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Léon Rosenthal, Notre musée, l'art expliqué par les œuvres…

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Jeunes, enthousiastes, épris d'art, <strong>les</strong> Romantiques étaient<br />

d'accord pour rejeter <strong>les</strong> règ<strong>les</strong> et revendiquer la liberté; ils n'avaient<br />

pas de doctrine commune, chacun obéissant à son tempérament,<br />

mais ils avaient un air de famille <strong>par</strong>ce qu'ils subissaient <strong>les</strong><br />

influences de leur temps. Delacroix <strong>les</strong> domine et incarne le Romantisme<br />

dans ses aspects essentiels et durab<strong>les</strong>.<br />

Eugène Delacroix (1798-1863), une des plus bel<strong>les</strong> intelligences<br />

du siècle, esprit ouvert, coeur généreux, est profondément peintre.<br />

Il essaye de tout dire <strong>par</strong> la peinture, avec une ardeur inassouvie.<br />

Coloriste génial, il ne peint pas pour la joie des yeux, il veut <strong>par</strong>ler<br />

à l'âme. Tourmenté d'abord <strong>par</strong> une inquiétude fiévreuse (mal du<br />

siècle) qui s'est peu à peu apaisée, il représente le drame et la vie :<br />

la vie totale, comme Michelct, l'être physiologique aussi bien que<br />

moral, <strong>les</strong> costumes, <strong>les</strong> paysages. Il s'éloigne, sauf exceptions<br />

rares, de la réalité présente jugée médiocre et puise l'inspiration<br />

chez <strong>les</strong> poètes, Dante, <strong>les</strong> écrivains germaniques, Goethe, Shakespeare,<br />

Walter Scott, Byron, dans l'histoire, en Orient. Soucieux<br />

de caractère, non de beauté, il dessine moins <strong>par</strong> <strong>les</strong> contours que<br />

<strong>par</strong> <strong>les</strong> masses, surprend le mouvement. Il colore selon la signification<br />

de l'œuvre : harmonies éclatantes, sourdes, tragiques,<br />

toujours puissantes, chaudes, avec des hardiesses neuves de pinceau,<br />

décomposition des tons, juxtapositions de taches.<br />

Les Massacres de Scio, 1824, la première œuvre<br />

où DELACROIX se soit totalement affirmé. Épisode<br />

de la guerre d'indépendance hellénique qui passion-<br />

Cl. Uvy-Neurdein.<br />

DELACROIX. — Les M issacres de Sclo. — Musée du Louvre.<br />

nait l'Europe (Victor Hugo, Les Orienta<strong>les</strong>). Réquisitoire<br />

véhément contre le barbare qui n'a respecté<br />

ni vieillards, ni femmes, ni enfants; la désolation,<br />

la mort; types ethniques, magnifiques morceaux : le<br />

torse de femme à droite, la femme morte et son bébé....<br />

XL VII. — DELACROIX<br />

influence de Gros; le paysage largement suggéré, peutêtre<br />

sous l'action de Constable. Composition complexe,<br />

baroque. Antithèse entre la lumière éclatante, <strong>les</strong><br />

splendeurs colorées des costumes, et la terreur turque.<br />

L'Entrée des Croisés à Constantinople en 1204,<br />

peinte en 1841. Intensité d'impression : la scène<br />

Cl. Huilât.<br />

EUOÉNE DELACROIX. — La Justice de Trajan. — Musée de Rouen,<br />

<strong>par</strong>aît présente : la composition très sûre (<strong>par</strong> masses,<br />

<strong>par</strong> taches) dissimulée pour suggérer le bouleversement<br />

inouï. Les Barbares d'Occident aux costumes<br />

étranges, groupe sombre enlevé sur le panorama céruléen<br />

de la ville et de la Corne d'or. Pillage, carnage,<br />

supplications. Pittoresque accentué sans précision<br />

mesquine.<br />

La Justice de Trajan (qui, <strong>par</strong>tant pour combattre<br />

<strong>les</strong> Daces, promet à une mère de punir l'assassin de<br />

son enfant) transporte dans l'antiquité classique la<br />

même puissance évocatrice et la même splendeur<br />

colorée. Opposer à la conception abstraite de David,<br />

à toutes <strong>les</strong> intentions que nous avons analysées dans<br />

<strong>les</strong> Sabines (p. 89), le désordre pittoresque, tumultueux,<br />

de ce cortège sous le soleil, dans la poussière,<br />

cet éclat, ce tapage, ces types véridiques, cette composition<br />

complexe, cette orchestration véhémente

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