1 - Notes du mont Royal

CHANT XXIV. Cil
permettez que mon labeur ne soit pas perdu. C'est le linceul du
héros Laërte, quand enfin la Parque inexorable le plongera dans
le long sommeil de la mort. Vous ne voudriez pas que, parmi le
peuple, l'une des Argiennes me reprochât de ne point richement
ensevelir un roi qui a possédé tant de domaines. » Elle dit; et nos
coeurs généreux se laissent persuader. Dès lors chaque jour elle
tisse l'immense toile, et la nuit, à la lueur des flambeaux, elle
défait son ouvrage. Pendant trois ans elle sut nous cacher sa ruse.
Mais lorsque vint la quatrième année, lorsque les saisons recommencèrent
leur cours, lorsque les mois furent consumés et les
j ours accomplis, une de ses femmes qui connaissait son secret nous le
dévoila; nous la surprîmes comme elle défaisait sa grande toile,
et malgré ses désirs nous la contraignîmes à l'achever. Enfin elle
déploie à nos regards ce tissu, dont le vaste contour et l'éblouissante
blancheur rappelaient l'éclat du soleil ou de la lune. Mais
alors une divinité funeste ramène, de je ne sais quelle contrée, le
fils de Laërte. Le héros aborde à l'extrémité de ses champs en la
demeure *i u gardien de ses porcs. Au même lieu vient le fils du
divin Ulysse, de retour de la sablonneuse Pylos.Tous deux conspirent
la mort des prétendants et partent pour l'illustre ville : Télémaque
d'a.hord,et, après lui, Ulysse conduit par le pâtre, revêtu de
misérables haillons, semblable à un mendiant sordide, accablé
a années, soutenant d'un bâton sa marche chancelante. Ce déguise-
ent > son arrivée soudaine, le rendent méconnaissable même aux
Plus anciens. On l'outrage par de dures paroles; on lui lance des
raits, mais dans sa demeure il endure d'un cœur patient nos injures
et nos coups.Cependant, lorsque l'esprit de Jupiter le ranime,
enlevé à l'aide de son fils les armes de guerre et les dépose dans
son appartement secret, dont il ferme les verrous. Bientôt il ordonne
a son aitiflcie.Use épouse d'apporter aux prétendants l'arc et le fer
éclatant, épreuve qUi nous doit être fatale, signal d'un effroyable
carnage. Personne ne peut tendre le nerf, nous nous épuisons en
" s e "orts - Mais lorsque l'arme redoutable arrive entre les mains
a Ulysse, nos outrages redoublent, nous demandons à grands cris
qu on la lui x^efuse, quelles que soient ses instances. Le seul Télémaque
exige cju'U tente l'épreuve, il en sort victorieux, et son trait
traverse le fer. H s'élance alors sur le seuil, s'an-ête, répand à ses
pieds les flèches rapides, jette autour de lui de terribles regards
et perce le roi Antinoos. 11 atteint ensuite de ses traits amers les
autres Prétendants, qui tombent en foule. Nous reconnaissons que
l'un des d.i e u x est son auxiliaire. Son fïïs, ses serviteurs, entraînés
par sa furevi,^ portent àl'entour d'eux le carnage. Les gémissements,
le lii-u n des coups retentissent dans le palais, le sol ruisselle