1 - Notes du mont Royal

CHANT IX. Ail
e leur colère. Les Cyclopes n'ont aucun souci de Jupiter, ni
les bienheureux immortels ; notre force l'emporte sur la leur,
ïe crois donc pas que, pour éviter la haine de Jupiter, je conente,
à moins que mon âme ne me l'ordonne, à épargner tes
ompagnons ni toi-même. Mais dis-moi où tu as laissé ton beau
•avive; est-ce loin, est-ce près de ma demeure? ne me laisse rien
gnorer. »
u II dit, et me tend un piège ; mais mon expérience me dévoile
;a pensée, et je le trompe à mon tour par une réponse artifi-
:ieuse.
« Lj.es vents ont poussé mon navire hors des flots, et Neptune
'a brisé sur les écueils d'un promontoire aux confins de. votre
erre ; mes compagnons et moi nous avons évité l'instant su-
>rême. »
onse; mais il se lève , étend vers nous ses bras gigantesques,
iaisit deux de mes compagnons, et leur écrase la tête sur le sol.
..eurs cervelles, comme celles de jeunes chiens, s'écoulent et
rouvrent la terre. Le monstre divise leurs membres palpitants,
>répare son horrible festin, et les dévore non moins avide qu'un
ion nourri dans les montagnes, sans rien laisser de leurs enrailles,
de leurs chairs, de leurs os moelleux. Cependant, à ce
ruel spectacle, nous jetons des cris lamentables, et nous élevons
exs Jupiter nos mains suppliantes; un délire de désespoir nous
ransporte. Lorsque le Cyclope a gorgé son vaste sein de chairs
umaines et de,grands traits de lait pur, il s'étend au milieu de
'antre parmi ses troupeaux, et s'endort. Alors, en mon cœur
agnanime, je projette de fondre sur lui, de tirer mon glaive
céré, et, d'un effort de mon bras, de le frapper à la poitrine, au
ieu où le foie se joint au diaphragme. Mais une autre pensée me
etient. Ma résolution ne nous eût pas empêchés de périr, jamais
os faibles mains n'eussent pu mouvoir l'énorme rocher dont il
vait fermé l'entrée de la. caverne.
u Nous attendons donc en soupirant le retour de la divine luière.
Aux premières lueurs de la fille du matin, de l'Aurore aux
oigts de rose, le monstre allume un grand feu, trait en ordre
on riche troupeau, et remet les petits auprès de leurs mères. Ces
pprèts activement terminés, il saisit encore deux de mes comagnons,
et dispose son repas. Lorsqu'il est rassasié, il écarte sans
eine la roche énorme, et pousse hors de l'antre son florissant
roupeau. Nous le voyons remettre la pierre comme on place le
ouvercle d'un carquois, et nous l'entendons conduire à grand
ruil sos brebis au sommet de la montagne. Je reste dans la