1 - Notes du mont Royal

CHANT XVI. 531
wr les pieds pour me jeter hors de ma demeure; lors même
[u'ilsme lanceraient des traits, regarde-les sans te trahir, borneoi
par des paroles flatteuses à les prier de se modérer : au reste,
1s ne t'écouteront pas, car leur jour fatal approche. Retiens ce
[ue je te recommande et fais tomber mes paroles en ton esprit,
-orsque Minerve, féconde conseillère, m'aura inspiré, je te ferai
e la tête un signe que bientôt tu apercevras ; «soudain enlève et
lansporte dans le réduit de l'appartement supérieur toutes les
rmes de guerre qui sont suspendues dans lagiande salle. Si l'un
es prétendants remarque leur absence et te questionne, trompei
par ces paroles persuasives •
« Je les ai éloignées de la fumée, car elles ne sont plus telles
u'Ulysse les a laissées en partant pour Ilion ; l'immense vapeur
u foyer les a ternies. Ce n'est pas tout : le fils de Saturne m'a
lit naître dans l'esprit un motif plus puissant encore. Je crains,
u'entralnés par le vin la discorde ne s'élève entre vous, que*
ous ne vous blessiez mutuellement, que vous ne souilliez nos
•stins et l'espoir de votre hyménée : car le fer de lui-même
ttire l'homme. »
« C'est ainsi que tu leur parleras; laisse cependant pour nous
uls deux glaires, deux javelots et deux vastes boucliers que nos
ains puissent saisir et dont nous nous armerons pour fondre
r eux. Minerve ensuite et Jupiter les fascineront et troubleront
urs esprits. Écoute encore ce que je te recommande, fais-le
mber dans ton âme, s'il est vrai que tu me doives le jour et
ue tu sortes de mon sang; que personne, dans Ithaque, n'aprenne
le retour d'Ulysse : ni Laërte, ni le pâtre, ni l'un'de tes
erviteurs, ni Pénélope elle-même. Sachons seuls les sentiments
es captives; éprouvons nos serviteurs, distinguons ceux qui
ous honorent et nous craignent de ceux qui n'ont point de souci
e leurs maîtres, >et qui en leur âme te méprisent. »
« O mon père! répond l'illustre Télémaque, j'espère que plus
ard tu connaîtras mon courage. Certes mon esprit n'est pas sans
ermeté; mais cette entreprise me semble d'un succès incertain,
t je te conjure d'y réfléchir. Que de temps tu perdrais à parcourir
es domaines pour éprouver chacun de nos serviteurs ! tandis
ue les Prétendants, tranquilles au sein de ton palais, dévorent
mpudemment tes trésors, sans en rien épargner. Toutefois ne
néglige pas de bien t'informer des femmes, de connaître celles
,ui te me P rise nt et celles qui sont innocentes. Ne sonde pas toiuême
lesdesseins de tes pâtres : plus tard nous nous livrerons à
e soin, s il est vra. e tu t'appUies sur j e s signes du dieu qui
•orte l'égide. »