Résistance. De 1940 aux maquis de 1944 Des départs vers l ...
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<strong>Résistance</strong>. <strong>De</strong> <strong>1940</strong> <strong>aux</strong> <strong>maquis</strong> <strong>de</strong> <strong>1944</strong><br />
<strong>De</strong>s <strong>départs</strong> <strong>vers</strong> l’Angleterre en juin <strong>1940</strong> <strong>aux</strong> <strong>maquis</strong> <strong>de</strong> <strong>1944</strong>, la <strong>Résistance</strong><br />
bretonne a, tour à tour, pris <strong>de</strong> multiples visages. Rése<strong>aux</strong> d’évasion, cellules<br />
d’espionnage, manifestations silencieuses, opérations <strong>de</strong> sabotage… La Bretagne<br />
est l’une <strong>de</strong>s régions <strong>de</strong> France où la résistance à l’occupant a été la plus active.<br />
Christian Bougeard, un uni<strong>vers</strong>itaire spécialiste <strong>de</strong> la <strong>Résistance</strong> bretonne, nous<br />
propose <strong>de</strong> mieux comprendre les faits et gestes <strong>de</strong> l’organisation <strong>de</strong>s<br />
combattants <strong>de</strong> l’ombre.<br />
A la mi-juin <strong>1940</strong>, la Bretagne est occupée par la Wehrmacht en trois jours sans<br />
combat. La région, qui accueille environ 1,2 million <strong>de</strong> réfugiés, constitue un enjeu<br />
stratégique pour le contrôle <strong>de</strong> la Manche et <strong>de</strong> l’Atlantique.<br />
Les Allemands font édifier dès <strong>1940</strong> <strong>de</strong>s bases sous-marines à Brest, à Lorient et à<br />
Saint-Nazaire et agrandissent les aérodromes bretons pour préparer l‘invasion <strong>de</strong><br />
l’Angleterre. Services <strong>de</strong> renseignements anglais (IS, SOE) et gaullistes (SR puis BCRA)<br />
vont vouloir en savoir plus. Pendant la débâcle, <strong>de</strong> nombreux navires quittent les ports en<br />
catastrophe. Parmi les partants, <strong>de</strong>s militaires mais aussi <strong>de</strong>s jeunes volontaires, comme<br />
les 80 élèves <strong>de</strong> l’école d’hydrographie <strong>de</strong> Paimpol qui veulent poursuivre la lutte, tels les<br />
133 pêcheurs <strong>de</strong> l’île <strong>de</strong> Sein partis les 24 et 26 juin.<br />
Le choc <strong>de</strong> la défaite<br />
Dans ces premiers engagés <strong>de</strong>s Forces françaises libres naissantes, beaucoup <strong>de</strong><br />
Bretons. <strong>De</strong> Camaret et <strong>de</strong> Douarnenez, <strong>de</strong> Henvic et <strong>de</strong> Carantec (Finistère), <strong>de</strong>s<br />
évasions par mer se poursuivent pendant plusieurs semaines encore malgré le<br />
bouclage <strong>de</strong>s côtes, en zone interdite. Ce sont <strong>de</strong>s bate<strong>aux</strong> passés outre-Manche et<br />
barrés par <strong>de</strong>s pêcheurs (<strong>de</strong> Sein, du Guilvinec, <strong>de</strong> Camaret…) qui débarquent les<br />
premiers agents gaullistes à la pointe <strong>de</strong> Bretagne à partir <strong>de</strong> juillet <strong>1940</strong>.<br />
Le départ le plus original est celui <strong>de</strong> Maurice Halna du Fretay, <strong>de</strong> Jugon-les-Lacs<br />
(Côtes-du-Nord), qui remonte un petit avion pour gagner l’Angleterre le 15 novembre<br />
<strong>1940</strong>.<br />
Malgré l’abattement <strong>de</strong> la défaite, <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> résistance à « l’ordre nouveau nazi »<br />
sont immédiates. Elles vont <strong>de</strong>s lacérations d’affiches (Lamballe, Gouarec…) <strong>aux</strong>
premiers sabotages, surtout <strong>de</strong>s coupures <strong>de</strong> lignes téléphoniques en <strong>1940</strong>-1941 (13<br />
dans les Côtes-du-Nord, 18 dans le Morbihan, une vingtaine dans le Finistère). A<br />
Rennes, le cheminot Marcel Brossier est le premier fusillé pour sabotage. Le réseau<br />
ébauché par Roger Barbé au camp <strong>de</strong> Servel-Lannion est démantelé le 28 décembre<br />
<strong>1940</strong> ; son chef sera fusillé le 4 octobre 1941. <strong>De</strong>s attentats visent les Allemands (<strong>de</strong>ux<br />
tués fin <strong>1940</strong> dans le Morbihan, un noyé à Lorient).<br />
Une population tournée <strong>vers</strong> l’Angleterre<br />
Encore rares, ces actions reflètent un rejet précoce <strong>de</strong> l’occupant dans les villes et<br />
sur la côte, plus marqué en pays bretonnant. La cohabitation forcée est difficile : à la<br />
suite d’insultes et <strong>de</strong> rixes, les tribun<strong>aux</strong> allemands condamnent <strong>de</strong>s dizaines <strong>de</strong><br />
personnes à <strong>de</strong>s peines <strong>de</strong> prison. L’effet Mers-el-Kébir est moins profond que ne le<br />
prétend la propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong> Vichy. Pourtant, 1 300 marins dont beaucoup <strong>de</strong> Bretons ont<br />
été tués par les Anglais le 3 juillet <strong>1940</strong>, quand la flotte française a tenté <strong>de</strong> gagner<br />
Toulon.<br />
Dès novembre <strong>1940</strong>, dans le Finistère, « la propagan<strong>de</strong> anglaise est très active. Les<br />
populations bretonnes y sont fort sensibles », selon le préfet, qui ne craint pas d’écrire :<br />
« L’Intelligence service donne l’impression d’être très renseignée (beaucoup mieux que<br />
notre police) ».<br />
Dans une région rurale plutôt conservatrice et très catholique, le ralliement <strong>de</strong>s<br />
notables et <strong>de</strong> l’Eglise au maréchalisme et à la Révolution nationale semblait aller <strong>de</strong> soi.<br />
Pourtant, sept parlementaires, tous Finistériens, sur 57 présents à Vichy, n’ont pas<br />
voté les pleins pouvoirs au maréchal Pétain le 10 juillet <strong>1940</strong>. Et dès l’automne <strong>1940</strong>,<br />
dans l’ouest <strong>de</strong> la péninsule, les autorités se plaignent du fort t<strong>aux</strong> d’écoute <strong>de</strong> la BBC,<br />
un mouvement qui s’amplifie tout au long <strong>de</strong> la guerre. En juin 1941, certains cantons du<br />
Trégor seraient « à 75 % intoxiqués par la radio anglaise et gaulliste », selon le sous-<br />
préfet <strong>de</strong> Lannion.<br />
Les manifestations publiques<br />
Dès juillet <strong>1940</strong>, à <strong>de</strong>ux reprises, <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong> Pontivy ont manifesté contre la<br />
présence au château <strong>de</strong> la poignée <strong>de</strong> nationalistes bretons du PNB. Mordrel et<br />
<strong>De</strong>bauvais rêvent pendant quelques jours d’établir un Etat « indépendant » breton sous<br />
l’aile protectrice du IIIe Reich. Collaboration d’Etat et partis groupusculaires <strong>de</strong>s ultras
<strong>de</strong> la collaboration (PNB, PPF, RNP, Collaboration) ne seront jamais du goût <strong>de</strong>s<br />
Bretons.<br />
Les manifestations sont un moyen d’exprimer collectivement un esprit <strong>de</strong> résistance<br />
sans trop <strong>de</strong> risques. Soit elles sont spontanées, soit elles répon<strong>de</strong>nt à <strong>de</strong>s consignes <strong>de</strong><br />
la France libre à une heure donnée, lors <strong>de</strong> commémorations patriotiques (11<br />
novembre, 18 juin, 14 juillet, 1 er mai). A l’appel du général <strong>de</strong> Gaule, le 1 er janvier 1941, la<br />
population reste chez elle mais elle sort dans la rue en arborant les couleurs tricolores le<br />
11 mai (fête <strong>de</strong> Jeanne d’Arc) et le 14 juillet 1941 ou le 1 er mai 1942. La jeunesse<br />
scolarisée est souvent en pointe.<br />
En <strong>1940</strong>-1941, la liste serait longue <strong>de</strong>s cinémas fermés par l’occupant à la suite <strong>de</strong><br />
sifflets <strong>de</strong> l’assistance lors <strong>de</strong>s actualités alleman<strong>de</strong>s : Rennes, Brest, Lorient (juillet et<br />
octobre <strong>1940</strong>) ; Guingamp, Saint-Quay-Portrieux, Châteaulin, Concarneau (1941). Les<br />
premiers tracts et inscriptions « gaullistes » et communistes (à Brest) sont signalés<br />
en octobre avant Montoire (Guingamp) et autour du 11 novembre (Lorient, Saint-Brieuc,<br />
Paimpol, Rennes, Nantes).<br />
<strong>De</strong>s lycéens brestois ont confectionné <strong>de</strong>s drape<strong>aux</strong> britanniques. Le 18 juin 1941, <strong>de</strong><br />
jeunes Briochins se présentent au lycée avec un crêpe noir, en signe <strong>de</strong> <strong>de</strong>uil pour<br />
marquer la première année d’occupation. Le len<strong>de</strong>main, un tract incite les Brestois à<br />
mettre un linge noir <strong>aux</strong> fenêtres. Les interpellations <strong>de</strong> la police française sont<br />
fréquentes.<br />
4 000 personnes à Rennes<br />
<strong>De</strong>s initiatives locales appellent aussi à manifester en masse en 1941 : le 20 mai, à<br />
Lorient, 3 000 personnes (beaucoup d’ouvriers) défilent contre Pétain ; elles sont 3 000<br />
ou 4 000 le 17 juin, à Rennes. Le commandant <strong>de</strong> gendarmerie Guillaudot, qui a refusé<br />
<strong>de</strong> donner l’ordre <strong>de</strong> charger la foule, est muté d’office à Vannes où il <strong>de</strong>viendra, en 1943,<br />
l’un <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> l’Armée secrète (AS) du Morbihan.<br />
Malgré les bombar<strong>de</strong>ments, <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> personnes défilent sur les tombes <strong>de</strong><br />
soldats britanniques <strong>de</strong> <strong>1940</strong> à 1942, à Brest, Lanester, Lorient, Saint-Brieuc, Saint-<br />
Cast, Saint-Malo… Au printemps 1941, V <strong>de</strong> la victoire et croix <strong>de</strong> Lorraine fleurissent<br />
partout, agaçant fortement l’occupant. « Le vent mauvais » que Pétain voit se lever le 12<br />
août 1941 souffle déjà bien sûr la Bretagne. Certains veulent aller plus loin.
Les rése<strong>aux</strong> <strong>de</strong> renseignements<br />
En <strong>1940</strong>, <strong>de</strong>s filières d’évasion <strong>de</strong> prisonniers se sont ébauchées (à Nantes, à Rennes,<br />
à Dinan). Jusqu’à sa <strong>de</strong>struction, le groupe nantais <strong>de</strong> Marcel Hévin, qui a une antenne<br />
dans les Côtes-du-Nord, prend en charge <strong>de</strong>s aviateurs anglais (ceux tombés à Lanvollon<br />
et à Saint-Michel-en-Grève).<br />
SR gaulliste et IS et ISOE britanniques recrutent leurs premiers agents dans les<br />
ports militaires. Plusieurs missions londoniennes parcourent la Bretagne en 1941-1942<br />
(Savannah, Overcloud). Le Vannetais Gilbert Renault-Rémy trouve <strong>de</strong>s correspondants<br />
très efficaces : l’officier <strong>de</strong> marine Philippon à Brest, l’ingénieur A. Tanguy à Lorient, qui<br />
lui remet tous les plans <strong>de</strong> toutes les bases sous-marines à la fin 1941. <strong>De</strong> <strong>1940</strong> à <strong>1944</strong>,<br />
l‘ingénieur alsacien Stosskopf surveille les sous-marins <strong>de</strong> Lorient pour le SR Marine <strong>de</strong><br />
Vichy qui informe les Anglais par l’ambassa<strong>de</strong> américaine puis pour le réseau Alliance.<br />
<strong>De</strong>s évadés <strong>de</strong> <strong>1940</strong> reviennent monter le réseau Johnny qui surveille pour les Anglais<br />
les croiseurs allemands à Brest. <strong>De</strong>s petits groupes loc<strong>aux</strong> cherchent le contact (le<br />
groupe Elie à Brest, « la ban<strong>de</strong> à Sidonie » <strong>de</strong> Suzanne Willborts à Bréhat). Du fait <strong>de</strong>s<br />
infiltrations policières, la durée <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> ces rése<strong>aux</strong> ne dépasse guère quelques mois.<br />
Au bout, il y a souvent la torture, l’exécution ou la déportation.<br />
La <strong>Résistance</strong> communiste<br />
Frappé par la répression en 1939-<strong>1940</strong> à cause <strong>de</strong> son approbation du pacte<br />
germano-soviétique, le PCF est désorganisé. Marcel Paul arrive en Bretagne en juillet<br />
<strong>1940</strong> pour renouer <strong>de</strong>s contacts à Rennes, à Brest (où une structure clan<strong>de</strong>stine s’est<br />
maintenue) et dans la région nantaise. <strong>De</strong>s militants ont caché quelques armes.<br />
A Nantes, Auguste Havez aurait lancé un appel « à la lutte <strong>de</strong> libération nationale »,<br />
non conservé, alors que la direction centrale du parti (Jacques Duclos) dénonce la guerre<br />
interimpérialiste, critique <strong>de</strong> Gaulle et les Anglais, et tente d’obtenir <strong>de</strong>s Allemands la<br />
reparution légale <strong>de</strong> « L’Humanité ».<br />
La répression suit
Fin <strong>1940</strong>-début 1941, Alain Le Lay dans le Finistère et le Morbihan, Pierre Le<br />
Quéinec dans les Côtes-du-Nord réorganisent le parti. <strong>De</strong>s groupes se forment à<br />
Rennes, à Saint-Malo et à Fougères. La propagan<strong>de</strong> communiste est signalée dans<br />
plusieurs villes <strong>de</strong> Bretagne à l’automne <strong>1940</strong>, notamment dans les arsen<strong>aux</strong> ; <strong>de</strong>s<br />
journ<strong>aux</strong> sont diffusés : « La voix <strong>de</strong> l’Arsenal » à Rennes, « La Bretagne ouvrière,<br />
paysanne et maritime » <strong>de</strong> Brest à Nantes à partir <strong>de</strong> mars-avril 1941.<br />
La répression suit. Onze jeunes <strong>de</strong> Lorient sont condamnés à plusieurs jours <strong>de</strong><br />
prison pour avoir chanté l’Internationale dans un café, le 1 er janvier 1941. La montée en<br />
puissance <strong>de</strong> cette propagan<strong>de</strong> en avril-mai 1941, c’est-à-dire <strong>de</strong>ux mois avant l’attaque<br />
<strong>de</strong> l‘URSS, inquiète les Allemands. A leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, 16 suspects <strong>de</strong> Callac, <strong>de</strong> Guingamp<br />
et du Trégor sont arrêtés en août 1941.<br />
27 otages fusillés<br />
Plusieurs Résistants <strong>de</strong>s trois départements les plus à l’ouest sont internés à<br />
Châteaubriant. Peu après, 27 otages communistes désignés par Vichy, dont Paul<br />
Guéguin, l’ancien maire <strong>de</strong> Concarneau, et 27 autres Nantais sont fusillés en représailles<br />
contre la mort du commandant Hotz. Le 21 octobre 1941, il a été abattu à Nantes par<br />
Gilbert Brustlein, envoyé par le PC spécialement <strong>de</strong> Paris.<br />
Cette affaire a un profond retentissement sur l’opinion et sur l‘essor <strong>de</strong> la<br />
<strong>Résistance</strong> communiste. Les quelques groupes <strong>de</strong> l’Organisation spéciale pratiquaient<br />
déjà <strong>de</strong>s sabotages (chemins <strong>de</strong> fer, arsen<strong>aux</strong>, chantiers allemands). Celui du port <strong>de</strong><br />
Brest tue trois Allemands en mars 1941 et immerge les corps. Un officier allemand est<br />
abattu en novembre pendant un bombar<strong>de</strong>ment.<br />
Avec la création <strong>de</strong>s Francs tireurs et partisans (FTP), en avril 1942, commandés<br />
par le Breton Charles Tillon, les sabotages augmentent. <strong>De</strong>s attentats à la bombe<br />
visent <strong>de</strong>s loc<strong>aux</strong> fréquentés par les Allemands dans toutes les gran<strong>de</strong>s villes. Mais la<br />
répression se durcit. La plupart <strong>de</strong>s pionniers tombent et sont fusillés (25 à Rennes le<br />
30 décembre 1942, 19 Brestois au Mont-Valérien le 17 septembre 1943).<br />
1943 : l’essor <strong>de</strong>s mouvements<br />
Alors que les privations s’aggravent, la Relève fin 1942, l’envoi d’ouvriers requis en<br />
Allemagne est difficile. En 1943, le Service du travail obligatoire (STO) jettent <strong>de</strong>s
milliers <strong>de</strong> jeunes gens dans la dissi<strong>de</strong>nce. Plus <strong>de</strong> 4 500 réfractaires sont cachés dans<br />
les fermes du Morbihan et autant dans celles <strong>de</strong>s Côtes-du-Nord en août 1943.<br />
En 1942 et surtout en 1943, les grands mouvements <strong>de</strong> zone occupée se<br />
développent en Bretagne. Il s’agit <strong>de</strong> Libération-Nord (proche <strong>de</strong> la SFIO et <strong>de</strong> la CGT),<br />
du Front National lancé par le PCF, <strong>de</strong> Défense <strong>de</strong> la France (dans les milieux modérés).<br />
S’y ajoutent <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> l’OCM, <strong>de</strong> l’ORA, <strong>de</strong> Vengeance. Grâce à leurs journ<strong>aux</strong><br />
clan<strong>de</strong>stins, ils touchent <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> mon<strong>de</strong>, revendiquant plusieurs milliers<br />
d’adhérents en <strong>1944</strong>. Avec <strong>de</strong>s responsables comme Tanguy-Prigent, Libé-Nord, qui a<br />
une audience importante, est chargé d’organiser l’Armée secrète (AS).<br />
Dans le Morbihan, c‘est le commandant Guillaudot-Yodi, chef du réseau Action <strong>de</strong> la<br />
France combattante, et ses gendarmes qui prennent les choses en mains. Les génér<strong>aux</strong><br />
Audibert et Allard comman<strong>de</strong>nt l’AS <strong>de</strong>s régions M2 et M3 (Bretagne).<br />
<strong>De</strong>s actions <strong>de</strong> guérilla<br />
Dans le Centre-Bretagne, <strong>de</strong>s groupes FTP très mobiles, plus quelques corps francs<br />
<strong>de</strong>s autres mouvements (24 dans le Morbihan en décembre 1943), pratiquent la guérilla<br />
(sabotages, attaques <strong>de</strong> mairies et <strong>de</strong> fermes, premières exécutions sommaires). Avant<br />
le débarquement, il y a très peu <strong>de</strong> <strong>maquis</strong> en Bretagne. On est pourtant passé <strong>de</strong> 23<br />
attentats en juillet 1943 à 348 en mars <strong>1944</strong> ; <strong>de</strong> 29 à 104 dans les Côtes-du-Nord du 1 er<br />
au 2 e semestre 1943. Mais les armes font défaut et il faut se débrouiller (rails<br />
déboulonnés) en attendant quelques parachutages au printemps, mais surtout en juillet<br />
<strong>1944</strong>. La Cie FTP <strong>de</strong> Plouaret réalise ainsi 24 sabotages sur la ligne Paris-Brest <strong>de</strong><br />
janvier au 9 mai <strong>1944</strong>.<br />
Un climat quasi-insurrectionnel règne dans plusieurs zones <strong>de</strong> l’intérieur en avril-<br />
mai, provoquant <strong>de</strong>s rafles alleman<strong>de</strong>s. En outre, la plupart <strong>de</strong>s chefs département<strong>aux</strong><br />
civils et militaires <strong>de</strong> la <strong>Résistance</strong> ont été arrêtés, empêchant la fusion en cours <strong>de</strong>s<br />
Forces françaises <strong>de</strong> l’Intérieur (FFI) et <strong>de</strong>s FTP. Face à quelques milliers <strong>de</strong> résistants,<br />
sans armes ou presque, les Allemands concentrent quelque 150 000 hommes dans la<br />
péninsule.<br />
Participation <strong>de</strong> la <strong>Résistance</strong> à la Libération
Les Alliés ne font guère confiance <strong>aux</strong> Résistants <strong>de</strong> l’intérieur pour appliquer les<br />
di<strong>vers</strong> plans <strong>de</strong> sabotage prévus pour retar<strong>de</strong>r l’envoi <strong>de</strong> renforts allemands en<br />
Normandie. A partir du 6 juin, ils comptent sur les 500 parachutistes SAS du commandant<br />
Bourgoin largués sur les <strong>de</strong>ux bases Samwest et Dingson, à Duault (Côtes-du-Nord)<br />
et à Saint-Marcel (Morbihan) ainsi que sur 18 Coney parties. Surpris, les SAS se<br />
ren<strong>de</strong>nt vite compte <strong>de</strong> l‘importance et <strong>de</strong> la combativité <strong>de</strong>s FFI et <strong>de</strong>s FTP.<br />
Après la dislocation après combat <strong>de</strong>s bases <strong>de</strong> Duault (12 juin) et <strong>de</strong> Saint-Marcel (18<br />
juin), plusieurs parachutistes prendront la tête <strong>de</strong> <strong>maquis</strong> importants comme celui <strong>de</strong><br />
Plésidy, au sud <strong>de</strong> Guingamp. Dans une ambiance <strong>de</strong> levée en masse, <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong><br />
FFI <strong>de</strong>s bataillons en formation dans le Morbihan passent au camp <strong>de</strong> Saint-Marcel pour<br />
s’y armer. Ils sont 2 400 au matin du 18 juin quand les Allemands attaquent. Une telle<br />
concentration était dangereuse. La bataille rangée fait rage toute la journée, soutenue par<br />
l’aviation alliée.<br />
Le soir, FFI et SAS décrochent, laissant 30 tués pour 300 à 560 Allemands ? La<br />
stratégie alliée <strong>de</strong>s <strong>maquis</strong> mobilisateurs est un échec.<br />
35 000 FFI<br />
Grâce à une dizaine d’équipes Jedburgh (trois hommes), les armes vont bientôt<br />
tomber du ciel (64 parachutages dans les Côtes-du-Nord dont 54 en juillet). Dans ce<br />
département, les plans <strong>de</strong> sabotages ont bien été mis en œuvre par les FFI-FTP :<br />
143 voies ferrées, 102 lignes téléphoniques coupées selon Roger Huguen. Il y a eu 116<br />
embusca<strong>de</strong>s et accrochages du 6 juin au 31 juillet.<br />
Partout, les <strong>maquis</strong> attaqués doivent décrocher avec <strong>de</strong>s pertes ; certains sont<br />
détruits (Saffré) ; les représailles alleman<strong>de</strong>s sont <strong>de</strong> plus en plus sanglantes.<br />
Heureusement, la percée d’Avranches permet <strong>aux</strong> armées américaines <strong>de</strong> foncer <strong>vers</strong><br />
Brest dans les premiers jours d’août, soulageant une pression <strong>de</strong> plus en plus<br />
insupportable. Quelque 35 000 FFI participent à la Libération <strong>de</strong> leur région, servant<br />
d’infanterie <strong>aux</strong> Américains, nettoyant les campagnes.<br />
Ils libèrent <strong>de</strong>s villes évacuées par les Allemands qui se replient sur Brest et Lorient.<br />
Il faut l’intervention américaine pour réduire, <strong>de</strong> la mi-août à la mi-septembre <strong>1944</strong>, les<br />
mini-poches côtières (Saint-Malo, le Cap Fréhel, Lézardrieux, Paimpol, Concarneau,
Brest, Crozon), mais celles <strong>de</strong> Lorient et <strong>de</strong> Saint-Nazaire vont tenir jusqu’en mai 1945.<br />
Les Bretons, qui n’ont pas démérité, peuvent fêter la liberté reconquise.<br />
Source : Hors-série Le Télégramme "La Bretagne libérée" 2004, p. 4-5. Christian Bougeard.