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26.06.2013 Views

ŕ Tous leurs chautoirs et le rechte. Tous leurs colliers en or. Ils jen ont des tas. Ch’est comme cha, les prêtres, crachouilla le vieillard. Des torques, des torques et encore des torques. Qui ch’est, la fille ? ŕ Elle ne veut pas qu’on la sauve », dit Rincevent. La fille regarda le petit vieux d’un air de défi à travers le barbouillage de son fard à paupières. « Ben merde, alors », fit-il, et dans la foulée il la souleva, chancela un peu, pesta contre son arthrite et s’écroula par terre. Au bout d’un moment, toujours étalé face contre terre, il lança : « Rechte pas là, echpèche de chalope de dingue… aidemoi à me relever. » À la surprise de Rincevent, et certainement à celle de la fille aussi, elle obéit. Le mage, pendant ce temps, essayait de ranimer Deuxfleurs. Le touriste portait au tympan une éraflure apparemment peu profonde, mais il restait inconscient, la figure figée dans un sourire vaguement soucieux. Il avait la respiration faible et… bizarre. Et il semblait léger. Pas simplement en dessous du poids normal, mais dépourvu de poids. Le mage aurait aussi bien pu tenir une ombre. Rincevent se rappela ce qu’on racontait sur les druides, qu’ils se servaient de poisons étranges et terribles. Évidemment, on racontait aussi Ŕ c’étaient souvent les mêmes gens Ŕ que les escrocs avaient toujours les yeux rapprochés, que la foudre ne frappait jamais deux fois au même endroit et que si les dieux avaient voulu voir les hommes voler, ils leur auraient donné un billet d’avion. Mais quelque chose dans la légèreté de Deuxfleurs effraya Rincevent. L’effraya horriblement. Il leva la tête pour regarder la fille. Elle avait jeté le vieux sur son épaule et elle adressa au mage un vague sourire d’excuse. De quelque part dans le creux de ses reins une voix lança : « On oublie rien ? Alors tirons-nous d’ichi avant qu’ils reviennent ! » Rincevent se coinça Deuxfleurs sous le bras et les suivit au petit trot. Ça paraissait la seule chose à faire. * 80

Le petit vieux avait un gros cheval blanc attaché à un arbre desséché, dans une ravine envahie par la neige à quelque distance des cercles. L’animal arborait un beau poil luisant et son image de magnifique cheval de bataille n’était qu’à peine ternie par le rond de siège pour hémorroïdes accroché à la selle. « O. K., dépoje-moi. Y a une bouteille d’une chorte de Uniment dans la chacoche de chelle, alors chi cha t’ennuie pas…» Rincevent cala Deuxfleurs du mieux possible contre l’arbre et, au clair de lune Ŕ ainsi qu’à la faible lueur rouge de la nouvelle étoile lourde de menace, s’aperçut-il Ŕ, il détailla vraiment pour la première fois son sauveur. L’homme n’avait qu’un œil ; un cache noir masquait l’autre. Un réseau de cicatrices couvrait son corps maigre pour l’heure contracté et enflammé par une tendinite. Ses dents avaient à l’évidence depuis longtemps décidé de prendre le large. « Qui êtes-vous ? demanda le mage. ŕ Bethan », répondit la fille en étalant une pleine main d’onguent vert nauséabond dans le dos du vieillard. Si on lui avait demandé d’imaginer à quoi elle allait se consacrer une fois sauvée d’un sacrifice de vierge par un héros au blanc destrier, elle n’aurait probablement pas songé au Uniment, mais puisque Uniment il y avait, elle s’acquittait de sa tâche avec conscience. C’était l’impression qu’elle donnait. « Pas toi, lui », dit Rincevent. Un œil luisant comme une étoile se leva vers le mage. « Mon nom, ch’est Cohen, mon gars. » Les mains de Bethan arrêtèrent leur va-et-vient. « Le sieur Cohen ? fit-elle. Cohen le Barbare ? ŕ Le chieur Cohen lui-même. ŕ Holà, holà, fit Rincevent. Cohen, c’est un grand costaud… un cou de taureau, des pectoraux comme un sac rempli de ballons. Enfin quoi, c’est le plus grand guerrier du Disque, une légende de son vivant. Je me souviens de mon grand-père qui me racontait l’avoir vu… qui me racontait… qui me…» Il hésita sous le regard perçant qui le fixait. « Oh, dit-il. Oh. Bien sûr. Désolé. 81

Le petit vieux avait un gros cheval blanc attaché à un arbre<br />

desséché, dans une ravine envahie par la neige à quelque<br />

distance des cercles. L’animal arborait un beau poil luisant et<br />

son image de magnifique cheval de bataille n’était qu’à peine<br />

ternie par le rond de siège pour hémorroïdes accroché à la selle.<br />

« O. K., dépoje-moi. Y a une bouteille d’une chorte de<br />

Uniment dans la chacoche de chelle, alors chi cha t’ennuie<br />

pas…»<br />

Rincevent cala Deuxfleurs du mieux possible contre l’arbre<br />

et, au clair de lune Ŕ ainsi qu’à la faible lueur rouge de la<br />

nouvelle étoile lourde de menace, s’aperçut-il Ŕ, il détailla<br />

vraiment pour la première fois son sauveur.<br />

L’homme n’avait qu’un œil ; un cache noir masquait l’autre.<br />

Un réseau de cicatrices couvrait son corps maigre pour l’heure<br />

contracté et enflammé par une tendinite. Ses dents avaient à<br />

l’évidence depuis longtemps décidé de prendre le large.<br />

« Qui êtes-vous ? demanda le mage.<br />

ŕ Bethan », répondit la fille en étalant une pleine main<br />

d’onguent vert nauséabond dans le dos du vieillard. Si on lui<br />

avait demandé d’imaginer à quoi elle allait se consacrer une fois<br />

sauvée d’un sacrifice de vierge par un héros au blanc destrier,<br />

elle n’aurait probablement pas songé au Uniment, mais puisque<br />

Uniment il y avait, elle s’acquittait de sa tâche avec conscience.<br />

C’était l’impression qu’elle donnait.<br />

« Pas toi, lui », dit Rincevent.<br />

Un œil luisant comme une étoile se leva vers le mage.<br />

« Mon nom, ch’est Cohen, mon gars. » Les mains de Bethan<br />

arrêtèrent leur va-et-vient.<br />

« Le sieur Cohen ? fit-elle. Cohen le Barbare ?<br />

ŕ Le chieur Cohen lui-même.<br />

ŕ Holà, holà, fit Rincevent. Cohen, c’est un grand costaud…<br />

un cou de taureau, des pectoraux comme un sac rempli de<br />

ballons. Enfin quoi, c’est le plus grand guerrier du <strong>Dis</strong>que, une<br />

légende de son vivant. Je me souviens de mon grand-père qui<br />

me racontait l’avoir vu… qui me racontait… qui me…»<br />

Il hésita sous le regard perçant qui le fixait.<br />

« Oh, dit-il. Oh. Bien sûr. Désolé.<br />

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