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Jean Massart - La Presse Clandestine dans la Belgique Occupee

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<strong>La</strong> <strong>Presse</strong> <strong>C<strong>la</strong>ndestine</strong> <strong>dans</strong> <strong>la</strong> <strong>Belgique</strong> <strong>Occupee</strong><br />

scalpe. Von Bissing ne va pas si loin: il est “kultive", lui? Noblement il enseigne qu'il faut mepriser les<br />

vaincus et n'avoir aucune compassion pour eux: voi<strong>la</strong>, Mesdemoiselles, <strong>la</strong> bonne education et <strong>la</strong> pure<br />

conscience allemandes!<br />

Nous verrons les effets de ces principes sur von Bissing et sur sa famille. En decembre, il fit arreter <strong>la</strong><br />

comtesse de Merode, femme du grand marechal de <strong>la</strong> Cour de <strong>Belgique</strong>. A defaut du moindre semb<strong>la</strong>nt de<br />

culpabilite, le conseil de guerre dut acquitter l'inculpee. Alors, le preux “freiherr", selon les regles de <strong>la</strong><br />

chevalerie prussienne, voulut user d'un droit extraordinaire dont il est investi et deporter Mme de Merode en<br />

Allemagne! Il fallut les plus grands efforts pour obliger ce goujat a <strong>la</strong>cher sa proie innocente! En mai, il<br />

parvint a prendre en defaut <strong>la</strong> femme de notre ministre de <strong>la</strong> Justice; du moins lui fit−il octroyer quelques<br />

mois de prison; puis, en vertu de son droit discretionnaire, le butor decida que <strong>la</strong> relegation en Allemagne<br />

durerait jusqu'a <strong>la</strong> fin des hostilites! Voi<strong>la</strong> des exemples, entre cent, de sa parfaite education allemande!<br />

Mais continuons avec ordre l'examen de <strong>la</strong> carriere de ce <strong>Jean</strong>−foudre−de−guerre. Apres avoir banni des<br />

camps de prisonniers les petites marques d'interet qui auraient pu mitiger les penibles souvenirs de captivite,<br />

von Bissing vint en <strong>Belgique</strong>. Il annonce d'abord par affiche son intention de faire renaitre en <strong>Belgique</strong><br />

l'activite economique et de soutenir les victimes de <strong>la</strong> guerre. Ce<strong>la</strong> parut etrange, au moment ou Berlin mettait<br />

tout en oeuvre, mensonge et falsification, pour faire croire que <strong>la</strong> <strong>Belgique</strong> meritait ses chatiments. Les Belges<br />

penserent comme autrefois les Troyens: Timeo Danaos, et dona ferentes—traduction libre: Je me defie des<br />

Alboches, meme quand ils promettent de nous aider. Ou <strong>la</strong> <strong>Belgique</strong> est innocente et tous les egards lui sont<br />

dus; ou elle est coupable et ne merite aucune sollicitude. Les Belges avaient raison de se defier! En meme<br />

temps qu'il publie ses bonnes intentions, von Bissing inflige au pays, qui se debat <strong>dans</strong> les pires difficultes,<br />

une nouvelle contribution de guerre de 480 millions! Ce<strong>la</strong> lui vaut de l'avancement: le voi<strong>la</strong> “generaloberst”.<br />

Le grade qu'il n'avait pu decrocher comme officier, il l'obtient comme spoliateur. Gloria! Victoria!<br />

L'hiver fut dur aux Belges. Von Bissing avait rafle les victuailles, vide les etables et pousse les producteurs a<br />

dissimuler des vivres. Aux Etats−Unis, au Canada, au Chili, en Hol<strong>la</strong>nde, en Suisse, en Italie, on s'indigne<br />

vivement des extorsions d'argent commises en <strong>Belgique</strong>. Le gouverneur p<strong>la</strong>ce sous <strong>la</strong> surveil<strong>la</strong>nce de ses<br />

bureaux les societes ou des etrangers belligerants ont des interets; ce qui permet a des banquiers allemands de<br />

se caser en <strong>Belgique</strong> aux frais desdites societes qu'ils depouillent methodiquement. <strong>La</strong> masse souffre de faim<br />

et de froid; <strong>la</strong> detresse se generalise.<br />

On ne voit le “generaloberst” que f<strong>la</strong>nque d'estafiers; il ne sort qu'en auto. Ne croyez pas ses photographies,<br />

reproduites meme en carte postale, ou <strong>la</strong> retouche donne au “freiherr” decrepit un air martial: comme une<br />

vieille cocotte, il se fait rajeunir... En verite, il est fort de<strong>la</strong>bre. Tete antipathique au possible; longue<br />

moustache horizontale, face osseuse et machoire lourde; type bestial, annoncant une intelligence mediocre et<br />

une ame vulgaire. Sa carriere et ses actes confirment ce pronostic. Ses extorsions d'argent, grandes et petites,<br />

constituent veritablement du banditisme. De tels faits n'ont aucun precedent <strong>dans</strong> <strong>la</strong> guerre moderne; ils n'ont<br />

d'equivalent <strong>dans</strong> nulle expedition militaire; c'est une innovation specifiquement allemande. En s'assurant le<br />

versement de 480 millions, von Bissing s'engagea a ne plus imposer ni provinces ni communes; mais, ayant<br />

conserve son “droit" d'infliger des amendes, il en use et en abuse. En outre, il se rattrape sur les particuliers et<br />

cree notamment un impot a charge des citoyens ayant quitte le pays!<br />

Faute de chemins de fer, d'autos, de chevaux, certaines regions ne purent recevoir les vivres du Comite<br />

national; aussi <strong>la</strong> nation belge connut−elle les pires privations. L'evasion de nos jeunes gens et l'introduction<br />

de fonds donnent beaucoup de tintouin a notre gouverneur; il suffit de lui parler de ce<strong>la</strong> pour voir fremir les<br />

muscles qui lui pendent sous le menton. <strong>La</strong> frontiere hol<strong>la</strong>ndo−belge est barree de postes a pied et a cheval,<br />

avec reflecteurs et telephone, de fils de fer, de fosses et de pieges. Autant il soigne ces organisations−<strong>la</strong>,<br />

autant il neglige les besoins du pays. Ainsi, il limite les dep<strong>la</strong>cements <strong>dans</strong> les provinces; puis il frappe<br />

d'interdit <strong>la</strong> plupart des produits industriels; les transactions sont entravees. Voi<strong>la</strong> qui favorise a rebours <strong>la</strong><br />

reprise des affaires! Quand l'autorite prussienne edicte un tarif des denrees, des fourrages ou des viandes, c'est<br />

II. COMMENT LES BELGES SE COMPORTENT EN BELGIQUE 110

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