Jean Massart - La Presse Clandestine dans la Belgique Occupee
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<strong>La</strong> <strong>Presse</strong> <strong>C<strong>la</strong>ndestine</strong> <strong>dans</strong> <strong>la</strong> <strong>Belgique</strong> <strong>Occupee</strong><br />
Novembre.—Les Prussiens, parce qu'on a rosse, pres de <strong>la</strong> Bourse, un mouchard allemand (en civil) et un<br />
soldat venu a son aide, condamnent <strong>la</strong> ville de Bruxelles a une amende de 5 millions!—Les Etats−Unis et le<br />
Canada nous envoient de <strong>la</strong> farine. Le “Comite d'alimentation” s'etend a tout le pays, que l'incurie allemande<br />
<strong>la</strong>isse <strong>dans</strong> le denument. Cette impuissance, <strong>dans</strong> un domaine de premiere importance, prouve combien le<br />
bluff a surfait l'organisation allemande.—Le Prussien mande aux autorites communales de ne plus nourrir les<br />
ouvriers qui n'acceptent pas du travail sa<strong>la</strong>rie (nos ouvriers refusent de col<strong>la</strong>borer aux fournitures militaires<br />
).—L'heure allemande devient obligatoire; les delinquants sont frappes d'amendes.—Le serment exige des<br />
gardes civiques pousse a l'exil un grand nombre de patrons; ils craignent de se voir deportes en Allemagne,<br />
comme ce<strong>la</strong> s'est fait ailleurs, et meme aux portes de <strong>la</strong> capitale (a Tervueren).—<strong>La</strong> situation economique<br />
s'empire; l'hiver s'annonce dur... Par suite de <strong>la</strong> suppression de tout transport, le charbon s'epuise et encherit;<br />
<strong>la</strong> batisse ne peut reprendre. L'industrie chome forcement. Misere.—Tout passeport est refuse aux hommes de<br />
18 a 45 ans.—L'ennemi s'empare du cuivre, du nickel et d'autres metaux necessaires a <strong>la</strong> confection des<br />
munitions; fabriques arretees par suite de l'enlevement de leurs cuves de cuivre.—Vers cette epoque<br />
commence le pil<strong>la</strong>ge systematique de nos ateliers de construction: l'outil<strong>la</strong>ge industriel (machines−outils)<br />
prend le chemin de l'Allemagne. Ce<strong>la</strong> continuera pendant plusieurs mois! Le materiel emporte represente une<br />
valeur de plusieurs centaines de millions. Ces vols a peine deguises rendent le travail impossible <strong>dans</strong><br />
beaucoup d'etablissements, privent de gagne−pain des centaines de milliers de familles!—Ecrasee de charges<br />
extraordinaires, <strong>la</strong> ville de Bruxelles ne peut commanditer un organisme intercommunal d'assurance des<br />
risques de guerre qui cherche a se constituer afin de ranimer l'industrie du batiment.<br />
Decembre.—Le spoliateur von der Goltz part. Le detrousseur von Bissing arrive. En s'en al<strong>la</strong>nt, le premier<br />
dec<strong>la</strong>re que <strong>la</strong> situation en <strong>Belgique</strong> est “normale”. Toutefois, son successeur annonce qu'il va faire tout son<br />
possible pour restaurer l'activite economique du pays et soutenir les faibles. Voi<strong>la</strong> les paroles; nous allons voir<br />
les actes.<br />
A peine installe, von Bissing inflige aux provinces belges une nouvelle contribution de guerre, de 480<br />
millions de francs, payables par mensualites!—L'envahisseur retablit <strong>la</strong> circu<strong>la</strong>tion des tramways vicinaux et<br />
preleve <strong>la</strong> moitie des recettes.—Il vide nos etables.—<strong>La</strong> presse etrangere s'indigne de l'avidite prussienne a<br />
propos des extorsions d'argent operees en <strong>Belgique</strong>.—Von Bissing p<strong>la</strong>ce les societes ou des etrangers<br />
belligerants ont des interets sous <strong>la</strong> surveil<strong>la</strong>nce de ses bureaux. En revanche, il nous apprend que<br />
l'Allemagne, l'Autriche et <strong>la</strong> Turquie “ne sont pas des puissances etrangeres ou ennemies”! Il est defendu<br />
d'inciter quelqu'un a refuser de travailler pour ces Etats...—Les amendes pleuvent sur les communes et sur les<br />
particuliers. Tout pretexte est bon. Von Bissing renforce <strong>la</strong> chasse aux importateurs d'argent. A <strong>la</strong> frontiere, on<br />
echange de force l'or contre des marks.—Le transport des lettres est prohibe afin d'obliger le public a user de<br />
timbres allemands.<br />
—En Italie, en Suisse, en Hol<strong>la</strong>nde, au Chili, au Canada, aux Etats−Unis, <strong>la</strong> voracite des Prussiens provoque<br />
des manifestations publiques contre eux et pour les Belges.—L'importation du sel est prohibee, sauf s'il vient<br />
d'Allemagne. Nos F<strong>la</strong>ndres manquent de froment, de seigle, de pommes de terre, de charbon.—Faim et froid<br />
etreignent le pays. Detresse et denument partout.—Von Bissing obtient de l'avancement: il est nomme<br />
general−colonel.—Il destitue <strong>la</strong> Banque nationale de son privilege d'emettre du papier−monnaie et le repasse a<br />
<strong>la</strong> Societe generale.<br />
—L'assurance des risques de guerre s'organise a Bruxelles en vue de remettre en train <strong>la</strong> batisse et les<br />
industries qui s'y rattachent; l'esprit de lucre est exclu de cette oeuvre mutualiste.<br />
Janvier 1915.—Les etages de nos ministeres, <strong>dans</strong> les salons desquels siegent les bureaux de l'Usurpation,<br />
sont convertis en prison temporaire. Von Bissing reorganise le service des mouchards et en accroit le<br />
“rendement”.<br />
D. L'EXPLOITATION SYSTEMATIQUE DE LA BELGIQUE 203