Jean Massart - La Presse Clandestine dans la Belgique Occupee
Jean Massart - La Presse Clandestine dans la Belgique Occupee
Jean Massart - La Presse Clandestine dans la Belgique Occupee
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
parfaitement que s'ils sont pris ils risquent fort d'etre p<strong>la</strong>ces devant le peloton d'execution, car l'Allemagne ne<br />
badine pas avec le crime de lese−majeste; mais cette perspective ne les empeche pas d'envoyer les Polizisten<br />
faire visite a <strong>la</strong> statue d'Andre Vesale ou a un W.C. (p. 11). On ne se prive meme pas du p<strong>la</strong>isir d'epingler un<br />
numero de <strong>La</strong> Libre <strong>Belgique</strong> au dos d'un soldat, qui se charge ainsi de faire de <strong>la</strong> propagande gratuite pour le<br />
journal traque.<br />
D'innombrables p<strong>la</strong>isanteries circulent en <strong>Belgique</strong>. Ecrites a <strong>la</strong> machine sur un bout de papier, elles passent<br />
rapidement de main en main, <strong>la</strong>issant derriere elles un <strong>la</strong>rge sil<strong>la</strong>ge d'ec<strong>la</strong>ts de rire. Voici quelques−unes de<br />
ces anecdotes, a titre d'echantillons:<br />
Un paysan venait chaque jour en ville avec sa charrette attelee d'un ane. Le vieux <strong>la</strong>ndsturm, tout−venant avec<br />
80% de gros[27], qui etait de faction a l'entree de <strong>la</strong> ville, examine ses papiers et demande le nom de l'Ane.<br />
[Note 27: C'est <strong>la</strong> formule c<strong>la</strong>ssique des marchands de charbon a Bruxelles: leur tout−venant contient 80% de<br />
gros. On designe ainsi le <strong>la</strong>ndsturm (Note de J.M.)]<br />
—Mon ane! il n'a pas de nom!<br />
—Il faudra lui en donner un. Chez nous, tous les anes ont un nom. Je pourrais facilement vous en citer 93.<br />
Quelques jours plus tard:<br />
—Eh bien, dit le <strong>la</strong>ndsturm, avez−vous choisi un nom?<br />
—C'est que... je n'en trouve pas de convenable.<br />
—Appelez le donc Albert.<br />
—Ah! pardon! riposte le paysan, ce serait injurieux pour mon Roi.<br />
—Oh! <strong>la</strong>! <strong>la</strong>! En voi<strong>la</strong> des scrupules! Tenez! appelez−le Guil<strong>la</strong>ume!<br />
—Ah! pardon! riposte le paysan, ce serait injurieux pour mon ane.<br />
* * * * *<br />
Chez un paysan logent des soldats allemands. Ils ne tarissent pas en rodomontades sur <strong>la</strong> puissance de leur<br />
armee, sur son triomphe certain, sur les inepuisables reserves en hommes de l'Empire, sur l'excellence du pain<br />
K.K., etc. Un beau matin, ils annoncent l'arrivee de 100.000 nouveaux hommes sur le front de l'Yser. Le<br />
paysan se gratte <strong>la</strong> tete.<br />
—Hein! qu'en dites−vous? 100.000 nouveaux!<br />
Le paysan se gratte toujours <strong>la</strong> tete.<br />
—Mais parlez donc, insistent les Teutons, dites ce que vous en pensez!<br />
—J'en pense, dit enfin le F<strong>la</strong>mand, que c'est trop! Je ne sais vraiment plus ou nous trouverons encore de <strong>la</strong><br />
p<strong>la</strong>ce pour en enterrer 100.000.<br />
* * * * *<br />
<strong>La</strong> <strong>Presse</strong> <strong>C<strong>la</strong>ndestine</strong> <strong>dans</strong> <strong>la</strong> <strong>Belgique</strong> <strong>Occupee</strong><br />
II. COMMENT LES BELGES SE COMPORTENT EN BELGIQUE 65