Blanqui, Adolphe (1798-1854). Histoire de l'économie politique en ...
Blanqui, Adolphe (1798-1854). Histoire de l'économie politique en ... Blanqui, Adolphe (1798-1854). Histoire de l'économie politique en ...
68 HISTOIRE Le crédit public était substitué au crédit privé. L1intér&t de l'argent tombait au taux le plus bas; et par là dispa- raissait la cause la plus efficace de l'inégalité des condi- tions. RIalheureiisement, le financier écossais partagea l'erreur commune à plusieurs de ses plus illustres con- temporains, en supposant qu'il suffisait de multiplier la monnaie pour faire diminuer l'intérét de l'argent; et iI aggrava cette premiére erreur par l'erreur plus grande encore et toute personnelle, de croire qu'on pouvait mul- tiplier la monnaie de papier (les billets de banque), sans avoir égard au capital cliargé ,d'en répondre. L'événe- ment favorisa son illusion plus longtemps qu'il ne sem- blait possible, car nous avons vu que les avaiitages du papier furent si bien compris en France, que Law put hasarder, méme au début de ses opérations, ce que nulle banque d'escompte n'oserait tenter aujourd'hui, iine 6mission de billets dix fois plus considérable que le capital en espèces. La confiance était générale; le tort de Law fut d'en abuser. Le régent l'y entraîna peu à peu, dans l'intention de rembourser la dette nationale; et il le força u d'élever, suivant l'expression d'un contem- porain 1, sept .étages sur des fondements qu'il n'avait posés que pour trois. u Les véritables effets d,u système nous sont à peine bien connus à présent. Les écrivains du temps en parlent tous avec cette affectation d'hor- reur qui poursuit trop souvent les plus grandes renom-. mées, quand la main du malheur s'est appesantie sur elles. a En quittant cette partie, dit M. Lemontey 2, les joueurs heureux eurent trop d'intérht à dissimufer leurs profits, et les malheureux a exagérer leurs pertes. Les 1 Di*it~l. 2 Histoire de la Régence, lorne 1, p. 356.
DE L'ÉCONOMIE POLITIQUE. CHAP. XXXI. 69 appréciatenrs de cette crise compliquée furent exposés à confondre la violence du remède avec celle du mal, et ce qui n'était que déplacé avec ce qui était détruit.. . Ce- pendant les provinces centrales, oii. la civilisation était le plus retardée, en éprouvérent un ébranlement salu- taire. Ces pays pau17res et indolents, où l'on avait vu le commerce et J'argent presque ignorés, les fruits de la terre sans valeur, et la perception des imp8ts aussi pé- nible qu'improductive, s'animèrent d'une vie nouvelle. Sous le rapport de la richesse, du prix des denré'cs, de la somme des contributions, de la vie sociale et de l'im- portance politique, la renaissance de ce vaste territoire date du cataclysme de Law, et sa civilisation progres- sive, depuis 1'730, en est un meilleur monument que les billets de la banque qu'on y conserve dans quelques chaumières. D La principale cause de la chute du système fut donc la trop grande émission de billets de banque et d'actions de la compagnie des Indes. Des capitaux fictirs Btaient impuissants à fournir des intéréts rBels : il n'en résulta que l'élévation exagérée du prix de toutes choses et un déplacement général des fortunes, d'autant plus dange- reux qu'il était plus rapide. Des catastrophes semblables ont signalé depuis les mêmes abus du crédit dans les deux mondes. Nos pères ont vu les assignats, multipliés outre mesure, tomber avec fracas malgré la garantie des biens dits nationaux ; l'Angleterre a éprouvé à son tour une grande crise monétaire, pour avoir dépassé dans les prêts de sa banque à son gouvernement la limite natu- relle des espèces. Au moment ou j'écris, une crise plus grave vient de bouleverser toute la circulation auxÉtats- Unis ', et l'on se croit transporté à l'époque de Law, L'auteur fait allusion à la crise de 1538-39. (Note r4e l'éditeur,)
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Le crédit public était substitué au crédit privé. L1intér&t<br />
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raissait la cause la plus efficace <strong>de</strong> l'inégalité <strong>de</strong>s condi-<br />
tions. RIalheureiisem<strong>en</strong>t, le financier écossais partagea<br />
l'erreur commune à plusieurs <strong>de</strong> ses plus illustres con-<br />
temporains, <strong>en</strong> supposant qu'il suffisait <strong>de</strong> multiplier la<br />
monnaie pour faire diminuer l'intérét <strong>de</strong> l'arg<strong>en</strong>t; et iI<br />
aggrava cette premiére erreur par l'erreur plus gran<strong>de</strong><br />
<strong>en</strong>core et toute personnelle, <strong>de</strong> croire qu'on pouvait mul-<br />
tiplier la monnaie <strong>de</strong> papier (les billets <strong>de</strong> banque), sans<br />
avoir égard au capital cliargé ,d'<strong>en</strong> répondre. L'événe-<br />
m<strong>en</strong>t favorisa son illusion plus longtemps qu'il ne sem-<br />
blait possible, car nous avons vu que les avaiitages du<br />
papier fur<strong>en</strong>t si bi<strong>en</strong> compris <strong>en</strong> France, que Law put<br />
hasar<strong>de</strong>r, méme au début <strong>de</strong> ses opérations, ce que nulle<br />
banque d'escompte n'oserait t<strong>en</strong>ter aujourd'hui, iine<br />
6mission <strong>de</strong> billets dix fois plus considérable que le<br />
capital <strong>en</strong> espèces. La confiance était générale; le tort <strong>de</strong><br />
Law fut d'<strong>en</strong> abuser. Le rég<strong>en</strong>t l'y <strong>en</strong>traîna peu à peu,<br />
dans l'int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> rembourser la <strong>de</strong>tte nationale; et il<br />
le força u d'élever, suivant l'expression d'un contem-<br />
porain 1, sept .étages sur <strong>de</strong>s fon<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts qu'il n'avait<br />
posés que pour trois. u Les véritables effets d,u système<br />
nous sont à peine bi<strong>en</strong> connus à prés<strong>en</strong>t. Les écrivains<br />
du temps <strong>en</strong> parl<strong>en</strong>t tous avec cette affectation d'hor-<br />
reur qui poursuit trop souv<strong>en</strong>t les plus gran<strong>de</strong>s r<strong>en</strong>om-.<br />
mées, quand la main du malheur s'est appesantie sur<br />
elles. a En quittant cette partie, dit M. Lemontey 2, les<br />
joueurs heureux eur<strong>en</strong>t trop d'intérht à dissimufer leurs<br />
profits, et les malheureux a exagérer leurs pertes. Les<br />
1 Di*it~l.<br />
2 <strong>Histoire</strong> <strong>de</strong> la Rég<strong>en</strong>ce, lorne 1, p. 356.