Cahier NTA 2009 int - Nouveau théâtre d'Angers

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Cahier NTA 2009 int 13/02/09 9:47 Page 2 UN CONTE DES FAUBOURGS J’aime dans Liliom cette féerie de banlieue, à la fois naïve et brutale… J’aime ses scènes très précises comme prises dans la stupeur du fantasme, et la houle vague semblant surgir de l’imagination « primitive » de ses protagonistes qui emporte tout dans un torrent tragique. Mon souhait est de mettre en scène cette fable foraine dans une faconde contemporaine, tout en respectant (ce qui suscita mon désir premier pour cette œuvre) le voyage que la pièce suggère des manèges de nos enfances aux terrains vagues de nos errances en passant (bien sûr) par des pacotilles de l’Au-delà… Liliom ne traite pas de la honte d’aimer, de notre résistance à la tendresse, de la violence et de son pardon, de nos mauvais choix, nos regrets et nos oublis, elle slalome entre ces récifs comme si elle cherchait dans ce dédale de l’amour mauvais une chose à la fois plus essentielle et plus volatile, une humeur, un parfum de la vie « triste et doux », comme cet air que Julie perçoit dans le regard de Liliom. Ces personnages, sans mère ni père, au verbe frêle et aux cœurs lourds, ces « branleurs » d’une banlieue éternelle de l’existence, nous racontent une errance moins sociologique qu’intime, dans les mauvais quartiers du cœur. Liliom est un mélodrame, pourquoi pas ? Mais un curieux mélodrame, fait d’abcès bouffons, d’absence beckettienne, de raptus absurde. Il y a tout juste un siècle, Molnár écrit une pièce solitaire et inclassable sur la joie triste de Julie. Je voudrais mettre en scène une odyssée « statique », selon l’étrange mot de l’auteur, à la fois simple et ample du temps présent qui pourrait « presque » être racontée par (et pour) un enfant turbulent. C’est un spectacle pour dix comédiennes et comédiens, beaucoup de musique et pas mal de bruit. 2 Frédéric Bélier-Garcia Quelque chose comme une foire mais plus scintillant, avec une grande roue de lumières tournant dans les airs… Mais ne vous en approchez pas trop, car alors vous ne sentirez que la chaleur et la sueur et la vie. Mon Dieu, comme je déteste les gens qui se disent “bons”. Je veux dire les gens qui sont bons et qui pensent que ça suffit dans la vie. Francis Scott Fitzgerald

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UN CONTE DES FAUBOURGS<br />

J’aime dans Liliom cette féerie de banlieue, à la fois naïve et brutale…<br />

J’aime ses scènes très précises comme prises dans la stupeur du<br />

fantasme, et la houle vague semblant surgir de l’imagination « primitive »<br />

de ses protagonistes qui emporte tout dans un torrent tragique. Mon<br />

souhait est de mettre en scène cette fable foraine dans une faconde<br />

contemporaine, tout en respectant (ce qui suscita mon désir premier<br />

pour cette œuvre) le voyage que la pièce suggère des manèges de nos<br />

enfances aux terrains vagues de nos errances en passant (bien sûr) par<br />

des pacotilles de l’Au-delà…<br />

Liliom ne traite pas de la honte d’aimer, de notre résistance à la<br />

tendresse, de la violence et de son pardon, de nos mauvais choix, nos<br />

regrets et nos oublis, elle slalome entre ces récifs comme si elle cherchait<br />

dans ce dédale de l’amour mauvais une chose à la fois plus essentielle et<br />

plus volatile, une humeur, un parfum de la vie « triste et doux », comme<br />

cet air que Julie perçoit dans le regard de Liliom.<br />

Ces personnages, sans mère ni père, au verbe frêle et aux cœurs lourds,<br />

ces « branleurs » d’une banlieue éternelle de l’existence, nous racontent<br />

une errance moins sociologique qu’<strong>int</strong>ime, dans les mauvais quartiers<br />

du cœur. Liliom est un mélodrame, pourquoi pas ? Mais un curieux<br />

mélodrame, fait d’abcès bouffons, d’absence beckettienne, de raptus<br />

absurde. Il y a tout juste un siècle, Molnár écrit une pièce solitaire et<br />

inclassable sur la joie triste de Julie.<br />

Je voudrais mettre en scène une odyssée « statique », selon l’étrange mot<br />

de l’auteur, à la fois simple et ample du temps présent qui pourrait<br />

« presque » être racontée par (et pour) un enfant turbulent.<br />

C’est un spectacle pour dix comédiennes et comédiens, beaucoup de<br />

musique et pas mal de bruit.<br />

2<br />

Frédéric Bélier-Garcia<br />

Quelque chose comme une foire mais plus sc<strong>int</strong>illant, avec une grande roue de<br />

lumières tournant dans les airs… Mais ne vous en approchez pas trop, car alors<br />

vous ne sentirez que la chaleur et la sueur et la vie.<br />

Mon Dieu, comme je déteste les gens qui se disent “bons”.<br />

Je veux dire les gens qui sont bons et qui pensent que ça suffit dans la vie.<br />

Francis Scott Fitzgerald

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