Fraction Armée Rouge : l'utopie meurtrière - Festival international du ...
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paroles d’Herold : « Imaginons les personnes de Baader et Meinhof disparues, le terrorisme se<br />
serait-il seulement développé en R.F.A. ? »<br />
En 1977, ce n'est plus l'armée américaine mais l'Etat allemand qui est visé à travers la<br />
personne de dirigeants politico-économiques tels que Ponto ou Schleyer ; les nouveaux<br />
militants de la R.A.F. sont passés de l'attaque contre les biens à l'attaque contre les personnes.<br />
Le groupe, qui s'est reconstitué autour des comités de soutien aux prisonniers de la R.A.F., ne<br />
répond plus « aux crimes <strong>du</strong> système impérialiste » mais « aux crimes de l'Etat allemand » :<br />
les expériences de privation sensorielle auxquelles sont soumis les prisonniers, la mort<br />
d'Holger Meins et celle d'Ulrike Meinhof.<br />
Les actions de la seconde phase offensive ont encore été plus critiquées par l'extrême gauche<br />
légale que les attentats anti-américains de 1972 qui intervenaient dans un contexte de<br />
mobilisation générale contre la guerre <strong>du</strong> Vietnam ; beaucoup de ceux qui avaient accueilli<br />
favorablement les premières actions <strong>du</strong> groupe, accusent la R.A.F. d'être devenue, cinq années<br />
plus tard, une organisation de libération de ses propres militants.<br />
Le capital de sympathie, que les militants de la R.A.F. avaient su entretenir par leur lutte<br />
intransigeante en prison et pendant les procès, a été ébranlé par les actions de 1977, en<br />
particulier celle de Mogadiscio menée par des militants palestiniens solidaires de la RA.F. La<br />
pratique <strong>du</strong> détournement d'avion venait contredire un des principes essentiels <strong>du</strong> groupe<br />
allemand qui était de ne pas concevoir d'actions comportant le risque de tuer ou blesser des<br />
civils. Cette prise d'otages affaiblissait l'image morale et politique de l'organisation. Cette<br />
action intervenait au moment où la R.A.F., qui avait su mobiliser les grandes organisations<br />
humanitaires comme Amnesty International ou la Ligue des droits de l'homme, avait atteint<br />
l'un de ses buts : dénoncer sur la scène <strong>international</strong>e le fonctionnement des institutions<br />
allemandes. Mogadiscio détruisit cet acquis et la réaction au « suicide collectif » controversé<br />
de Stammheim resta modérée en Allemagne comme à l'étranger.<br />
La coupure avec l'extrême gauche européenne était à ce moment consommée et devait rendre<br />
difficile toute future jonction entre la R.A.F. et les mouvements sociaux à venir, en particulier<br />
le mouvement pacifiste qui s'est développé à partir de 1980 autour des thèmes qui étaient<br />
chers aux premiers militants <strong>du</strong> groupe.<br />
La R.A.F. n'a cependant pas été anéantie en 1977; d'autres militants se sont regroupés sous ce<br />
sigle pour revendiquer de nouvelles actions. Tandis que les deux autres organisations de<br />
guérilla ouest-allemande, le mouvement <strong>du</strong> 2 juin et les Cellules révolutionnaires, se sont<br />
effondrées, la RA.F. a su rester un pôle de référence pour les partisans de la violence<br />
révolutionnaire.<br />
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