Fraction Armée Rouge : l'utopie meurtrière - Festival international du ...
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<strong>international</strong>e d'enquête fut créée à leur initiative ; elle publia un rapport, établi avec la<br />
collaboration d'experts qualifiés, qui conteste la version <strong>du</strong> suicide. Dans une conférence de<br />
presse, le 15 décembre 1978, les membres de la commission d'enquête déclarent :<br />
« (...) Les résultats de l'enquête suggèrent qu'Ulrike Meinhof était morte quand on l'a pen<strong>du</strong>e<br />
et il y a des indices troublants de l'intervention d'un tiers en relation avec cette mort. »!« La<br />
commission ne peut exprimer de certitudes sur les circonstances de la mort d'Ulrike Meinhof.<br />
Cependant, le fait qu'en dehors <strong>du</strong> personnel de la prison les services secrets avaient accès aux<br />
cellules par un passage séparé et secret autorise tous les soupçons. »<br />
Le rapport constate que les autorités commencèrent l'autopsie <strong>du</strong> corps dans des conditions de<br />
secret absolu bien avant le délai de 24 heures prévu par le droit allemand et sans autoriser le<br />
médecin de confiance, cité par la sœur d'Ulrike, à y assister. Pour l'ensemble de l'extrême<br />
gauche allemande et européenne le doute subsista quant aux circonstances exactes de la mort<br />
d'Ulrike Meinhof. Du 9 mai au 26 mai 1976, on a dénombré 11 attentats ou incendies<br />
volontaires en R.F.A. et 20 à l'étranger en relation avec cette mort, ainsi que 33 manifestations<br />
et meetings ; 4 000 personnes assistaient à l'enterrement. Cet événement n'a évidemment pas<br />
contribué à rendre l'atmosphère autour <strong>du</strong> procès de Stammheim plus sereine. Lors de<br />
l'audience <strong>du</strong> 11 mai 1976, Jan-Carl Raspe déclarait : « Nous savons qu'Ulrike n'est pas morte<br />
des suites de son isolement. Elle a été assassinée, nous ne savons pas comment mais nous<br />
savons par qui. Il y a un responsable : Buback ». Le verdict <strong>du</strong> 28 avril 1977 ne donna lieu à<br />
aucun mouvement de contestation ; dès le début <strong>du</strong> procès, il était évident que les accusés<br />
encourraient la peine maximale en République Fédérale Allemande : « la réclusion à<br />
perpétuité ».<br />
Les lois spéciales de 1975 restreignant la défense collective ont été appliquées depuis dans<br />
tous les procès politiques, notamment dans les procès concernant les manifestations contre<br />
l'agrandissement de l'aéroport de Francfort où beaucoup de manifestants interpellés se sont<br />
trouvés privés de défenseurs de leur choix, chaque avocat ne pouvant défendre qu'un seul<br />
inculpé. Le discrédit jeté sur les avocats de la <strong>Fraction</strong> <strong>Armée</strong> <strong>Rouge</strong>, qui ont été à plusieurs<br />
reprises victimes d'interdiction professionnelle, inculpés pour complicité avec leurs clients,<br />
arrêtés, victimes de campagne de presse, a rejailli sur l'ensemble de la profession, ce qui<br />
constitue une remise en question de fait <strong>du</strong> droit de tout accusé à être défen<strong>du</strong>.<br />
Le caractère exceptionnellement <strong>du</strong>r de la répression policière et judiciaire à l'égard des<br />
militants de la R.A.F. faisait apparaître ceux-ci non comme des délinquants ordinaires, mais<br />
comme de véritables adversaires politiques de l'Etat allemand qui, tout en simulant « l'état de<br />
guerre », s'efforçait de nier le caractère politique de l'affrontement.<br />
La résistance exemplaire que les militants de la R.A.F. opposèrent à leurs conditions de<br />
détention contribua à maintenir un courant de sympathie pour le groupe dans des cercles assez<br />
larges de l'extrême gauche et à sensibiliser l'opinion publique <strong>international</strong>e aux problèmes<br />
posés par le fonctionnement de l'appareil répressif allemand.<br />
Le traitement sans précédent en Europe, réservé aux prisonniers de la R.A.F., semblait<br />
confirmer les analyses politiques <strong>du</strong> groupe qui dénonçait la mise en place dans les sociétés<br />
in<strong>du</strong>striellement développées d'un « Nouveau Fascisme » caractérisé par l'alliance <strong>du</strong> pouvoir<br />
et de la science en vue d'assurer l'intégration forcée de chaque indivi<strong>du</strong> au « système<br />
impérialiste ».<br />
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