Léon Rosenthal, Notre musée, l'art expliqué par les œuvres…

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XXVIII. — LA FLANDRE : RUBENS En 1600, RUBENS (1577-1640), alla Interroger l'Italie, il y resta jusqu'en 1608, mais, de ce contact où ses aillés avaient perdu toute originalité, il ne tira, lui, que ce qui pouvait nourrir son tempérament. Dès la Descente de Croix, 1012, il fut célèbre; il révéla aux Flamands des traits, jusqu'alors contenus, de leur nature, le goût exubérant du mouvement, des formes opulentes, de l'éclat joyeux, des spectacles; sous cet aspect, il incarna leur génie. Ni idéaliste, ni profond, ni psychologue, étranger au souci de correction et de pureté, il est doué, à un degré extrême, du sens physiologique de la vie; il a déployé une imagination charnelle d'une fécondité inouïe. Il s'est prodigué dans tous les genres, animant tout ce qu'il CI. BuDoi. RUBENS. — Le Coup de Lante. — Musée d'Anvers. touchait. Son dessin hardi, sa couleur éclatante, sans raffinement, sa science généreuse et libre ont, depuis le 17 E siècle jusqu'à nos jours, passionné les artistes indépendants. La suite de grandes toiles décoratives que RUBENS a consacrées à la vie de Marie de Médicis est un vrai miracle de l'art puisque, sur des prétextes pour la plupart insignifiants, il a développé des pages magnifiques. Henri IV reçoit le Portrait de Marie de Médicis, thème pauvre; pour l'enrichir, l'artiste l'orne d'allégories rebattues : l'Amour, l'Hymen; il y introduit Jupiter et Junon, patrons inattendus du roi très chrétien et il affuble la France personnifiée d'un accoutrement qui, sous tout autre pinceau, aurait été ridicule. La composition participe au système baroque. Mais, en tout cela Rubens fait circuler la vie. Henri IV est campé d'une façon admirable; la France est aussi réelle que lui, de jolis amours jouent avec ses armes, on entrevoit un large paysage. Noblesse et familiarité, fanfare éclatante de tons orchestrés avec sûreté. Toile pleine à déborder, mais de signification limpide. Le Coup de Lance, page religieuse, selon le génie de Rubens, d'un tragique presque matériel, d'un sentiment tout humain. Le corps palpitant du Christ agonisant, la violence du coup de lance; beau geste de la Madeleine; déploration de la Vierge, de saint Jean. Le ciel lourd, la couleur sourde, l'harmonie sombre traduisent la lamentation en langage sensible. Maximum de recueillement compatible avec le tableau d'autel. Prédilection pour les carnations grasses, lymphatiques. Contours peu marqués; dessin qui ne se soucie pas de science anatomique, mais de surprendre le mouvement et de traduire la vie physiologique. Draperies amples et molles sansstyle. Liberté et évidence de la composition, d'un esprit vraiment moderne. (Opposer le Calvaire de Mantegna, p. 29.) Le Paysage aux Vaches est aussi l'œuvre d'un initiateur. Ni l'exactitude, ni la ferveur que vont nous offrir les Hollandais, les arbres indiqués par masses sans chercher à donner l'illusion du feuillage. Une symphonie suggestive : poésie des heures changeantes, des aspects instantanés : accord du ciel, de la campagne, des choses, des êtres, pâturages, vergers. La vie qui circule en tout. Vision immédiate, pas de transpositions, pas de construction apparente des plans, de composition rythmique à l'inverse des paysages français classiques. Cl. Hani/lam/l. RUBENS. — Haysage. — Pinacothèque, Munich.

XXVIII. — LA FLANDRE : RUBENS<br />

En 1600, RUBENS (1577-1640), alla Interroger l'Italie, il y resta<br />

jusqu'en 1608, mais, de ce contact où ses aillés avaient perdu toute<br />

originalité, il ne tira, lui, que ce qui pouvait nourrir son tempérament.<br />

Dès la Descente de Croix, 1012, il fut célèbre; il révéla aux<br />

Flamands des traits, jusqu'alors contenus, de leur nature, le goût<br />

exubérant du mouvement, des formes opulentes, de l'éclat joyeux,<br />

des spectac<strong>les</strong>; sous cet aspect, il incarna leur génie. Ni idéaliste,<br />

ni profond, ni psychologue, étranger au souci de correction et de<br />

pureté, il est doué, à un degré extrême, du sens physiologique de<br />

la vie; il a déployé une imagination charnelle d'une fécondité<br />

inouïe. Il s'est prodigué dans tous <strong>les</strong> genres, animant tout ce qu'il<br />

CI. BuDoi.<br />

RUBENS. — Le Coup de Lante. — Musée d'Anvers.<br />

touchait. Son dessin hardi, sa couleur éclatante, sans raffinement,<br />

sa science généreuse et libre ont, depuis le 17 E siècle jusqu'à nos<br />

jours, passionné <strong>les</strong> artistes indépendants.<br />

La suite de grandes toi<strong>les</strong> décoratives que RUBENS<br />

a consacrées à la vie de Marie de Médicis est un<br />

vrai miracle de <strong>l'art</strong> puisque, sur des prétextes<br />

pour la plu<strong>par</strong>t insignifiants, il a développé des<br />

pages magnifiques. Henri IV reçoit le Portrait de<br />

Marie de Médicis, thème pauvre; pour l'enrichir,<br />

<strong>l'art</strong>iste l'orne d'allégories rebattues : l'Amour,<br />

l'Hymen; il y introduit Jupiter et Junon, patrons<br />

inattendus du roi très chrétien et il affuble la<br />

France personnifiée d'un accoutrement qui, sous<br />

tout autre pinceau, aurait été ridicule. La composition<br />

<strong>par</strong>ticipe au système baroque. Mais, en tout<br />

cela Rubens fait circuler la vie. Henri IV est campé<br />

d'une façon admirable; la France est aussi réelle que<br />

lui, de jolis amours jouent avec ses armes, on entrevoit<br />

un large paysage. Nob<strong>les</strong>se et familiarité, fanfare<br />

éclatante de tons orchestrés avec sûreté. Toile<br />

pleine à déborder, mais de signification limpide.<br />

Le Coup de Lance, page religieuse, selon le génie de<br />

Rubens, d'un tragique presque matériel, d'un sentiment<br />

tout humain. Le corps palpitant du Christ agonisant,<br />

la violence du coup de lance; beau geste de<br />

la Madeleine; déploration de la Vierge, de saint<br />

Jean. Le ciel lourd, la couleur sourde, l'harmonie<br />

sombre traduisent la lamentation en langage sensible.<br />

Maximum de recueillement compatible avec<br />

le tableau d'autel. Prédilection pour <strong>les</strong> carnations<br />

grasses, lymphatiques. Contours peu marqués; dessin<br />

qui ne se soucie pas de science anatomique, mais de<br />

surprendre le mouvement et de traduire la vie physiologique.<br />

Draperies amp<strong>les</strong> et mol<strong>les</strong> sansstyle. Liberté<br />

et évidence de la composition, d'un esprit vraiment<br />

moderne. (Opposer le Calvaire de Mantegna, p. 29.)<br />

Le Paysage aux Vaches est aussi l'œuvre d'un<br />

initiateur. Ni l'exactitude, ni la ferveur que vont<br />

nous offrir <strong>les</strong> Hollandais, <strong>les</strong> arbres indiqués <strong>par</strong><br />

masses sans chercher à donner l'illusion du feuillage.<br />

Une symphonie suggestive : poésie des heures changeantes,<br />

des aspects instantanés : accord du ciel, de<br />

la campagne, des choses, des êtres, pâturages, vergers.<br />

La vie qui circule en tout. Vision immédiate, pas de<br />

transpositions, pas de construction ap<strong>par</strong>ente des<br />

plans, de composition rythmique à l'inverse des<br />

paysages français classiques.<br />

Cl. Hani/lam/l.<br />

RUBENS. — Haysage. — Pinacothèque, Munich.

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