La présence des Métis dans les pensionnats
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Douleur ancestrale : Souvenirs de l’expérience <strong>des</strong> <strong>Métis</strong> <strong>dans</strong> <strong>les</strong> <strong>pensionnats</strong><br />
Pensionnat indien de Blue Quills<br />
Le pensionnat indien de Blue Quills (« Blue Quills ») est représentatif de la réalité du réseau <strong>des</strong> <strong>pensionnats</strong><br />
indiens de l’Alberta et de l’expérience <strong>des</strong> élèves qui <strong>les</strong> ont fréquentés. En 1980, Diane S. Persson (1981),<br />
étudiante au doctorat, a rédigé un historique et une analyse détaillés de Blue Quills. Son mémoire fait la<br />
lumière sur l’expérience <strong>des</strong> élèves de Blue Quills, dont il sera question <strong>dans</strong> la présente section.<br />
Nous ne savons pas combien de <strong>Métis</strong> exactement ont fréquenté Blue Quills. Un dirigeant du comité<br />
consultatif du présent projet, Sam Dumais, a fréquenté Blue Quills de 1944 à 1946. Un autre membre<br />
vénérable et influent de la communauté métisse, Francis Dumais, a fréquenté le pensionnat de 1944 à<br />
1947. Tous <strong>les</strong> deux affirment que de 15 à 20 p. 100 environ de leurs camara<strong>des</strong> de classe étaient métis.<br />
Au moins cinq <strong>des</strong> anciens élèves interrogés par Persson étaient métis. On peut supposer qu’un nombre<br />
considérable d’élèves métis fréquentaient Blue Quills puisque le pensionnat était situé à quelques kilomètres<br />
seulement de St. Paul, en Alberta, où de nombreux <strong>Métis</strong> s’étaient établis <strong>dans</strong> <strong>les</strong> années 1890.<br />
Persson a découvert que même si <strong>les</strong> Affaires indiennes avaient le dernier mot sur <strong>les</strong> élèves qui étaient<br />
admis, l’Église jouait un rôle important <strong>dans</strong> le processus d’admission : [traduction] « l’Église contrôlait<br />
souvent la situation en admettant <strong>des</strong> élèves à la demande de la famille ou contre la volonté de la famille.<br />
Lorsque <strong>les</strong> parents étaient réticents à signer le formulaire de demande, le prêtre le signait pour eux »<br />
(1981:258). Il fallait indiquer sur le formulaire d’admission au moins une raison pour l’admission, et<br />
Persson a constaté ce qui suit : [traduction] « Parfois, on admettait <strong>les</strong> enfants parce qu’ils avaient<br />
“besoin de discipline”, et <strong>dans</strong> <strong>les</strong> années 1960, le pensionnat était devenu un établissement de correction<br />
en raison <strong>des</strong> tentatives du Ministère de changer le rôle de ces éco<strong>les</strong> » (1981:258).<br />
Persson a analysé le pensionnat en partant du principe qu’il s’agissait d’une [traduction] « institution<br />
totale ». Elle a trouvé plusieurs facteurs qui permettent de considérer le pensionnat comme une institution<br />
totale. Le pensionnat était manifestement coupé du reste de la société et était conçu pour endoctriner et<br />
transformer <strong>les</strong> enfants. L’individualisme et la différence n’étaient pas tolérés. L’endoctrinement commençait<br />
dès l’arrivée <strong>des</strong> enfants :<br />
[traduction]] À son arrivée à la résidence, on déshabillait l’enfant, on lui donnait un<br />
bain, on l’épouillait et on lui remettait un uniforme identique à celui <strong>des</strong> autres enfants<br />
du même sexe et de la même taille. On lui assignait ensuite un numéro que l’on apposait<br />
à ses vêtements, à ses serviettes et à ses ustensi<strong>les</strong> (Persson, 1981:259).<br />
Persson a décrit <strong>les</strong> nombreux règlements détaillés que <strong>les</strong> enfants devaient suivre. Tout était réglé à la<br />
minute près. Chaque aspect de la vie <strong>des</strong> enfants était réglementé. Un ancien élève interrogé a raconté ce<br />
qui suit :<br />
[traduction] Après le souper, tout le monde faisait la queue pour aller aux toilettes. Il<br />
était impossible d’aller aux toilettes en dehors <strong>des</strong> moments prévus à cette fin. Si on n’arrivait<br />
pas à contenir notre envie, tant pis. Alors on apprenait à se retenir. On s’habituait à aller aux<br />
toilettes à heures fixes. On y allait après le petit déjeuner; on faisait la queue, et il y avait une<br />
sœur à la porte qui nous remettait six carrés de papier (cité <strong>dans</strong> Persson, 1981:261).<br />
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