Léon Rosenthal, Notre musée, l'art expliqué par les œuvres…
Léon Rosenthal, Notre musée, l'art expliqué par les œuvres… Léon Rosenthal, Notre musée, l'art expliqué par les œuvres…
I. — LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE A LA FIN DU MOYEN AGE Cl. Bullej. FOUOUET. — Le Couronnement de la Vierge. — Chantilly. Au 14* et au 15* siècle, l'art n'est plus soutenu par la fol populaire. IL est protégé, non par les rois, après Charles V, mais par les princes : le duc de Berry, le duc d'Orléans, surtout les ducs de Bourgogne, et aussi par de grands bourgeois, Jacques Cœur, le chancelier Rolin, Etienne Chevalier. On bâtit peu d'églises (gothique flamboyant), mais de nombreux châteaux. Un luxe raffiné réclame tapisseries, orfèvrerie, manuscrits à miniatures. Avec un esprit nouveau de réalisme, les miniaturistes, sur lesquels agissent la Flandre et l'Italie, ressemblent aux chroniqueurs. Observateurs scrupuleux, curieux des détails exacts, ils sont dénués de sens historique : même quand ils évoquent l'évangile ou l'antiquité, ils portent témoignage sur leur temps. La miniature prépare la peinture sur panneau ou sur muraille qui se développe au 15" siècle. Les Très Riches Heures ont été faites, vers 1415, pour le duc de Berry, par des Flamands, LES FRÈRES DE LIMBOURG. Les mois y sont caractérisés par des scènes de la vie noble ou populaire. Janvier, le duc de Berry, le dos au feu, près de sa table, donne audience avec familiarité et dignité. Tous les personnages sont des portraits. Sur la table, des pièces d'or- fèvrerie d'apparat, copies certainement exactes. Au mur une tapisserie toute couverte de guerriers, très « meublante ». Costumes brillants : fourrures, velours, brocards. Groupement vivant, ordonné naïvement; style descriptif : rien n'est supprimé parce que tout est intéressant. Le « primitif » ne sait pas choisir. Octobre. Les semailles. Habile mise en scène, perspective vraisemblable. Des bourgeois, aux costumes étriqués, à la mode, se promènent près des remparts. Le vilain sème, d'un geste vrai dont l'artiste ne devine pas la grandeur. Un épouvantail capable de faire fuir l'archer de Bagnolet. Spectacle paisible sous la protection de l'ancien Louvre construit pour Charles V, résidence et forteresse. Plusieurs foyers d'art en France, au 15 e siècle, écoles de Loire, d'Avignon, de Moulins, de Bourgogne, de Provence. FOUQUET, miniaturiste et peintre, chef de l'ccole de la Loire, a décoré, vers 1450, les Heures d'Étienne Chevalier, secrétaire de Charles VII. Même sincérité avec plus d'aisance, une grâce paisible un peu molle. Les architectures sont inspirées de l'Italie. Aucun mysticisme, pas d'élan : la Vierge est une princesse que le Christ couronne avec dignité : préciosité minutieuse du décor. Dans cette Pietà, peinte dans la région d'Avignon, il y a, au contraire, grande ardeur, exaltation : caractère tragique de ce cadavre rigide, téte dou- er Bullot. La Plelà d'Avignon. — Mns/e
Cl. Bullox. Octobre. — Les Semailles. Janvier. — Le Dîner du duc de Berrv. FRÈRES DE LI.MBOURG. — Très riches heures du duc de Berry. — Chantilly. Ll. tlultus.
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I. — LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE A LA FIN DU MOYEN AGE<br />
Cl. Bullej.<br />
FOUOUET. — Le Couronnement de la Vierge. — Chantilly.<br />
Au 14* et au 15* siècle, <strong>l'art</strong> n'est plus soutenu <strong>par</strong> la fol<br />
populaire. IL est protégé, non <strong>par</strong> <strong>les</strong> rois, après Char<strong>les</strong> V, mais<br />
<strong>par</strong> <strong>les</strong> princes : le duc de Berry, le duc d'Orléans, surtout <strong>les</strong> ducs<br />
de Bourgogne, et aussi <strong>par</strong> de grands bourgeois, Jacques Cœur,<br />
le chancelier Rolin, Etienne Chevalier. On bâtit peu d'églises<br />
(gothique flamboyant), mais de nombreux châteaux. Un luxe<br />
raffiné réclame tapisseries, orfèvrerie, manuscrits à miniatures.<br />
Avec un esprit nouveau de réalisme, <strong>les</strong> miniaturistes, sur <strong>les</strong>quels<br />
agissent la Flandre et l'Italie, ressemblent aux chroniqueurs.<br />
Observateurs scrupuleux, curieux des détails exacts, ils sont<br />
dénués de sens historique : même quand ils évoquent l'évangile<br />
ou l'antiquité, ils portent témoignage sur leur temps. La miniature<br />
pré<strong>par</strong>e la peinture sur panneau ou sur muraille qui se<br />
développe au 15" siècle.<br />
Les Très Riches Heures ont été faites, vers 1415,<br />
pour le duc de Berry, <strong>par</strong> des Flamands, LES FRÈRES<br />
DE LIMBOURG. Les mois y sont caractérisés <strong>par</strong> des<br />
scènes de la vie noble ou populaire. Janvier, le duc<br />
de Berry, le dos au feu, près de sa table, donne<br />
audience avec familiarité et dignité. Tous <strong>les</strong> personnages<br />
sont des portraits. Sur la table, des pièces d'or-<br />
fèvrerie d'ap<strong>par</strong>at, copies certainement exactes. Au<br />
mur une tapisserie toute couverte de guerriers, très<br />
« meublante ». Costumes brillants : fourrures, velours,<br />
brocards. Groupement vivant, ordonné naïvement;<br />
style descriptif : rien n'est supprimé <strong>par</strong>ce que tout<br />
est intéressant. Le « primitif » ne sait pas choisir.<br />
Octobre. Les semail<strong>les</strong>. Habile mise en scène, perspective<br />
vraisemblable. Des bourgeois, aux costumes<br />
étriqués, à la mode, se promènent près des rem<strong>par</strong>ts.<br />
Le vilain sème, d'un geste vrai dont <strong>l'art</strong>iste ne<br />
devine pas la grandeur. Un épouvantail capable de<br />
faire fuir l'archer de Bagnolet. Spectacle paisible<br />
sous la protection de l'ancien Louvre construit<br />
pour Char<strong>les</strong> V, résidence et forteresse.<br />
Plusieurs foyers d'art en France, au 15 e siècle,<br />
éco<strong>les</strong> de Loire, d'Avignon, de Moulins, de Bourgogne,<br />
de Provence. FOUQUET, miniaturiste et peintre, chef<br />
de l'ccole de la Loire, a décoré, vers 1450, <strong>les</strong> Heures<br />
d'Étienne Chevalier, secrétaire de Char<strong>les</strong> VII. Même<br />
sincérité avec plus d'aisance, une grâce paisible un<br />
peu molle. Les architectures sont inspirées de l'Italie.<br />
Aucun mysticisme, pas d'élan : la Vierge est une<br />
princesse que le Christ couronne avec dignité : préciosité<br />
minutieuse du décor.<br />
Dans cette Pietà, peinte dans la région d'Avignon,<br />
il y a, au contraire, grande ardeur, exaltation :<br />
caractère tragique de ce cadavre rigide, téte dou-<br />
er Bullot.<br />
La Plelà d'Avignon. — Mns/e