 27 e concerto pour
piano (K. 595) à Vienne. Mozart
est au clavier.
Composition en trois semaines et
création de La Clémence de Ti t u s
( K. 621) au National Theater de
Pr a g u e .Création de La Flûte
enchantée(K. 620) au Theater
an der Wien de Vienne.
Concerto pour clarinette
(K. 622) et Requiem(K. 626)
qui demeure inachevé.
Mozart meurt le 5 décembre à
Vienne. Il est enterré dans la
fosse commune.

M U S I Q U E L I T T É R AT U R E
SCIENCE & ART S
1787.
Création à Paris de Tarare de
Salieri (livret de Da Ponte) qui
sera repris à Vienne l’année
suivante.
1790-1795.
Haydn, Douze Symphonies
londoniennes.
1838.
Mort de Lorenzo Da Ponte aux
E t a t s- U n i s .
MOZART & SON TEMPS
1787.
Goethe, Faust.
Schiller, Don Carlos.
1790.
Naissance de Lamartine.
1791.
Sade, Justine ou les malheurs
de la vertu.
249

WOLFGANG AMADEUS MOZARTNOTICE BIBLIOGRAPHIQUE
250
W.A. MOZART. Lettres des jours ordinaires (1756-1791).
établi par ANNE PARADIS. Fayard, 2005.
Correspondance
Sur le compositeur
MICHEL PAROUTY. Mozart, aimé des dieux. Gallimard,
collection Découvertes, 1988.
JEAN & BRIGITTE MASSIN. Mozart. Fayard, 1990.
ALFRED EINSTEIN. Mozart, l’homme et l’œuvre. Gallimard, 1991.
NORBERT ELIAS. Mozart, sociologie d’un génie.Seuil, 1991.
H.C. ROBBINS LANDON. 1791, la dernière année de Mozart.
Editions Jean-Claude Lattès, 1990.
TEODOR WYZEWA & GEORGES DE SAINT-FOIX.
Mozart, sa vie musicale et son œuvre.
Robert Laffont, collection Bouquins (2 volumes), 1991.
PHILIPPE SOLLERS. Mystérieux Mozart. Plon, 2001.
CO L L E C T I F sous la direction de BE RT R A N DDE R M O N C O U RT. Tout M o z a r t.
Robert Laffont, collection Bouquins, 2005.
AN D R É TU B E U F. Mozart, chemins et chants.Actes Sud / Classica, 2005.
Sur l’œuvre lyrique
IVAN NAGEL. Autonomie et grâce, Sur les opéras de Mozart.
Editions de l’Aube, 1990.
Sous la direction de BRIGITTE MASSIN. Guide des opéras de Mozart.
Fayard, 1991.
RÉMY STRICKER. Mozart et ses opéras, Fiction et vérité.
Gallimard, collection Tel, 1991.
Così fan tutte. L’Avant-Scène / Opéra, n os 131-132, 1990.
Sur Così fan tutte

COSI FAN TUTTE DISCOGRAPHIE SÉLECTIVE
KARL BÖHM. Orchestre philharmonique de Vienne,
Chœur de l’Opéra de Vienne
Lisa della Casa (Fiordiligi), Christa Ludwig (Dorabella),
Erich Kunz (Guglielmo), Anton Dermota (Ferrando),
Emmy Loose (Despina), Paul Schöffler (Don Alfonso)
1955 – EMI
COLIN DAVIS. Orchestre et chœurs de Covent Garden
Montserrat Caballe (Fiordiligi), Janet Baker (Dorabella),
Vladimiro Ganzarolli (Guglielmo), Nicolaï Gedda (Ferrando),
Ileana Cotrubas (Despina), Richard Van Allan (Don Alfonso)
1975 – PHILIPS
JOHN ELIOT GARDINER. English Baroque Soloists, Monteverdi Choir
Amanda Roocroft (Fiordiligi), Rosa Mannion (Dorabella),
Rodney Gilfry (Guglielmo), Rainer Trost (Ferrando), Eirian
James (Despina), Carlos Feller (Don Alfonso)
1992 – DG-Archiv Produktion
251

DANS LA MÊME COLLECTION
252
LUDWIG VAN BEETHOVEN, Fidelio
Livret du compositeur, d’après Léonore ou l’amour conjugal,
de Jean-Nicolas Bouilly
ALBAN BERG, Wozzeck.
Livret du compositeur, d’après Woyzeck, de Georg Büchner
EMMANUEL CHABRIER, Le Roi malgré lui
Livret d’Emile de Najac & Paul Burani
DIMITRI CHOSTAKOVITCH, Moscou, quartier des cerises
Livret de Vladimir Mass & Mikhaïl Tchervinsky
CLAUDE DEBUSSY, Pelléas et Mélisande
Livret d’après Pelléas et Mélisande de Maurice Maeterlinck
PASCAL DUSAPIN, Faustus, The last night
Livret du compositeur d’après La Tragique Histoire du Docteur Faust
de Christopher Marlowe
HANS WERNER HENZE, L’Upupa & le triomphe de l'amour filial
Livret du compositeur
LEOŠ JANÁČEK, Jenůfa
L i v ret du comp o s i teur d’après la pièce J ejí pasto rk y ň ade Gabriela Pre i s s ová
LEOŠ JANÁČEK, Kát’a Kabanová.
Livret d’après L’Orage d’Alexandre Ostrovski
LEOŠ JANÁČEK, L’Affaire Makropoulos
Livret d’après la pièce Věc Makropulosde Karel Čapek
MICHAËL LEVINAS, Les Nègres
Livret d’après Les Nègres de Jean Genet

DANS LA MÊME COLLECTION
CLAUDIO MONTEVERDI, L’Orfeo
Livret d’Alessandro Striggio
CLAUDIO MONTEVERDI, Le Couronnement de Poppée
Livret de Giovanni Francesco Busenello
Textes de Léo Schrade, Maurice Roche, Tacite, Sénèque, Suétone
WOLFGANG AMADEUS MOZART, La Flûte enchantée
Livret d’Emanuel Schikaneder
JACQUES OFFENBACH, Les Contes d’Hoffmann
Livret de Jules Barbier
JEAN-PHILIPPE RAMEAU, Les Boréades
Livret attribué à Louis de Cahusac.
RICHARD STRAUSS, Ariane à Naxos
Opéra en un acte avec un prologue de Hugo von Hoffmannsthal
TAN DUN, Tea
Livret de Tan Dun & Xu Ying
PIOTR ILLITCH TCHAÏKOVSKI, Mazeppa
Livret de Victor Bourénine & du compositeur d’après Poltava,
poème de Pouchkine
GIUSEPPE VERDI, Falstaff
Livret d’Arrigo Boito d’après Shakespeare
253

Chargé d’édition
Jean Spenlehauer
Remerciements
Nicole Boudet
Le Nouvel Observateur
France Musique
Conception & Réalisation
Brigitte Rax / Clémence Hiver
Impression
Horizon
Opéra national de Lyon
Saison 2005/06
Directeur général
Serge Dorny
OPÉRA NATIONAL DE LYON
Place de la Comédie
69001 Lyon
Renseignements & Réservation
0.826.305.325 (0,15 e/ m n )
www.opera-lyon.com
L’Opéra national de Lyon est conventionné par le ministère de la Culture et
de la Communication, la Ville de Lyon, le conseil régional Rhône-Alpes
et le conseil général du Rhône.

ISBN 2-84956-018-9
Dépôt légal : avril 2006
Pour la présente édition
© Opéra national de Lyon, 2006

ACHEVÉ d’IMPRIMER
le 25 mars 2006, pour les représentations
de Così fan tutte, à l’Opéra national de Lyon
dans une mise en scène d’Adrian Noble
et sous la direction musicale
de William Christie & Jérémie Rohrer