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<strong>PAHAD</strong> <strong>DAVID</strong><br />
verset, Zohar), et il est évident que c’est une cause supplémentaire de joie. Rien ne semble donc justifier<br />
une expression de tristesse.<br />
Pour l’expliquer, il faut d’abord citer le Rav Israël de Rozhine, pour qui le fait même d’avoir à construire<br />
le Temple est un élément de tristesse. En effet, au commencement Dieu désirait résider en chacun, et chaque<br />
cœur de chaque juif était appelé à devenir une sorte de Temple. Ce n’est qu’après la faute du Veau d’Or qu’Il<br />
a dû réduire Sa résidence à une maison de bois et de pierre (voir Chemoth Rabah 34, 1). Par conséquent,<br />
il est tout à fait clair que si les benei Israël n’avaient pas commis la faute du Veau d’Or, l’Eternel aurait<br />
fait reposer Sa Chekhinah en chacun d’entre eux, et le bonheur aurait été parfait. Mais désormais, bien<br />
que cette faute leur ait été pardonnée et que Sa présence réside parmi eux, surtout le huitième jour, jour<br />
d’un niveau qui dépasse toute la nature (ainsi qu’il est écrit : « Donne une part au sept, et aussi au huit »<br />
(Ecclésiaste 11, 2)), et que la joie y était aussi grande que le jour où le ciel et la terre ont été créés, elle n’était<br />
malgré tout pas totale, car chaque juif regrettait amèrement que la chekhinah ne soit pas véritablement à<br />
l’intérieur de lui, mais seulement dans le Temple. Or on sait que Dieu prend part à toutes les souffrances<br />
des benei Israël (Isaïe 63, 9), par conséquent Lui aussi participait à cette peine, si bien que même en haut<br />
la joie n’était pas parfaite.<br />
Tout un chacun peut tirer de là une règle de vie et une leçon, en examinant combien il doit regretter de<br />
laisser passer la moindre mitsvah sans l’accomplir. Nos Sages nous ont enjoint de ne pas tarder à exécuter<br />
une mitsvah qui est à notre portée (Mekhilta Chemoth 12, 17), car même si en fin de compte on la réalise<br />
dans tous ses détails, il en reste malgré tout une légère imperfection. On aurait pu s’élever davantage en le<br />
faisant immédiatement, et notre temporisation nous a fait perdre ce bénéfice. C’est le même regret qu’on a<br />
pour tout ce qui disparaît et qu’on ne peut plus retrouver (Sanhédrin 111a). Bien qu’on se soit repenti et que<br />
la faute elle-même ait été effacée, au point qu’on ressemble à l’enfant qui vient de naître (Bekhorot 47a),<br />
elle a tout de même laissé une trace, et si l’on commet une nouvelle faute, elle fera renaître le souvenir de<br />
la première. C’est ce qui s’est passé avec la faute du Veau d’Or. Le verset dit : « Le jour où je demanderai<br />
des comptes, je leur demanderai compte de cette faute » (Exode 32, 34), et la Guemara (Sanhédrin 102a)<br />
ajoute qu’aucune catastrophe ne se produit chez les benei Israël qui ne contienne un peu du rachat de<br />
la faute du Veau d’Or. Or cela paraît difficile à admettre : pourquoi y aurait-il aujourd’hui une punition<br />
de ce péché, alors qu’il y a eu repentir, que ce repentir a été accepté (« J’ai pardonné selon tes paroles »<br />
(Nombres 14, 20)), qu’un Sanctuaire a été bâti et que la Présence Divine est venue y résider. Que reste-t-il<br />
donc à punir ?<br />
On le comprend parfaitement à la lumière de ce que nous avons dit ci-dessus : bien que la faute elle-même<br />
soit effacée et pardonnée, son souvenir demeure, comme dans le verset : « ma faute est devant moi sans<br />
cesse » (Psaumes 51, 5), et la perte causée par ce souvenir demeure également. La construction du Temple<br />
prouve qu’au lieu de faire résider la Chekhinah en chacun des benei Israël, l’Eternel a dû se contenter<br />
d’un Sanctuaire en bois, tout cela à cause de la faute du Veau d’Or. Certes, il y a eu une grande joie dans<br />
le ciel, mais il restait aussi malheureusement une peine qui a des prolongements jusqu’à aujourd’hui. Et<br />
c’est pourquoi les catastrophes qui viennent en punition de la faute du Veau d’Or s’étendent également<br />
jusqu’à nos jours, à notre grand regret.<br />
On peut comparer cette situation à celle d’un homme qui sait qu’en choisissant six numéros justes à la<br />
Loterie, il aurait gagné le gros lot, et qui n’a que cinq chiffres justes. Il a de toutes façons gagné un prix<br />
respectable, et il y a de quoi se réjouir. Mais sa joie est mêlée de regret à l’idée que s’il avait choisi un autre<br />
bon numéro, il aurait gagné le gros lot. Et ce choix imparfait paraît une faute, car il a négligé l’occasion<br />
qui se présentait à lui, et il a osé perdre et faire perdre à sa famille une énorme somme d’argent qui aurait<br />
pu le faire vivre sans effort, lui et ses descendants.<br />
Dans cette optique, nous allons pouvoir comprendre ce qui s’est passé avec Nadav et Avihou. En effet,<br />
s’ils avaient péché en offrant un feu étranger sans en avoir reçu l’ordre (Lévitique 10, 1), pourquoi Dieu<br />
les aurait-Il donc considérés comme importants au point de dire « Je me sanctifierai par mes proches »<br />
(Ibid. 3), ou encore : « Et vos frères, toute la maison d’Israël, pleureront ceux qu’a brûlés le Seigneur »<br />
(Ibid.6) ? En fait, il faut comprendre la raison de l’acte de Nadav et Avihou, qui ressemble apparemment<br />
à une faute malgré leur grandeur. Il faut aussi comprendre avec précision pourquoi il est dit « la maison<br />
d’Israël » pleurera, et non « les benei Israël ».