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Contribution à l'étude des relations entre sports et violences

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Chapitre 2 : Sports <strong>et</strong> <strong>violences</strong>. <strong>Contribution</strong> <strong>à</strong> un obj<strong>et</strong><br />

de recherche <strong>à</strong> partir de la question du hooliganisme<br />

La deuxième distinction est l’organisation. A contrario <strong>des</strong> jeux anciens, comme la soule, les<br />

<strong>sports</strong> modernes n’ont pas expressément de fonction rituelle ou de finalité festive. Ils se<br />

distinguent du calendrier religieux (Bourdieu, 1978 ; Chartier <strong>et</strong> Vigarello, 1982 ; Elias <strong>et</strong><br />

Dunning, 1986). Le sport se fonde en instaurant une chronologie différente de la vie sociale<br />

ordinaire, remplaçant progressivement les usages locaux par <strong>des</strong> règles uniformes (nombre de<br />

participants, règlements, délimitation précise <strong>des</strong> terrains) <strong>et</strong> perm<strong>et</strong>tant une plus grande<br />

hétérogénéité sociale <strong>des</strong> pratiquants 13 .<br />

Le troisième facteur est l’évidente diminution de la violence physique <strong>entre</strong> compétiteurs. Le<br />

sport dans sa forme moderne semble « aseptisé ». La violence qui s’y joue ainsi que la<br />

« mort » annoncée de l’un <strong>des</strong> protagonistes sont symboliques (Jeu, 1975, 1987) même si<br />

parfois, <strong>à</strong> l’image <strong>des</strong> athlètes de l’ex RDA, de certains cyclistes ou autres, elles peuvent être<br />

différées par les blessures ou maladies induites. La finalité n’est tout simplement plus la<br />

même. Alors que les jeux anciens étaient essentiellement une préparation <strong>à</strong> la guerre ou un<br />

substitut <strong>à</strong> celle-ci, le sport au XX ème siècle a progressivement assimilé d’autres finalités <strong>et</strong><br />

valeurs : éducation, hédonisme, santé, culte du corps, compétition, spectacle, insertion sociale<br />

ou professionnelle, intégration, cohésion sociale, <strong>et</strong>c. Ce n’est certes pas la seule raison. La<br />

société en se pacifiant a abaissé chez les individus le seuil de tolérance <strong>à</strong> la violence. Les<br />

activités sportives ont suivi le même cheminement au point que les plus violentes d’<strong>entre</strong><br />

elles, la boxe par exemple, ont vu leurs effectifs fondre en l’espace d’un siècle, au profit<br />

d’activités physiques émergentes qui privilégient l’esthétisme ou la nature (gymnastique<br />

rythmique <strong>et</strong> sportive, escalade, surf). Le sport est ainsi un puissant révélateur de nos sociétés<br />

<strong>et</strong> de leurs transformations, de nos cultures <strong>et</strong> de la manière dont elles gèrent <strong>et</strong> conçoivent le<br />

débridement <strong>des</strong> émotions <strong>des</strong> individus qui les composent.<br />

Mais ce qui distingue le plus n<strong>et</strong>tement les <strong>sports</strong> modernes <strong>des</strong> jeux anciens est leur fonction,<br />

au sens défini par Durkheim 14 , au sein de la société : ils participent, ou participeraient, nous<br />

critiquerons c<strong>et</strong> aspect, au contrôle de la violence même si ce n’était probablement pas leur<br />

finalité première.<br />

Les <strong>sports</strong> modernes participent au contrôle de la violence ?<br />

Elias, autour de la théorie centrale du « procès de civilisation » (1969a/b) s’est essentiellement<br />

attaché <strong>à</strong> décrire, en établissant un équilibre <strong>entre</strong> l’idéographique <strong>et</strong> le nomothétique,<br />

l’élaboration, l’apprentissage <strong>et</strong> l’affinement <strong>des</strong> conduites <strong>et</strong> <strong>des</strong> normes comportementales <strong>et</strong><br />

socialement acceptables qui ont conduit <strong>à</strong> la formation <strong>des</strong> sociétés occidentales <strong>entre</strong> le<br />

Moyen age <strong>et</strong> le XX ème siècle. Il montre ainsi que les sociétés modernes se sont structurées <strong>à</strong><br />

travers la censure de l’agressivité <strong>et</strong> le monopole étatique de la violence, la curialisation <strong>des</strong><br />

13 Qu’il faudrait cependant discuter en matière de droits <strong>et</strong> de modalités d’inscriptions dans certains clubs<br />

sportifs, de l’implantation géographique <strong>des</strong> installations sportives, de l’implantation privilégiée de certains<br />

<strong>sports</strong>, <strong>des</strong> politiques sportives <strong>des</strong> collectivités locales <strong>et</strong> territoriales en matière de « <strong>sports</strong> civils » <strong>et</strong> « <strong>sports</strong><br />

de rue », <strong>et</strong>c.<br />

14 « Quand on <strong>entre</strong>prend d’expliquer un phénomène social, il faut rechercher séparément la cause efficiente qui<br />

le produit <strong>et</strong> la fonction qu’il remplit. Nous nous servons du mot de fonction de préférence <strong>à</strong> celui de fin ou de<br />

but […]. Ce qu’il faut déterminer c’est s’il y a correspondance <strong>entre</strong> le fait considéré <strong>et</strong> les besoins généraux de<br />

l’organisme social <strong>et</strong> en quoi consiste c<strong>et</strong>te correspondance, sans se préoccuper de savoir si elle a été<br />

intentionnelle ou non. » (Durkheim, op. cit. 95).<br />

<strong>Contribution</strong> <strong>à</strong> l’étude <strong>des</strong> <strong>relations</strong> <strong>entre</strong> <strong>sports</strong> <strong>et</strong> <strong>violences</strong>. De leurs manifestations <strong>à</strong><br />

leurs préventions. Page 15

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