Blanqui, Adolphe (1798-1854). Histoire de l'économie politique en ...
Blanqui, Adolphe (1798-1854). Histoire de l'économie politique en ... Blanqui, Adolphe (1798-1854). Histoire de l'économie politique en ...
1 O0 HISTOIRE dire les créations annuelles du travail naturel de la terre. Son plan était d'en consacrer une partie auxcon- tributions et de laisser l'autre aux mains des proprié- taires, distributeurs nés du salaire, selon la théorie de Quesnay. Mais les proprietaires s'effrayèrent justement d'une expérience qui attaquait leur revenu dans sa source et qui avilissait leurs propriétés, devenues le point de mire de toutes les taxes. Le projet de Turgot était d'ailleurs inique en ce sens que les richesses réelles créées par les travailleurs autres que les agriculteurs, étaient exemptes d'impôt comme si elles n'étaient pas des richesses, quoiqu'elles en fussent véritablement. On faisait ainsi supporter aux propriétaires de terres les conséquences fiscales d'une erreur de doctrine, et on les ruinait de la meilleure foi du monde, tout en les pro- clamant les producteurs par excellence. Ce fut un grand malheur pour la science que Turgot ait mis tant de précipitation à appliquer une théorie aussi hasardeuse et aussi radicalement fausse, comme si l'exactitude en eût été démontrée avec une rigueur mathématique. Et m&me, dans ce cas, le passé commandait de grands mé- nagements à un homme d'État. Quelle que fiit la fer- veur de ses croyances, il ne devait pas procéder à de pareilles réformes avec la vivacité d'un sectaire, mais avec la prudence d'un législateur. Son erreur, partagée depuis par l'Assemblée constituante, a précipité la France dans un abîme de maux, en privant le gouvernement, pendant plusieurs années, des ressources immenses qu'il aurait trouvées dans les impôts indirects, dont le prin- cipe repose sur la production de la richesse immobilière, comme l'impôt foncier sur la production de la richesse agricole. Turgot ne voulait pas non plus d'emprii~its, et sa
DE L'ÉCONOMIE POLITIQUE. CHAP. XXXIII. loi caisse d'escompte n'était point un acheminement à la reconstitution d'un grand crédit public. L'école élono- miste niait l'influence du crédit public sur la prospérité publique. Elle n'admettait pas qu'on pût anticiper, même pour d'utiles motifs, sur le revenu annuel de i'ktat, et parce qu'elle avait rêvé 1'8ge d'or, elle ne sup- posait pas qu'on eût jamais b traverser des jours diffi- a ciles. C'est cette confiance philosophique qui avait animé Turgot lorsqii'ii fit supprimer les corporations. Il était loin de penser que ce grand acte d'émancipation, qu'on .ne saurait d'ailleurs trop louer, serait suivi de compli- cations formidables, dont Ia solution exigerait quelque jour un génie plus hardi, sinon plus loyal que le sien. Il était si heureux de rendre la liberté du travail à cette foule de compagnons attachés à la glèbe de l'atelier! Il présageait de si brillantes destinées à la nation fran- çaise, remise en possession de tant de forces vives! Qui lui eût dit qii'après un demi-siècle, la concurrence des travailleurs engendrerait la baisse des salaires, le pau- périsme, et toutes les misères qui ternissent l'éclat de notre civilisation ! 11 marchait d'un pas aussi Ferme à la poursuite des utopies qu'à la réforme des abus; et i'es- prit demeure accablé de tout ce qu'il entreprit avec ses seules forces de ministre, dans un temps oh les ministres n'en avaient pas beaucoup. 11 avait projeté la suppres- sion des monastères, l'égale répartition des impôts; un seul code civil pour tout le royaume ; l'unité des poids et mesures; un régime nouveau pour l'instruction pu- blique; l'établissement du cadastre, sans parler d'une foule de mesures de détail qui attestent la sollicitude $c l'administrateur, autant que les lumières du savant. u 11 agissait, dit Sénac de Meilhan, comme un chirurgien qui opère sur les cadavres, et il ne songeait pas qu'il 6.
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Quesnay. Mais les proprietaires s'effrayèr<strong>en</strong>t justem<strong>en</strong>t<br />
d'une expéri<strong>en</strong>ce qui attaquait leur rev<strong>en</strong>u dans sa<br />
source et qui avilissait leurs propriétés, <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ues le<br />
point <strong>de</strong> mire <strong>de</strong> toutes les taxes. Le projet <strong>de</strong> Turgot<br />
était d'ailleurs inique <strong>en</strong> ce s<strong>en</strong>s que les richesses réelles<br />
créées par les travailleurs autres que les agriculteurs,<br />
étai<strong>en</strong>t exemptes d'impôt comme si elles n'étai<strong>en</strong>t pas<br />
<strong>de</strong>s richesses, quoiqu'elles <strong>en</strong> fuss<strong>en</strong>t véritablem<strong>en</strong>t.<br />
On faisait ainsi supporter aux propriétaires <strong>de</strong> terres les<br />
conséqu<strong>en</strong>ces fiscales d'une erreur <strong>de</strong> doctrine, et on les<br />
ruinait <strong>de</strong> la meilleure foi du mon<strong>de</strong>, tout <strong>en</strong> les pro-<br />
clamant les producteurs par excell<strong>en</strong>ce. Ce fut un grand<br />
malheur pour la sci<strong>en</strong>ce que Turgot ait mis tant <strong>de</strong><br />
précipitation à appliquer une théorie aussi hasar<strong>de</strong>use<br />
et aussi radicalem<strong>en</strong>t fausse, comme si l'exactitu<strong>de</strong> <strong>en</strong><br />
eût été démontrée avec une rigueur mathématique. Et<br />
m&me, dans ce cas, le passé commandait <strong>de</strong> grands mé-<br />
nagem<strong>en</strong>ts à un homme d'État. Quelle que fiit la fer-<br />
veur <strong>de</strong> ses croyances, il ne <strong>de</strong>vait pas procé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong><br />
pareilles réformes avec la vivacité d'un sectaire, mais<br />
avec la pru<strong>de</strong>nce d'un législateur. Son erreur, partagée<br />
<strong>de</strong>puis par l'Assemblée constituante, a précipité la France<br />
dans un abîme <strong>de</strong> maux, <strong>en</strong> privant le gouvernem<strong>en</strong>t,<br />
p<strong>en</strong>dant plusieurs années, <strong>de</strong>s ressources imm<strong>en</strong>ses qu'il<br />
aurait trouvées dans les impôts indirects, dont le prin-<br />
cipe repose sur la production <strong>de</strong> la richesse immobilière,<br />
comme l'impôt foncier sur la production <strong>de</strong> la richesse<br />
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Turgot ne voulait pas non plus d'emprii~its, et sa