Fraction Armée Rouge : l'utopie meurtrière - Festival international du ...

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années, c’est comme si elle avait eu peur de ne plus pouvoir penser, le fait d’argumenter lui prenait de la force. Si l’on compare les enregistrements originaux de Meinhof et qu’on les compare avec les images de Gedeck, on est surpris de la ressemblance tant au niveau des gestes que de la voix. Martina Gedeck voulait mélanger le passé et le présent, les témoins de l’époque devaient avoir le sentiment d’être replongés dans ce passé. Lorsqu’elle interviewe Gudrun, lors de la scène dans la prison, elle frotte son pouce aux autres doigts, attitude caractéristique qu’elle avait lorsqu’ elle était nerveuse et le réalisateur insiste en nous le montrant en gros plan. Ulrike Meinhof était de plus en plus malheureuse de ne rien pouvoir faire avec un stylo dans les mains. Bien qu’elle sache que la violence n’est pas la solution, elle est fascinée par les propos de Gudrun. Mais dans cette scène, elle n’a pas encore envisagé de quitter ses enfants. Sa position à l’égard de ses enfants évolue après la libération de Baader et le départ pour la Jordanie. Ensslin demande alors au chef du camp s’il serait possible de mettre les enfants d’Ulrike dans un orphelinat palestinien, cela supposerait qu’Ulrike ne voit plus ses enfants. A ce moment-là Ulrike n’intervient pas, ses yeux sont dirigés vers Gudrun, elle n’a aucune réaction. Mais elle semble d’accord avec la décision de Gudrun, son visage ne reflète ni regret, ni tristesse. Dans le film, il est très fortement fait référence aux mesures d’isolement qu’ont eu à subir les membres de la RAF et en particulier Meinhof qui, avant Stammheim a été incarcérée à Cologne-Ossendorf dans « l’aile de la mort ». Elle ne pouvait plus prendre part à aucune vie acoustique, car elle n’entendait rien. Astrid Proll, qui avait séjourné dans cette aile de la mort, cherche à savoir où se trouve Ulrike et elle fait du bruit et crie afin qu’Ulrike sache qu’elle est là. La caméra s’enfonce à travers des grilles derrière une porte dans les profondeurs d’une cellule toute blanche, éclairée par un néon et dans laquelle se trouve Ulrike. Ulrike semble être à bout, ses yeux grands ouverts, ce rictus découvrant ses dents nous donnent l’impression qu’elle est une morte vivante. Gedeck nous montre une Meinhof en marge des autres membres. Chacun des ses actes semble être motivé par son besoin de reconnaissance des autres. Le personnage d’Ulrike Meinhof est celui qui tout au long du film évolue le plus ; cette évolution a eu lieu aussi dans la vraie vie. Celle qui était une journaliste en vue, finit brisée et ne trouve son salut que dans le suicide. Bernd Eichinger pensait que le scénario du film ne nécessitait qu’une seule figure qui fasse contrepoids à la RAF. Il ne voulait pas faire apparaître d’homme politique. Horst Herold était donc le seul qui pouvait représenter le pouvoir de l’Etat. Bruno Ganz tient ce rôle. En comparaison des membres de la RAF, le personnage d’Horst Herold apparaît beaucoup moins. Certes, il n’apparaît qu’au bout de 29 minutes, mais d’entrée de jeu, il est identifié comme un homme d’Etat sage et qui a déjà presque tout prévu. Il parle en effet avec son assistant Koch au sujet des mouvements étudiants. Koch pense qu’après l’arrivée du chancelier Willy Brandt à la tête de l’Etat, les choses vont se calmer. Mais Herold est d’un tout autre avis. Il parle même de bombes que les étudiants sont prêts à jeter pour mettre à mal la conscience encroûtée de la société. Et il a raison, puisque les premiers incendies se déclenchent et les premiers attentas ont lieu. Il est important d’expliquer aux élèves ce qu’était le BKA et qui était Herold, dans la mesure où le film ne donne que très peu d’explications. Il est mentionné qu’Herold utilisait tous les moyens techniques modernes à sa disposition et on le voit dans une salle remplie d’ordinateurs. Une autre fois on le voit expliquer à un adjudant du ministère de l’intérieur son plan « Wasserschlag » et l’on voit défiler les images d’actualité : des files de voitures arrêtées et fouillées, un autocollant sur une voiture précise « je n’appartiens pas à la bande à Baader », des hélicoptères et des rues barrées. On apprend ensuite que grâce à cette action Baader, Meins, Raspe, Ensslin et Meinhof ont été arrêtés. Lorsque le ministre de l’Intérieur félicite Herold par télégramme pour son succès, tenant le 81
cas RAF pour terminé, Herold se montre très sceptique. Il ne semble pas partager l’optimisme du ministre, pensant qu’il faudra compter avec de nouveaux attentats. De fait en 1972, il y eut l’attentat au cours de Jeux Olympiques et l’on voit Herold et ses collaborateurs suivre les événements à la télévision. Herold veut combattre les terroristes, mais il veut pour cela les comprendre, comprendre leur motivation, mais il ne recueille que critiques et hochements de tête d’incompréhension. Herold condamnait certes le terrorisme, mais il n’ôtait pas toute sa responsabilité à l’Etat. Bruno Ganz a vécu le mouvement de 1968 et la RAF. Il explique qu’à cette époque si des membres de la RAF avaient voulu dormir chez lui, il aurait eu beaucoup de mal à les mettre dehors. A l’époque, il se considérait presque comme l’un de leurs sympathisants, mais avec les film sont point de vu a changé et ce qui c’est passé à l’époque est pour lui catastrophique la RAF n’ayant été qu’un coup d’épée dans l’eau. Les scènes entre Herold et Koch servent à expliquer au public ces différents arrières plans. La critique a reproché à Bernd Eichinger d’avoir choisi Bruno Ganz en qui le public voyait encore le personnage du Führer de « La Chute ». 82
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